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17 novembre 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/02645
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2023
(n°159, 15 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 22/02645 – n° Portalis 35L7-V-B7G-CFFV6
Décision déférée à la Cour : jugement du 20 janvier 2022 -Tribunal judiciaire de PARIS – 3ème chambre 1ère section – RG n°19/01997
APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE
S.A.S. BIOMEDIQA, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 6]
[Localité 3]
Immatriculée au rcs de Lille Métropole sous le numéro 479 267 569
Représentée par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477
Assistée de Me Benjamin MOUROT plaidant pour la SELAS BIGNON – LEBRAY & ASSOCIES, avocat au barreau de LILLE, case 158
INTERVENANTE VOLONTAIRE EN REPRISE D’INSTANCE et comme telle INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE
S.A.S. HIOLLE TECHNOLOGIES, venant aux droits de la société RHEA, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 4]
[Localité 2]
Immatriculée au rcs de Valenciennes sous le numéro 332 909 647
Représentée par Me Jérôme HOCQUARD de la SELARL ELOCA, avocat au barreau de PARIS, toque P 0087
Assistée de Me Stéphane MONS plaidant pour le Cabinet PWC SOCIETE D’AVOCATS, avocat au barreau de LILLE
INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE
S.A.R.L. TC MEDICAL, prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocate au barreau de PARIS, toque D 2090
Assistée de Me Jean-Christophe GUERRINI plaidant pour la SELARL PLASSERAUD AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque C 2354
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique RENARD, Présidente, en présence de Mme Agnès MARCADE, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mmes Véronique RENARD et Agnès MARCADE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Véronique RENARD, Présidente
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement contradictoire rendu le 20 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Paris.
Vu l’appel interjeté le 2 février 2022 par la société Biomediqa.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 octobre 2022 par la société Biomediqa, appelante et incidemment intimée.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 mai 2023 par la société TC Médical, intimée et appelante incidente.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 5 janvier 2023 par la société Hiolle Technologies (anciennement Rhea), intimée et appelante incidente.
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 22 juin 2023.
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
La société Biomediqa est une société spécialisée dans la physique médicale, l’assurance qualité et la radioprotection au sein des établissements de santé, tant publics que privés.
Elle est titulaire du brevet français FR 3 036 528 (« FR 528 »), dont la demande a été déposée le 19 mai 2015 et publiée le 25 novembre 2016, délivré le 18 août 2017 et ayant pour titre « Dispositif de signalisation du statut d’un appareil à émission radioélectrique en champs ouvert et notamment d’un appareil muni d’un tube à rayon X ».
L’invention couverte par ce brevet est destinée notamment à équiper des appareils de radiologie mobiles dans les hôpitaux ou cliniques, de manière à donner une information sur leur statut (hors tension, en veille ou en utilisation), dans le but de protéger les utilisateurs contre les rayonnements desdits appareils.
Ce brevet a fait l’objet d’une extension, via une demande EURO-PCT n° WO 2016 181 5112, aux territoires suivants :
‘Europe (EP 3297538), étant précisé que par courrier du 19 novembre 2018 adressé à l’Office européen des brevets la société Biomediqa a demandé le retrait de la désignation française au sein de la demande de brevet européen, l’invention n’étant donc protégée en France que par le brevet FR 528 ;
‘ Brésil (BR 112017024546) ;
‘ Canada (CA 2986299) ;
‘ États-Unis (US 2018132802) ;
‘ Japon (JP 2018521491) ;
‘ Chine (CN 107750140).
La société Biomediqa exploite ce brevet sous la forme d’un dispositif dénommé « DOSALERT ».
La SARL TC Médical est spécialisée dans la vente de matériel dans le domaine de l’imagerie médicale.
La SAS Rhea, devenue Hiolle Technologies, se présente comme un sous-traitant électronique de la société TC Médical qui offre à ses clients des prestations diverses dans le domaine électronique, de la rédaction de cahiers des charges à l’étude de prototypes et la production de petites et moyennes séries.
Au mois de mai 2016, la société TC Médical et la société Rhea, devenue Hiolle Technologies, se sont rapprochées afin d’élaborer un dispositif permettant d’informer, au niveau de chaque porte de bloc opératoire, qu’un amplificateur de rayons X est branché sur le secteur et qu’il peut être en service, et ainsi d’éviter l’exposition de personnel soignant non protégé entrant dans les salles. Après établissement d’un cahier des charges par la société Rhea, devenue Hiolle Technologies, en août 2016, le dispositif, dénommé AFF’X, a été fabriqué par cette société et commercialisé par la société TC Médical.
La société Biomediqa expose avoir fait constater par huissier de justice, le 21 septembre 2018, la présentation sur le site internet accessible à l’adresse www.rhea-electronique.fr du dispositif AFF’X reproduisant selon elle les caractéristiques du brevet FR 528.
Dument autorisée par deux ordonnances présidentielles du 6 décembre 2018, elle a fait pratiquer le 14 janvier 2019 des opérations de saisie contrefaçon dans les locaux des sociétés Rhea, devenue Hiolle Technologies, et TC Médical.
Par acte du 14 février 2019, la société Biomediqa a fait assigner les sociétés Rhea, devenue Hiolle Technologies, et TC Médical devant le tribunal de grande instance, devenu le 1er janvier 2020 le tribunal judiciaire, de Paris en contrefaçon des revendications n°1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR3036528 ainsi qu’en concurrence déloyale et parasitisme.
Par jugement du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Lyon, saisi d’une contestation du marché public remporté par la société TC Médical auprès du groupement hospitalier UNIHA, a décidé de surseoir à statuer dans l’attente de la décision du tribunal judiciaire à intervenir.
Par ordonnance du 11 juin 2020, le juge de la mise en état a notamment :
‘ enjoint à l’Association Française du Personnel Paramédical d’Electroradiologie (AFPPE) de communiquer sans délai à la société TC Médical une copie de la vidéo de la présentation du dispositif DOSALERT réalisée le samedi 21 mars 2015 lors du congrès intitulé « 56èmes journées scientifiques des manipulateurs d’électroradiologie médicale » ;
‘ rejeté la demande aux fins de levée de scellés sous lesquels ont été placés les éléments comptables et financiers saisis le 14 janviers 2019 dans les locaux des sociétés TC médical et Rhea.
C’est dans ce contexte qu’a été rendu le jugement dont appel qui a :
– déclaré la SAS Biomediqa recevable en son action en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 3 036 528,
– déclaré nulles pour défaut de nouveauté les revendications 1, 2, 3, 5 et 8 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– déclaré nulle pour défaut d’activité inventive la revendication 9 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– dit que la présente décision, une fois définitive, sera transmise à l’INPI pour être inscrite au registre national des brevets à l’initiative de la partie la plus diligente,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 3 036 528,
– dit n’y avoir lieu à ordonner la remise à la SAS Biomediqa des éléments placés sous scellés au cours des opérations de saisie contrefaçon,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en concurrence déloyale et parasitisme,
– débouté la SARL TC Médical et la SAS Rhea de leur demande reconventionnelle en procédure abusive,
– déclaré sans objet la demande en garantie de la SAS Rhea à l’encontre de la SARL TC Médical,
– condamné la SAS Biomediqa à payer à la SARL TC Médical la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SAS Biomediqa à payer à la SAS Rhea la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamné la SAS Biomediqa aux dépens dont distraction au profit de Maître Jean-Christophe Guerrini,
– ordonné l’exécution provisoire, à l’exception de la mesure de transcription sur les registres de l’INPI.
Par jugement du 24 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête de la société Biomediqa tendant à l’annulation du marché public conclu par le groupement de coopération sanitaire Uniha avec la société TC Médical en vue de la fourniture, de la livraison et de l’installation de dispositifs de report de signalisation d’émission de rayons X pour arceaux mobiles de radioscopie.
Par opération de fusion absorption à effet au 1er janvier 2023 la société Rhea a été absorbée par la société Hiolle Technologies.
La société Biomediqa a relevé appel du jugement du tribunal judiciaire de Paris et par ses dernières conclusions demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
– infirmer la décision de première instance en ce qu’elle a :
– déclaré nulles pour défaut de nouveauté les revendications 1, 2, 3, 5 et 8 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– déclaré nulle pour défaut d’activité inventive la revendication 9 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 3 036 528,
– dit n’y avoir lieu à ordonner la remise à la SAS Biomediqa des éléments placés sous scellés au cours des opérations de saisie-contrefaçon,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en concurrence déloyale et parasitisme,
– condamné la SAS Biomediqa à payer à la SARL TC médical la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SAS Biomediqa à payer à la SAS Rhea la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SAS Biomediqa aux dépens dont distraction au profit de Maître Jean-Christophe Guerrini.
Et statuant à nouveau :
– ordonner avant-dire droit la libération au profit de la société Biomediqa des documents détenus par les huissiers depuis la réalisation des opérations de saisie-contrefaçon,
– juger que les sociétés Rhea et TC Médical se rendent coupables de contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR3036528 dont est titulaire Biomediqa, en procédant à la fabrication, à la commercialisation, à la diffusion et/ou à la détention des produits intitulés « AFF’X » et tous dispositifs similaires mettant en ‘uvre les revendications du brevet FR3036528,
– faire interdiction aux sociétés Rhea et TC Médical de poursuivre la fabrication, la commercialisation, la diffusion et/ou la détention des produits intitulés « AFF’X » et de tous dispositifs mettant en ‘uvre les revendications du brevet FR3036528, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir,
– ordonner à la société TC Médical de mettre en place une mesure de rappel des produits « AFF’X » mis sur le marché auprès de l’ensemble de ses clients, à ses frais exclusifs, et à leur destruction à ses frais exclusifs, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir,
– condamner solidairement les sociétés Rhea et TC Médical à verser à la société Biomediqa la somme de 150 000 euros, par provision, à parfaire, au titre du préjudice économique subi du fait des actes de contrefaçon des revendications n° 1, 2, 3, 5, 8, et 9 du brevet FR3036528,
– condamner solidairement les sociétés Rhea et TC Médical à verser à la société Biomediqa la somme de 50 000 euros, par provision, à parfaire, au titre du préjudice moral subi du fait des actes de contrefaçon des revendications n° 1, 2, 3, 5, 8, et 9 du brevet FR3036528,
– ordonner aux sociétés Rhea et TC Médical, en application de l’article L. 615-5-2 du code de la propriété intellectuelle, la production, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard dans les huit jours de la signification du jugement à intervenir (sic), de toutes les informations nécessaires à l’évaluation des préjudices subis par la société Biomediqa, du fait des actes de contrefaçon et, notamment :
– les noms et adresse des utilisateurs, distributeurs, fournisseurs, et autres détenteurs de tous produits du type de ceux décrits dans les procès-verbaux de saisie-contrefaçon de Maîtres [B] et [U], huissiers de justice, des 14 janvier 2019, ou de produits équivalents,
– les quantités de produits contrefaisants fabriqués et vendus,
– le prix obtenu pour chaque produit contrefaisant,
– la marge brute réalisée du fait de la fabrication et la commercialisation des produits contrefaisants,
– décider que cette procédure de communication d’informations et de reddition des comptes sera conduite sous le contrôle du conseiller de la mise en état, la cour restant saisie du litige de façon à pouvoir, une fois la reddition des comptes achevée, statuer sur le montant des demandes de réparations formulées par la société Biomediqa,
– renvoyer la procédure, avant dire droit sur la détermination des dommages, à la mise en état, pour permettre le suivi et le contrôle de la procédure de communication et de reddition des comptes et pour conclusions ultérieures de la société Biomediqa sur le préjudice par elle invoqué,
– juger que les sociétés Rhea et TC Médical se rendent coupable d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme en procédant à la fabrication, à la commercialisation, à la diffusion et/ou à la détention des produits intitulés « AFF’X » et tous dispositifs similaires mettant en ‘uvre les revendications du brevet FR3036528,
– condamner solidairement les sociétés Rhea et TC Médical à verser à la société Biomediqa la somme de 100 000 euros, par provision, à parfaire, au titre du préjudice économique subi du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
– subsidiairement, désigner tel expert qu’il plaira à la cour de nommer afin d’évaluer le montant final des dommages et intérêts que les sociétés Rhea et TC Médical devront payer à la société Biomediqa en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon,
– ordonner la publication ou l’affichage aux frais solidaires des sociétés Rhea et TC Médical, par extrait ou en entier, du jugement à intervenir dans trois journaux ou revues au choix de la société Biomediqa,
– condamner solidairement les sociétés Rhea et TC Médical à verser à la société Biomediqa une somme de 50 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement les sociétés Rhea et TC Médical aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– dire que ceux d’appel seront recouvrés par la SELARL Lexavoué Paris Versailles, agissant par Maître Matthieu Boccon Gibod, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, la société TC Médical demande à la cour de :
– débouter la société Biomediqa de ses demandes
– confirmer le jugement du 20 janvier 2022 en ce qu’il a :
– annulé les revendications 1, 2, 3, 5 et 8 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa pour défaut de nouveauté, et au besoin par substitution de motifs, pour défaut d’activité inventive,
– déclaré nulle pour défaut d’activité inventive la revendication 9 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– dit que la décision, une fois définitive, sera transmise à l’INPI pour être inscrite au registre national des brevets à l’initiative de la partie la plus diligente,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 3 036 528,
– dit n’y avoir lieu à ordonner la remise à la SAS Biomediqa des éléments placés sous scellés au cours des opérations de saisie-contrefaçon,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en concurrence déloyale et parasitisme
– condamné la SAS Biomediqa à payer à la SARL TC médical la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SAS Biomediqa aux dépens dont distraction au profit de Maître Jean-Christophe Guerrini
– déclarer la société TC médical recevable en son appel incident,
Y faisant droit,
– infirmer le jugement du 20 janvier 2022 en ce qu’il a débouté la société TC médical de sa demande reconventionnelle en procédure abusive,
Et statuant à nouveau :
– condamner la société Biomediqa à payer une indemnité de 50 000 euros à la société TC Médical pour procédure abusive,
En tout état de cause,
– débouter la société Hiolle technologies de sa demande de condamnation de la société TC Médical à la garantir des condamnations qui pourraient être mises à sa charge,
– condamner la société Biomediqa au paiement d’une somme de 75 000 euros à la société TC médical au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,
– condamner la société Biomediqa aux dépens d’appel dont distraction au profit de Maître Nathalie Le Senechal, avocat conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, la société Rhea devenue la société Hiolle Technologies demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu en ce qu’il a :
– déclaré la société Biomediqa recevable en son action en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 3 036 528,
– débouté la SAS Rhea de sa demande reconventionnelle en procédure abusive,
– déclaré sans objet la demande en garantie de la SAS Rhea à l’encontre de la SARL TC médical,
– confirmer le jugement rendu en ce qu’il a :
– déclaré nulles pour défaut de nouveauté les revendications 1, 2, 3, 5 et 8 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– déclaré nulle pour défaut d’activité inventive la revendication 9 du brevet FR 3 036 528 dont est titulaire la SAS Biomediqa,
– dit que sa décision, une fois définitive, sera transmise à l’INPI pour être inscrite au registre national des brevets à l’initiative de la partie la plus diligente,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 3 036 528,
– dit n’y avoir lieu à ordonner la remise à la SAS Biomediqa des éléments placés sous scellés au cours des opérations de saisie-contrefaçon,
– débouté la SAS Biomediqa de sa demande en concurrence déloyale et parasitisme,
– condamné la SAS Biomediqa à payer à la SAS Rhea la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau :
– condamner la société Biomediqa à payer à la société Hiolle technologies la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamner la société Biomediqa à payer à la société Hiolle technologies la somme de 50 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
À titre infiniment subsidiaire ;
– condamner la société TC Médical à garantir l’intégralité des condamnations qui pourraient être mises à la charge de la société Hiolle technologies.
Sur la contrefaçon du brevet FR 528
La recevabilité à agir de la société Biomediqa en contrefaçon du brevet FR 528 n’est pas discutée par la société TC Médical. Si la société Hiolle Technologies sollicite l’infirmation du jugement entrepris qui a déclaré recevable à agir la société Biomediqa, elle ne présente pas dans le dispositif de ses dernières conclusions de fin de non-recevoir, sollicitant uniquement la condamnation de la société Biomediqa à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre à des frais irrépétibles et les dépens de l’instance.
La cour ne peut donc statuer sur une fin de non-recevoir qui n’est pas énoncée au dispositif des dernières conclusions de la société Hiolle Technologies.
Le brevet FR 528 porte sur une invention concernant un dispositif de signalisation du statut d’un appareil à émission radioélectrique en champs ouvert, et notamment d’un appareil muni d’un tube à rayon X, particulièrement destiné à venir équiper des appareils de radiologie mobiles dans les hôpitaux ou cliniques médicales, utilisation qui n’est toutefois pas limitative.
Selon l’art antérieur exposé dans la description du brevet, les salles des hôpitaux dédiées à l’utilisation d’appareils à émission radioélectriques sont équipées d’appareils à émission fixes et comprennent des moyens de protection contre les rayonnements parmi lesquels une signalétique informant de la présence possible de rayonnement ainsi que de panneaux lumineux indiquant si les appareils sont activés ou non, ces salles nécessitant des travaux d’installation spécifiques et notamment de câblage. Cette solution n’est toutefois pas adaptée à des appareils à émissions mobiles utilisés dans des salles non dédiées ce qui pose des problèmes de sécurité du personnel médical et des patients, une signalétique constante dans toutes les salles rendant les déplacements difficiles ou diminuant l’impact de l’avertissement.
L’objet de l’invention est de résoudre tout ou partie des problèmes techniques posés et de proposer un dispositif de signalisation :
‘ permettant de signaler une émission de rayonnement en présence d’un appareil à émission dans une salle sans nécessité d’aménagement particulier de la salle ;
‘ pouvant être adapté de manière rapide et fiable sur tout type d’appareil à émission à poste fixe ou mobile ;
‘ dans lequel la signalétique peut être multiple et facilement déplaçable pour être visible de tous les points d’accès à la salle ;
‘ permettant de stopper l’appareil à émission en cas de risque d’exposition, notamment dans des installations industrielles (page 2 lignes 19 à 30).
Le dispositif protégé par l’invention comprend :
– une première partie apte à être connectée au niveau du câble d’alimentation dudit appareil à émission, et comportant des moyens de mesure de la demande en courant dudit appareil à émission, des moyens de traitement permettant de déterminer le statut, hors tension, veille ou utilisation, dudit appareil à émission en fonction de la mesure du courant et des moyens de transmission du statut détecté vers une seconde partie,
– une seconde partie comportant des moyens de signalisation du statut de l’appareil à émission détecté par ladite première partie.
Le brevet comporte 10 revendications dont seules les revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 sont opposées. Elles sont ainsi libellées :
1. Dispositif de signalisation du statut d’un appareil à émission radioélectrique en extérieur, et notamment d’un appareil muni d’un tube à rayon X, caractérisé en ce qu’il comprend : ‘ une première partie (2), apte à être connectée au niveau du câble d’alimentation (9) dudit appareil à émission, et comportant des moyens de mesure (10) de la demande en courant dudit appareil à émission, des moyens de traitement (11) permettant de déterminer le statut, hors tension, veille ou utilisation, dudit appareil à émission en fonction de la mesure du courant et des moyens de transmission du statut détecté vers une seconde partie (3), ‘ une seconde partie (3) comportant des moyens de signalisation (13) du statut de l’appareil à émission détecté par ladite première partie.
2. Dispositif de signalisation selon la revendication 1 dans lequel la première (2) et la seconde (3) partie sont logées dans des boitiers indépendants (4,5), lesdits moyens de transmission (12) comportant une liaison sans fil.
3. Dispositif de signalisation selon la revendication 2 dans lequel la liaison entre les première et seconde parties (2,3) est codée pour éviter les erreurs d’appairage.
5. Dispositif selon l’une quelconque des revendications précédentes dans lequel les moyens de traitement (11) comportent au moins deux seuils dont un premier seuil bas (S1) est inférieur à la demande minimale en courant lorsque l’appareil à émission (6) est en veille et un second seuil haut (S2) est inférieur à la demande minimale en courant de l’appareil à émission (6) en utilisation.
8. Dispositif de signalisation selon l’une quelconque des revendications précédentes dans lequel les moyens de signalisation (13) sont de type sonore et/ou lumineux et/ou un afficheur de messages.
9. Dispositif de signalisation selon l’une quelconque des revendications précédentes dans lequel la première partie (2) comporte des moyens de coupure de l’alimentation de l’appareil à émission (6) couplés à des moyens de détection de présence dans la zone de champs ouvert de l’appareil à émission (6).
La validité de ces revendications est contestée par les sociétés Hiolle et TC Médical aux motifs d’insuffisance de description, de défaut de nouveauté et d’activité inventive.
La société Biomediqa critique le jugement entrepris qui a annulé les revendications 1, 2, 3, 5 et 8 pour défaut de nouveauté se fondant sur une auto divulgation de l’invention lors d’une présentation en date du 21 mars 2015, et la revendication 9 pour défaut d’activité inventive. Elle fait valoir que la présentation du 21 mars 2015 ne divulgue pas l’intégralité des revendications s’agissant d’une description succincte à vocation commerciale qui ne renseigne en rien l’homme du métier sur les moyens techniques de l’invention mais décrit un autre type de dispositif d’alerte qui est basé non sur la mesure d’une demande en courant de l’appareil à émission mais sur la mesure du rayonnement émis par l’appareil à émission. Elle ajoute que la présentation ne renseigne en rien sur les moyens de détection de l’émission du rayonnement, ni sur les modalités techniques qui permettent au dispositif DOSALERT de détecter les émissions de faible énergie et de faibles ampérages. De même s’il est fait mention de la bande de fréquence utilisée pour la communication entre les deux boitiers, la présentation ne divulgue en rien les fréquences utilisées ni même l’encodage des trames de données échangées par radiofréquence.
La société TC Médical réplique que les revendications 1, 2, 3, 5, 8 et 9 du brevet FR 528 opposées au titre de la contrefaçon par la société Biomediqa sont dépourvues de validité pour défaut de nouveauté, ou pour le moins d’activité inventive au vu l’état de la technique constitué des antériorités suivantes divulguées avant le 19 mai 2015 :
– le fichier vidéo « BERJON-21-pm-4 » montrant une présentation intitulée «DOSALERT : rôle du MEM dans la mise en place d’un système innovant de prévention des risques radiologiques pour le personnel du bloc opératoire », présentation faite par [H] [D], ingénieur doctorante, BIOMEDIQA/Institut de recherche IEMN, lors du congrès «56èmes Journées Scientifiques des Manipulateurs d’Électroradiologie à [Localité 7] », organisé par l’Association Française du Personnel Paramédical d’Électroradiologie (AFPPE) regroupant des personnels paramédicaux d’électroradiologie médicale.
– la demande de brevet FR 2 825 844 A1 publiée le 13 décembre 2002, opposable au titre de la nouveauté et de l’activité inventive.
– la demande de brevet DE 10 2005 025 541 A1 publiée le 7 décembre 2006, opposable au titre de la nouveauté et de l’activité inventive.
– la demande de brevet UK 2 192 250 A publiée le 6 janvier 1988, opposable au titre de la nouveauté et de l’activité inventive.
La société Hiolle Technologies oppose également à la société Biomediqa le défaut de nouveauté des revendications 1, 2, 3, 5, 8 en raison de la présentation du 21 mars 2015 et le défaut d’activité inventive de la revendication 9 au vu du brevet UK 2 192 250 A et de la norme de l’Autorité de sûreté nucléaire du 4 juin 2013 et partant la confirmation à ce titre du jugement déféré.
L’article L. 611-10 du code de la propriété intellectuelle prévoit que :
« 1. Sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d’application industrielle (‘) ».
Selon l’article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle,
« Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique.
L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen (‘) ».
L’article L. 611-14 de ce code précise que :
« Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. (‘)».
La définition de l’homme du métier proposée par la société Biomediqa à savoir un ingénieur en électronique n’est pas discutée par les autres parties.
Les sociétés TC Médical et Hiolle Technologies opposent tout d’abord comme destructrice de la nouveauté des revendications 1, 2, 3, 5 et 8 du brevet FR 528, une antériorité constituée par une présentation publique de Mme [D], de la société Biomediqa, intervenue le 21 mars 2015, soit deux mois avant la date du dépôt du brevet FR 528 du 19 mai 2015, lors des « 56èmes journées scientifiques des manipulateurs d’électroradiologie médicale » (pièce 4 TC Médical et pièce 15 Biomediqa).
La revendication 1 du brevet en cause porte sur un :
Dispositif de signalisation du statut d’un appareil à émission radioélectrique en extérieur, et notamment d’un appareil muni d’un tube à rayon X, caractérisé en ce qu’il comprend : – une première partie (2), apte à être connectée au niveau du câble d’alimentation (9) dudit appareil à émission, et comportant
– des moyens de mesure (10) de la demande en courant dudit appareil à émission,
– des moyens de traitement (11) permettant de déterminer le statut, hors tension, veille ou utilisation, dudit appareil à émission en fonction de la mesure du courant
et des moyens de transmission du statut détecté vers une seconde partie (3),
– une seconde partie (3) comportant des moyens de signalisation (13) du statut de l’appareil à émission détecté par ladite première partie.
A l’occasion de son intervention, Mme [D] a présenté le dispositif DOSALERT de la société Biomediqa lequel a pour objectif d’ « Alerter le personnel, présent hors de la salle d’opération, de l’utilisation d’un appareil émetteur de rayons X » (diapositive 17 de la présentation). Ce dispositif mobile est présenté par Mme [D] comme composé de deux boîtiers inter-opérationnels, un premier boîtier dans la salle d’intervention, qui détecte l’émission de rayonnement, et un second boîtier à l’extérieur de la salle, connecté et distant au premier boîtier, et qui renseigne sur le danger d’exposition par une signalisation lumineuse, ce dispositif ne nécessitant pas de travaux d’installation spécifique (diapositive 20). Les diapositives 21 à 23 illustrent la configuration et le fonctionnement du dispositif :
– lorsque, lors d’une opération chirurgicale, est utilisé un amplificateur de brillance émettant des rayons X, une lumière rouge clignotante s’allume à l’extérieur,
– lorsque, lors d’une opération chirurgicale ou après celle-ci, l’amplificateur de brillance n’est plus en fonction mais est toujours sous tension, la lumière extérieure allumée est orange clignotante,
ce, pour prévenir les personnes en dehors de la salle d’opération des dangers éventuels.
Toujours selon la présentation, ce dispositif est capable de détecter des émissions de faible énergie, donc de faibles tensions, et des faibles débits de photons, donc de faibles ampérages (diapositive 25). La communication entre les deux boîtiers DOSALERT se fait par radiofréquence, par bande ISM, utilisée pour les applications industrielles, scientifiques ou médicales, sans incidence sur les appareils médicaux environnants (diapositive 27). La diapositive suivante (28) montre que plusieurs dispositifs DOSALERT peuvent coexister en l’illustrant par trois salles d’opération mitoyennes, la première où l’amplificateur de brillance est sous tension, une lumière orange s’allumant à l’extérieur, la seconde où l’amplificateur est hors tension, une lumière verte s’allumant à l’extérieur, et la troisième où l’amplificateur est sous tension et émet des rayons X, une lumière rouge s’allumant à l’extérieur.
En conséquence, la présentation de Mme [D] qui n’est nullement succincte, divulgue un dispositif de signalisation de l’utilisation d’un appareil émettant des rayons X, comprenant un premier boîtier qui détecte l’émission de rayonnement dans la salle d’opération et un second boîtier situé à l’extérieur comportant des moyens de signalisation lumineux de l’utilisation de cet appareil selon qu’il est en fonctionnement, sous tension ou hors tension. Le moyen de détection du rayonnement au sein de la salle d’intervention par le premier boitier n’est pas directement précisé par Mme [D]. Pour autant, il apparaît du tableau objet de la diapositive 25 et des diapositives suivantes que le dispositif DOSALERT fonctionne pour tout mode d’émission, en mode pulsé ou continu, selon une tension mesurée de 50kV à 120kV ou un ampérage de 0,5mA à 10 mA, de sorte qu’est aussi divulguée la capacité du premier boîtier à mesurer la demande en courant électrique de l’appareil à émission, ce qui impose nécessairement qu’il soit connecté au niveau du câble d’alimentation.
Contrairement à ce que soutient la société Biomediqa, le dispositif DOSALERT présenté par Mme [D] n’est donc pas un dispositif basé sur la mesure du rayonnement de l’appareil à émission qui ne permettrait pas de rendre compte d’un état hors tension de cet appareil.
Le dispositif présenté par Mme [D] utilise en effet des moyens de mesure de demande en courant de l’appareil pour permettre de déterminer le statut de hors tension, veille ou utilisation de l’appareil à émission. A cet égard, la société Biomediqa ne soutient pas utilement que ce dispositif décrit utilise des photodétecteurs pour mesurer le flux électromagnétique, ce qui n’est nullement mentionné par Mme [D] dans sa présentation, ni révélé par la diapositive 21 qui montre le principe de fonctionnement du dispositif, l’absence de câble d’alimentation électrique dans ce schéma étant indifférente.
Par conséquent, c’est à juste titre que le tribunal a considéré que l’ensemble des caractéristiques de la revendication 1 ont été divulguées par la société Biomediqa lors du congrès du 21 mars 2015. Cette revendication est donc dépourvue de nouveauté et doit être considérée comme nulle.
La revendication 2, dépendante de la revendication principale 1, précise que « la première (2) et la seconde (3) partie sont logées dans des boitiers indépendants (4,5), lesdits moyens de transmission (12) comportant une liaison sans fil ».
La présentation susvisée de Mme [D] montre que les deux parties sont logées dans des boitiers séparés communiquant entre eux par une liaison sans fil.
La revendication 2 est également dépourvue de nouveauté et doit être annulée.
La revendication 3 dépend de la revendication 2 et précise que « la liaison entre les première et seconde partie (2, 3) est codée pour éviter des erreurs d’appairage ».
La présentation de Mme [D] (diapositive 28) divulgue, ainsi que l’ont pertinemment relevé les premiers juges, que la liaison entre les deux boitiers peut être codée pour éviter les interférences entre plusieurs dispositifs et donc les erreurs d’appairages.
La revendication 3 doit en conséquence être annulée pour défaut de nouveauté.
La revendication 5 dépend de l’une quelconque des revendications précédentes et précise que « les moyens de traitement (11) comportent au moins deux seuils dont un premier seuil bas (S1) est inférieur à la demande minimale en courant lorsque l’appareil à émission (6) est en veille et un second seuil haut (S2) est inférieur à la demande minimale en courant de l’appareil à émission (6) en utilisation ».
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a considéré que les diapositives 21 à 23 illustrent des configurations dans lesquelles la signalisation est différente selon que l’appareil est en fonctionnement ou simplement sous tension, ce qui implique que les moyens de traitement comportent au moins deux seuils dont un premier seuil bas est inférieur à la demande minimale en courant lorsque l’appareil à émission est en veille (c’est-à-dire sous tension) et un second seuil haut inférieur à la demande minimale en courant de l’appareil à émission en utilisation.
La revendication 5 sera également déclarée nulle faute de nouveauté.
La revendication 8 dépend de l’une quelconque des revendications précédentes et précise que « les moyens de signalisation (13) sont de type sonore et/ou lumineux et/ou un afficheur de messages ».
La présentation précitée comporte des illustrations du second boitier avec une signalisation comportant un message de type lumineux sur un écran d’affichage de sorte que les caractéristiques de la revendication 8 sont aussi divulguées et dépourvues de nouveauté.
La revendication 8 doit elle aussi être déclarée nulle.
La revendication 9 dépend de l’une quelconque des revendications précédentes et précise que « la première partie (2) comporte des moyens de coupure de l’alimentation de l’appareil à émission (6) couplés à des moyens de détection de présence dans la zone de champs ouvert de l’appareil à émission (6) ».
La demande de brevet UK 2 192 250 A a été publiée le 6 janvier 1988 et appartient donc à l’état de la technique. Elle porte, selon une traduction non discutée, sur une invention qui concerne des équipements à rayon X et plus particulièrement les systèmes d’avertissement et de protection sur ou pour de tels équipements. Selon l’invention, il est proposé un équipement à rayons X ayant une tête de tube associée à un système d’avertissement local agencé pour donner un avertissement préliminaire que la mise sous tension de la tête de tube est imminente, et comprenant en outre un interrupteur sur ou adjacent à la tête de tube pour abandonner ou inhiber la mise sous tension (pièce 7 TC Médical).
La décision n°2013 DC 0349 de l’autorité de sûreté nucléaire du 4 juin 2013 fixant les règles techniques minimales de conception auxquelles doivent répondre les installations dans lesquelles sont présents des rayonnements X produits par des appareils fonctionnant sous une haute tension inférieure ou égale à 600 kV, prévoit aux point 3.2 et 4.3 de son annexe que :
« Les appareils électriques émettant des rayonnements X, mobiles ou non, utilisés à poste fixe ou couramment dans un même local, sont installés dans un local équipé d’au moins un arrêt d’urgence. Ces arrêts d’urgence sont placés à l’intérieur du local en nombre suffisant et à des emplacements facilement repérables et accessibles depuis les postes de travail des
opérateurs. Ces dispositifs, à contact fermé au repos, sont connectés entre eux en série, et assurent la coupure de la haute tension. Si l’appareil dispose d’un arrêt d’urgence, ce dernier peut être pris en compte pour répondre à ces exigences. » et « Les appareils électriques émettant des rayonnements X, mobiles ou non, utilisés à poste fixe ou couramment dans un même local, sont installés dans un local équipé d’au moins un arrêt d’urgence. Ces arrêts d’urgence sont placés à l’intérieur du local en nombre suffisant et à des emplacements facilement repérables et accessibles depuis les postes de travail des opérateurs. Si l’appareil dispose d’un arrêt d’urgence, ce dernier répond à l’exigence du paragraphe 1.1.2.2 de la norme NF C 15-160 » (pièce 1 TC Médical).
Il ressort de ce qui précède que selon la décision de l’autorité de sûreté nucléaire susmentionnée, les locaux équipés d’appareils à rayons X doivent être équipés d’un dispositif d’arrêt d’urgence.
En conséquence, ainsi que le soutiennent les intimées suivies par le tribunal, l’homme du métier ingénieur en électronique, qui doit prévoir un arrêt d’urgence est incité par la demande de brevet UK 2 192 250 A et par le recours courant à des barrières infra-rouge en matière de sécurité, ce dernier point n’étant pas discuté par l’appelante, à incorporer un tel arrêt au premier boîtier du dispositif de signalisation, qu’il couplera à des moyens de détection de la présence d’une personne dans le champ de fonctionnement de ces appareils afin d’empêcher une mise sous tension et un danger possible pour elle.
Il est donc caractérisé que la revendication 9 est dépourvue d’activité inventive et doit être annulée.
Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a déclaré nulles les revendications 1, 2, 3, 5 et 8 du brevet FR 528 pour défaut de nouveauté et la revendication 9 pour défaut d’activité inventive.
Les demandes de la société Biomediqa fondées sur la contrefaçon du brevet FR 528 sont en conséquence rejetées, en ce compris la demande de publication judiciaire, et le jugement également confirmé de ce chef.
Sur les actes de concurrence déloyale et de parasitisme
Le principe de la liberté du commerce implique qu’un produit qui n’est pas l’objet de droits privatifs peut être librement reproduit et commercialisé à moins que la reproduction ou l’imitation du produit ait pour objet ou pour effet de créer un risque de confusion entre les produits dans l’esprit du public, comportement déloyal constitutif d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil.
Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
La demande en concurrence déloyale et parasitaire présente un fondement délictuel et il incombe en conséquence à la société Biomediqa de rapporter la preuve d’un agissement fautif des sociétés Hiolle Technologies et TC Médical commis à son préjudice par la création d’un risque de confusion et / ou la captation des investissements consentis pour développer un produit phare.
La société Biomediqa reproche aux sociétés TC Médical et Hiolle Technologies d’avoir mis sur le marché un produit reproduisant les caractéristiques de son brevet FR 528, sans bourse délier, les intimées ayant permis à la société TC Médical de répondre à des appels d’offres à des prix très inférieurs aux siens en raison des économies qu’elles ont réalisées sur les frais de recherche et de développement. Elle considère que les sociétés TC Médical et Hiolle Technologies ont ainsi tiré profit de ses travail, efforts, recherches et investissements et qu’elles ont commis une faute caractéristique de parasitisme. Elle ajoute qu’en répondant à vil prix à des appels d’offres, la société TC Médical a faussé le jeu de la concurrence entre les opérateurs économiques.
Outre que les revendications du brevet FR 528 opposées au titre de la contrefaçon ont été déclarées nulles et que la seule reproduction, à supposer démontrée, de ces caractéristiques n’établit nullement une faute constitutive de concurrence déloyale ou parasitaire, aucune pièce versée au débat par la société Biomediqa ne démontre les efforts de recherche ou investissements qu’elle a entrepris pour développer le produit DOSALERT qui a été conçu en partenariat avec l’Institut d’électronique de microélectronique et de nanotechnologie (IEMN), et dont les sociétés TC Médical et Hiolle Technologies auraient indûment tiré profit.
De même, par jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 24 mai 2022 (pièce 9 TC Médical) la requête de la société Biomediqa qui tendait à l’annulation du marché public conclu par le groupement de coopération sanitaire Uniha avec la société TC Médical en vue de la fourniture, de la livraison et de l’installation de dispositifs de report de signalisation d’émission de rayons X pour arceaux mobiles de radioscopie a été rejetée. Il ressort des points 7 et 8 de cette décision que, s’agissant du critère « évaluation sur site » pour l’attribution du marché, d’après le rapport d’analyse des offres, « L’offre Biomediqa est en quatrième position avec la note de 0 points. En effet l’évaluation est non concluante, car le dispositif est non fonctionnel en dehors de la salle d’opération et ne répond donc pas aux spécifications du cahier des charges. De plus, l’appareil présenté n’est pas identique à celui proposé dans la réponse du candidat ce qui justifie une note nulle à l’évaluation. En effet, devant l’échec de l’essai, le démonstrateur nous a indiqué que le dispositif essayé était de technologie Bluetooth (de moindre portée) alors que la candidature portait sur un dispositif de technologie RF ». Le tribunal considère alors que : « La société Biomediqa conteste la notation du critère « évaluation sur site » où elle a obtenu la note de 0/20. (…) la société Biomediqa reconnaît que le dispositif de signalisation n’a pas fonctionné à travers une paroi plombée et ne peut sérieusement soutenir, compte tenu de l’objet du marché, que le fonctionnement du dispositif à travers une paroi plombée ne ferait pas partie des exigences du marché. En outre, elle ne conteste pas l’autre motif pour lequel elle a obtenu une note nulle tenant à la différence de technologie entre le produit présenté lors du test et le produit décrit dans l’offre. Enfin, l’attribution d’une note nulle au critère « évaluation sur site » en cas de non-fonctionnement du dispositif, est une possibilité expressément prévue par le règlement de consultation, qui est conforme à l’objet du marché et n’aboutit à aucune distorsion des écarts de note entre les candidats. Par suite, la société Biomediqa n’est pas fondée à soutenir que la notation du critère « évaluation sur site » serait entachée d’une erreur de droit ni que la note attribuée serait entachée d’erreur manifeste d’appréciation ».
Aussi, il apparaît que le marché n’a pas été attribué à la société Biomediqa en raison notamment du dispositif qu’elle a proposé qui est inadapté aux critères du marché public, et non à cause d’un avantage concurrentiel indu de la société TC Médical.
La société Biomediqa échoue à démontrer une faute des sociétés TC MAdical et Hiolle Technologies. Ses demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire seront en conséquence rejetées et le jugement entrepris confirmé de ce chef.
L’ensemble des demandes de la société Biomediqa ayant été rejetées, la demande de garantie formée par la société Hiolle contre la société TC Médical est sans objet. Le jugement sera également confirmé à ce titre.
Sur les demandes au titre de la procédure abusive
La société TC Médical reproche à la société Biomediqa d’avoir obtenu l’autorisation du juge des requêtes à faire procéder à une saisie-contrefaçon en faisant une présentation inexacte de la réalité, alors qu’elle savait que le dispositif AFF’X ne reprenait pas les caractéristiques de la revendication 1 du brevet FR 528 ni aucune des revendications qui sont dans sa dépendance. Elle en déduit que l’action de la société Biomediqa n’était pas pour faire valoir son brevet mais par mesure de rétorsion en suite de la perte de l’appel d’offres de l’Uniha.
La société Hiolle soutient également que cette action avait pour finalité de lui nuire.
Pour autant, la société Biomediqa a pu légitimement se méprendre sur la portée de ses droits et une appréciation inexacte des actes de contrefaçon de son brevet ne caractérise nullement une intention de nuire ou une légèreté blâmable de la part de la société appelante ce quand bien même cette action s’inscrit dans le cadre d’une autre affaire portée devant le tribunal administratif tendant à solliciter la nullité du marché public conclu par le groupement de coopération sanitaire Uniha avec la société TC médical.
Les demandes des sociétés TC Médical et Hiolle Technologies fondées sur la procédure abusive seront également rejetées. Le jugement déféré mérite confirmation de ce chef.
Sur les autres demandes
Les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles sont également confirmées.
Partie perdante, la société Biomediqa sera condamnée aux dépens d’appel et à payer aux sociétés TC Médical et Hiolle Technologies, en application de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 15 000 euros pour chacune.
PAR CES MOTIFS
La cour, dans les limites de sa saisine,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la société Biomediqa à payer à la société TC Médical la somme de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,
Condamne la société Biomediqa à payer à la société Hiolle Technologies la somme de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,
Condamne la société Biomediqa aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente