Licenciement disciplinaire : 2 février 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/02571

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Licenciement disciplinaire : 2 février 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/02571

N° RG 20/02571 – N° Portalis DBV2-V-B7E-IQ77

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 02 FEVRIER 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 07 Juillet 2020

APPELANT :

Monsieur [B] [J]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Hélène QUESNEL de la SELARL MOLINERO QUESNEL STRATEGIES, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Perrine HENROT, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

S.A. FERRERO FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Alexandre LAMY de la SELARL ARSIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 16 Novembre 2022 sans opposition des parties devant Madame ALVARADE, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame ALVARADE, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme DUBUC, Greffière

DEBATS :

A l’audience publique du 16 Novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 12 Janvier 2023, date à laquelle le délibéré a été prorogé au 26 Janvier 2023, puis au 02 Février 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 02 Février 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame ALVARADE, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société FERRERO France SA, appartient au Groupe FERRERO. Elle fait partie de l’UES FERRERO France laquelle est composée d’un pôle industriel (Ferrero France SA) et d’un pôle commercial 12 (Ferrero France Commerciale SAS) et est soumise à la convention collective nationale des 5 branches industries alimentaires diverses.

M. [B] [J] a été embauché par la SA Ferrero France en qualité de Human Ressources Business Partner Opération du Pôle Industriel, statut cadre, suivant contrat à durée indéterminée du 1er juillet 2016, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était en dernier lieu de 10 119,85 euros.

M. [J] a été placé en arrêt maladie à compter du 2 octobre 2018.

Après avoir été convoqué à un entretien préalable fixé au 10 janvier 2019, M. [J], par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 5 février 2019 a été licencié pour faute grave.

Suivant courrier du 21 février 2019, la caisse primaire d’assurance maladie a refusé la qualification d’accident du travail.

Le 11 juin 2019, M. [J], contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, a saisi la juridiction prud’homale, afin d’obtenir diverses sommes tant en exécution qu’au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 7 juillet 2020, le conseil de prud’hommes de Rouen a dit le licenciement pour faute grave de M. [J] fondé, l’a débouté de toutes ses demandes indemnitaires, a condamné la SA Ferrero France à lui verser la somme de 538,23 euros à titre de remboursement des frais professionnels du 2 au 27 septembre 2018, a débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et laissé les dépens à leur charge respective.

M. [J] a interjeté appel limité le 11 août 2020.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 octobre 2022. Suivant décision du 16 novembre 2022, ladite ordonnance a été révoquée, la clôture ayant été reportée au même jour avant l’ouverture des débats.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Par conclusions remises le 19 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [J], appelant, demande à la cour de voir :

– infirmer en totalité le jugement rendu,

en conséquence et statuant à nouveau ;

à titre principal,

– dire que son licenciement est nul considérant avoir fait l’objet de harcèlement moral sur le fondement des articles L.1152-1 et L.1152-3 du code du travail,

– condamner la SA Ferrero France à lui verser la somme de 182 157,30 euros sur le fondement de l’article L.1235-3-1 du code du travail,

à titre subsidiaire,

– dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– condamner la SA Ferrero France à lui verser la somme de 182 157,30 euros sur le fondement de l’article 24 de la Charte Sociale Européenne et de l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT,

en tout état de cause,

– constater qu’il n’a pas perçu l’indemnité conventionnelle de licenciement, ni l’indemnité compensatrice de préavis auxquelles il avait droit,

– constater que la rupture du contrat de travail est intervenue dans des conditions vexatoires et brutales,

– constater que la SA Ferrero France a manqué à son obligation d’assurer sa santé et sa sécurité,

en conséquence,

– condamner la SA Ferrero France à lui verser les sommes suivantes :

rappel d’indemnité conventionnelle de licenciement : 11 469,16 euros,

rappel d’indemnité compensatrice de préavis : 20 203,86 euros,

rappel d’indemnité de congés payés afférents : 2020,39 euros,

dommages et intérêts en raison des conditions vexatoires et brutales de la rupture du contrat de travail sur le fondement de l’article 1240 du code civil : 60 719,10 euros,

dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du manquement par la société intimée de son obligation d’assurer sa santé et sa sécurité sur le fondement des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail : 60 719,10 euros,

frais professionnels du mois de septembre 2018 : 1 617,23 euros,

– ordonner le report du point de départ des intérêts à la date de la saisine du conseil, sur le fondement de l’article 1231-7 du code civil,

– ordonner la capitalisation judiciaire des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du civil,

– ordonner l’affichage de la décision à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard, l’affichage devant être assuré pendant un mois sur les panneaux réservés aux communications de la direction,

– condamner la SA Ferrero France à lui verser la somme de 3 000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la SA Ferrero France aux entiers dépens sur le fondement de l’article 696 du code de procédure civile.

Par conclusions n° 3 remises le 10 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, la SA Ferrero France demande à la cour de :

– révoquer l’ordonnance de clôture et déclarer ainsi recevables ses conclusions n° 3,

Subsidiairement,

– déclarer recevables ses conclusions n°2 déposées le 19 octobre 2022, veille de la clôture.

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Rouen le 7 juillet 2020,

Et en conséquence de :

– dire et juger que M. [J] n’a subi aucun harcèlement moral ;

– dire et juger que M. [J] n’a subi aucune discrimination ;

Et de :

– dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [J] n’est pas nul ;

– débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes au titre de la nullité de son licenciement ;

– dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [J] est bien fondé ;

En conséquence,

– débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes,

Et en tout état de cause de :

– dire et juger que la procédure de licenciement est régulière, ni brutale ni vexatoire,

– débouter M. [J] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner M. [J] au paiement de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur la procédure

Il résulte du dossier de la procédure que :

– suite à sa déclaration d’appel présentée le 11 août 2021, M. [J] a déposé ses conclusions le 10 novembre 2021,

– l’intimée a conclu en réplique le 16 février 2021, soit en dehors des délais impartis par l’article 909 du code de procédure civile lui accordant un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant prévues à l’article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident,

– suivant ordonnance du magistrat chargé de la mise en état du 23 mars 2021, ces dernières conclusions ont été déclarées irrecevables,

– le 19 octobre 2022 à 17h58, l’appelant a déposé un second jeu d’écritures,

– le même jour à 19h34, l’intimée a conclu en réplique,

– suivant conclusions d’incident du 20 octobre 2022, M. [J] demande « au magistrat chargé de la mise en état et aux conseillers composant la cour » de prononcer l’irrecevabilité des conclusions et pièces déposées par l’intimée le 19 octobre 2022 et de la débouter de sa demande visant à autoriser la production de ses conclusions et pièces,

– le 10 novembre 2022, la société Ferrero France a déposé de nouvelles conclusions en révocation de l’ordonnance de clôture et en réplique aux écritures de l’appelant,

– suivant décision du 16 novembre 2022, l’ordonnance de clôture des débats fixée au 20 octobre 2022 a été révoquée, la clôture ayant été reportée, avec l’accord des parties, au même jour avant l’ouverture des débats.

L’appelant conclut au rejet des conclusions et pièces déposées par l’intimée le 19 octobre 2022, postérieurement à l’ordonnance d’irrecevabilité prononcée à l’encontre de ses premières écritures déclarées tardives, faisant valoir que l’irrégularité de ces écritures la privait du droit de conclure à nouveau en application de l’article 909 du code de procédure civile,

que les jurisprudences citées par l’intimée ne sont pas transposables, au cas d’espèce, ses conclusions communiquées le 19 octobre 2022 ne développant aucun moyen nouveau et se contentant d’actualiser sa situation professionnelle et son préjudice, ne contrevenant aucunement aux principes du respect du contradictoire, de la loyauté des débats et du procès équitable et partant, ne lui ouvrant pas la possibilité de reprendre le débat et de conclure en réponse.

La société Ferrero France demande à la cour de déclarer recevables ses conclusions n° 3 et subsidiairement, ses conclusions n° 2 déposées le 19 octobre 2022, faisant valoir qu’en concluant à nouveau la veille de la clôture, l’appelant lui a rouvert un délai pour conclure.

Il indique que l’appelant se prévaut, sur le fondement d’un arrêt inédit de la 3e chambre civile de la Cour de cassation, de l’impossibilité pour l’intimé de conclure ses conclusions ayant été jugées une première fois irrecevables, alors que la 2e chambre civile ne s’est toujours pas prononcée sur ce point et que tant la doctrine que la jurisprudence des cours d’appel ont rappelé les exigences du procès équitable et le respect du contradictoire,

qu’en réalité, ce n’est que lorsque les conclusions nouvelles de l’appelant n’ajoutent rien que les cours n’autorisent pas l’intimé à conclure de nouveau,

qu’au cas d’espèce, les éléments et développements nouveaux, qui n’ont pas été versés aux débats antérieurement, viennent de façon significative renforcer son argumentation sur le préjudice.

Elle observe en outre que l’appelant a attendu un an et demi depuis l’ordonnance d’irrecevabilité du 23 mars 2021 pour déposer, la veille de la clôture, de nouvelles conclusions et pièces, ce de façon volontaire afin de la priver de toute possibilité de répliquer.

En application des dispositions de l’article 914 du code de procédure civile les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu’à la clôture de l’instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant notamment à déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910.

Cette disposition qui donne compétence exclusive au conseiller de la mise en état pour prononcer l’irrecevabilité des conclusions ne prive pas la cour d’appel de la possibilité de relever d’office cette sanction.

Pour justifier l’irrecevabilité des conclusions de l’intimée, l’appelant précise que « les amendements apportés au sein des conclusions de M. [J] communiquées le 19 octobre 2022 ne concernent que :

– des modifications de conjugaison, pour adapter les écritures à la situation de ce jour ;

– la modification de son adresse postale et de sa profession dès lors que ces éléments ont évolué depuis le dépôt des conclusions d’appelant ;

– un copier/coller d’une partie de la critique du jugement du conseil de prud’hommes déjà présente au sein des premières conclusions d’appelant du 10 novembre 2020, sans argument nouveau ;

– une actualisation de la situation professionnelle et donc du préjudice de M. [J],

avec à l’appui de trois pièces ».

Au cas d’espèce, le dépôt par l’appelant de nouvelles conclusions, qui ne développe aucun nouvel argument, ni aucun nouveau moyen, ne fait pas courir au profit de l’intimée, contrairement à ce qui est soutenu, un nouveau délai pour conclure et ne peut justifier qu’elle soit relevée de son irrecevabilité à se défendre et autorisée à conclure. Le respect des délais prescrits par les articles 908 à 910 du code de procédure civile dans l’instance d’appel ayant pour but d’assurer le jugement de la cause dans un délai raisonnable, il n’en résulte aucune atteinte à l’objectif du procès équitable, l’intimée n’étant pas privée de l’accès au juge. Il lui appartient en effet pour assurer sa défense de déposer ses premières conclusions dans le délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant.

Considérant en outre la révocation de l’ordonnance de clôture et le report de la clôture des débats, il conviendra de déclarer irrecevables aussi bien les conclusions déposées le 19 octobre 2022, que celles transmises le 10 novembre 2022.

La cour, qui n’est pas saisie de conclusions par l’intimée doit dès lors pour statuer sur ledit appel, examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

Sur le harcèlement moral

En application des dispositions de l’article L1152-1 du code du travail, «aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

Aux termes du même article et de l’article L.1154-1 du code du travail, en sa rédaction applicable à la cause, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Lorsqu’une telle situation est alléguée, il revient à cour de rechercher si le salarié rapporte la preuve de faits qu’il dénonce au soutien de son allégation d’un harcèlement moral, si les faits qu’il présente, appréhendés dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et dans l’affirmative, si l’employeur justifie que les agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et qu’ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

L’article 1154-1 précité présuppose donc que les éléments de fait présentés par le salarié soient des faits établis puisqu’il n’est pas offert à l’employeur de les contester mais seulement de démontrer qu’ils étaient justifiés.

M. [J] fait valoir qu’en qualité de HRBP, il était en charge des ressources humaines et des relations sociales de la société, qu’à ce titre, il était l’unique interlocuteur des délégués syndicaux centraux, du CCE et des instances représentatives du personnel pour la société Ferrero France SA,

qu’il a toujours fait preuve d’un parfait professionnalisme dans l’exercice de ses fonctions ainsi que cela résulte de ses entretiens annuels d’évaluation, percevant des primes chaque année,

qu’il était reconnu pour ses compétences comme en atteste l’ancienne directrice des ressources humaines régionale, Mme [G] [E] dont il lui a été confié l’intérim du poste lors de sa mutation, et disposait du soutien de sa hiérarchie,

que ses conditions de travail ont commencé à se dégrader lors de l’arrivée le 2 avril 2018 de la nouvelle directrice des ressources humaines de l’UES Ferrero, Mme [T] [A], laquelle s’est employée à user de pratiques constitutives de harcèlement moral.

Il allègue les faits suivants :

des actes de dénigrement, en ce que Mme [A] n’a pas hésité à le discréditer tant auprès des différents interlocuteurs internes, soit les autres membres de la direction des ressources humaines, les partenaires sociaux, mais aussi le directeur des ressources humaines Monde pôle industriel, M. [F] [D] qui le soutenait jusqu’alors, qu’auprès des partenaires externes (Alliance 7, Branche professionnelle), obérant ainsi son avenir professionnel,

qu’il a découvert lors d’une réunion d’information interne le 7 septembre 2018, que M. [H] [V] était recruté et prendrait en charge 80 % de ses responsabilités, subissant par la même une réelle humiliation, Mme [A] ayant omis de l’informer,

qu’il sera sera victime d’un accident du travail le 2 octobre 2018, suite à un entretien au cours duquel M. [V] lui confirmait sur un ton particulièrement directif, qu’il avait été choisi pour reprendre ses fonctions.

Il produit :

– la lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la société Ferrero France et au groupe Ferrero le 20 septembre 2018, dénonçant les conditions d’exécution de son contrat de travail et notamment, l’absence de soutien de sa hiérarchie depuis l’arrivée de Mme [A] l’empêchant d’exercer normalement ses missions, le fait d’être mis à l’écart des décisions prises, alors qu’elles ont des conséquences directes sur son périmètre d’action et de responsabilité, d’avoir été décrédibilisé face aux partenaires sociaux lui apprenant ces décisions, d’être exclu systématiquement de tous les échanges et de ne plus être convié aux réunions importantes et le fait d’apprendre qu’elle répète sans cesse qu’elle n’est pas aidée par son équipe sans qu’il n’ait pu obtenir d’explications claires sur ce qui lui est reproché,

– la lettre recommandée avec accusé de réception adressée par son conseil à la société Ferrero International le 12 novembre 2018,

– sur le soutien antérieur et les bonnes relations avec sa direction, les échanges de courriels avec Mme [E] et M. [D] le 24 novembre 2017 et avec M. [D] les 10 et 11 avril 2018, 30 août 2016 et,

– les échanges de courriels avec Mme [N] [U], directrice des affaires sociales de l’Alliance 7 les 11 et 17 septembre 2018 et le courriel de Mme [U] du 1er octobre 2018 concernant la représentation Ferrero dans les instances A7 et syndicales démontrant qu’il était exclu des réunions de la commission sociale de «l’Alliance 7 », et notamment qu’il n’était pas informé du changement d’interlocuteurs pour Ferrero auprès de la branche,

– la fiche de renseignements concernant l’accident du 2 octobre 2018 dont il a été victime, établie le 21 janvier 2019 par Mme [M], responsables ressources humaines, à l’adresse de la caisse primaire d’assurance-maladie indiquant : ‘il semblait être pris d’une crise d’angoisse aiguë, il pleurait ses propos n’était pas audibles’, comprenant en annexe le détail des causes et circonstances de l’accident, et ajoutant qu’« il lui a fait part à plusieurs reprises avant le 2 octobre 2018 du fait qu’il était victime de harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique, Mme [A], qu’il était mis à l’écart régulièrement de réunions, dénigré dans son poste, que ses missions étaient considérablement réduites… que le 2 octobre 2018, M. [V] s’était présenté dans son bureau pour lui expliciter qu’il était là pour reprendre ses missions »,

– le courriel de Mme [A] du 8 septembre 2018, alors qu’il ne faisait pas partie des destinataires, annonçant l’arrivée de [H] [V], en renfort de l’équipe sur la partie relations sociales jusqu’en janvier, en qualité de responsables relations sociales,

– les courriels que lui a adressés le directeur général, M. [W] [I], le 6 août 2018 et le 29 août 2018 sollicitant son avis sur les différents dossiers en cours,

– les échanges de courriels avec Mme [A] les 2 et 3 mai 2018, avec Mme [A], Mme [E], MM. [I] et [D] les 26 avril 2018 et 3 mai 2018, concernant un rappel à l’ordre de Mme [VH], alors qu’un courrier devait être validé par lui et M. [I], ce dernier indiquant ‘ ce courrier est différent de celui que j’ai validé hier soir…. ma préoccupation sur ce dossier est de protéger la société en agissant notamment selon ma délégation de pouvoir, en qualité de DG Ferrero France. De tels agissements ne sont ni tolérables ni durables…’

– les attestations de délégués syndicaux centraux CFTC, CFDT et CFE-CGC témoignant de la qualité du dialogue social sous sa responsabilité,

M. [C] indiquant qu’il ‘partageait les informations de façon transparente et informait toujours les instances représentatives du personnel et le personnel’

M. [S] précisant :’il a pendant 2 ans participé à toutes les réunions avec les acteurs syndicaux et les instances représentatives du personnel, participé à des négociations multiples et à même tenu certaines de ces réunions qu’il a menées de façon professionnelle et responsable’

M. [P] ajoutant qu’il a ‘su instaurer un dialogue social de qualité ».

Une placardisation, en ce qu’il a été progressivement mis à l’écart et exclu de toutes les réunions, discussions et échanges ayant directement trait à ses missions, le privant de la possibilité d’exercer correctement ses fonctions,

qu’il a été ainsi été exclu dès avril 2018 des rencontres organisées avec les délégués syndicaux, alors même qu’il était en charge des relations sociales de Ferrero France SA, qu’il participait systématiquement aux réunions de négociation avec les délégués syndicaux centraux et aux réunions du CCE, dont le périmètre correspond à l’UES sein FERRERO (FERRERO France SA et FERRERO France Commercial),

qu’au mois de septembre 2018, il s’est vu écarté des réunions de préparation des négociations annuelles obligatoires sur les salaires et des réunions stratégiques sur la mise en place du CSE, Mme [A] s’étant organisée pour fixer ces réunions à des dates où il n’était pas disponible, et exclu des réunions de la commission sociale de « l’Alliance 7 », l’apprenant par le biais d’un courriel de la secrétaire générale de la commission sociale,

qu’il a été en outre écarté de la gestion de la procédure de licenciement mise en ‘uvre à l’encontre d’une salariée, Mme [O], alors qu’il en était le manager direct et que la conduite des relations individuelles relevait de ses compétences.

Il produit :

– les lettres précitées à la société Ferrero France et au groupe Ferrero du 20 septembre 2018 concernant les conditions d’exécution de son contrat de travail et de son conseil aux sociétés Ferrero France et Ferrero International du 12 novembre 2018,

– le courriel adressé par Mme [A] le 11 avril 2018, lui indiquant qu’elle rencontre les délégués syndicaux et le remerciant pour les communications NAO de l’année dernière,

– les échanges de courriels précités avec Mme [A] les 2 et 3 mai 2018, avec Mmes [A], [E], MM. [I] et [D] les 26 avril 2018 et 3 mai 2018,

– le courriel qu’il adresse à M. [D] le 5 septembre 2018 évoquant un conflit d’agenda, l’absence de solution et lui demandant à quelle réunion il doit assister,

– les échanges de courriels avec Mme [A] du 18 septembre 2018, à propos d’un rendez-vous aux fins de construire la stratégie CSE, M. [J] répondant ne pas avoir été informé, et dans l’impossibilité d’y participer, Mme [A] indiquant pour sa part qu’il y a eu un malentendu sur la date, mais qu’il s’agit d’une première réunion de plusieurs à venir…,

– les échanges de courriels précités entre Mme [U] et M. [B] [J] les 11 et 17 septembre 2018 et le courriel de Mme [U] du 1er octobre 2018 ayant pour objet la représentation Ferrero dans les instances A 7 et syndicales,

– l’attestation de M. [C] déclarant : «C’est d’ailleurs M. [V] qui en septembre 2018 était responsable pour la direction, des négociations sur la mise en place du CSE de Ferrero France SA » et sur son rôle lors des réunions de l’Alliance 7 « M. [J] représentait aussi la partie industrielle (Ferrero France SA) et la partie commerciale (Ferrero France Commerciale SAS) au Comité européen et à l’Alliance 7 depuis son arrivée chez Ferrero ces responsabilités lui ont été enlevées du jour au lendemain. »

– le courriel qu’il a adressé à Mme [A] le 30 août 2018 indiquant qu’elle avait annoncé l’arrivée de M. [V], lequel prenait la responsabilité des relations sociales et que ce projet d’UES relève désormais de son périmètre de compétence et de responsabilité,

– les échanges de courriels précités avec Mme [A] les 18 et 19 septembre 2018 et le courriel de M. [V] du 1er octobre 2018,

– les échanges de courriels avec Mme [A], MM. [I] et [Z] le 25 septembre 2018,

– le courriel du 31 mai 2018, adressé à Mme [A] indiquant dans le cadre du dossier [O] « être dans l’attente d’avoir enfin l’opportunité de pouvoir te présenter les éléments du dossier ».

Une rétrogradation à compter de septembre 2018, en ce que le poste de responsable des relations sociales a été confié à M. [V], alors qu’il a découvert sa nomination et son périmètre d’intervention en même temps que l’ensemble de ses collègues lors d’une réunion d’information du 7 septembre 2018 et qu’il était exclu de la liste de diffusion du courriel du 8 septembre 2018 annonçant son arrivée, ce courriel lui ayant été transféré par l’une de ses collègues, l’employeur reconnaissant qu’il était le subordonné de M. [V] lorsqu’il indique pour justifier l’absence de rétrogradation que ce dernier le conviait à des réunions de travail « en sollicitant sa présence obligatoire », alors que dans le même temps, M. [V] omettait de l’associer à l’élaboration de l’ordre du jour de la réunion du comité central d’entreprise.

Il produit :

– la fiche de renseignements précitée adressée à la CPAM remplie par Mme [M] qui atteste qu’il a été mis devant le fait accompli,

– le courriel de Mme [A] du 8 septembre 2018, les échanges de courriels avec M. [D] du 12 septembre 2018 (cf ci-avant),

– le courriel précité de M. [V] du 11 septembre 2018,

– les attestations des représentants syndicaux, à savoir :

M. [C] indiquant : « Mme [A], nouvelle directrice des ressources humaines régionale, arrivée en avril 2018 a présenté M. [V] aux quatre DSC en expliquant que c’est lui “qui reprenait” l’intégralité des relations sociales … c’est d’ailleurs M. [V] qui en septembre 2018 était responsable pour la Direction des négociations sur la mise en place du CSE de Ferrero France SA.

(‘) M. [V] a été nommé par la directrice des ressources humaines régionale Mme [A] dès septembre 2018 comme Responsable et seul interface des instances représentatives du personnel puisque nous ne la voyons rarement. »

M. [S] déclarant : « Seuls, Mme [A] et M. [V] géraient les négociations et les réunions d’instance (DP, CE, CHCT, CCE). En septembre 2018, Mme [A] a nommé M. [V] responsable des relations sociales de tout le périmètre de l’UES et il est devenu notre seul interlocuteur. »

M. [P] ajoutant : « J’ai constaté, dès avril 2018, un changement concernant ses responsabilités et prérogatives puisque M. [J] ne participait plus aux séances. M. [J] ne participait plus non plus aux négociations collectives ni au CCE de septembre 2018.

C’est en septembre 2018 que M. [V] a été nommé responsable des relations sociales de l’ensemble du périmètre de l’UES. »

la dégradation de son état de santé, en ce qu’il souffre depuis l’été 2018 d’un syndrome anxiodépressif sévère réactionnel et persistant, directement lié à ses conditions de travail, le contraignant à être placé en arrêt maladie de manière continue à compter du 3 octobre 2018 jusqu’au terme de l’année 2020.

Il produit :

– les arrêts de travail des 3 et 22 octobre 2018, 30 novembre 2018, 14 janvier 2019, 15 mars 2019, 15 avril 2019 et 15 mai 2019 délivrés en raison d’un état anxiodépressif sévère,

– les ordonnances de prescription médicale délivrées par le docteur [R] [L] les 3, 4 et 22 octobre 2018,

– le certificat médical du docteur [L] du 30 novembre 2018 précisant qu’il présente un état anxiodépressif consécutif à un conflit professionnel,

– le certificat médical du docteur [X] [K] du 29 décembre 2018 indiquant que son état de santé tant psychique que physique contre-indique sa présence pour un entretien professionnel pour une durée indéterminée,

– le courrier de la médecine du travail au docteur [L] du 14 janvier 2019 recommandant une prise en charge par un psychiatre,

– la lettre recommandée de la médecine du travail à la société Ferrero France du 14 janvier 2019 indiquant vouloir échanger sur la situation du salarié,

– le courriel de la caisse d’assurance maladie du 28 août 2019 le convoquant au service médical arrêt de travail.

la passivité de l’employeur, en ce qu’il a vainement alerté sa hiérarchie, en particulier le directeur des ressources humaines du groupe Ferrero au Luxembourg, M. [Y], des pratiques mises en ‘uvre à son encontre par Mme [A] et de l’impact sur son état de santé, alors qu’il ne pouvait alerter les institutions représentatives du personnel, étant officiellement représentant de la direction de l’entreprise, que si une réunion a été organisée le 5 juin 2018 au siège du groupe au Luxembourg au cours de laquelle il a relaté les difficultés qu’il rencontrait avec Mme [A], aucune mesure n’a été prise, ni aucune enquête diligentée, alors même que par courrier du 28 septembre 2018, le médecin du travail et le psychologue du travail ont également alerté la direction de Ferrero France SA.

Il produit :

– la lettre recommandée qu’il a adressée à la société Ferrero France et au groupe Ferrero le 20 septembre 2018 sur ses conditions de travail,

– le courriel adressé à M. [D] le 5 juin 2018 aux fins d’évoquer le conflit existant,

– la lettre de la médecine du travail adressée à la société Ferrero France le 28 septembre 2018, libellé en ces termes «  Nous avons reçu Mr [B] [J], directeur des ressources humaines Ferrero France SA, sur le site de [Localité 5]. Mr [J] nous a fait part de sa situation professionnelle. En effet, il nous relate que depuis plusieurs mois maintenant, son poste de travail subit des modifications dans son contenu. Il nous informe également être de plus en plus en difficultés en relation avec les modalités de communication en place depuis quelques mois (préparation de certaines réunions, réception de messages avec demande de réponse imminente’). Il décrit un isolement grandissant sur le site de [Localité 5], portant préjudice à la bonne réalisation de ses missions.

Ces faits, relatés par Mr [J], ont un impact sur son état de santé, tant physique que mental, que j’ai pu constater.

A ce stade, il nous est donc indispensable de vous alerter sur cette situation afin que toutes mesures soient prises afin de préserver l’état de santé de votre salarié ».

***

Les premiers juges ont retenu que les pièces versées au dossier, et notamment les courriels échangés avec Mme [A], ne permettaient pas de corroborer les allégations du salarié quant aux actes de dénigrement, la cour ajoutant que le fait d’avoir découvert l’arrivée d’un nouveau responsable des relations sociales et le fait pour Mme [A] d’avoir dit « qu’elle n’était pas aidée par son équipe », sans que l’intéressé ne soit visé précisément, ne suffisent pas à caractériser de tels actes, ceux-ci n’étant dénoncés en définitive que dans son propre courrier du 20 septembre 2018, les attestations versées aux débats ne rapportant en outre aucun propos dénigrant.

M. [J] soutient par ailleurs avoir été progressivement écarté, cette mise à l’écart se traduisant par une absence d’information, par le fait d’avoir été omis des listes de diffusion et par l’exclusion des principales réunions, dont celles sur la mise en place du CSE et des instances sociales de la branche professionnelle dites de « l’Alliance 7 », des réunions sur la négociation annuelle obligatoire des salaires, ainsi que par le retrait d’une grande partie de ses fonctions qui ont été transférées à M. [V].

Les pièces produites permettent de mettre en évidence un réel retrait des fonctions du salarié et la rétrogradation qui en est découlée, sans pouvoir retenir que ses fonctions contractuelles se limitaient, s’agissant des relations sociales, à la seule représentation de la société Ferrero France comme retenu au jugement, alors que l’ancienne directrice des ressources humaines régionale a pu affirmer «  M. [J] avait l’entière responsabilité des services ressources humaines (présidence des CE, CHSCT, DP et organisations syndicales de Ferrero France SA, service paie, recrutement, talent, Comp & Ben); santé sécurité; services généraux; communication interne. L’expérience et les compétences démontrées de M. [J] (Ingénieur des Arts et Métiers de formation et DRH de profession) ainsi que son grand professionnalisme, sa rigueur professionnelle, sa droiture et ses connaissances lui ont très vite permis de démontrer une valeur ajoutée certaine.(…)C’est alors que nous avons décidé de lui confier des missions en sus des siennes et portant sur l’ensemble du périmètre de l’UES. Il a ainsi mené seul et avec succès : 4 accords collectifs clefs pour l’UES ; contribué à développer et mis en ‘uvre Cap Sécurité ; assuré le lead des RH de Ferrero France Commerciale SAS et de son service paie lors du congé maternité de son homologue du pôle commercial (en effet tous deux N-1 du DRH Régional). », ses déclarations étant corroborées par celles de trois délégués syndicaux, qui indiquent que M. [J] était l’unique interlocuteur des délégués syndicaux centraux, du CCE et des instances représentatives du personnel pour la société Ferrero France SA, avec notamment pour missions les relations sociales et la gestion des relations individuelles et collectives de travail, que « M. [V] a été nommé responsable des relations sociales de l’ensemble du périmètre de l’UES », ce dernier ayant été présenté par Mme [A] comme étant « celui qui reprenait l’ensemble des relation sociales ».

M. [J] justifie en outre d’éléments médicaux attestant de la dégradation de son état de santé, dont le certificat de son médecin traitant précisant qu’il présente un état anxiodépressif consécutif à un conflit professionnel, alors qu’il a été placé en arrêt de travail entre le 3 octobre 2018 et la date de son licenciement.

Par conséquent, les pièces produites permettent d’établir l’existence matérielle de faits précis et concordants, en l’occurrence une mise à l’écart par un retrait des fonctions et une rétrogradation, qui pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral à l’encontre du salarié. Comme rappelé ci dessus, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, ce en quoi il échoue.

Les faits reprochés au salarié n’étant pas justifiés par des raisons objectives, il sera retenu l’existence d’un harcèlement moral à l’encontre de M. [J], le jugement entrepris étant infirmé de ce chef.

Sur le manquement à l’obligation de sécurité

En application de l’article L.4121-1 du code du travail l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Cette obligation, non seulement lui interdit de prendre, dans l’exercice de son pouvoir de direction, toutes mesures de nature à compromettre la santé physique et mentale des travailleurs mais lui impose de mener des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, des actions d’information et de formation, outre la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

Par ailleurs, en application des dispositions de l’article L.1152-1 du code du travail, «aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel »

Aux termes de l’article L1152- 4 du code du travail « l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Manque à son obligation de sécurité, l’employeur qui, tenu d’en assurer l’effectivité, s’abstient de mettre en oeuvre les mesures nécessaires aux fins de prévenir de tels agissements et les faire cesser.

M. [J] fait valoir qu’il a alerté l’employeur sur la situation bien avant son courrier du 20 septembre 2018, qu’ainsi une réunion a été organisée le 5 juin 2018 au siège à Luxembourg en présence de Mme [A] au cours de laquelle il a relaté les difficultés qu’il recontrait, que pour autant, Mme [A] n’a pas modifié son comportement et sa direction n’a pris aucune mesure de protection le concernant.

Le manquement est caractérisé, dès lors qu’il est retenu l’existence d’un harcèlement moral subi par le salarié du fait de l’employeur, alors que ce dernier était précisément tenu de prévenir de tels faits en vertu de son obligation de sécurité, de sorte qu’il sera fait droit à sa demande à hauteur de 3 000 euros.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 5 février 2019 est rédigée en ces termes :

« Nous faisons suite a l’entretien du 10 janvier 2019 auquel vous ne vous êtes pas présenté et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave pour le motif ci-après.

vous exercez depuis le 1er juillet 2016 la fonction de Human Ressources Business Partner Operations, statut cadre niveau 8 échelon 2 de la convention collective applicable.

En cette qualité vous avez pour fonctions principales l’encadrement et l’animation de la politique sociale et des relations sociales. c’est à dire définir et contribuer au dialogue social notamment en représentant de façon permanente la direction de la société auprès des instances représentatives du personnel de la société Ferrero France.

A ce titre. vous disposez d’une délégation de pouvoirs et êtes ainsi en charge de la présidence de ces instances, comité d’entreprise et CHSCT, et de respecter et faire respecter les dispositions légales, réglementaires et conventionnelles relatives à ces institutions représentatives du personnel au sein de Ferrero France.

Par ailleurs, vous avez également dans ce cadre pour missions de respecter et faire respecter les dispositions légales, réglementaires et conventionnelles en vigueur en matière d’hygiène, de sécurité du travail et disposez également à ce titre d’une délégation de pouvoirs.

Ces missions qui sont essentielles dans le cadre de vos fonctions sont fondamentales pour la société dans la mesure où non seulement elles structurent et relèvent de sa politique sociale mais qu’en outre les exigences légales et réglementaires qui les encadrent exposent la société à des risques civils et pénaux.

Or, lors de la première réunion en vue d’une consultation du CHSCT de la société, tenue le 13 novembre 2018, portant sur le projet d’organisation du travail au sein du nouvel entrepôt logistique, il est apparu que le projet de construction de cet entrepôt n’a jamais été soumis à la consultation préalable des instances représentatives du personnel concernées.

Pourtant, ce projet est d’une importance réelle dans la mesure ou il se traduit notamment par la construction d’un nouveau bâtiment d’entrepôt logistique de l’usine de 6300 m² sur 3 niveaux, ayant impliqué notamment la modification des voies de circulation routière environnante, ayant suscité l’intervention d’entreprises sous-traitantes, concernant près de 40 salariés, et ayant pour objet d’accueillir les dernières technologies de flux logistiques sur 33 mètres de rocks.

En dépit de ces éléments, vous n’avez pas pris la peine de consulter les instances représentatives du personnel concernées dont le CHSCT sur le projet de cet entrepôt dont la construction a débuté en décembre 2017.

Ainsi, à aucun moment vous n’avez recueilli l’avis du CHSCT, que ce soit au stade du projet de construction ou même avant la mise en place des premières installations entre juin et septembre 2018.

Il est ainsi apparu qu’aucune mesure spécifique en matière d’hygiène et de sécurité. en lien avec la construction de cet entrepôt n’a été suivie, nonobstant les dispositions légales et réglementaires applicables.

Un tel manquement, qui constitue une inexécution de vos missions contractuelles est de nature à mettre en péril les relations sociales au sein de la société.

En outre, vos agissements sont d’autant plus graves, qu’ils exposent la société à des risques juridiques importants, non seulement s’agissant de la réglementation régissant et garantissant les droits des instances représentatives du personnel, mais encore des lors que sont en cause la santé, la sécurité et les conditions de travail des salariés de la société.

Une telle inexécution rend impossible la poursuite de votre contrat de travail et nous conduit à vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave sans préavis ni indemnités.(…) »

Pour satisfaire à l’exigence de motivation posée par l’article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l’énoncé de faits précis et contrôlables.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d’autres griefs que ceux qu’elle énonce.

Aux termes de l’article L.1332-4 du code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. Sous cette réserve, le licenciement disciplinaire prononcé à raison de faits connus de plus de deux mois par l’employeur est sans cause réelle et sérieuse.

La faute grave s’entend d’une faute d’une particulière gravité ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l’employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l’éviction immédiate du salarié de l’entreprise.

Aux termes de la lettre ci-dessus rappelée, il est reproché au salarié de ne pas avoir soumis à la consultation préalable des instances représentatives du personnel un important projet de construction d’un entrepôt logistique au stade du projet de construction en décembre 2017 et avant la mise en place des premières installations entre juin et septembre 2018.

M. [J] oppose l’inconsistance de ce grief, faisant valoir qu’il avait coutume d’informer les institutions représentatives du personnel, ainsi qu’attesté par M. [C], délégué syndical central de la CFTC au sein de l’UES Ferrero, et membre du CHSCT de Ferrero France SA, qui déclare qu’il était «  le premier directeur des ressources humaines de l’usine Ferrero qui partageait les informations de façon transparente et informait toujours les instances représentatives du personnel et le personnel. »,

que quand bien même la consultation n’aurait pas été effectuée, elle aurait dû intervenir en 2015, date à laquelle il ne faisait pas encore partie des effectifs de l’entreprise,

que la société Ferrero France ne peut sérieusement affirmer que le projet de construction du nouvel entrepôt n’existait pas encore en 2015, alors qu’en raison des avancées, la construction du futur entrepôt n’en était plus à l’état de projet,

que les institutions représentatives du personnel doivent être informées et consultées sur un projet, avant qu’il ne soit définitif, et non sur une mesure déjà arrêtée, sous peine de rendre cette formalité fictive et dénuée d’intérêt,

qu’il ne peut donc lui être reproché aucun manquement alors que cette phase était précisément échue,

que le projet de construction ayant pris un retard considérable, en février 2018, il a sollicité auprès du responsable projets & investissements de Ferrero France SA, des informations quant aux avancées aux fins de respecter les engagements d’informations régulières pris auprès du CHSCT,

qu’en juin 2018, la construction du magasin n’était toujours pas achevée et en novembre 2018, le bâtiment n’était toujours pas livré, et la future organisation du travail n’avait pas encore été étudiée par la direction, qui n’était pas en mesure de répondre aux premières interrogations des élus au CHSCT, portant sur la charge de travail des équipes de maintenances locales et du gardien, que les membres du CHSCT ont d’ailleurs fait observer qu’ils n’étaient pas en possession des informations nécessaires pour se prononcer sur le projet de nouvelle organisation du travail au sein de l’entrepôt,

que la direction tente de tirer profit des retards pris dans l’exécution des travaux pour soutenir le bien-fondé de ces griefs,

qu’elle a en outre utilisé la réunion du CHSCT du 13 novembre 2018 afin de construire de toutes pièces la thèse de la faute grave, alors que seul le projet de future organisation du travail au sein du nouvel entrepôt avait été présenté au CHSCT et que ni la Direction, ni les élus, n’ont évoqué le sujet de la consultation préalable à la construction de l’entrepôt,

qu’il s’agissait de l’unique motif pouvant permettre de rompre le contrat de travail pendant sa suspension, dans la mesure où une procédure de reconnaissance d’un accident du travail était en cours.

Il est reproché au salarié d’avoir gravement manqué à ses obligations contractuelles, les griefs allégués, de nature disciplinaire, étant exclusifs de l’insuffisance professionnelle.

Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permet d’affirmer que la société Ferrero France a eu une connaissance des griefs en cause avant la réunion du CHSCT du 13 novembre 2018, alors que c’est précisément à cette occasion qu’était évoqué le projet de future organisation du travail au sein du nouvel entrepôt, qui pouvait permettre de mettre en évidence l’absence de consultation préalable des instances représentatives du personnel sur le projet de construction, quand bien même la question n’était pas à l’ordre du jour.

La matérialité du grief est établie, en ce que le salarié admet que les instances représentatives du personnel et en particulier le CHSCT n’ont pas fait l’objet d’une consultation préalable sur le projet de construction d’un entrepôt logistique, mais seulement d’informations régulières. Il conteste toutefois que les faits lui soient imputables.

Le salarié produit copie des procès-verbaux de réunion du CCE du 10 juin 2015 du 15 décembre 2015 et du 14 juin 2016, dont l’analyse démontre qu’en 2015, alors qu’il n’était pas encore en poste pour avoir été embauché le 1er juillet 2016, le stade de l’avant-projet ne permettant pas d’opérer une consultation utile des instances représentatives du personnel, avait été amplement dépassé, alors que la direction affirmait dès le 10 juin 2015 : «  : – la possibilité d’une étude sur le projet d’un nouveau dépôt à [Localité 5] a été validée par le groupe le 3 juin 2015.

Phase 1 Etude et faisabilité

2 études devront être conduites (sur les produits finis et l’organisation de l’espace de l’usine) cet investissement a été estimé à 1,65 millions d’euros et a été validé par le groupe. La procédure d’approbation débute ce jour.

Phase 2 réalisation

1 réalisation du nouveau dépôt…

2 réalisation de l’espace supplémentaire…

Ceci implique des dizaines de milliers d’euros d’investissement que nous devons soumettre à la validation du groupe dans les mois à venir. L’objectif est de finaliser les travaux à horizon 2017. (…) ».

De la même manière, et à toutes fins, quant à l’absence de consultation sur le projet d’organisation du travail au sein du nouvel entrepôt, il ne peut non plus être retenu de manquement alors que le salarié justifie qu’en raison d’un retard important dans l’exécution des travaux, les installations n’étaient toujours pas mises en place entre juin et septembre 2018, alors que le 12 février 2018, le responsable projets et investissements lui indiquait sur son interrogation, « nous avons pris du retard sur le début du projet dû aux intempéries. Nous en sommes à l’étape réalisation des fondations/longrines avec pieux… » et qu’il ressort du point d’avancement CHSCT du 26 juin 2018 concernant le « nouveau magasin supply chain [Localité 5] » montrant la photographie d’un chantier en début de construction et que la date d’achèvement de la construction est prévue entre le mois de décembre 2018 et le 1er trimestre 2019.

Compte tenu de ce qui précède, il convient de tenir pour non établie la cause réelle et sérieuse de licenciement et a fortiori la faute grave empêchant le maintien du salarié dans l’entreprise, par infirmation du jugement déféré.

Le salarié fait valoir que son licenciement est nul en raison des faits de harcèlement moral, précédemment examinés, de la dénonciation des faits en cause et pour discrimination en raison de son état de santé pour avoir été placé en arrêt maladie à compter du 3 octobre 2018 suite à l’accident du travail du 2 octobre 2018.

M. [J] fait valoir qu’à la suite des dénonciations des agissements de sa hiérarchie, il a par lettre du vendredi 21 décembre 2018, soit la veille des fêtes de noël, été convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à un licenciement pour faute grave,

que par courrier du 29 décembre 2018 au directeur général de Ferrero France SA, au directeur général de Ferrero France Commerciale SAS, à la directrice des ressources humaines Groupe et à la directrice des ressources humaines Industriel Monde, il a dénoncé le caractère injuste de cette procédure qu’il considère avoir été mise en ‘uvre aux seules fins de le sanctionner,

qu’il n’a pas été l’unique victime des méthodes de harcèlement moral de Mme [A], puis d’une brutale éviction destinée à sanctionner la dénonciation des agissements de harcèlement moral,

qu’ainsi Mme [M], responsable des ressources humaines au sein de la société Ferrero France Commerciale, a subi le même sort.

Il est de droit que le fait qu’un salarié ait subi ou dénoncé des faits de harcèlement ne suffit pas à établir qu’il a été licencié pour avoir subi de tels faits.

Selon l’article L.1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions de l’article L.1152-1 du code du travail est nulle. Il résulte de ces dispositions que le salarié qui subit ou relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

Au cas d’espèce, il est établi que le salarié s’est vu retirer ses fonctions en avril 2018, puis de façon définitive en septembre 2018, date à laquelle M. [V] a été chargé de l’ensemble des relations sociales UES, qu’il s’est vu par suite licencié, ledit licenciement ne reposant du reste sur aucune cause réelle et sérieuse,

que par ailleurs, la mesure a été initiée fin décembre 2018, après que le salarié a adressé à l’employeur un courrier le 20 septembre 2018, suivi d’un second courrier de son conseil en date du 12 novembre 2018, faisant état d’agissements de harcèlement moral et mettant en cause la directrice des ressources humaines, Mme [A], alors que, de la même manière, son homologue Mme [M], responsable des ressources humaines au sein de la société Ferrero France Commerciale, après avoir dénoncé le comportement de Mme [A] à son égard par courrier du 21 septembre 2018, réceptionné le 24 septembre 2018, l’employeur la convoquait dès le 25 septembre 2018 en vue d’un entretien préalable au licenciement et la licenciait le 12 octobre 2018 pour manquement à ses missions contractuelles.

Le lien entre les faits de harcèlement moral subis, puis dénoncés et le licenciement étant démontré, la mesure encourt la nullité en application des articles L. 1152-1 L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail, sans qu’il y ait lieu à examiner le moyen tenant à la nullité du licenciement pour discrimination en raison de l’état de santé.

Sur les indemnités de rupture :

L’article L. 1235-3-1 du code du travail dispose que l’article L.1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

M. [J] peut prétendre aux indemnités de rupture et à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement au moins égale aux salaires des six derniers mois.

Il fait valoir qu’il a subi un grave préjudice, tant moral, financier que professionnel, que la dégradation de son état de santé a été telle que la prolongation de son arrêt de travail était justifiée près de deux ans après avoir été licencié, qu’il a finalement retrouvé un emploi équivalent à celui dont il a injustement été privé au sein de la société Ferrero France, le 16 novembre 2020, soit 2 ans après son licenciement, puis a renoncé à cet un emploi salarié, signant une rupture conventionnelle en novembre 2021, pour exercer une activité libérale en qualité d’avocat à compter du 1er février 2022, percevant une rétrocession d’honoraires mensuelle à hauteur de 3 000 euros HT soit environ 1 980 euros net. Il estime que son préjudice sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 182 157,30 euros.

Au moment de la rupture de son contrat de travail, M. [J] comptait deux années d’ancienneté révolus et la société Ferrero France employait habituellement au moins onze salariés.

En raison de l’âge de M. [J], comme étant né en 1980, de son ancienneté dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, du fait qu’il a retrouvé un emploi salarié deux ans après son licenciement, puis à titre libéral, il conviendra de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral qu’il a subi, la somme de 65.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul.

Il lui sera en outre accordé les sommes non contestées de 11 469,16 euros à titre de rappel d’indemnité conventionnelle de licenciement, de 20 203,86 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 2 020,39 euros à titre de rappel d’indemnité de congés payés afférents.

Sur la demande au titre des frais professionnels

M. [J] sollicite le remboursement des frais professionnels engagés, antérieurement à son arrêt de travail, soit au titre du mois de septembre 2018, outre une somme de 1079 euros correspondant à ses frais de déplacement, calculés sur la base du barème kilométrique 2018 en fonction des différents rendez-vous professionnels qu’il a honorés.

Il sera fait droit à la demande de remboursement de la somme non utilement contestée à hauteur de 1617,23 euros au titre des frais professionnels du mois de septembre 2018, le jugement étant infirmé de ce chef.

Sur les autres demandes

sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice distinct :

En application de l’article 1240, du code civil, des articles articles 1103 et 1231-1 du code civil, M. [J] sollicite la condamnation de la société Ferrero à lui payer la somme de 60.719,10 euros à titre de dommages intérêts compte tenu du caractère vexatoire du licenciement et du préjudice moral ainsi subi. Il ajoute qu’il a été licencié, pour des motifs d’évidence fallacieux alors qu’il avait été placé en arrêt de travail, que la société a en outre persisté à adopter une attitude vexatoire postérieurement au licenciement en lui adressant tardivement ses documents de fin de contrat et en s’abstenant de constituer son dossier auprès de la prévoyance, l’empêchant de percevoir les indemnités de prévoyance, rendant ainsi précaire sa situation.

Toutefois, il ne résulte pas des éléments du dossier que la procédure de licenciement a été menée de manière brutale ou vexatoire, aucune irrégularité n’ayant du reste été relevée, alors que considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour a été conduite à condamner la société Ferrero France à verser au salarié de ce chef la somme mentionnée ci-dessus. Le salarié, qui ne justifie pas d’un préjudice demeuré non indemnisé, sera débouté de sa demande.

Sur les intérêts :

Les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d’indemnité de licenciement sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation.

Les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Il convient d’ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 devenu 1343-2, du code civil.

Sur la demande d’affichage de la décision :

M. [J] sollicite l’affichage de la décision dans les locaux de la société Ferrero France SA et de la société Ferrero France Commerciale SAS pendant un mois sur les panneaux réservés à l’affichage de la direction, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Les circonstances de la cause ne justifient pas la publication sollicitée, alors que le salarié a quitté la société depuis près de quatre ans, étant observé que la société Ferrero France Commerciale n’est pas concernée par le présent litige.

Sur les frais du procès :

La société Ferrero France qui succombe, doit supporter les dépens de première instance et d’appel et il y a lieu de la condamner à payer à M. [J] une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 3000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,

Déclare irrecevables les conclusions d’intimée déposées les 19 octobre 2022 et 10 novembre 2022,

Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu’il a débouté M. [B] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct et de sa demande d’affichage de la décision, et en ce qui concerne le montant des sommes allouées au titre des frais professionnels,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que M. [B] [J] a été victime de harcèlement moral,

Annule le licenciement de M. [B] [J] prononcé le 5 février 2019,

Condamne la société Ferrero France à payer à M. [B] [J] les sommes suivantes :

65.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul,

11 469,16 euros à titre de rappel d’indemnité conventionnelle de licenciement,

20 203,86 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 2 020,39 euros à titre de rappel d’indemnité de congés payés afférents,

3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,

1 617,23 euros au titre des frais professionnels,

Y ajoutant,

Dit que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Dit que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d’indemnité de licenciement sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

Condamne la société Ferrero France aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société Ferrero France à payer à M. [B] [J] une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande.

La greffière La présidente

 


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