Obligation d’exploitation du phonogramme
Il est acquis que l’acquéreur d’une licence phonographique est soumis à une obligation d’exploitation commerciale de l’œuvre sous peine de résiliation judiciaire du contrat. En l’espèce, le cessionnaire, pour s’opposer à la résiliation judiciaire de son contrat de licence, faisait valoir que jamais les ventes de l’album n’ont cessé et que le tassement des ventes constaté cinq plus tard était inéluctable alors qu’il n’est pas d’usage de susciter par la publicité un public qui ne marque plus d’intérêt et ne formule plus de demande.
Chute brutale des ventes
Ce à quoi les juges ont répondu que s’il peut être admis que le succès de l’oeuvre décline progressivement avec le temps, force est de relever en l’espèce que le volume des ventes était en 2006 de 635 exemplaires en France et de 8 exemplaires à l’exportation, en 2007 de 246 exemplaires en France et de 7 exemplaires à l’exportation, et qu’une chute brutale et drastique a été ainsi accusée en 2008, année de la reprise du catalogue de la société par le cessionnaire.
Par ailleurs, le site marchand www.alapage.com faisait figurer l’album avec l’indication ‘épuisé’ et le site www.virginmega.fr ne le présentait pas à la vente et l’application Itunes permettant l’écoute, le stockage de fichiers audio et l’acquisition de ces fichiers en ligne, offrait un résultat infructueux à la recherche de l’enregistrement en cause. Enfin, Amazon.fr présentait l’album comme indisponible « Nous ne savons pas quand cet article sera de nouveau approvisionné ni s’il le sera ».
Il s’infère de ces éléments que le cessionnaire n’a pas assuré l’offre en vente de l’album dans des conditions satisfaisantes et qu’elle ne saurait en conséquence arguer d’une désaffection du public pour expliquer le volume dérisoire des ventes. Le cessionnaire reconnaissait lui-même n’avoir entrepris en faveur de l’artiste ou de son oeuvre la moindre action promotionnelle ou publicitaire.
Or, le contrat de licence phonographique prévoyait expressément à l’article 10 sous le titre « Promotion et Publicité’ que Le Producteur autorise la Société à faire toute publicité qu’elle jugera utile, sous quelque forme que ce soit (…) Le budget promotionnel et marketing sera d’un montant supérieur ou égal à 10.000 euros hors taxes . La Société s’engage à assurer une promotion de bonne qualité. »
S’il est certes d’usage que les investissements promotionnels les plus importants soient consentis à l’occasion du lancement du produit sur le marché, l’absence totale de tout effort promotionnel passé les trois premières années d’exécution d’un contrat de licence prévu pour durer 8 années ne saurait être acceptable.
Le défaut d’exploitation de l’oeuvre est ainsi caractérisé à la charge de la licenciée qui n’a pas rendu l’album accessible au public et qui n’a pas cherché à soutenir, ni de plus fort, à relancer les ventes par la publicité. Le défaut d’exploitation constitue un manquement à l’engagement essentiel contracté par la licenciée de distribuer et de commercialiser l’album. Ce manquement est d’autant plus grave que la licenciée s’était vue octroyer la licence à titre exclusif et que cette licence portait sur le premier album de l’artiste dont les chances de succès ont été ainsi compromises. Les juges ont donc prononcé la résiliation du contrat de licence.
Mots clés : Licence de phonogramme
Thème : Licence de phonogramme
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour d’appel de Paris | Date : 7 mai 2014 | Pays : France