Savoir-faire : 30 novembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 21/04597

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Savoir-faire : 30 novembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 21/04597
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30 novembre 2023
Cour d’appel de Rennes
RG n°
21/04597

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°521

N° RG 21/04597 – N° Portalis DBVL-V-B7F-R3NB

M. [M] [Z]

S.A.R.L. HERLEM CONSTRUCTION

C/

S.A.R.L. KERBEA FRANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me LE COULS BOUVET

Me CROIX

Copie délivrée le :

à :

TC Rennes

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, rapporteur,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 04 Juillet 2023

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Novembre 2023, après avoir été prorogé les 24 octobre et 23 novembre 2023, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [M] [Z]

né le 02 Février 1974 à [Localité 7]

[Adresse 6]

[Localité 3]

S.A.R.L. HERLEM CONSTRUCTION, immatriculée au RCS d’Orléans sous le numéro 520.771.551, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Charlotte BELLET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Rodolphe PERRIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

S.A.R.L. KERBEA FRANCE immatriculée au RCS d’Orléans sous le numéro 520.268.426 prise en la personne de son représentant légal Monsieur [L] [C], agissant en cette qualité au siège

[Adresse 5]

[Localité 2] / FRANCE

Représentée par Me Alexis CROIX de la SELARL A-LEX AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Eric GRASSIN de la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL, Plaidant, avocat au barreau d’ORLEANS

FAITS ET PROCEDURE :

La société Orkila Ingénierie (la société Orkila), devenue société Kerbéa France (la société Kerbéa) était titulaire de la marque Kerbéa. Elle était spécialisée dans la construction, la vente et la livraison de maisons individuelles et était à la tête d’un réseau national de franchisés spécialisé dans la construction de maisons individuelles.

Le 4 septembre 2009, un contrat de franchise a été signé entre, d’une part, une société en cours de constitution, dont M. [Z] était le gérant, et, d’autre part, la société Orkila.

Le contrat de franchise a été conclu pour une durée de 5 ans à compter de sa signature. Le contrat était précisé comme n’étant pas renouvelé par tacite reconduction mais uniquement par renvouvellement exprès et écrit.

La société Herlem Constuction (la société Herlem) a été inscrite le 9 mars 2020.

Le contrat a fait l’objet de certains avenants, notamment un avenant du 5 octobre 2009 confirmant le contrat de franchise pour une durée de 5 années à compter du 5 octobre 2009.

Le 9 avril 2018, la société Kerbéa a été absorbée par la société Lafobi, détenue par M.[C], par transmission universelle de patrimoine. La sociéte Lafobi a repris le nom de Kerbéa par décision de l’assemblée générale du 12 avril 2018.

A compter d’avril 2019, les franchisés ont proposé à M. [L] [C] de lui racheter les titres de la société Kerbéa, ce que ce dernier a refusé.

Par lettre du 20 février 2020, la société Herlem a résilié le contrat de franchise avec effet au 30 mars 2020.

Estimant que la société Kerbéa avait manqué à ses obligations, la société Herlem et M. [Z] l’ont assignée en résiliation de la franchise à effet au 30 mars 2020 et paiement de dommages-intérêts.

Par jugement du 8 juillet 2021, le tribunal de commerce de Rennes a :

– Décerné acte aux parties qu’elles ont donné compétence au tribunal de commerce de Rennes pour traiter des affaires numérotées de 2020F00207 à 2020F00215,

– Ecarté des débats les pièces de la société Herlem numérotées de A1 à A45,

– Débouté la société Herlem et M. [Z] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 58.488 euros TTC au titre des 32 ouvertures de chantiers,

– Dit que la société Herlem pourra s’acquitter de sa condamnation par 12 mensualités égales de 4.874 euros TTC conformément au contrat de franchise, la première échéance intervenant dans les 30 jours de la signification du jugement,

– Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 65.000 euros à titre de dommages et intérêts,

– Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Débouté la société Kerbéa du surplus de ses demandes,

– Condamné la société Beauséjour aux entiers dépens.

M. [Z] et la société Herlem ont interjeté appel le 21 juillet 2021.

Les dernières conclusions M. [Z] et de la société Herlem sont en date du 26 juin 2023. Les dernières conclusions de la société Kerbéa sont en date du 21 juin 2023.

Par note du 28 juin 2023, la société Kerbéa a demandé le rejet des pièces et conclusions déposées par M. [Z] et la société Herlem le 26 juin 2023.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 juin 2023.

Sur le rejet des conclusions et pièces déposées par la société M. [Z] et la société Herlem le 26 juin 2023 :

Les parties ont été avisées de la date de clôture, prévue au 15 juin 2023, le 3 mars 2023. A la demande des parties, cette clôture a été repoussée au 29 juin 2023.

M. [Z] et la société Herlem avaient conclu pour la dernière fois le 14 juin 2023.

M. [Z] et la société Herlem ont déposé le 26 juin 2023 un nouveau jeu de conclusions comportant 115 pages.

Les ajouts que comportent ces conclusions par rapport aux précédentes sont identifiés par un trait vertical dans la marge. L’ajout de la page 21, une ligne, n’appelait pas de réponse particulière.

L’ajout des pages 45 et 46, près d’une page, ne vient qu’en réponse à des conclusions de la société Kerbéa.

L’ajout de la page 89, trois lignes, n’appelait pas de réponse particulière.

Les ajouts des pages 101 à 103 portent sur une demande de compensation entre les dommages-intérêts réclamés par M. [Z] et la société Herlem et le montant des redevances réclamé par la société Kerbéa. Elle porte également sur la lecture de certaines décisions de justice qui avaient déjà été produites.

Le dispositif de ces conclusions comporte en page 110 un nouveau chef de demande. Il s’agit d’une demande de ‘Juger’ qui relève plus d’une argumentation que d’une demande en justice.

Cette demande de compensation formulée dans ses dernières écritures pourrait cependant être analysée comme une prétention. Elle n’a pas été présentée dans les premières conclusions de M. [Z] et la société Herlem comme le prévoient les dispositions de l’article 910-4 du code de procédure civile. Cette demande de compensation présentée dans ces circonstances appelait donc une réponse de la part de la société Kerbéa.

Il apparait ainsi qu’à l’exception de la demande de compensation nouvellement présentée, les dernières conclusions de M. [Z] et la société Herlem n’appelaient pas de réponse particulière. En outre, la société Kerbéa disposait de trois jours avant la date de la clôture pour répondre le cas échéant sur les quelques ajouts des conclusions.

Seule la présentation d’une prétention nouvelle, non exposée dans les premières conclusions, nécessitait une réponse que la société Kerbéa n’a pas été en mesure d’apporter dans ce délais de trois jours. Le dépôt de ces conclusions a porté atteinte au principe de la contradiction en ce qu’il a présenté une demande de compensation.

Les dernières conclusions de M. [Z] et la société Herlem à prendre en compte sont celles du 26 juin 2023, étant précisé que la demande de compensation qu’elles comportent sera déclarée irrecevable.

PRETENTIONS ET MOYENS :

M. [Z] et la société Herlem demandent à la cour de :

– Confirmer le jugement en ce qu’il a autorisé la société Herlem à payer le solde de ses redevances en 12 mensualités égales à compter de la signification du jugement et en ce qu’il a débouté la société Kerbéa « du surplus de ses demandes », dont sa demande tendant à voir la société Herlem être condamnée à lui verser des dommages-intérêts correspondant aux redevances restant à courir jusqu’au terme du contrat de franchise initialement prévu, et sa demande de paiement d’une indemnité contractuelle de 15.600 euros TTC,

– Infirmer le jugement pour le surplus et notamment en ce qu’il a :

– Ecarté des débats les pièces de la société Herlem numérotées A1 à A45,

– Débouté la société Herlem et M. [Z] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 58.488 euros TTC au titre de 32 ouvertures de chantiers,

– Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 65.000 euros à titre de dommages-intérêts,

– Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

Et, statuer à nouveau :

– Juger que les demandes indemnitaires formées par la société Kerbea au titre de la prétendue violation de la clause de non-concurrence contractuelle et de la clause de non-affiliation post-contractuelle sont irrecevables en raison de leur tardiveté et de leur nouveauté,

– Juger que la société Kerbéa a gravement manqué à ses obligations contractuelles,

– Juger que ces manquements sont à l’origine de préjudices subis personnellement tant par la société Herlem que par M. [Z] lui-même,

– Juger que les concluants n’ont pu méconnaître la clause de non-concurrence contractuelle stipulée au contrat de franchise dès lors qu’ils n’ont exploité aucune activité concurrente à celle prévue à leur contrat de franchise avant leur sortie du réseau « Maisons Kerbéa » le 30 mars 2020, ce que la société Kerbéa n’offre pas même pas de contester,

– Juger que la clause de non-affiliation post-contractuelle stipulée au contrat de franchise est sans objet dès lors que les concluants ne se sont affiliés à aucune enseigne régionale ou nationale et que la société Kerbéa est sans activité depuis que ses neuf derniers franchisés sont sortis du réseau « Maisons Kerbéa » le 30 mars 2020,

– Juger que la clause de non-affiliation post-contractuelle stipulée au contrat de franchise est dépourvue de validité, et donc nulle et de nul effet, comme n’étant pas nécessaire à la protection du savoir-faire de la société Kerbéa ,

En conséquence :

– Prononcer la résiliation du contrat de franchise conclu le 4 septembre 2009 aux torts et griefs exclusifs de la société Kerbéa , à effet du 30 mars 2020,

– Condamner la société Kerbéa à payer la somme de 156.657,50 euros à titre de dommages-intérêts à la société Herlem, outre les intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation, sauf à parfaire,

– Condamner la société Kerbéa à payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts à M. [Z], outre les intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation, sauf à parfaire,

– Débouter la société Kerbéa de l’ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions, en ce compris son appel incident,

– Juger en tout état de cause que les sommes réclamées par la société Kerbéa au titre des redevances, consignées ou non, ont vocation à se compenser de plein droit avec les dommages-intérêts qui seront mis à la charge de cette dernière au profit des Concluants par la décision à intervenir, et en toute hypothèse ordonner une telle compensation,

– Réduire subsidiairement à la somme d’un euro le montant de l’indemnité contractuelle réclamée par la société Kerbéa,

– Réduire subsidiairement à la somme d’un euro le montant de la peine convenue sous la clause de non-concurrence contractuelle et sous la clause de non-affiliation post-contractuelle stipulée dans le contrat de franchise,

– Condamner la société Kerbéa aux entiers dépens de l’instance,

– Condamner la société Kerbéa à payer la somme de 15.000 euros à la société Beauséjour au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Kerbéa demande à la cour de :

– Recevoir la société Herlem et M. [Z] en leur appel comme régulier,

– Les débouter de toutes leurs demandes, fins et prétentions,

– Confirmer le jugement en ce qu’il a :

‘ Ecarté des débats les pièces de la société Herlem numérotées A1 à A45,

‘ Condamné la société Herlem à payer à la société Kerbéa la somme de 58.488 euros TTC correspondant aux redevances échues au 30 mars 2020,

‘ Condamné la société Beauséjour à payer à la société Kerbéa la somme de 65.000 euros en réparation du trouble causé par la rupture injustifiée du contrat de franchise et du préjudice moral,

– Recevoir la société Kerbéa en son appel incident, ses demandes, fins et prétentions, et l’en déclarer bien fondée,

Et par conséquent :

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Kerbéa du surplus de ses demandes,

Et, statuant à nouveau :

– Condamner la société Herlem à verser les sommes de :

‘ 15.600 euros TTC à titre d’indemnité égale à deux fois la redevance visée à l’article 7, en réparation de la faute grave caractérisée telle que prévue à l’article 11 du contrat de franchise,

‘ 351.000 euros H.T., soit 421.200 T.T.C. correspondant aux redevances restant à courir jusqu’à la fin du contrat initialement prévu le 4 septembre 2024, résultant de la rupture abusive du fait du franchisé en date du 20 février 2020, prenant effet le 30 mars 2020,

‘10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, en première instance,

– Condamner solidairement la société Herlem et son gérant M. [Z] à verser à la société Kerbéa une indemnité de 150.000 euros à la suite de la violation de son engagement de non-concurrence tel que prévu à l’article 15 du contrat de franchise,

– Condamner la société Herlem à verser à la société Kerbéa une somme de 39.000 euros résultant de la violation de son obligation de non-affiliation post-contractuelle telle que prévue à l’article 16 du contrat de franchise,

En tout état de cause :

– Condamner la société Herlem à verser à la société Kerbéa la somme de 25.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, en cause d’appel.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION :

Les demandes de constat et de donner acte ne sont pas des demandes en justice. Elles ne seront examinées que comme moyens.

Sur le rejet des pièces A 31 à A 45 de la société Herlem et de M. [Z] :

Le tribunal a rejeté ces pièces comme ayant été produites tardivement devant lui.

S’il a pu, à juste titre, rejeter des pièces produites en violation du principe de la contradiction, ce rejet n’est plus d’actualité aujourd’hui les parties ayant eu le temps depuis de les analyser et de faire valoir leurs observations correspondantes.

Le jugement sera infirmé sur ce point pour permettre à la cour de prendre ces pièces en compte.

La demande de rejet de ces pièces sera rejetée.

Sur la rupture du contrat de franchise :

Par lettre du 20 février 2020, la société Herlem a notifié à la société Kerbéa la rupture du contrat de franchise avec effet au 30 mars 2020. Cette rupture a été confirmée par lettre du 23 mars 2020.

La cour n’a donc pas à rechercher s’il y a lieu ou non à rupture du contrat de franchise mais à rechercher si cette rupture était ou non justifiée.

La société Herlem invoque des manquements de la société Kerbéa à ses obligations de franchiseur, à savoir manquements graves et répétés aux obligations contractuelles, rupture totale et définitive du lien de confiance du fait du franchiseur et refus réitéré de rencontrer les franchisés lors d’une réunion aux fins de tenter de régler amiablement le litige.

Le contrat de franchise prévoyait les obligations du franchiseur :

4 – OBLIGATIONS DU FRANCHISEUR ET DU FRANCHISE

Le Franchiseur s’engage envers le Franchisé :

– A lui assurer la paisible jouissance de la marque ‘Maisons Kerbéa’, pendant toute la durée du présent contrat,

– A établir des notes d’information pour tout ce qui concerne l’activité du Franchisé,

– A améliorer constamment les différents types de maisons qu’il conçoit, par ailleurs, ll aura la faculté d’interrompre la commercialisation de certains modèles de maisons sans que le Franchisé puisse exiger une indemnité de ce chef,

– A préparer, rédiger et mettre à jour de façon permanente l’organisation originale de son concept visant à favoriser l’expansion de l’entreprise du Franchisé,

– A tester des matériaux de construction,

– A organiser des sessions d’information au profit du Franchisé,

– A référencer des matériaux et matériels,

– A assurer, à ses frais exclusifs, la présence à intervales réguliers, d’une équipe d’assistants au siège de l’entreprise du franchisé,

– A s’efforcer de tout faire d’une manière générale pour promouvoir la marque ‘Maisons Kerbéa’,

[…]

Le nombre décroissant de franchisés ne constitue pas une atteinte à une jouissance paisible de la marque. Ce n’est pas non plus, en soi, la preuve de ce que le franchiseur ne ferait pas tout pour promouvoir la marque.

La société Herlem fait valoir que la société Kerbéa n’aurait pas entrepris les démarches et actions utiles pour améliorer et actualiser son concept, en s’abstenant notamment de proposer de nouveaux modèles de maisons.

La société Kerbéa justifie avoir notamment proposé dans le cadre de la gamme Koncept 2019, 9 modèles de maisons représentant 58 versions de plans différents. Elle a également proposé la gamme Tendance USA 2020 avec 4 modèles. Tous ces modèles, outre d’autres gammes, ont été notamment présentés dans une annexe du 20 février 2020.

La société Kerbéa justifie ainsi avoir continué à présenter de nouveaux modèles de maisons pour s’adapter aux évolutions du marché.

La société Herlem ne justifie pas que les plans de ces modèles aient été insuffisants et que cette insuffisance ait rendu obligatoire le recours à un prestataire extérieur.

Si la société Kerbéa a indiqué dans une note qu’il était parfois impossible de ne pas modifier un plan, il n’est pas justifié que ces modifications indispensables aient été fréquentes.

En outre, seul un devis pour modification hors catalogue Kerbéa de la société Plan Habitat Permis est produit. Il n’est pas justifié que cette société ait du intervenir, ni à quelle fréquence, et pour quelles facturations.

Le fait que la société Kerbéa ait validé de telles modifications ne permet pas d’en déduire qu’elles étaient indispensables. Il est au contraire ainsi justifié que la société Kerbéa accompagnait les franchisés lors de telles modifications.

La société Herlem reproche à la société Kerbéa de ne plus envoyer que 20 notes par an alors qu’elle en envoyait 80 par an entre 2014 et 2016 et de ce que ces 20 notes ne seraient qu’un copier coller d’un texte ou d’une réglementation sans comporter les explications théorique ou pratique permettant aux franchisés de les comprendre ou d’en saisir la portée.

La société Kerbéa justifie avoir envoyé près de 20 notes par an au cours des années ayant précédé la rupture du contrat.

Au regard des quelques notes produites devant la cour, il apparait que la société Herlem ne justifie pas que ces notes n’aient pas été complètes ou aient été insuffisantes ou erronées.

Comme il sera vu infra, la société Kerbéa a en outre mis en place d’autres vecteurs d’information des franchisés.

La société Herlem reproche à la société Kerbéa de persister à indiquer sur son site internet l’existence de certaines agences de franchisés comme étant encore membres du réseau alors que cela n’était plus le cas.

La société Kerbéa reconnait qu’à la suite de la refonte de son site internet, certaines agences qui ne faisaient plus partie du réseau ont pu continuer à être présentées comme en faisant encore partie.

Il apparait qu’il s’agit plus d’erreur ou d’absence de mise à jour de données publicitaires sur un site internet. Il n’est pas justifié que la société Kerbéa ait utilisé ces données erronées volontairement ou que cette absence de mise à jour ait eu des conséquences sur la renommée de la marque.

La société Herlem ne justifie d’ailleurs pas que l’un des franchisés en ait, à l’époque, fait la remarque à la société Kerbéa.

En outre, le fait que postérieurement à la résolution du contrat de franchise la société Kerbéa ait commis de nouveaux manquements, notamment en se prévalant des agences qui avaient ainsi quitté le réseau, ne peut être retenu comme fondement de la décision de résolution qui avait déjà été prise.

La société Herlem reproche à la société Kerbéa un nombre anormalement élevé de sociétés franchisées placées en liquidation judiciaire, soit 20 depuis 2010, 6 autres ayant quitté le réseau pour exploiter une autre enseigne.

Le franchiseur ne peut pas, en soi, être tenu pour responsable de la santé financière de ses franchisés.

Il résulte au contraire de l’évolution des chiffres d’affaires des franchisés en cause en l’espèce que leur situtation restait bonne et que leur activité a continué de se développer au cours des trois premiers trimestres 2019. Si la présentation de l’évolution de ces chiffres d’affaires peut être discutée quant à son aspect partiel, il n’en demeure pas moins que les activités des franchisés se développaient.

La société Herlem fait grief à la société Kerbéa de l’avoir contrainte à prendre en charge les factures non réglées de certains prestataires comme les sociétés Metamorphoses (formation commerciale) et Vitaweb (site internet de l’enseigne).

Il apparait que les factures en question concernent la période du 1er octobre 2019 au 31 mars 2020. Ces difficultés sont survenues en novembre 2019, époque à laquelle les franchisés ne payaient plus leurs redevances en totalité.

Selon la société Herlem, les franchisés auraient été à jour de leurs redevances à fin 2019.

La société Kerbéa conteste ce point et justifie, par la production d’un tableau des franchises non payées, qu’elle était créancière de la somme de près de 35.000 euros au 10 décembre 2019. La société Herlem devait elle-même 3.200 euros. En agissant de façon concertée avec les autres franchisés, elle participait indirectement à ces absences de paiements.

Les retards de paiement concertés par les franchisés en cause ont occasionné d’importantes difficultés de trésorerie à la société Kerbéa et il ne peut lui être reproché d’avoir eu alors elle-même des difficultés à payer ses fournisseurs.

Selon la société Herlem, la société Kerbéa aurait mis fin à l’utilisation du logiciel de gestion administrative, Batman, fourni gratuitement aux franchisésjusqu’à 2015, leur imposant depuis de payer chaque mois la somme de 350 euros pour avoir accès au logiciel de remplacement, Batib.

La société Kerbéa justifie que le logiciel Batib a été mis au point par un ancien franchisé. Elle indique avoir présenté aux franchisés les avantages de ce nouveau logiciel, selon elle gestion idéale de leur projet de construction : une gestion des tarifs de leurs sous-traitants, édition automatique des marchés de travaux et des pièces administratives etc.

Elle indique qu’elle assure les frais d’installation et de mise en place mais que les franchisés ont ensuite le choix de souscrire ou non à la solution.

La société Herlem ne justifie pas avoir été forcée par la société Kerbéa de souscrire cette solution de logiciel ni qu’elle ait été moins performante que la précédente qui était gratuite.

La société Herlem fait valoir que le franchiseur n’aurait pas mis en place une équipe suffisante et compétente pour répondre à ses obligations et engagements vis à vis des franchisés et une absence de formations proposées.

Elle produit en ce sens une lettre d’un ancien directeur technique de la société Kerbéa en date du 2 février 2018 faisant état de ses difficultés à développer et entretenir le réseau et la réponse que lui a faite le franchisé [Y] faisant état de sa crainte sur le devenir et la santé du réseau. Elle se prévaut également d’une attestation de M. [E], ancien directeur du réseau Kerbéa, en date du 26 février 2020. M. [E] fait état d’un dépouillement du potentiel humain de l’entreprise et des conséquences qui avaient du en résulter pour les franchisés. Il ne date cependant pas les faits qu’il relate et il n’est pas possible d’en apprécier la véracité et la portée sur les relations contractuelles.

La société Kerbéa justifie cependant qu’au 31 décembre 2018 elle employait six salariés, dont un directeur technique d’expérience engagé en juin 2018 et qui a animé des formations dispensées aux franchisés dans le courant de l’année 2019.

Elle justifie également de près de 30 formations proposées aux franchisés au cours de l’année 2019 pour lesquelles la société Métamorphose a établi des factures à la société Kerbéa. Neuf de ces formations étaient commerciales.

Les échanges de courriels entre les franchisés MM. [B] et [P] d’une part et M. [L] [C], d’autre part, des 24 et 26 mai 2016 témoignent des inquiétudes des premiers à cette époque. Ils ne peuvent cependant pas être utilement retenus comme fondement d’une décision de résolution des contrats de franchises intervenue près de quatre années plus tard. Il en est de même des messages de cette époque faisant état des difficultés du réseau.

Dans un courriel du 12 janvier 2017, M. [P] indiquait à M. [L] [C] qu’il avait rencontré de nombreux problèmes, manque d’accompagnement du franchiseur, transmission d’informations générales et abstraites totalement inadaptées aux territoires des différentes agences, simple copie des débours de la Bretagne pour les appliquer en Picardie ce qui avait entraîné des offres de prix inadaptées à cette dernière région, les pondérations de matériaux et prix marchés étant spécifiques à chaque région.

M. [P] a cependant renouvelé le contrat de franchise en 2014 et a cédé son entreprise en 2017. Par courriel du 17 février 2017 il manifestait sa satisfaction des services apportés par la société Kerbéa.

Son attestation du 12 avril 2022 s’en trouve peu pertinente.

La société Kerbéa justifie avoir proposé 27 formations entre août 2018 et septembre 2019. Entre 2014 et 2018 la société Kerbéa justifie avoir proposé 574 journées de formations sur 221 sessions.

La société Herlem fait valoir que les franchisés auraient décidé en 2019 de faire appel à un prestataire extérieur, la société Acorthex, afin d’obtenir l’assistance technique dont ils avaient besoin alors que les outils de gestion et de communication internes ne seraient plus mis à jour.

La société Kerbéa justifie avoir passé un contrat cadre avec la société Acorthex le 7 février 2019 pour que la seconde assiste un franchisé accompagné par son franchiseur, création de formations, rédaction de rapports. La société Kerbéa a signé un autre contrat le 15 février 2019 permettant aux franchisés de poser des questions afin de maîtriser les risques induits par l’évolution de la réglementation et l’accompagnement technique. Les réponses apportées étaient facturées à la société Kerbéa.

A travers ces contrats, la société Kerbéa a assuré une assistance et une aide technique à ses franchisés, même si elle a en quelque sorte externalisé cette mission. Elle justifie avoir satisfait à ses obligations sur ce point.

La société Arcothex a attesté le 26 février 2020 ne pas avoir adressé de facture aux franchisés, à l’exception d’une mission d’expertise que l’un d’eux lui avait confié. Elle a également indiqué que ce n’est qu’à la suite de l’absence de paiement des factures fin 2019 qu’elle avait suspendu ses prestations.

La société Herlem fait valoir qu’en janvier 2020 la boîte mail du franchisé aurait été coupée et les messages qui y avaient été envoyés perdus.

Il apparait que le 15 janvier 2020, la société Kerbéa a averti ses franchisés qu’il semblait y avoir un problème avec les adresses mail @KerbéaXX.fr. Elle leur a indiqué que le problème se situait chez le fournisseur et qu’elle avait lancé une demande d’assistance. Le 17 janvier 2020, la société Kerbéa a averti ses franchisés que le problème était réglé.

Il n’est pas justifié que le problème technique ait été imputable directement à la société Kerbéa et elle justifie être intervenue rapidement pour permettre la fin du dysfonctionnement. Aucun manquement ne peut utilement lui être imputé.

La société Herlem fait valoir que son contrat aurait été transmis à un nouveau franchiseur par effet d’une opération de fusion avec transmission universelle du patrimoine, sans son accord. Elle en déduit que le contrat passé avec le franchiseur s’en serait trouvé rompu.

Il apparait qu’en principe, le contrat de franchise, conclu en considération de la personne du franchiseur, ne peut être transmis par fusion-absorption à une société tierce, qu’avec l’accord du franchisé.

Ce consentement peut être tacite et résulter de la continuation des relations commerciales avec le successeur.

Les parties peuvent cependant conventionnellement opter pour sa transmissibilité en cas d’opération de restructuration concernant celui-ci. Une telle clause de transmissibilité ne fait que recueillir par anticipation l’accord du franchisé à ce que le franchieur fasse l’objet d’une opération de restructuration du type fusion, apport partiel d’actif ou scission.

Le contrat de franchise signé par la société Herlem ne prévoyait pas la liberté pour le franchiseur de modifier sa structure financière.

Le contrat de franchise prévoyait la liberté pour le franchiseur de modifier sa structure financière :

21 ‘ SUBSTITUTION DU FRANCHISEUR

Le Franchiseur conserve à tout moment sa liberté d’organiser comme il l’entend ses structures juridiques et financières. En cas de modification dans la structure juridique de la société Franchiseur, la nouvelle entitité se substituera à l’ancienne pour tous les droits et obligations stipulés aux présentes. Les changements intervenus seront opposables de plein droit au Franchisé.

Il est à noter, au contraire, que les clauses contractuelles restreignaient la liberté du franchisé en matière de restructuration. Cette différence voulue par les parties entre l’intuitu personae attaché à la personnalité du franchiseur et celui attaché à la personnalité du franchisé caractérise, si besoin était, leur volonté de laisser une grande liberté de restructuration au premier mais pas au second.

Il en résulte que le fait que la société franchiseur ait été restructurée à travers une opération de fusion avec transmission universelle du patrimoine ne constitue pas un manquement aux obligations de sa part.

En tout état de cause, M. [E], ancien directeur de la société Kerbéa, mentionne dans son attestation du 26 février 2020 que cette cession serait intervenue au profit de personnes n’ayant aucun rapport ni compétence en matière de franchise ou de maisons individuelles. Il ajoute que les franchisés ont du en partir et ont du rencontrer des difficultés économiques.

Outre le fait que cette attestation ne date pas les faits qu’elle relate, elle n’est que prospective et montre, par les termes choisis, que son auteur n’a aucune certitude quant aux conséquences du changement capitalistique sur les franchisés.

Dans la lettre des franchisés du 3 décembre 2019, dont se prévaut la société Herlem, les franchisés faisaient valoir que la transmission universelle était de nature à entraîner l’extinction des contrats de franchise. Ils ne sont donc pas prévalu de la fin des contrats du fait de l’opération financière mais d’une possibilité de rupture. Or, à défaut d’accord du franchisé, une telle opération non autorisée entraîne la fin du contrat à la date de l’opération en question.

Il apparait que postérieurement à l’opération financière litigieuse, la société Herlem à poursuivi ses relations commerciales avec la société Kerbea, même après avoir eu connaissance de cette opération.

Même la lettre de résiliation du 20 février 2020 mentionne une rupture avec effet au 30 mars 2020, ce qui montre que la société Herlem s’estimait tenue par le contrat jusqu’à cette dernière date.

La société Herlem a ainsi en tout état de cause tacitement accepté de poursuivre le contrat sans en demander la fin à la date de l’opération financière qu’elle dénonce.

La société Herlem fait valoir qu’elle aurait perdu confiance dans la société Kerbéa cette dernière se trouvant en cessation des paiements.

La société Herlem ne précise pas en quoi la société Kerbéa aurait été dans l’incapacité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

La société Kerbéa produit un tableau faisant apparaitre que le 10 décembre 2019 elle restait créancière de près de 35.000 euros au titre des redevances de franchises dues mais impayées par les franchisés, la société Herlem faisant partie des franchisés en retard de paiement.

La société Herlem ne peut utilement reprocher à la société Kerbéa des difficultés de trésorerie alors qu’elle-même, dans le cadre d’une action concertée avec les autres franchisés, participait indirectement à cette situation.

Par ailleurs, le fait que la société [C] Patrimoine ait rencontré des difficultés financières ne permet pas d’établir que cette situation ait mis en danger la société Kerbéa elle-même.

La société Herlem fait valoir que les poursuites pénales engagées contre les dirigeants de la société Kerbéa France aurait porté atteinte à la réputation de la marque.

Il apparait que [D] [C] et son fils, M. [L] [C], ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour escroquerie et abus de confiance. M. [L] [C] a comparu le 12 décembre 2019 devant le tribunal correctionnel, [D] [C] étant absent pour raisons médicales.

Ces poursuites ont été relatées dans la presse et ont connu une publicité certaine.

L’affaire a été examinée par le tribunal correctionnel à son audience du 12 décembre 2019, puis renvoyée à plusieurs reprises. Les débats ont été rouverts en avril 2020 à la suite du décès de [D] [C], le délibéré étant prorogé au 20 mai 2020. A la suite de décès de [D] [C] en cours de délibéré, il a été renvoyé des fins de la poursuite.

Aucune condamnation n’est intervenue antérieurement à la rupture du contrat de franchise.

Ainsi, la condamnation de M. [L] [C] par la cour d’appel d’Orléans le 12 avril 2023 a fait l’objet d’un article dans le journal La République du Centre. Cet article précise que M. [L] [C] était poursuivi pour les agissements commis alors qu’il était gérant des sociétés Demeure terre et tradition et Habitat loisir construction qui appartenaient à la société holding [C] construction dirigée à l’époque par [D] [C]. L’article relate que M. [L] [C] a été relaxé du chef d’escroquerie et condamné à une amende de 18.000 euros pour abus de confiance ainsi qu’à indemniser les victimes.

Aucune référence à la marque Kerbéa n’est mentionnée dans cet article de presse, en tout état de cause postérieur à la date de rupture du contrat.

Dans certains articles du journal La Voix du Nord de fin 2018 et début 2019, il est fait référence aux manquements d’un franchisé à [Localité 8]. La société Kerbéa y est mise en cause comme étant un franchiseur qui ne viendrait pas en garantie des manquements de ses franchisés, ajoutant que cinq sociétés détenues par la famille aux manettes de Kerbéa avaient été mises en liquidation judiciaire et que par ailleurs, dans le cadre d’un dossier relatif à l’US [Localité 9] Football, mais en lien avec leurs entreprises, [D] [C], son ancien président, et son fils, [L], avaient été condamnés pour abus de biens sociaux et faux en écriture et qu’ils avaient fait appel.

L’article du 12 février 2019 mettaient toutefois en avant le comportement préjudiciable d’un franchisé. La référence qu’il faisait à la situation personnelle de [D] et [L] [C], partiellement exacte, n’était pas associée directement à un comportement répréhensible au titre de leur gestion de la société Kerbéa.

Il résulte notamment d’un courriel du ‘Comité France Kerbéa A [L] [C]’ en date du 1er juin 2016 que certains franchisés se sont plaints à l’époque de l’atteinte à la réputation de l’enseigne Kerbéa résultant des agissements reprochés aux consorts [C].

Les reproches de franchisés ainsi rapportés datent pour l’essentiel de 2016 ou début 2017.

Par courriel du 25 mars 2019, un client a ainsi indiqué qu’il renonçait à recourir aux services d’un franchisé Kerbéa pour ne pas prendre de risque d’ordre financier.

La société Herlem produit des copies de messages facebook d’avis sur Kerbéa. Il n’est cependant pas établi que ces messages comportent des critiques directes du franchiseur lui même, même si les titres des critiques indiquent qu’il ne faut pas recommander Kerbéa France. Ce sont la réalisation des travaux et leur suivi qui font l’objet des critiques des auteurs des messages. Ces messages prennent le plus souvent soin de préciser qu’il visent une agence Kerbéa qu’ils désignent avec précision. A plusieurs reprises, la société Kerbéa France invite les rédacteurs des critiques à la contacter directement ou indique qu’elle va elle-même contacter l’agence incriminée afin de rechercher une solution.

Il apparait ainsi que la publicité négative faite à la marque Kerbéa n’était qu’indirecte et qu’elle était peu, voire pas, diffusée dans le public.

En outre, les franchisés ont réagi pour l’essentiel en 2016 mais sans en tirer de conséquences quant à la poursuite des contrats de franchise.

Le 9 mai 2017 la société Kerbéa a diffusé à ses franchisés une note sur les réseaux sociaux et sur l’attitude à adopter pour éviter les mécontentements des clients, y répondre le cas échéant et améliorer les avis émis par les clients sur les réseaux sociaux. Il apparait qu’elle n’a pas laissé les franchisés seuls face à ces difficultés de communication.

Courant 2019 et début 2020 les franchisés, dont la société Herlem, ont proposé de racheter la société Kerbéa ou du moins la marque Kerbéa. Ils font le reproche à M. [L] [C] d’avoir refusé de les leur vendre à des conditions selon eux raisonnables.

Il parait difficile dans ces conditions de retenir que la société et la marque en question aient été dévalorisées à leurs yeux au point de justifier une résolution du contrat de franchise.

Il apparait ainsi qu’aucune atteinte à la réputation de la marque Kerbéa pouvant fonder une rupture du contrat de franchise à la date à laquelle il est intervenu n’est caractérisée.

La société Herlem fait valoir que la société Kerbéa n’aurait plus été en mesure de lui offrir de garanties et qu’elle aurait du obtenir des lignes d’encours par ses propres moyens.

Il apparait que la société Kerbéa n’était pas, et n’avait pas été, caution de la société Herlem. Aucun manquement contractuel ne peut lui être utilement reproché sur ce point.

La société Herlem fait valoir que la société Kerbéa facturerait une commission de 3,5% pour obtenir l’assurance nécessaire à son activité alors que sans l’intervention de la société Kerbéa elle pourrait obtenir un taux de 2,2%.

La société Kerbéa reconnait que les franchisés les plus expérimentés peuvent obtenir un taux de 2,2% mais que les nouveaux franchisés ne peuvent parfois pas obtenir mieux que 2,80%. Elle indique avoir fixé un taux de 3,5% pour tenir compte de ses propres frais, de caution, administratifs, juridiques.

La société Kerbéa était libre de négocier avec chaque franchisé des conditions de rémunération spécifiques. Il n’est pas justifié qu’elle ait abusé de cette possibilité ni demandé une commission excessive.

La société Herlem fait valoir que la société Kerbéa aurait violé le principe de transparence dans l’utilisation des redevances de communication. Ainsi, la redevance de communication de publicité nationale aurait été supprimée ce qui aurait entraîné l’arrêt des actions menées dans ce cadre.

La société Kerbéa justifie avoir confié à la société Vitaweb la reprise de la gestion du site internet www.maisons-Kerbéa.fr. Cette prestation lui a été facturée le 31 mai 2018.

Par lettre collective du 20 février 2020, la société Herlem a reconnu qu’elle avait eu connaissance d’une baisse du taux de la redevance de publicité de 2% à 1%. En outre, la société Herlem a signé un avenant au contrat de franchise le 3 novembre 2016 prévoyant une diminution de la redevance pour la publicité nationale.

Il apparait ainsi que la redevance de publicité nationale n’a pas été supprimée, mais diminuée, et que la société Herlem en avait connaissance.

Il n’est pas établi que la société Kerbea ait violé un principe de transparence dans l’utilisation de cette redevance.

La société Kerbéa justifie avoir refondu son site internet entre mai 2018 et février 2019. Il s’agit d’un outil de communication et de notorité de la marque particulièrement important.

La société Kerbéa justifie également avoir passé, au profit de ses franchisés, des contrats cadre avec des fournisseurs pour référencer des produits. Même si ces contrats ne permettent pas une fourniture de tous les produits, les franchisés ont pu en bénéficier notamment dans des secteurs spécifiques des armatures béton, plancher poutrelles bétons plancher chauffant, isolation nouvelle génération. Il n’est pas justifié que ces contrats aient porté sur des produits non compétitifs ou inadaptés.

La société Herlem fait valoir que ce serait le courtier Gritchen qui serait intervenu au lieu de celui qu’elle avait choisi, la société Ker Courtage.

La société Kerbéa admet qu’elle ne disposait pas des mandats de gestion de la part des franchisés. Elle fait cependant valoir que ce seul grief ne saurait justifier à lui seul la résiliation du contrat de franchise.

La société Herlem fait valoir que les franchisés seraient traités de façon inégale, certains ne payant pas le même taux de redevance de franchise et de communication.

Il apparait que le franchiseur n’est pas tenu de pratiquer les mêmes taux de franchises avec chacun de ses franchisés. Chaque franchisé est libre d’accepter ou non les conditions fixées par son contrat de franchise et la société Herlem a signé un contrat prévoyant des taux de franchise, modifiés par avenants ultérieurs, qui ont été respectés par la société Kerbéa.

La société Herlem fait valoir que le gérant de la société Kerbéa, M. [L] [C], aurait refusé de rencontrer les franchisés pour régler amiablement le litige qui les opposait.

Il apparait que les franchisés ont proposé à la société Kerbéa de racheter la marque Maisons Kerbéa. Des négociations ont eu lieu mais n’ont pas pu aboutir.

Il n’est pas établi que la société Kerbéa ait abusé de son droit de ne pas céder la marque ni qu’il ai rompu de façon abusive les pourparlers engagés. Les discussions sur l’éventuelle vente de la société Kerbéa n’ont pas abouti à un accord précis auquel M. [C] aurait brutalement renoncé. Les quelques échanges informels par SMS ne permettent pas d’établir l’existence d’un engagement précis de M. [C] à une cession.

La société Herlem ne justifie pas avoir indiqué avec précision à la société Kerbéa, avant décembre 2019, quels étaient les points de litige nécessitant un réglement amiable du litige.

Au vu de la rupture du contrat du 20 février 2020, il ne peut être retenu que c’est à la suite d’un litige ayant perduré malgré des demandes de réglement amiable que cette rupture est intervenue.

En tout état de cause, même s’il est préférable que des co-contractants essayent de s’entendre pour régler leurs désaccords éventuels, l’absence de recherche d’un accord n’est pas en soi fautive. La société Beauséjour ne justifie pas non plus que la société Kerbéa ait abusivement rompu des négociations tendant à la recherche d’un réglement amiable du litige.

Il est justifié que le nombre de maisons commercialisées par les franchisés du 1er janvier 2019 au 30 octobre 2019 a été en augmentation de près de 30% par rapport à la même période de l’année 2018.

Sans méconnaître le rôle des franchisés dans cette amélioration, il en ressort que la transmission du savoir par la société Kerbéa était encore efficace et pertinente à cette époque.

Il apparait ainsi que la société Herlem ne justifie pas que les manquements de la société Kerbéa qui ont été retenus comme tels supra, même pris dans leur ensemble, justifiaient une rupture du contrat de franchise par la première.

Il en résulte également que la société Herlem et M. [Z] justifient pas des fautes qu’ils alléguent et leurs demandes de paiement de dommages-intérêts seront rejetées.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les redevances restant dues :

Devant le juge des référés, la société Herlem a reconnu devoir certaines sommes au titre des échéances impayées, sous réserve de la prise en compte d’annulations de chantiers, tout en contestant le bien fondé des demandes de la société Kerbea.

Par ordonnance du 12 novembre 2020, le juge des référés du tribunal de commerce de Rennes a condamné la société Herlem à payer la somme de 52.248 euros au titre des avantages et services et celle de 6.240 euros au titre de la publicité nationale. Elle a accordé à la société Herlem des délais de paiement et ordonné la consignation des sommes versées auprès du bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris.

La société Herlem demande la confirmation du jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer la somme de 58.488 euros au titre des redevance impayées avec délais de paiement.

Sur la rupture du contrat de franchise sans motif légitime :

Le contrat de franchise prévoit une indemnisation du franchiseur en cas de rupture du contrat par le franchisé :

16 – FIN OU RUPTURE DU CONTRAT’ NON AFFILIATION

Le contrat prend fin en outre par survenance du terme défini à l’article 3.

Toutefois, en cas d’infraction grave et flagrante du Franchisé compromettant l’image de marque des ‘Maisons Kerbéa’, le franchiseur pourra suspendre immédiatement l’exécution du présent contrat et mettre fin immédiatement à l’exclusivité territoriale dont bénéficie le franchisé.

En plus des dommages et intérêts que le franchiseur sera en droit de réclamer, le franchisé restera tenu de payer les redevances que le franchiseur aurait été en droit de percevoir jusqu’à l’expiration du présent contrat ou de ses avenants.

A l’expiration du présent contrat, quelle qu’en soit la cause (rupture, non renouvellement, etc….) et pendant une durée de (1) un an, le Franchisé, s’interdit – directement ou indirectement – de s’affilier directement ou indirectement à un réseau de dimension régionale ou nationale de vente de construction de maisons assimilables, c’est à dire de même surface habitable et de même architecture, aux ‘Maisons Kerbea’ ou à un réseau de distribution ayant une activité trés proche ou similaire, c’est à dire à un autre constructeur de maisons ou à un maitre d’oeuvre du batiment, et ce dans un rayon de 80 kilomètres du ou des secteurs de commercialisation de la marque Kerbéa.

Au cas de non-respect de cette obligation, le Franchisé devra verser, par mois calendaire d’infraction,tout mois commencé étant dû en entier, la redevance minimum prévue à l’article 7.

La société Kerbéa fait valoir que la résiliation du contrat de franchise par la société Herlem s’est inscrite dans le cadre d’un mouvement concerté des franchisés qui a conduit à la résiliation de plusieurs contrats de franchise au même moment, aggravant pour elle les conséquences de ces ruptures.

Il apparait en effet que la rupture du contrat de franchise par la société Herlem est concomitante de celle prononcée par d’autres franchisés. Les huit franchisés en cause, exploitant neuf sociétés, ont agi de concert pour formuler différents reproches à la société Kerbéa. Ils ont ainsi co-signé une lettre du 3 décembre 2019 exposant la plupart des griefs invoqués devant la cour par la société Herlem et analysés supra.

La résiliation anticipée du contrat de franchise par la société Herlem de façon non justifiée a ainsi occasionné à la société Kerbéa un préjudice d’autant plus

important qu’il s’est inscrit dans une action aboutissant à la résiliation simultanée des contrats la liant à huit franchisés.

La société Herlem a rompu le contrat près de 4 ans et 5 mois avant la date prévue.

Il est justifié que la société Kerbéa a poursuivi son activité sous une forme différente.

Elle a cédé la marque Maisons Kerbéa le 20 mai 2020 à la société MI Ingenierie. Cette dernière a par la suite signé des contrats de concession commerciale.

Il n’en demeure pas moins que la rupture abusive par la société Herlem a occasionné à la société Kerbéa un préjudice constitué par la perte d’une chance de percevoir des redevances pendant la durée restant à courir du contrat et la nécessité de réorienter son activité et former un nouveau réseau.

Au vu de l’ensemble de ces éléments et du montant des redevances annuelles que la société Herlem avait payé au titre des années d’exercice de la franchise, il y a lieu d’infirmer le jugement et de fixer à la somme de 50.000 euros la condamnation au titre de l’indemnisation de ce préjudice. Le jugement sera confirmé pour ce qui concerne ce chef de préjudice.

Le départ simultané et brutal des franchisés de la société Kerbéa a porté atteinte à sa réputation en tant que franchiseur auprès des entreprises susceptibles d’adhérer à ce réseau et auprès des clients et fournisseurs.

Cette atteinte à la réputation a occasionné à la société Kerbéa un préjudice moral qu’il convient de fixer à la somme de 1.000 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné la société Herlem à payer une somme globale de 65.000 euros.

Sur l’obligation de non concurrence et l’obligation de non affiliation :

La société Kerbéa demande la condamnation de la société Herlem et son gérant M. [Z] à lui payer certaines sommes au titre de la violation de l’engagement de non-concurrence et de celle de non-affiliation post-contractuelle telles que prévues au contrat de franchise.

Il apparait que ces prétentions n’ont pas été présentées par la société Kerbéa dans ses premières conclusions. Elles sont donc irrecevables au vu des dispositions de l’article 910-4 du code de procédure civile.

Sur la modification des plans :

La société Kerbéa fait valoir que la société Herlem aurait modifié les plans des maisons sans son autorisation, en violation des dispositions des articles 7 et 11 du contrat de franchise. Elle demande en conséquence la condamnation de la société Herlem à lui payer la somme prévue à l’article 7 du contrat. Cette demande est motivée en page 70 de ses conclusions devant la cour.

Il résulte de l’article 11 du contrat de franchise que constitue une faute grave le fait pour le franchisé de modifier les plans des maisons Kerbéa et que chaque infraction met à la charge du franchisé le paiement d’une indemnité égale à deux fois la redevance telle que définie à l’article 7. Il résulte de l’article 7 que la redevance minimum est de 3.250 euros HT.

La société Kerbéa se prévaut de la modification de quatre plans en proposant un plan sur mesure ne ressemblant à aucun plan, un plan comportant la création d’une avancée sur toute la longueur de la façade, un plan comportant un porche sur l’entrée de la maison et un plan de création d’une avancée de garage en toit plat.

Ces modifications de plan étaient contractuellement interdites et constituaient, au sens de dispostions contractuelles, des fautes graves. Ces fautes ont été commises au cours de l’exécution du contrat de franchise.

Au vu de l’importance tout relative de ces modifications et de leurs conséquences, il y a lieu de réduire la clause pénale prévue au contrat à la somme de 400 euros TTC. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de rejeter les demandes formées en appel au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner chacune des parties à supporter les dépens d’appel par elle engagés.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant dans les limites de sa saisine :

– Rejette la demande de la société Kerbéa tendant au rejet des conclusions déposées par M. [Z] et la société Herlem Construction le 26 juin 2023,

– Déclare cependant irrecevable la demande formée par M. [Z] et la société Herlem Construction tendant à faire juger que les sommes réclamées par la société Kerbéa au titre des redevances, consignées ou non, ont vocation à se compenser de plein droit avec les dommages-intérêts qui seront mis à la charge de cette dernière au profit des Concluants par la décision à intervenir, et en toute hypothèse ordonner une telle compensation,

– Infirme le jugement en ce qu’il a :

– Ecarté des débats les pièces de la société Herlem Construction numérotées de Al à A45,

– Débouté la société Herlem Construction et M. [Z] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– Condamné la société Beauséjour à payer à la société Kerbéa la somme de 65.000 euros à titre de dommages et intérêts,

– Débouté la société Kerbéa du surplus de ses demandes,

– Confirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

– Condamne la société Herlem Construction à payer à la société Kerbéa France la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de franchise,

– Condamne la société Herlem Construction à payer à la société Kerbéa France la somme de 1.000 euros au à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

– Condamne la société Herlem Construction à payer à la société Kerbéa France la somme de 400 euros TTC à titre d’indemnité contractuelle pour modification de plans de maisons,

– Rejette les autres demandes des parties,

– Dit que chacune des parties supportera les dépens d’appel par elle engagés.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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