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COUR D’APPEL
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
IG/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 19/00339 – N° Portalis DBVP-V-B7D-EOWR
Jugement du 13 Novembre 2018
Tribunal de Grande Instance d’ANGERS
n° d’inscription au RG de première instance 15/00209
ARRET DU 17 JANVIER 2023
APPELANTS :
Monsieur [H] [R]
né le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 8] (49)
[Adresse 11]
[Localité 6]
Madame [G] [L] épouse [R]
née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 14] (49)
[Adresse 11]
[Localité 6]
Représentés par Me Dominique BOUCHERON de la SELARL DOMINIQUE BOUCHERON, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 150009
INTIMES :
Monsieur [E] [C]
né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité 8] (49)
[Adresse 7]
[Localité 10]
Madame [Y] [S] épouse [C]
née le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 9] (49)
[Adresse 7]
[Localité 10]
Représentés par Me Elisabeth ROULEAU substituant Me Régine GAUDRE de la SELARL CAPPATO GAUDRE, avocat au barreau d’ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 18 Octobre 2022 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme MULLER, conseillère faisant fonction de présidente, et Mme GANDAIS, conseillère, qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Mme GANDAIS, conseillère
M. WOLFF, Conseiller
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 17 janvier 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente, et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C] sont propriétaires d’une maison à usage d’habitation située [Adresse 7] (49), cadastrée section C [Cadastre 12], pour une contenance de 20 a 27 ca. Monsieur [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] sont propriétaires de l’immeuble contigu situé [Adresse 5], cadastré section C n° [Cadastre 13] pour 9 a 16 ca.
Ces deux parcelles sont issues de la division, intervenue en 1987, d’une propriété appartenant à l’indivision [A].
Au cours de l’année 2008, les époux [R] ont fait réaliser des travaux de rénovation de leur habitation et d’aménagement de leur jardin avec création d’une piscine et d’un local technique. A cette occasion, ils ont fait procéder à la mise en place de deux pompes à chaleur, l’une destinée au chauffage de la piscine et l’autre au chauffage de l’habitation.
Les époux [R] ont donné en location leur maison d’habitation aux époux [V].
Dans le courant du mois d’août 2008, les époux [C] signalaient auprès des époux [R] et de leurs locataires, M. et Mme [V], des nuisances sonores provoquées par le fonctionnement des pompes à chaleur du chauffage et de la piscine et du système de filtration de la piscine.
M. et Mme [R] ont alors fait transférer le système de filtration de la piscine dans le garage et les deux pompes à chaleur à l’extrémité de la parcelle.
Suivant ordonnance rendue le 9 juin 2011, le président du tribunal de grande instance d’Angers, saisi par les époux [C] d’une demande d’expertise acoustique, a fait droit à cette demande et désigné en qualité d’expert, M. [D] [O].
L’expert a déposé son rapport définitif le 1er mars 2013.
Parallèlement, M. et Mme [C] ont assigné, en référé, devant le juge d’instance d’Angers, M. et Mme [R], en bornage judiciaire pour déterminer les limites des parcelles C [Cadastre 12] et C [Cadastre 13].
Suivant ordonnance de référé du 19 mars 2012, le juge d’instance d’Angers a fait droit à cette demande et désigné en qualité d’expert, M. [X] [N].
L’expert a déposé son rapport définitif le 4 octobre 2012.
Par acte du 9 janvier 2014, M. et Mme [C] ont saisi le juge d’instance d’Angers, statuant en référé, aux fins de procéder à la mise en place des bornes A, B, C et D permettant de délimiter les parcelles cadastrées section C [Cadastre 12] et C [Cadastre 13], conformément à la proposition de délimitation faite par M. [N].
Suivant ordonnance de référé rendue le 10 mars 2014, le juge d’instance, constatant l’accord des parties sur la proposition de délimitation des parcelles en cause, désignait M. [N] aux fins de procéder à la mise en place des bornes A, B, C, D délimitant la propriété des époux [C] et la propriété des époux [R].
M. [N] a procédé à l’implantation de ces bornes le 5 mai 2014 et un procès-verbal de bornage a été dressé le 26 mai 2014.
Par acte du 7 janvier 2015, M. et Mme [C] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance d’Angers M. et Mme [R] aux fins principalement d’obtenir le déplacement, sous astreinte, des deux pompes à chaleur au plus loin de la limite séparative de propriété et subsidiairement leur installation à l’arrière du local technique de la piscine, le retrait du poteau et de toutes installations empiétant sur leur propriété, la remise en état, sous astreinte, du fossé en limite de propriété entre les bornes B et C du plan annexé au procès-verbal de bornage du 26 mai 2014 ainsi que le paiement d’une indemnité de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour leurs préjudices.
Par jugement du 13 novembre 2018, le tribunal de grande instance d’Angers a :
– jugé que les niveaux sonores de la pompe à chaleur de la piscine fonctionnant en période de jour de 7 heures à 22 heures sont conformes à la réglementation en extérieur et au premier étage fenêtre ouverte et sont inférieures à la réglementation 3,7 dB en extérieur et en intérieur en fenêtre ouverte pour 6dB admissibles,
– jugé que les bruits en limite réglementaire supérieure pendant la nuit de la pompe à chaleur du chauffage causent un trouble de jouissance rendu anormal par leur fréquence, leur émergence et leurs caractéristiques,
– jugé que les dépassements d’horaire au delà de 7 heures à 22 heures de la pompe à chaleur de la piscine causent un trouble de jouissance rendu anormal par leur fréquence et leurs caractéristiques,
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] à déplacer la pompe à chaleur de la piscine, au plus loin de la limite séparative des propriétés, située entre la borne B et C, selon le procès-verbal de M. [N] en date du 26 mai 2014, dans un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai,
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] à remettre en état le fossé situé en limite de propriété, à savoir entre les bornes B et C, selon le procès-verbal de M. [N] en date du 26 mai 2014 et à retirer toute installation dans le sous-sol de la propriété [C], dans un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai,
– dit qu’il se réservait le pouvoir de liquider l’astreinte,
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] à payer à M. [E] [C] et à Mme [Y] [S] la somme de 5 000 euros en réparation du trouble de jouissance généré par le conflit et en réparation de leur préjudice moral,
– donné acte à M. [E] [C] et à Mme [Y] [S] de l’abandon de leurs autres demandes,
– débouté M. [H] [R] et Mme [G] [L] de leurs demandes,
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] à payer à M. [E] [C] et à Mme [Y] [S] la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] aux dépens conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile qui comprendront les frais d’expertise ayant donné lieu à l’ordonnance de référé du tribunal de grande instance en date du 9 juin 2011, à l’ordonnance de référé du tribunal d’instance d’Angers en date des 19 mars 2012 et 10 mars 2014 dûment taxés et les frais de constat.
Suivant déclaration en date du 21 février 2019 les époux [R] ont relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions, intimant les époux [C].
M. et Mme [C] ont formé, quant à eux, un appel incident par conclusions notifiées le 7 août 2019, sur le montant de l’indemnisation qui leur a été allouée au titre de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral.
Le 15 mai 2020, M. et Mme [R] ont vendu leur immeuble à M. [W] [B] et Mme [J] [T] épouse [B], s’engageant à prendre à leur charge toutes les conséquences du contentieux les opposant à M. et Mme [C].
Suivant ordonnance rendue le 24 mars 2021, le conseiller chargé de la mise en état, saisi par les époux [C] d’une demande d’exécution provisoire du jugement rendu le 13 novembre 2018, a fait droit à celle-ci en sa seule disposition relative aux dommages-intérêts alloués aux époux [C].
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions en date du :
– 6 septembre 2022 pour les appelants, M. et Mme [R]
– 21 septembre 2022 pour les intimés, M. et Mme [C]
qui peuvent se résumer comme suit.
Les époux [R] demandent à la cour, au visa des articles 544, 640, 646 et 1382 ancien devenu 1240 du code civil, de :
– les déclarer recevables et fondés en leur appel,
– y faisant droit, déclarer M. et Mme [B] recevables et fondés en leur intervention volontaire,
– donner acte à M. et Mme [B] de ce qu’ils s’associent à leurs demandes, observations et défenses,
– infirmer le jugement du tribunal de grande instance d’Angers du 13 novembre 2018,
– déclarer M. et Mme [C] irrecevables et en tous les cas mal fondés en leur appel incident et en leurs demandes, fins et conclusions,
– les en débouter,
– condamner in solidum M. et Mme [C] à leur payer une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– condamner in solidum M. et Mme [C] à leur payer, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile une somme de 6 000 euros pour leurs frais irrépétibles de première instance et une somme de 6 000 euros pour leurs frais irrépétibles en cause d’appel,
– très subsidiairement, pour le cas où par impossible la Cour considérerait qu’il existe un doute sur l’emprise et la fonction du fossé rebouché par leurs soins, commettre tel expert qu’il plaira à la Cour de désigner avec pour mission de fournir tout renseignement utile sur l’emprise et la fonction de ce fossé,
– condamner in solidum M. et Mme [C] aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, qui comprendront le coût des procès-verbaux de Maître [Z] des 13 janvier 2015 et 10 mai 2019.
À l’appui de leur appel, ils exposent en premier lieu que le niveau sonore de la pompe à chaleur de l’habitation, légèrement supérieur au niveau réglementaire la nuit, ne peut être à l’origine d’une gêne phonique significative et donc du moindre trouble anormal de voisinage. Ils soulignent que ladite pompe, hors service depuis janvier 2015, a été supprimée pour une chaudière électrique. S’agissant de la pompe à chaleur de la piscine, les appelants contestent également l’existence de nuisances sonores de jour comme de nuit, précisant avoir suivi les préconisations de l’expert judiciaire et installé une horloge pour cantonner son fonctionnement à la journée. Ils remettent en cause les bruits rapportés par les proches des époux [C], non constatés par l’expert judiciaire, et considèrent que de telles attestations, orientées, n’établissent pas l’existence d’un trouble excessif de voisinage. En tout état de cause, ils font valoir que la pompe à chaleur de la piscine a également été retirée en mai 2019 au profit d’un réchauffeur électrique. En second lieu, s’agissant du fossé comblé par leurs soins, les appelants soutiennent que son emprise est entièrement située sur leur parcelle et qu’ils n’ont aucunement repoussé les limites de celle-ci au détriment des époux [C], pour agrandir leur jardin. Ils soulignent que le rapport d’expertise de M. [N] et le procès-verbal de bornage contradictoire ne contient aucun élément permettant d’affirmer que le fossé rebouché appartient pour moitié à chacune des parties. Les appelants produisent un rapport d’expertise amiable leur attribuant la propriété dudit fossé et met en évidence l’inutilité de recréer celui-ci puisque la grille-avaloir et le drain assurent l’évacuation des eaux de ruissellement. Ils ajoutent que les derniers renseignements fournis par l’ancien maire de la commune, s’agissant des intempéries de février 2013, établissent que les rétentions d’eau à cette époque, sur le terrain de M. et Mme [C], sont sans lien avec le comblement et le busage du fossé. Les appelants indiquent encore qu’aucun busage complémentaire n’apparaît nécessaire pour permettre la libre circulation des eaux pluviales, relevant qu’ils n’ont à aucun moment modifié la pente naturelle d’écoulement des eaux. S’agissant des préjudices allégués par les intimés, les appelants exposent que ces derniers multiplient les contentieux avec plusieurs voisins, produisant à cet effet une attestation de l’un d’entre eux. Ils ajoutent que le trouble anormal de voisinage n’est pas constitué, qu’ils ont pu régulièrement combler leur fossé après avoir posé un drain et une grille pour faciliter l’écoulement des eaux et qu’il ne peut leur être reproché aucun propos outrancier. Enfin, les appelants se prévalent d’un préjudice moral résultant de leur impossibilité de vendre leur immeuble pendant près de 10 ans du fait des multiples procédures engagées à leur encontre.
Les époux [C] demandent à la cour, au visa des articles 1240, 544 et suivants du code civil, 6 §1er de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, de :
– débouter M. et Mme [R] de l’intégralité de leurs demandes, tant irrecevables que mal fondées et ce faisant, confirmer le jugement rendu le 13 novembre 2018 en ce qu’il a :
– jugé que les bruits en limite réglementaire supérieur pendant la nuit de la pompe à chaleur du chauffage causent un trouble de jouissance rendu anormal par leur fréquence, leur émergence et leurs caractéristiques ;
– jugé que les dépassements d’horaire au-delà de 7 heures à 22 heures de la pompe à chaleur causent un trouble de jouissance rendu anormal par leur fréquence et leurs caractéristiques ;
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] son épouse à déplacer la pompe à chaleur piscine, au plus loin de la limite séparative des propriétés, située entre la borne B et C, selon le procès-verbal de M. [N] en date du 26 mai 2014, dans un délai de 4 mois à compter de la signification du jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé ce délai ;
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] son épouse à remettre en état le fossé située en limite de propriété, à savoir entre les bornes B et C selon procès-verbal de bornage de M. [N] en date du 26 mai 2014, et à retirer toute installation dans le sous-sol de la propriété [C], dans un délai de 4 mois à compter de la signification du jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé ce délai ;
– donné acte à M. [E] [C] et Mme [Y] [S] son épouse de l’abandon de leurs autres demandes ;
– débouté M. [H] [R] et Mme [G] [L] son épouse de leurs demandes ;
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] son épouse à payer à M. [E] [C] et Mme [Y] [S] son épouse la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] son épouse aux dépens conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile qui comprendront les frais d’expertise ayant donné lieu à l’ordonnance de référé du tribunal de grande instance d’Angers en date du 9 juin 2011, à l’ordonnance de référé du tribunal d’instance d’Angers en date des 19 mars 2012 et 10 mars 2014 dûment taxés et les frais de constat,
– et y ajoutant,
– dire que les astreintes de 50 euros par jour de retard, liées tant au déplacement de la pompe à chaleur/piscine qu’à la remise en état du fossé courront dans un délai de 2 mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
– subsidiairement, et s’agissant de la question relative au comblement du fossé par les époux [R], et ce où la Cour aurait un doute quant à l’assiette du fossé, désigner un expert judiciaire avec pour missions principales, de :
– se prononcer sur l’assiette de l’ancien fossé comblé par M. et Mme [R] ;
– se prononcer, en tout état de cause, sur l’efficacité du drainage mis en place, aux lieu et place dudit fossé, par les époux [R] ;
– évaluer le préjudice subi du fait des désordres constatés (troubles de jouissance notamment) ;
– d’une façon générale, et dans le cadre de la mission ci-dessus définie, rechercher tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la Cour d’apprécier les responsabilités encourues et d’évaluer les préjudices éventuellement subis ;
– répondre à tous dires écrits des parties et, au besoin, entendre tous sachants
– inviter M. et Mme [B], acquéreur de l’immeuble des époux [R] à constituer avocat et à prendre ensuite des conclusions d’intervention volontaire s’ils l’estiment nécessaire ;
– à défaut, leur décerner acte de ce qu’ils les assigneront en intervention forcée dans le cadre de l’expertise judiciaire ainsi ordonnée ;
– et les recevant en leur appel incident et, les y disant bien fondés,
– condamner solidairement M. et Mme [R] à leur verser une indemnité de 20 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance lié aux nuisances sonores subies du fait du fonctionnement des deux pompes à chaleur ainsi qu’une indemnité de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral,
– condamner solidairement M. et Mme [R] à leur verser, en cause d’appel, une indemnité de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement M. et Mme [R] aux entiers dépens d’appel.
À l’appui de leurs demandes, se fondant à la fois sur l’expertise acoustique et sur des attestations, ils affirment que le fonctionnement des pompes à chaleur de l’habitation et de la piscine des époux [R] a été à l’origine d’un trouble anormal de voisinage pendant plusieurs années. Ils soulignent que ces deux pompes étaient installées au plus loin de la maison d’habitation des appelants et au plus près de leur maison, ce qui générait des nuisances significatives. S’agissant de la pompe à chaleur pour la piscine, les intimés relèvent que la mise en place par les appelants d’une horloge n’empêchait pas un fonctionnement du matériel en continu, sur des créneaux horaires tout à fait anarchiques, y compris la nuit. Ils ajoutent que l’installation de la pompe à chaleur de la piscine n’est nullement retirée mais seulement provisoirement arrêtée, permettant ainsi à tout autre propriétaire de remettre un même matériel en fonctionnement. S’agissant de la remise en état du fossé, les intimés soutiennent qu’ils en sont partiellement propriétaires, se fondant à la fois sur le plan de bornage et de division qui leur a été remis lors de l’acquisition de leur propriété mais également sur les rapports de M. [N]. Ils affirment par ailleurs que le busage mis en place par les époux [R] n’est absolument pas conforme, ce qui cause la stagnation des eaux de pluie devant leur maison, en cas de fortes intempéries comme en février 2013. À cet effet, ils se fondent sur un courrier du maire adressé à M. et Mme [R], en avril 2013, sollicitant la remise en état du fossé pour permettre la libre circulation des eaux pluviales. Les intimés se prévalent de la servitude d’écoulement des eaux au bénéfice de leur fonds imposant ainsi le rétablissement de l’ancien fossé. Ils contestent les conclusions du rapport d’expertise, non contradictoire, de M. [K] tant s’agissant de l’emprise du fossé que de l’efficacité du drainage mis en place par les appelants. Au soutien de leur demande indemnitaire, les intimés rapportent avoir subi un préjudice de jouissance entre 2008 et 2019 du fait des nuisances sonores mais également un préjudice moral au regard des accusations et propos outranciers à leur égard, portés aux écritures des appelants. En réponse à la demande indemnitaire de ces derniers, ils soulignent que la procédure d’appel ne les a absolument pas empêchés de mettre en vente leur immeuble et de finaliser cette cession sans qu’ils puissent valablement faire courir le délai de prescription quinquennale à compter de ladite vente qui ne saurait correspondre à la manifestation du dommage allégué.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 18 octobre 2022, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 17 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, la cour constate que les appelants ont vendu leur immeuble le 15 mai 2020 à M. [W] [B] et Mme [J] [B]. Ils demandent que l’intervention volontaire de ces derniers en tant que propriétaires actuels du bien immobilier soit déclarée recevable et qu’il soit donné acte à ceux-ci de ce qu’ils s’associent à leurs demandes. Or, ces derniers ne sont pas intervenus volontairement à la procédure en appel, y compris en concluant aux côtés des appelants dont les seules identités figurent en tête de leurs dernières conclusions. Ils n’ont pas davantage été appelés à la cause par l’une ou l’autre des parties. Il s’ensuit que M. et Mme [R] seront déboutés de leurs prétentions.
I- Sur le trouble anormal du voisinage et la demande de déplacement de la pompe à chaleur de la piscine
Le droit de propriété, défini par l’article 544 du code civil comme le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, est limité par le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage.
En application de ce principe, la partie à l’origine d’un trouble anormal de voisinage en doit réparation, indépendamment de toute faute.
Le trouble de voisinage ne donne lieu à réparation que s’il excède la limite des inconvénients normaux du voisinage.
Le dommage doit être évalué in concreto en fonction de l’environnement spécifique des nuisances invoquées.
En l’espèce, aux termes de son rapport en date du 1er mars 2013, l’expert judiciaire, M. [O], après plusieurs déplacements et mesures acoustiques sur site, a constaté que la pompe à chaleur destinée au chauffage de la piscine, installée dans la partie nord de la propriété des époux [R], à 2 mètres environ de la propriété des époux [C], fonctionnait du mois de mai à septembre. Il a conclu qu’en période jour, l’équipement était conforme à la réglementation, avec des émergences inférieures aux seuils admis, en extérieur et en intérieur au 1er étage fenêtre ouverte de l’habitation des époux [C]. Partant du principe que la pompe de la piscine ne fonctionnait pas la nuit, l’expert a limité son analyse au seul fonctionnement en journée.
Il a toutefois préconisé, au titre des solutions techniques, la mise en place d’une horloge sur l’alimentation électrique de la pompe de piscine, réglée de telle façon qu’elle ne puisse fonctionner qu’en période de jour de 7h à 22h. Les époux [R] justifient avoir fait installer une horloge de pilotage automatique pour le fonctionnement de cette pompe, suivant un constat d’huissier établi le 13 janvier 2015.
Il importe de relever d’une part que l’expert judiciaire n’a pas distingué le niveau sonore de la pompe à chaleur destinée au chauffage de la piscine de celui de l’autre pompe destinée au chauffage de la maison. Les époux [R] ne contredisent pas utilement l’affirmation des époux [C] évoquant un niveau sonore identique pour les deux équipements de chauffage. D’autre part, il est constant que les deux pompes à chaleur étaient installées dans la partie nord de la propriété des époux [R], à proximité de la limite séparative du fonds appartenant aux époux [C].
Or, s’agissant du fonctionnement de la pompe à chaleur pour l’habitation, l’expert judiciaire a constaté que les niveaux sonores réglementaires étaient dépassés en période nuit, tant en extérieur (émergence de 9,9 pour 4dB admis) qu’en intérieur au 1er étage fenêtre ouverte de l’habitation des époux [C] (émergence de 7,9 pour 4dB admis). Au regard du dépassement des émergences réglementaires, la nuit, dans le jardin des époux [C] et dès que la fenêtre de la chambre du 1er étage de leur maison est ouverte, l’expert judiciaire en a déduit que les nuisances sonores étaient établies pour la pompe à chaleur de l’habitation.
Les époux [C] ont produit devant les premiers juges six attestations établies en avril, mai, juin et octobre 2017, par des proches invités chez eux, qui ont entendu à différents horaires de la nuit (23h, 23h20, 23h30, 01h, 03h15), le fonctionnement de la pompe à chaleur destinée à la piscine. Les attestants ont souligné le caractère bruyant du matériel des voisins, résonnant dans la nuit.
Si les appelants remettent en cause la sincérité de ces attestations, ils n’explicitent aucunement les motifs qui conduiraient à écarter leur force probante.
Au demeurant, si l’expert judiciaire a préconisé la mise en place d’une horloge pour éviter un fonctionnement de nuit de la pompe à chaleur de la piscine, cela tend à démontrer que son fonctionnement générerait au même titre que la pompe à chaleur pour l’habitation, des nuisances sonores pendant cette période.
L’installation de cette horloge ne saurait par ailleurs garantir l’absence de fonctionnement de la pompe à chaleur entre 22h et 7h, tout dépendant du réglage et de la mise en route de ladite horloge par son utilisateur.
C’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont retenu l’existence d’un trouble anormal de voisinage et condamné les appelants à déplacer la pompe à chaleur pour la piscine au plus loin de la limite séparative des propriétés, située entre la borne B et C, selon le procès-verbal de M. [N] du 26 mai 2014, dans un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement et sous astreinte provisoire.
Si les époux [R] font valoir que la pompe à chaleur litigieuse a été retirée en mai 2019 et remplacée en juillet 2019 par un réchauffeur électrique, les seules constatations de l’huissier, le 10 mai 2019, ne permettent pas d’exclure, comme souligné à juste titre par les intimés, la réinstallation d’une pompe à chaleur au même endroit. En effet, les tuyaux du circuit aller-retour de la pompe à chaleur, bien qu’étant décrits en position fermée, permettent, au moyen d’une manipulation simple, la réalimentation d’un équipement identique.
Il convient pour ce motif et ceux précédemment exposés de confirmer le jugement entrepris sauf à dire que l’astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard débutera à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, comme sollicité par les intimés.
II- Sur la demande de remise en état du fossé
Les époux [R] ne contestent pas avoir procédé au comblement d’un fossé situé en limite de propriété, longeant la haie des époux [C], précisant avoir mis en place un système de drainage.
La propriété de cet ancien fossé est contestée.
Aux termes de son rapport préliminaire du 8 août 2012 complété par son rapport définitif du 4 octobre 2012, l’expert judiciaire, M. [N] a émis une proposition de délimitation des propriétés appartenant l’une à M. et Mme [R] (cadastrée section C [Cadastre 13]), l’autre à M. et Mme [C] (cadastrée section C [Cadastre 12]). A cet effet, il a notamment utilisé le document d’arpentage établi par un précédent géomètre expert, M. [P], le 12 février 1987, qui a créé les parcelles sections C [Cadastre 12] et [Cadastre 13], dépendant anciennement d’un fonds commun appartenant aux consorts [A].
Le plan de bornage et de division d’avril 1986 figurant en annexe du rapport préliminaire de M. [N] a mis en évidence notamment l’existence d’un fossé en limite séparative des deux fonds, au droit des bornes actuelles B et C implantées par M. [N]. A l’examen dudit plan, la largeur de cet ancien fossé serait compris entre 1,02 mètre et 2,10 mètres. Si une flèche relie ce fossé à la parcelle désormais cadastrée C [Cadastre 13], ce seul élément ne saurait suffire à rattacher la propriété dudit fossé à M. et Mme [R], ainsi que l’a fait M. [K], géomètre-expert, aux termes d’un rapport d’expertise non contradictoire du 12 février 2019, produit en appel. Au surplus, il importe de rappeler que les appelants ont accepté, suivant procès-verbal de bornage du 26 mai 2014, la proposition de délimitation des parcelles cadastrées section C n° [Cadastre 12] et C [Cadastre 13] faite par M. [N] dans son rapport d’expertise du 4 octobre 2012 et n’ont pas revendiqué la partie du fossé située de l’autre côté de la limite séparative des fonds.
De même, la circonstance que la Mairie ait autorisé les époux [R] à mettre en place des buses ne saurait induire un droit de propriété entier sur cet ancien fossé. En outre, l’emplacement des deux regards, situés à l’aplomb des buses installées par leurs soins, ne permet pas d’affirmer que l’emprise du fossé est située sur leur propriété puisqu’ils ont eux-mêmes disposé ces buses, sans tenir compte des bornes actuelles, implantées par l’expert judiciaire.
En définitive, il résulte des éléments produits par les parties qu’à tout le moins, une partie de l’ancien fossé, celle bordant la haie des époux [C], appartient à ces derniers.
S’agissant des travaux de comblement de cet ancien fossé, dans sa totalité, les époux [R] ne discutent pas avoir procédé à ceux-ci en 2008, sans autorisation des époux [C]. Dans ce fossé rebouché, ils ont mis en place un drain qui serait raccordé à un autre drain existant dans un fossé comblé appartenant, depuis le bornage du 26 mai 2014, à M. et Mme [C]. Ils affirment que la grille-avaloir et le drain assurent l’évacuation des eaux de ruissellement et que le fossé, s’il était rétabli, ne pourrait déboucher sur aucun fossé existant en aval.
Les époux [C] déplorent pour leur part, une retenue des eaux pluviales sur leur propriété provenant de la parcelle des époux [R], à la suite du comblement du fossé. Ainsi, consécutivement aux fortes pluies du 1er février 2013, le Maire de la commune avait, suivant courrier du 23 avril 2013, demandé à M. [R] de remettre le fossé en état afin de permettre la circulation des eaux pluviales, indiquant ‘le fossé qui draine les terrains sur le côté de votre propriété est busé et (…) les buses utilisées n’ont pas un diamètre suffisant pour un bon fonctionnement en cas de grosses pluies. Compte tenu de la déclivité, les eaux de ruissellement inondent la parcelle de Monsieur et Madame [C].’ Le courrier du 11 mai 2017 établi par l’ancien maire de la commune (de 2008 à 2014) à la demande des appelants ne remet pas en cause ses constatations et sa demande de 2013. En effet, l’ancien maire précise que les fortes pluies du 1er février 2013 ont concerné toute la commune, causant des inondations, débordements de fossés dans les points les plus bas de [Localité 10], nécessitant le retrait de certains points d’entrée de propriété pour l’écoulement des eaux pluviales. Ces précisions n’ont pas conduit le maire de l’époque à revoir son avis s’agissant des buses insuffisantes posées par les époux [R] et la nécessité pour eux de remettre en état le fossé.
Par ailleurs, il n’est pas discuté par les époux [R] qu’il existe entre les fonds respectifs de chacune des parties une servitude d’écoulement des eaux, le fonds de M. et Mme [C] étant le fonds supérieur et le fonds de M. et Mme [R] étant le fonds inférieur. Il est donc certain que les eaux de ruissellement, comme celles qui ont inondé la propriété [C] en février 2013, selon attestation précitée du maire, sont celles qui, provenant de cette propriété, ne peuvent s’écouler vers la propriété [R] et le fossé séparant les deux propriétés.
Il appartient donc aux époux [R], dans le respect de cette servitude d’écoulement des eaux, du fait de la configuration des lieux, de permettre la libre circulation des eaux pluviales venant du fonds [C].
Aux termes d’un constat dressé le 6 juin 2018 à la demande des époux [C], l’huissier a pu constater, sur la bande de terrain propriété [C], en remontant le long des propriétés [M] et [R], soit entre les bornes actuelles B et C, qu’il s’enfonçait du fait de l’humidité de ce terrain. L’huissier a également constaté qu’au delà des bornes qui peuvent être identifiées comme étant B et C, la bande de terrain se situant au fond de la propriété [R] et en limite de la haie de thuyas [C], est surélevée d’une trentaine de centimètres. Or, comme souligné à juste titre par les intimés, cette configuration empêche l’évacuation des eaux pluviales et peut causer des inondations en cas de fortes intempéries, comme en 2013, phénomène aggravé par un busage de dimension et conception manifestement insuffisantes.
Au vu de ce qui précède, il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise visant à déterminer l’emprise et la fonction du fossé rebouché, les éléments ainsi développés permettant à la cour d’apprécier ces deux points en litige. La demande d’expertise formée à cet égard, à titre subsidiaire par les appelants, sera rejetée.
C’est donc par une juste appréciation des faits de la cause que les premiers juges ont condamné M. et Mme [R] à remettre en état le fossé situé en limite de propriété, entre les bornes B et C figurant au procès-verbal de bornage du 26 mai 2014 et à retirer toute installation dans le sous-sol de la propriété des époux [C] dans un délai de quatre mois à compter de la signification du jugement et ce, sous astreinte provisoire. Le jugement entrepris sera ainsi confirmé sauf à dire que l’astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard débutera à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, comme sollicité par les intimés.
III- Sur les demandes indemnitaires formées par les époux [C]
– Sur le préjudice de jouissance
M. et Mme [C] sollicitent la somme de 20 000 euros au titre du préjudice de jouissance subi entre 2008 et 2019, du fait des nuisances sonores causées par les deux pompes à chaleur.
S’agissant de la pompe à chaleur destinée à la piscine, au bénéfice de ce qui précède, il importe de rappeler que si ladite pompe, installée en 2008, a fonctionné jusqu’à sa dépose en janvier 2015, sur une période de cinq mois dans l’année, les nuisances sonores ne sont établies qu’au cours des mois d’avril à octobre 2017.
S’agissant de la pompe à chaleur destinée au chauffage de l’habitation des époux [R], le rapport d’expertise judiciaire de M. [O] du 1er mars 2013 a mis en évidence un dépassement des seuils réglementaires uniquement la nuit, dans le jardin des époux [C] et dès que la fenêtre de la chambre du 1er étage de leur habitation est ouverte. Cette pompe à chaleur, fonctionnant du mois d’octobre à avril, a été installée initialement le long de la propriété des époux [C] puis déplacée de quelques mètres à la fin de l’année 2010 pour être finalement supprimée en janvier 2015.
Les premiers juges ont indemnisé les époux [C] à hauteur de la somme de 5 000 euros, au titre à la fois de leur préjudice de jouissance mais également de leur préjudice moral. C’est à tort que le tribunal a traité de façon commune ces deux préjudices qui ont des objets différents et qui doivent être analysés de manière distincte.
Les appelants ne discutent pas les constatations de l’expert judiciaire s’agissant des nuisances sonores causées par le fonctionnement nocturne de la pompe à chaleur destinée à leur maison. L’expert judiciaire a conclu que le préjudice de jouissance était faible étant donné que les désordres se produisent en période nocturne et en période hivernale, indiquant ‘la nuit, l’hiver on est rarement dans son jardin et on dort généralement les fenêtres fermées’.
Au regard des éléments qui précèdent, les nuisances sonores excédant les inconvénients normaux de voisinages sont intervenues la nuit, pour la pompe à chaleur habitation, de 2008 jusqu’en janvier 2015, pendant la période de chauffe hivernale et pour la pompe à chaleur piscine, des mois d’avril à octobre 2017.
Bien que ces nuisances sonores soient intervenues dans des configurations précises de nature à limiter le préjudice de jouissance, celui-ci n’en demeure pas moins caractérisé, les époux [C] étant empêchés de jouir de leur jardin ou de leur fenêtre ouverte, lors de ces bruits de moteurs lancinants et répétitifs. Il y a lieu d’indemniser ce préjudice de jouissance à hauteur de la somme de 5 000 euros. M. et Mme [R] seront ainsi condamnés solidairement à payer ladite somme à M. et Mme [C].
– Sur le préjudice moral
L’article 1240 du code civil énonce que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Les époux [C] sollicitent une somme de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral, évoquant le sous-entendu des époux [R] à leur égard, relativement à un sabotage de leur pompe à chaleur chauffage et les qualificatifs employés dans leurs écritures pour les désigner ainsi que les propos outranciers à leur endroit.
M. et Mme [C] ne démontrent pas en quoi les écritures des appelants, produites dans un cadre limité à la présente procédure, leur portent préjudice.
En conséquence, faute de rapporter la preuve d’une faute et de démontrer avoir subi un préjudice du fait de l’attitude de M. et Mme [R], les intimés seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts et le jugement entrepris sera réformé sur ce point.
IV- Sur la demande indemnitaire formée par les époux [R]
L’article 2224 du code civil qui fixe le délai de prescription de droit commun en matière civile à cinq ans prévoit également que le point de départ de ce délai court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Pour l’action en responsabilité, le point de départ de la prescription correspond au jour où le dommage se manifeste.
M. et Mme [R] sollicitent une indemnisation de 10 000 euros en réparation de leur préjudice moral, faisant grief à M. et Mme [C] d’avoir adopté un comportement procédurier les empêchant, pendant dix ans, de vendre leur bien immobilier. Ils soulignent que leur locataire, M. [V], occupant des lieux de 2008 à 2012 et qui s’était manifesté pour acquérir le bien loué, a finalement renoncé à son projet du fait des litiges avec les voisins, M. et Mme [C].
Le tribunal a retenu que cette demande indemnitaire était prescrite à la date de leurs conclusions signifiées le 27 juin 2018 et qu’à titre superfétatoire, les époux [R] sont à l’origine par leur comportement du litige en cause et ne sont donc pas fondés à en faire supporter les conséquences par leurs voisins.
La cour relève que si les locataires occupants du bien immobilier ont pu se porter acquéreurs dudit bien auprès des propriétaires, M. et Mme [R], ces derniers n’avaient pas personnellement formalisé une mise en vente de leur bien. Aussi, le point de départ de la prescription ne peut correspondre au mois de juillet 2012, date où les locataires ont retiré leur proposition d’achat. Il ressort des écritures des intimés que les appelants ont mis en vente leur bien à la fin du mois de février 2019, ce qui n’est pas discuté par ceux-ci. La prescription quinquennale court ainsi à compter de cette date et rend recevable la demande indemnitaire formée par les appelants.
Les époux [R], qui ont vendu leur bien immobilier le 15 mai 2020, ne justifient pas en quoi les procédures diligentées par les époux [C], avant la mise en vente de leur bien, les auraient pénalisés dans leur projet. L’abus de procédure imputé aux intimés n’est pas caractérisé et conduit la cour, par substitution de motifs, à confirmer le jugement entrepris sur ce chef de demande.
V- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. et Mme [R] qui succombent en leur appel devront supporter solidairement les dépens de l’instance.
M. et Mme [R] seront également déboutés de leurs demandes formées à l’encontre de M. et Mme [C], sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur ce dernier fondement, ils seront en revanche condamnés solidairement à payer à M. et Mme [C] la somme de 3 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
DEBOUTE M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] de leur demande tendant à voir déclarer recevable l’intervention volontaire de M. [W] [B] et Mme [J] [B] et qu’il soit donné acte à ceux-ci de ce qu’ils s’associent à leurs demandes,
CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance d’Angers du 13 novembre 2018 sauf en ses dispositions sur :
– le point de départ de l’astreinte provisoire ;
– la condamnation de M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] au paiement d’une somme de 5 000 euros en réparation du trouble de jouissance et du préjudice moral subi par M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C] ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
DIT que l’astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard, assortissant la condamnation de M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] à déplacer la pompe à chaleur de la piscine, débutera à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt,
DIT que l’astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard, assortissant la condamnation de M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] à remettre en état le fossé situé en limite de propriété, débutera à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt,
CONDAMNE solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] à payer à M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C] la somme de 5 000 euros en réparation de leur trouble de jouissance,
DEBOUTE M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C] de leur demande indemnitaire formée à l’encontre de M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] au titre de leur préjudice moral,
DEBOUTE M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] de leur demande subsidiaire tendant à ordonner une expertise pour déterminer l’emprise et la fonction du fossé rebouché,
DECLARE M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] irrecevables en leur demande indemnitaire formée à l’encontre de M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C],
CONDAMNE solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] à payer à M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à raison des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,
DEBOUTE M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] de leur demande formée à l’encontre de M. [E] [C] et Mme [Y] [S] épouse [C] au titre de leurs frais irrépétibles d’appel,
CONDAMNE solidairement M. [H] [R] et Mme [G] [L] épouse [R] aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER