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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 8
ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2023
(n° / 2023, 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/06246 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDNL6
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2021 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2019030107
APPELANT ET INTIMÉ INCIDENT
Monsieur [G] [K]
Né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 4]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148,
Assisté de Me Ariella KHIAT COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque E240,
INTIMÉ ET APPELANT INCIDENT
Monsieur [M] [O]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par, Me Philippe BUISSON, avocat au barreau de PARIS, toque : R293,
Assisté de Me Paul BUISSON de la SELARL PAUL BUISSON, avocat au barreau de VAL D’OISE, toque : 6,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Janvier 2023, en audience publique, la Cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Un rapport a été présenté à l’audience par Madame Florence DUBOIS-STEVANT dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE:
M. [K] détenait le capital social de la société de droit néo-zélandais Hostorg investmentT2 (“la société Hostorg”) intervenant dans la gestion de portefeuilles.
Par convention du 18 septembre 2015, conclue au Luxembourg, il a cédé à M. [O] 250 des 1.000 actions Hostorg qu’il détenait moyennant, selon M. [O], le paiement par virement d’une somme de 20.000 euros, une cession de créances pour un montant de 7.460 euros et un second virement d’une somme de 12.540 euros le 18 décembre 2015. En décembre 2015, M. [P], de nationalité néo-zélandaise, a été nommé directeur local de la société Hostorg.
Le 18 juillet 2016, M. [P] a démissionné de son mandat et, le 12 juillet 2017, la société Hostorg a été radiée du registre des sociétés.
Soutenant avoir été trompé sur les termes de la convention du 18 septembre 2015 et la valeur des titres de la société Hostorg, M. [O] a, par acte du 20 mai 2019, assigné
M. [K] devant le tribunal de commerce de Paris en nullité de cette convention
pour dol, subsidiairement pour erreur sur la substance, et remboursement de la somme de 40.000 euros, plus subsidiairement en paiement de la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation par M. [K] de ses engagements.
M. [K] a soulevé l’incompétence des juridictions françaises et l’incompétence matérielle du tribunal de commerce de Paris et, subsidiairement, a formé des demandes reconventionnelles en paiement de dommages et intérêts.
Par jugement du 16 février 2021 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal a :
– dit l’exception d’incompétence recevable mais non fondée et s’est déclaré compétent,
– condamné M. [K] à verser à M. [O], en qualité d’associé de la société Hostorg, la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, déboutant pour le surplus,
– condamné M. [K] à payer à M. [O], en qualité d’associé de la société Hostorg, la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
– condamné M. [K] aux dépens.
Par déclaration du 1er avril 2021, M. [K] a fait appel de ce jugement. Par déclaration du 8 avril 2021, M. [O] a également fait appel de ce jugement. La jonction des deux instances a été ordonnée le 5 octobre 2021.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 5 septembre 2022,
M. [K] demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :
– in limine litis et à titre principal, de déclarer le tribunal de commerce de Paris incompétent pour connaître du présent litige et de renvoyer l’affaire devant la district court d’Auckland,
– à titre subsidiaire, de débouter M. [O] de l’ensemble de ses demandes, de le condamner au paiement de la somme de 5.000 euros pour procédure abusive, celle de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 18 mars 2022,
M. [O] demande à la cour :
– de confirmer le jugement sauf en ce qu’il a dit l’exception d’incompétence recevable, a limité à la somme de 20.000 euros la condamnation de M. [K] à titre de dommages et intérêts et l’a débouté du surplus de ses demandes,
– statuant à nouveau, de déclarer irrecevable l’incompétence internationale des juridictions françaises, subsidiairement de déclarer le tribunal de commerce de Paris territorialement et matériellement compétent, de déclarer nulle la convention du 18 septembre 2015 et de condamner M. [K] à lui rembourser la somme de 40.000 euros avec les intérêts légaux à compter de la date de la cession, subsidiairement de condamner
M. [K] à lui payer la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts légaux à compter du 27 septembre 2017, sinon du 31 mai 2018 ou, sinon, à compter de la mise en demeure ou de la demande en justice,
– en tout état de cause, de débouter M. [K] de toutes ses demandes, de le condamner à réparer le préjudice subi concernant les frais d’avocat en relation avec la présente procédure, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, sinon de la responsabilité délictuelle, et évalués à la somme de 49.221,17 euros, juger que les montants à valoir seront assortis d’intérêts en application de l’article 5 de la loi luxembourgeoise modifiée du 18 avril 2004 relative aux délais de paiement et aux intérêts de retard ou des dispositions françaises équivalentes, ou à défaut par application du taux d’intérêt légal en vigueur à compter de la mise en demeure, ou à défaut à compter de la présente demande et jusqu’au paiement du solde, de juger que le taux d’intérêt légal sera majoré de trois points à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la date de la signification du jugement à intervenir, de juger que les intérêts porteront intérêts conformément à l’article 1154 du code civil luxembourgeois, sinon conformément à l’article 1343-2 du code civil français, de condamner M. [K] à lui payer, au titre de ses frais irrépétibles, une indemnité de procédure de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile français, de condamner
M. [K] aux dépens avec droit de recouvrement direct.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 22 novembre 2022.
SUR CE,
1. Sur la compétence du tribunal de commerce de Paris
Sur la recevabilité de l’exception d’incompétence :
M. [O] soutient que l’exception d’incompétence n’est pas recevable faute d’avoir été soulevée in limine litis devant le tribunal. Il fait valoir que, dans sa lettre du 29 novembre 2019 adressée au tribunal en tant que première réponse à l’assignation, M. [K] a formulé des demandes reconventionnelles avant d’entamer la discussion et d’y soulever l’exception d’incompétence des juridictions françaises.
M. [K] réplique que l’exception est recevable dès lors qu’il en a fait état dans sa lettre adressée au tribunal le 29 novembre 2019 avant de conclure au fond et qu’il y a désigné la juridiction qui aurait dû être saisie.
L’article 74 du code de procédure civile dispose que les exceptions de procédure doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.
La procédure devant le tribunal de commerce étant orale, l’ordre de présentation des moyens à prendre en considération pour l’application de l’article 74 du code de procédure civile est l’ordre de présentation à l’audience sans qu’il y ait lieu de se déterminer selon la seule chronologie des écritures préalablement échangées entre les parties.
Il résulte en l’espèce des termes du jugement qu’à l’audience du 10 octobre 2020 M. [K] a repris des conclusions demandant in limine litis et à titre principal de juger que le tribunal de commerce de Paris n’est pas compétent pour connaître du litige et qu’il se démette au profit de la district court d’Aukland puis à titre subsidiaire de déclarer M. [O] mal fondé en ses demandes, de le débouter de toutes ses prétentions et de le condamner au paiement de dommages et intérêts et d’une indemnité procédurale.
Il s’ensuit que M. [K] a soulevé l’exception d’incompétence du tribunal de commerce de Paris in limine litis devant le tribunal conformément à l’article 74 du code de procédure civile et qu’elle est donc recevable. A ces motifs se substituant à ceux retenus par les premiers juges, le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l’exception d’incompétence matérielle :
M. [K], qui a fait appel du chef du jugement ayant rejeté cette exception, ne la soulève plus devant la cour et M. [O] demande la confirmation du jugement de ce chef. Il s’ensuit que la cour ne peut que confirmer le jugement sur ce point.
Sur l’exception d’incompétence territoriale :
M. [K] soutient qu’en application de l’article 46 du code de procédure civile et de l’article 4 2) du règlement Bruxelles I bis du 12 décembre 2012 la juridiction territorialement compétente n’est pas le tribunal de commerce de Paris mais celle du siège social de la société Hostorg situé en Nouvelle Zélande. Il fait valoir que le litige ne relève pas d’une contestation entre associés mais porte sur un contrat auquel il n’est lui-même pas partie, la convention du 18 septembre 2015 ayant été conclue entre M. [O] et la société Hostorg, représentée par lui et dont le siège social et la résidence du directeur local se trouvaient en Nouvelle-Zélande, et lui-même ne s’étant pas engagé à titre personnel.
M. [O] réplique qu’est applicable, pour la détermination de la juridiction compétente, l’article 4 1) du règlement Bruxelles I bis du 12 décembre 2012, qu’en outre l’article 15 du code de procédure civile prévoit qu’un Français peut être traduit devant un tribunal en France pour des obligations contractées en pays étranger et que M. [K] étant domicilié en France au jour de l’assignation, il peut être valablement attrait devant les juridictions françaises. Il soutient que le règlement Bruxelles I bis s’applique entre parties domiciliées sur le territoire d’Etats membres différents, qu’il ne prévoit pas la compétence d’un Etat tiers, que l’objet du litige est le contrat de cession de parts conclu entre deux
personnes physiques, M. [K] l’ayant signé en qualité d’actionnaire de la société Hostorg, et non la validité d’une décision des organes de la société, qu’il a assigné M. [O] et non la société Hostorg.
L’article 42 du code de procédure civile dispose que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur et l’article 46 du même code prévoit qu’en matière contractuelle le demandeur peut saisir à ses choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, la juridiction du lieu de livraison effective de la chose ou du lieu d’exécution de la prestation de service.
Le règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale détermine la compétence des juridictions situées dans les seuls Etats membres de l’Union européenne et non celle des juridictions situées dans un Etats tiers. Il dispose ainsi en son article 4 que les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre (§1er) et que les personnes qui ne possèdent pas la nationalité de l’État membre dans lequel elles sont domiciliées sont soumises aux règles de compétence applicables aux ressortissants de cet État membre (§2). Il prévoit, en son article 7 1) a), une exception en matière contractuelle selon laquelle une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat membre peut être attraite dans un autre
Etat membre devant la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande.
M. [O] a assigné en paiement M. [K] à titre personnel, et non comme représentant légal de la société Hostorg, en invoquant la nullité de la convention conclue le 18 septembre 2015, subsidiairement la violation par M. [K] de ses engagements. Cette convention précise que ” les parties prenantes de cet accord sont M. [K] (‘) agissant comme actionnaire de la société et disposant de 100 % des 1000 actions de la société Hostorg ” et ” M. [O] “. En son article 1er, elle stipule que le premier cède la propriété de 25 % de ses actions au second. Elle est signée par M. [K] et M. [O]. La convention litigieuse a donc été conclue entre deux personnes physiques et non entre M. [O] et la société Hostorg. L’inclusion dans le contrat d’engagements énoncés à la charge de la société – qui ont trait à l’absence d’augmentation de capital, à l’embauche d’un directeur local ou d’un employé local permettant l’obtention d’une licence ” on shore “, à la nomination de M. [O] comme directeur et à la perception d’honoraires en cas d’apport à la société de ” toute mission ” par un actionnaire – n’a pas pour effet de conférer à la société Hostorg la qualité de partie au contrat et la circonstance que le prix des actions cédées a été versé sur un compte au nom d’une société tierce, la société Tracker distribution oHG/AG, conformément aux stipulations de la convention, ne prive pas M. [K] de sa propre qualité de partie à titre personnel. Le litige oppose ainsi deux personnes physiques, de nationalité
française, et a trait à la validité et à l’exécution d’un contrat conclu entre elles.
En vertu des articles 42 et 46 rappelés ci-avant et dès lors qu’il est constant que M. [K] a été assigné à son domicile situé à Paris, M. [O], demandeur, pouvait saisir le tribunal de commerce de Paris sans que lui soit opposée la faculté d’assigner M. [K] devant la juridiction du lieu de livraison effective de la chose ou du lieu d’exécution de la prestation de service, l’exercice d’une telle faculté relevant de la seule décision du demandeur.
Au regard du règlement de Bruxelles 1 bis, M. [K], de nationalité française et domicilié en France, devait être attrait devant une juridiction française conformément à l’article 4 §1 et la faculté, ouverte au seul demandeur auquel elle ne peut être imposée, d’attraire le défendeur devant une juridiction d’un autre Etat membre ne peut fonder la compétence d’une juridiction de la Nouvelle-Zélande, qui n’est pas membre de l’Union européenne.
Il résulte ainsi du règlement de Bruxelles 1 bis et des articles 42 et 46 du code de procédure civile que les juridictions françaises sont seules compétentes pour connaître du litige opposant M. [O] à M. [K]. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a retenu la compétence du tribunal de commerce de Paris.
2. Sur la loi applicable
M. [K] soutient qu’en vertu de la volonté des parties et de ” la convention de Rome ” [en réalité le règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 dit ” Rome I “] sur la loi applicable aux obligations contractuelles, le tribunal aurait dû appliquer le droit néo-zélandais dès lors que le contrat litigieux, conclu entre M. [O] et la société Hostorg, présente les liens les plus étroits avec la Nouvelle Zélande et non avec le Luxembourg.
M. [O] réplique qu’il n’existait aucun conflit de lois potentiel lors de la conclusion de la convention, conclue entre deux parties résidant au Luxembourg, dès lors que le droit luxembourgeois avait vocation à s’appliquer. Il fait valoir que M. [K] a déclaré dans la convention être domicilié au Luxembourg et qu’il ne peut invoquer une autre résidence habituelle au jour de sa signature. Subsidiairement, il soutient que l’application du règlement de Rome I du 17 juin 2008 et de son article 4 §1 a) conduit également à retenir la loi luxembourgeoise, le contrat de vente de biens étant, à défaut de choix exercé par les parties, régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle, laquelle est déterminée au moment de la conclusion du contrat.
La cour relève en premier lieu que M. [K] n’explique pas en quoi la loi néo-zélandaise s’appliquerait au contrat litigieux et manque ainsi à établir l’existence d’un conflit de lois.
En deuxième lieu, la convention litigieuse a pour objet la cession d’actions détenues par M. [K] à M. [O] et il a été précédemment dit que seuls MM. [K] et [O] sont parties à la convention, à l’exclusion de la société Hostorg qui n’a à l’égard de M. [O], en vertu de ce contrat, ni la qualité de vendeur de biens ni celle de prestataire de services. Il ne résulte d’aucune des stipulations de la convention que MM. [K] et [O] ont exprimé la volonté de la soumettre à la loi d’un pays déterminé. Ainsi, à supposer un conflit de lois existant, l’application du règlement de Rome I – qui dispose, en son article 4 §1 a), qu’à défaut de choix exercé par les parties, le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle – conduit à désigner comme loi applicable soit la loi luxembourgeoise, comme le soutient M. [O] eu égard à la résidence habituelle de M. [K] au Luxembourg, en particulier au jour de la conclusion de la convention, soit la loi française, M. [K] se prévalant d’une résidence habituelle en France. Or M. [K] ne revendique pas l’application de la loi française mais celle de Nouvelle Zélande, laquelle ne peut en tout état de cause qu’être écartée, le vendeur n’ayant pas sa résidence habituelle en Nouvelle Zélande.
Au surplus, le contrat litigieux a été conclu au Luxembourg et M. [K] a expressément indiqué dans le contrat être domicilié alors, soit en septembre 2015, au Luxembourg. La résidence habituelle de M. [K] au Luxembourg est en outre établie par un certificat de résidence faisant état de sa résidence, à une même adresse au Luxembourg, du 2 octobre 1996 au 11 octobre 2002, du 12 mai 2004 au 30 janvier 2007, du 10 mars 2016 au 7 février 2017, par des publications au recueil des sociétés et associations ou la gazette officielle luxembourgeoise les 14 décembre 2010, 21 février, 5 juin et 3 décembre 2012, 19 novembre 2015, mentionnant cette même adresse au nom de M. [K], par une lettre adressée le 23 février 2017 par M. [K] se domiciliant à cette même adresse luxembourgeoise, par le courrier de mise en demeure adressé par M. [O] le 10 janvier 2019 revenu ” non réclamé ” car ” absent “.
C’est donc à juste titre que le tribunal a fait application de la loi luxembourgeoise.
3. Sur la nullité pour dol de la convention du 18 septembre 2015
Devant la cour, M. [O] invoque le seul dol au soutien de sa demande de nullité de la convention et se prévaut des articles 1109, 1110 et 1116 du code civil luxembourgeois.
Il prétend que M. [K] a usé de man’uvres dolosives qui l’ont trompé sur la substance et la valeur de la chose cédée et sans lesquelles il n’aurait pas acquis les actions ni investi 40.000 euros dans une société qui était une coquille vide, sans actif ni projet de développement. Il soutient au titre de ces man’uvres en premier lieu, s’il est considéré que M. [K] n’était pas résident luxembourgeois, qu’il a menti délibérément sur son adresse le trompant ainsi sur le droit applicable au contrat, en deuxième lieu qu’il a été trompé sur la valeur des actions cédées, déterminée par M. [K] sur la base d’un contrat d’investissement et d’un équilibre financier inexistants, en troisième lieu que M. [K] lui a fait une première promesse mensongère de le nommer directeur de la société Hostorg et une deuxième promesse mensongère de conclure un pacte d’actionnaires.
M. [K] conteste ces man’uvres dolosives faisant valoir que M. [O] est un professionnel aguerri du secteur de la finance, ayant le statut d’expert-comptable et de commissaire aux comptes et connaissant l’ensemble des procédures de vérification concernant les projets d’entreprise et levées de fonds, que l’absence de nomination comme directeur local n’est pas constitutive de man’uvres dolosives mais résulte de la seule volonté de M. [O] à cette époque, qu’il a ensuite laissé agir M. [O] comme directeur de fait, que l’absence de pacte d’actionnaires n’est pas non plus une man’uvre dolosive, que M. [O] a décidé librement, avec les éléments dont il disposait, de contracter avec lui dans le cadre de la société de droit néo-zélandais.
Aux termes de l’article 1116 du code civil luxembourgeois, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man’uvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces man’uvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ; il ne se présume pas et doit être prouvé.
Les man’uvres dolosives alléguées par M. [O] doivent être appréciées au jour de la formation du contrat de sorte que les événements postérieurs à la cession litigieuse, le 18 septembre 2015, ne sont pas de nature à établir le dol.
M. [K] n’a pas menti sur son adresse en mentionnant dans la convention être domicilié au Luxembourg, l’adresse déclarée étant celle figurant dans le certificat de résidence et les annonces publiées au recueil des sociétés et associations ou à la gazette officielle luxembourgeoise sur des périodes antérieures à la signature de la convention. Par suite et en l’absence de tout autre élément invoqué, M. [O], qui n’établit au demeurant pas en quoi le droit applicable était une condition essentielle de son consentement, n’a pas été trompé sur le droit applicable au contrat.
S’agissant de la valeur des actions cédées, il sera rappelé que MM. [K] et [O] sont des professionnels expérimentés du secteur de la finance, aguerris aux techniques d’investissement financier, ayant une formation et une expérience dans l’expertise comptable. Ces constats ressortent des échanges de courriels produits aux débats, M. [O] comprenant les informations portées à sa connaissance, que ce soit par M. [K] ou M. [P], un temps directeur local de la société Hostorg, aucune interrogation ni hésitation n’émanant de lui quant à leur compréhension.
La société Hostorg avait vocation à proposer des services financiers et recueillir des fonds de clients apportés par les associés, à savoir finalement MM. [K], [O] et [P]. Elle a été constituée par M. [K], alors unique actionnaire, et enregistrée par les autorités néozélandaises le 26 novembre 2014.
MM. [K] et [O] sont entrés en contact dans un cadre professionnel, le second mettant en relation des clients avec le premier, comme en témoignent des courriels du 13 octobre 2014 et 15 janvier 2015, et c’est M. [O] qui a sollicité M. [K] pour savoir, dans un premier temps, s’il connaissait une société de gestion en vente au Luxembourg ou en Europe (courriel du 13 octobre 2014). En outre, M. [K] lui a fourni des informations sur la création de société de gestion à Malte (courriel de novembre 2014) avant, par courriel du 15 décembre 2014, de transmettre des informations à M. [O] et à une autre personne, appelée selon ce dernier ” à l’actionnariat de la structure NZ “, relative à la création d’une société financière néo-zélandaise puis par courriel du 17 décembre 2014 de transmettre à M. [O] le courriel d’information sur la constitution et l’enregistrement en Nouvelle-Zélande de la société Hostorg.
En avril 2015, M. [K] a adressé à M. [O] un dossier de présentation de la société Hostorg, précisant qu’il ” sollicitait un investissement afin d’obtenir une licence onshore “, et, en réponse, M. [O] s’est montré ” enthousiaste ” quant au projet d’une telle société en Nouvelle-Zélande, étant intéressé par les licences autorisées et précisant rechercher ” pas exclusivement un rendement [mais] surtout un outil complémentaire de travail “. Ce dossier de présentation de la société arrêté par M. [K] expose l’objectif de disposer en six mois de 30 millions d’euros en gestion pour les entreprises et de 60 millions en moyenne annuelle au 31 décembre 2015 dans le ” hedging de risque “, l’objectif de 250 millions d’euros en 2016, la rémunération attendue des opérations, les frais de personnel, les frais de gestion, le résultat attendu, les dépenses immédiates de personnel pour obtenir la licence ” onshore ” et de loyers, la conclusion d’un contrat de gestion avec des particuliers, soit 4,9 millions d’euros à gérer avec un potentiel de rendement de 90.000 euros, et l’intention de la société de lever entre 30 et 100.000 euros, ce dernier montant correspondant à 25 % du capital comprenant alors 1.000 actions estimées 100 euros par actions en apport.
En juin 2015, M. [K] a présenté M. [P], futur directeur local de la société, à M. [O], manifestement lors d’un repas professionnel. En septembre 2015, MM. [O] et [K] ont discuté des termes de la convention de cession d’actions qu’ils ont signée le 18 septembre 2015. Dans des courriels du 16 septembre 2015, M. [K] a ainsi précisé à M. [O] que le compte bancaire de la société venait d’être ouvert, que les charges étaient payées par sa propre société, que la société Hostorg avait signé un contrat pour lequel elle était parfois rémunérée en espèces, qu’elle gérait ” 5 millions ” et qu’elle était à l’équilibre d’exploitation, et l’a informé de la conformité de la société Hostorg avec la règlement néozélandaise après la nomination de M. [P] comme directeur local. Dans un courriel du 17 septembre 2015, M. [O] a remercié M. [K] de ” cette proposition de coopération, comme de [sa] patience à [son] égard au sujet de [ses] disponibilités bancaires”.
Il se déduit de ces échanges que, contrairement à ce qu’affirme M. [O], M. [K] ne l’a pas incité à investir au capital de la société Hostorg mais a répondu, par cette proposition, à sa propre demande de participer à une société financière à des fins professionnelles, M. [K] recherchant de son côté un investisseur permettant à la société Hostorg d’obtenir une licence onshore nécessaire au développement de son activité avec une clientèle de résidents.
Il s’en déduit également que M. [O] a pris sa décision d’acquérir des actions de la société Hostorg, à l’issue d’une période de plusieurs mois, en considération non seulement de la présentation faite par M. [K], qu’il était en capacité de comprendre, mais aussi des échanges avec M. [P] en personne et des objectifs professionnels qu’il s’était assigné.
M. [O] avait connaissance de ce que la société Hostorg était de création récente, qu’elle avait recruté un directeur local pour développer son activité ” onshore ” conformément à la réglementation néozélandaise, directeur qu’il a rencontré en personne, et qu’elle n’en était ainsi qu’au commencement de l’exploitation de l’activité envisagée. Il était ainsi en mesure d’évaluer le prix des actions acquises.
Il ne ressort ni des pièces versées au débat, dont aucune ne montre que les informations portées à sa connaissance étaient erronées ou présentaient un caractère faux destiné à le tromper, ni des échanges entre M. [K] et M. [O] que le premier a dissimulé, avant la signature de la convention du 18 septembre 2015, des informations essentielles au consentement du second à l’acquisition d’actions de la société Hostorg au prix convenu ou que les informations transmises étaient volontairement erronées ni que M. [K] a cherché à tromper M. [O] sur la valeur de ces actions.
M. [O] manque ainsi à démontrer l’existence de man’uvres dolosives de la part de M. [K].
Quant à la nomination de M. [O] comme directeur de la société Hostorg et à la conclusion d’un pacte d’actionnaires, ces deux actes figurent dans la convention litigieuse en ces termes :
– Article 4 : ” Dès le versement du paiement des actions achetées, Hostorg investment T2 limited engage dans le mois qui suit un directeur ou un employé local permettant à Hostorg investment T2 limited d’obtenir la licence financière on shore néozélandaise, la société devenant alors financial service provider. La société reste la partenaire d’Halifax Australie. [M] [O] devient directeur de la société Hostorg investment T2 limited. ”
– Article 5 : ” à partir de la cession effective des actions, il sera convenu un pacte d’actionnaires entre les parties qui inclut notamment les points suivants : (‘) “.
Les échanges antérieurs à la conclusion de la convention entre MM. [K] et [O], tels que précédemment évoqués, ne font pas apparaître que M. [O] a fait de chacun de ces deux engagements des éléments déterminants de son consentement à l’acquisition d’actions de la société Hostorg et ce, quand bien même il a, le 7 avril 2015, interrogé M. [K] sur ses intentions quant à la conclusion d’un pacte d’actionnaires et demandé seulement la liste des individus impliqués à terme dans la gestion de la société. Aucune des pièces produites au débat, à l’exception des termes de la convention elle-même, ne fait allusion à la nomination de M. [O] comme directeur ni à son souhait de conclure un pacte d’actionnaires. L’absence de toute réclamation ultérieure de M. [O] sur chacun de ces deux points confirme qu’il n’en faisait pas un élément déterminant de son consentement. L’inexécution de ces articles 4 et 5 de la convention ne constitue pas un moyen propre à établir des man’uvres dolosives de la part de M. [K].
M. [O] ne rapportant pas la preuve qui lui incombe de man’uvres dolosives de
M. [K] doit être débouté de sa demande de nullité de la convention du 18 septembre 2015 et le jugement confirmé sur ce point.
4. Sur les fautes engageant la responsabilité de M. [K]
M. [O] soutient en premier lieu que M. [K] a manqué aux règles de bonne gouvernance de la société Hostorg en le maintenant à l’écart de la gestion sociale et en ne rendant pas compte de la situation financière de la société, qu’en sa qualité d’actionnaire majoritaire il aurait pu convoquer une assemblée générale en vue de désigner des administrateurs qui auraient rendu compte de leur gestion, ce qui lui aurait permis de se rendre compte de la ” supercherie orchestrée par M. [K] ” et d’éviter tout problème avec M. [P], que M. [K] n’a pas non plus permis ensuite à la société Hostorg de respecter ses obligations déclaratives et qu’il n’a pas publié les comptes sociaux exposant la société au risque de ” dissolution et de liquidation administrative “, que la société n’était pas en mesure de payer ses loyers ni les honoraires du comptable, que M. [K] a vidé les comptes bancaires de la société dans son seul intérêt personnel, mettant à la charge de la société des frais de voyage, qu’il a laissé la société péricliter jusqu’à sa radiation du registre local en ne procédant ni à la nomination d’un nouveau directeur local ni à la publication des comptes, que M. [K] avait ainsi abandonné le projet juste après lui avoir vendu une partie de ses actions, que ces manquements lui ont perdre l’intégralité de son investissement, soit la somme de 40.000 euros.
M. [O] reproche en second lieu à M. [K] de ne pas avoir respecté ses engagements réitérés de l’indemniser par échange d’actions de la société Hostorg et soutient que la proposition d’un tel échange impliquait nécessairement un échange d’actions d’une valeur correspondant au montant de son investissement dans la société Hostorg.
M. [K] réplique que M. [O] n’a réglé que partiellement ses actions, alors que sa nomination comme directeur était conditionnée à leur paiement intégral, qu’il a tout de même laissé M. [O] se comporter comme le directeur de la société Hostorg, ayant ouvert un compte bancaire au nom de la société, sans l’en informer, pour l’un de ses clients, que M. [O] était parfaitement informé de ce qui se passait dans la société, entretenait une relation privilégiée avec le directeur local et n’a formulé aucun reproche sur la société pendant toute sa durée, qu’il n’a en outre pas commis de fautes de gestion qui auraient conduit à la perte de valeur des actions, n’ayant pas agi avec légèreté dans la nomination du directeur local, ayant respecté la législation fiscale, réglé les loyers de 2014 à la radiation de la société et mis tout en ‘uvre pour que la société bénéficie de la licence financière “pleine”, que la perte de valeur des actions a pour cause la soudaine démission du directeur local, qu’il n’a enfin pas engagé sa responsabilité délictuelle en ne procédant pas à un échange d’actions Hostorg avec des actions d’une société à créer, ce projet de création d’une société luxembourgeoise n’ayant pas abouti.
M. [O] se prévaut du seul droit luxembourgeois relatif à la responsabilité délictuelle et contractuelle de droit commun et invoque la qualité d’actionnaire majoritaire de M. [K].
S’agissant des circonstances de fait, il ressort des échanges de courriels entre MM. [O], [K] et [P] que M. [K] s’est opposé aux honoraires réclamés par M. [P], nommé en septembre 2015 directeur local, en mai 2016 – et non en décembre 2015 comme l’affirme M. [O] – et qu’il a annoncé à M. [P] son intention de se désengager de la société Hostorg en ne conservant que 10 % du capital et ce, en raison de son souhait de se consacrer à d’autres activités en Europe et au Mexique, et proposé le rachat de ses actions Hostorg par les autres actionnaires, qu’en juin 2016 M. [O] a étudié, en interrogeant M. [P], la possibilité de faire perdurer la société Hostorg en l’absence de M. [P], que ce dernier l’a informé de ce que les loyers des locaux occupés par la société Hostorg demeuraient impayés depuis sept mois mais qu’ils étaient à la charge de M. [K] à titre personnel et non de la société – ce que confirment les factures produites au débat par M. [K] – qu’en revanche la société était débitrice auprès de la comptable, sans que le montant de la créance ne soit précisé, que la société ne semblait pas avoir d’autres dettes, qu’ainsi pour continuer son activité la société devait trouver une nouvelle domiciliation, M. [P] faisant des propositions de domiciliation chez le comptable ou la société Halifax Auckland, que le 14 juillet 2016 M. [P] a signalé à M. [K] l’obligation de déposer les comptes annuels 2016 de la société à défaut de quoi la société serait radiée, qu’il a informé M. [O] de cette situation en lui transférant ce dernier courriel, que le 18 juillet 2016 M. [P] a démissionné à effet immédiat et en a informé M. [O] le même jour, qu’à réception de ces informations M. [O] a demandé à M. [P] des propositions de successeur, en vain, que le 11 août 2016 M. [O] a demandé à M. [K], qu’il avait précédemment rencontré en personne, quelle était la réaction du ” directeur pressenti ” pour remplacer M. [P] lui faisant également part de sa crainte de voir la société radiée, que le 16 août 2016 M. [O] a alerté M. [K] sur le dépôt tardif des comptes annuels de la société Hostorg et lui a fait part de sa crainte de voir la société Hostorg radiée en conséquence et de ” tout perdre “, que M. [K] lui a répondu ” ce sera fait demain “, que le 16 septembre 2016 il a indiqué à M. [O] avoir un délai pour les déclarations fiscales, ne pas avoir de réponse de la personne approchée pour être directeur local et souhaiter discuter de l’évolution de la société Hostorg ou d’un échange d’actions sur une autre activité, estimant que l’activité de ” paymaster ” avait handicapé la société et préférant la seule gestion de fonds.
A défaut de pièces produites en ce sens, il n’est pas établi par ces échanges de courriels que M. [K] n’a pas in fine déposé les comptes annuels ni procédé aux déclarations fiscales et qu’ainsi la radiation de la société Hostorg du registre néo-zélandais a résulté d’une carence à se conformer aux obligations locales, ni que la société Hostorg n’était pas en mesure de payer ses dettes supposées et que M. [K] a mis à sa charge des dépenses sans lien avec son activité ni encore que la démission de M. [P] a résulté d’un comportement fautif de M. [K] alors, d’une part, que c’est la divergence sur le montant des honoraires du premier en qualité de directeur local qui a fait naître une mésentente, que ce poste de dépense pouvait être légitimement discuté compte tenu de la création récente de la société Hostorg et que M. [P] a démissionné sans laisser le temps à la société de recruter un autre directeur local lui permettant de développer son activité ” on shore “, et que, d’autre part, M. [P] a lui-même, par courriel du 12 mai 2018, présenté ses excuses à M. [K] pour son attitude et sa démission ayant provoqué l’arrêt de l’activité de la société. Il n’est pas non plus établi que M. [K] a dissimulé à M. [O], associé, des informations sur la gestion de la société sans lesquelles il a pu se méprendre sur la situation réelle de la société Hostorg et la mésentente avec M. [P] et ce, d’autant moins que MM. [O], [K] et [P] étaient en relations régulières. Enfin, alors qu’il n’est pas démontré que M. [K] a laissé péricliter la société Hostorg et qu’il ressort des pièces précédemment analysées que la démission brutale de M. [P] a interrompu l’exploitation de son activité naissante, il ne peut être imputé à faute à M. [K] son souhait de se désengager en tant qu’actionnaire de la société.
M. [O] manque ainsi à établir les faits, ou leur caractère fautif, qu’il reproche à M. [K] et à caractériser des manquements aux règles de bonne gouvernance de la société Hostorg, règles que M. [O], qui ne produit ni les statuts de la société ni le droit applicable aux sociétés de droit néozélandais, ne définit au demeurant pas.
S’agissant du second reproche fait par M. [O] à M. [K] de ne pas avoir respecté ses engagements réitérés de l’indemniser par échange d’actions de la société Hostorg, M. [O] s’appuie sur des courriels de M. [K] des 5 mai, 16 septembre, 19 décembre 2016, 21 mai, 30 juillet 2018, 21 août 2019.
Il ne ressort pas des courriels échangés ni d’aucune autre pièce que M. [K] a conclu un engagement contraignant, même unilatéral, soit de procéder à un échange d’actions soit de racheter les titres de M. [O] dans la société Hostorg de sorte qu’il n’a pas engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard de M. [O].
En 2016 et 2017, M. [K] s’est ainsi borné à lui proposer à plusieurs reprises d’échanger ses actions Hostorg avec les titres d’une autre société, sans autre précision, mais n’a pas donné suite à ces propositions. Il ne ressort pas des termes des premiers courriels que M. [K] a entendu indemniser M. [O] d’un préjudice résultant de la cessation d’activité de la société Hostorg, les propositions relevant davantage d’une proposition de poursuivre leur association pour développer un autre projet. Ainsi, M. [K] a proposé à M. [O], les 5 mai puis 16 septembre 2016, de discuter de l’évolution de la société Hostorg ou d’un échange d’actions ” sur une autre activité “, précisant en septembre qu’il souhaitait une seule activité de gestion de fonds et non plus de ” paymaster “. Le 19 décembre 2016, relancé par M. [O], M. [K] lui a répondu ” tout a excellemment avancé et donne de la valeur à l’échange d’actions qu’il y aura “, puis le 14 juillet 2017 qu’il allait ” avant le 26 septembre échanger [leurs] actions pour que [M. [O]] bénéficie des dossiers “. Ces courriels, alors que les intéressés ne sont pas parvenus à recruter un nouveau directeur local pour la société Hostorg, évoquent non pas une proposition d’indemnisation ou un échange des seules actions détenues par M. [O] en contrepartie d’une perte de valeur des actions Hostorg mais une proposition de poursuivre leur association pour développer un autre projet dans le cadre d’une autre société, ce à quoi M. [O] ne s’est pas opposé, exprimant seulement parfois une impatience face à l’absence de proposition concrète.
M. [K], malgré les multiples relances de M. [O] n’a cependant jamais donné suite à ce nouveau projet et il ressort des courriels suivants que M. [O] a entendu récupérer les sommes investies dans la société Hostorg par rachat de ses actions. Il ne ressort toutefois pas des termes des courriels alors échangés que M. [K] a entendu indemniser M. [O] de la perte de son investissement ni qu’il s’est engagé à racheter ses actions, seuls des pourparlers ayant tout au plus été initiés. Ainsi, le 21 mai 2018, M. [O] a explicitement demandé à M. [K] une proposition chiffrée de rachat de ses parts dans la société Hostorg en précisant qu’une décote ” assez importante ” par rapport au prix d’achat lui semblait ” logique et inévitable “, ajoutant ” tant pis, c’est ma perte “. M. [K] a répondu ” on va voir les solutions que l’on peut trouver ” en concluant ” essayer de faire une proposition dans les dix jours “. Faute de réponse de M. [K], M. [O] a, par courriel du 16 juillet 2018, fait une proposition de rachat de ses actions pour 30.000 euros, à laquelle M. [K] a répondu attendre de savoir s’il avait des fonds disponibles. Le 21 septembre 2018, M. [K] a souhaité discuter d’une base contractuelle et du montant, observant que les titres avaient été ” considérablement dévalorisés “. M. [O] lui a adressé un contrat, se disant ouvert à la discussion, ce à quoi M. [K] a répondu le 2 octobre chercher ” quelque chose à l’avantage des deux ” après avoir observé qu’il n’y avait pas de ” clause de rachat automatique “. M. [K] n’a pas donné suite au projet de contrat de cession avant de recevoir, en janvier 2019, une mise en demeure de payer la somme de 40.000 euros de la part des conseils de M. [O]. C’est à la suite de l’assignation délivrée par M. [O] que M. [K] a de nouveau, par courriel du 21 août 2019, proposé un échange des actions de M. [O] avec des titres d’une société ” disposant d’un projet à Luxembourg “, M. [O] déclinant cette offre. M. [K] n’a donc à aucun moment entendu racheté les actions de M. [O] au prix souhaité par ce dernier.
Il résulte de ces éléments que non seulement M. [K] n’a pas engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard de M. [O] mais qu’il ne s’est pas non plus engagé à indemniser ce dernier au titre de son investissement dans la société Hostorg. En ne procédant pas à une telle indemnisation, M. [K] n’a commis ni manquement contractuel ni faute délictuelle, étant rappelé que les éléments précédemment analysés ne permettent pas d’imputer à faute à M. [K] l’échec de la société Hostorg. Si M. [K] a laissé M. [O] espérer, en vain, bénéficier soit d’une participation dans une autre société, soit d’un rachat de ses titres, une telle attitude, à la supposer fautive en droit, n’a, en toute hypothèse, pas causé le préjudice invoqué constitué de la perte de l’investissement de M. [O] dans la société Hostorg.
Il s’ensuit que M. [O] doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
5. Sur les demandes de dommages et intérêts de M. [K]
M. [K] a formé deux demandes indemnitaires devant le tribunal sur lesquelles les premiers juges n’ont toutefois pas statué. Il réitère ces demandes devant la cour.
Sur les manquements contractuels :
M. [K] soutient que M. [O] n’a pas respecté les termes de la convention du 18 septembre 2015 et demande réparation de son préjudice à raison de ces manquements. Il fait valoir que M. [O] n’a réglé que partiellement les actions acquises, contestant que les virements invoqués par M. [O] aient été destinés au paiement du prix de cession, et que les clients apportés par M. [O] à la société Hostorg étaient de réputation douteuse, ce qui a causé la rupture des relations entre la société Hostorg et la société Halifax.
M. [O] réplique qu’il s’est acquitté du paiement complet des actions, observant que
M. [K] n’avait jamais contesté que les règlements avaient été faits au titre du prix de cession et non de prestations, dont il n’était pas débiteur.
Aux termes de la convention, le prix des actions achetées par M. [O] est payé à hauteur de 25 % par virement de 20.000 euros en date du 17 septembre 2015 et le solde par apport d’affaires avant le 31 décembre 2015 et, à défaut d’un tel apport, le solde est payé par
M. [O] au plus tard ” le 30 juin 2015 ” (sic).
M. [O] justifie, par la production des avis de virement, avoir réglé les sommes de 5.000 euros et de 15.000 euros, débitées le 22 septembre 2015, et la somme de 12.540 euros, le 18 décembre 2015, au profit de la société visée par la convention du 18 septembre 2015, par virements intitulés ” participation capital D. [O] Hostorg investment T2 limited selon contrat signé le 18/09/15 “, ” complément pour achat d’actions suivant contrat signé 18/09/15 ” et ” solde pour paiement actions NZ Hostorg T2 ltd “. Les dates et intitulés de ces trois virements établissent que, contrairement aux affirmation de M. [K], M. [O] a bien réglé la somme de 32.540 euros au titre de l’acquisition des actions Hostorg et non en paiement de factures.
S’agissant des apports d’affaires par M. [O], les courriels produits aux débats, indépendamment de la conversation électronique dans lesquels ils s’insèrent chacun, ne sont pas de nature, à eux seuls, à établir que les personnes impliquées dans ces courriels ont été des clients de M. [O] dont il a apporté les projets, à supposer qu’une suite ait été donnée à ces projets, à la société Hostorg. Les courriels de M. [P] de 2018, adressés à M. [K], n’évoquent pas comme cause de rupture du projet porté par la société Hostorg la qualité douteuse des clients supposés apportés par M. [O] et le caractère probant du courriel adressé par M. [K] à M. [P], le 20 octobre 2019, mettant en cause la probité des clients de M. [O] présentée comme à l’origine de l’échec de la société Hostorg, n’est pas suffisant dans la mesure où il émane de M. [K] qui s’en prévaut, qu’il a été rédigé alors que M. [K] avait été assigné par M. [O] le 20 mai précédent, et qu’il n’a pour objet que de rapporter des propos attribués à M. [P].
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que M. [K] manque à établir que M. [O] a failli dans ses obligations contractuelles et a été à l’origine de l’échec de la société Hostorg. Au surplus, M. [K] ne justifie pas de la réalité d’un préjudice.
M. [K] sera donc débouté de sa demande indemnitaire.
Sur la procédure abusive :
M. [K] demande la condamnation de M. [O] en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive mais n’invoque aucun moyen de fait au soutien de sa demande dans le corps de ses écritures. Il n’est ainsi ni soulevé ni a fortiori établi que M. [O] a abusé de son droit d’ester en justice. M. [K] sera donc également débouté de cette demande.
6. Sur les demandes accessoires et la demande additionnelle de M. [O] au titre de frais d’avocats
M. [O] demande la condamnation de M. [K] à réparer le préjudice subi à raison de la procédure qu’il a dû engager et constitué des frais d’avocat engagés. Il soutient que, selon le droit luxembourgeois, les honoraires d’avocat sont un préjudice réparable, indépendamment de l’indemnité procédurale accordée sur le fondement de l’article 240 du code de procédure civile, et ce, que ce soit dans le cadre de la responsabilité contractuelle ou délictuelle.
Comme l’a justement retenu le tribunal, qui n’a pas fait droit à cette demande, seul le code de procédure civile français est applicable aux instances ouvertes devant les juridictions civiles. Le préjudice invoqué est ainsi susceptible d’être réparé en application des seules dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [O], partie perdante à l’issue du litige en appel, ne peut prétendre à une indemnité procédurale. Ses demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en application de la jurisprudence des juridictions luxembourgeoises seront donc rejetées, le jugement étant infirmé en ce qu’il a condamné M. [K] à payer à M. [O] une somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 et confirmé à ce qu’il a rejeté la demande formée par M. [O] en sus des dispositions de l’article 700.
M. [O], partie perdante, sera condamné aux dépens, le jugement étant infirmé sur ce point. L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.
PAR CES MOTIFS,
La Cour statuant contradictoirement,
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné M. [G] [K] à verser à M. [M] [O] la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déboute M. [M] [O] de sa demande subsidiaire de dommages et intérêts ;
Déboute M. [M] [O] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [M] [O] aux dépens de première instance ;
Y ajoutant,
Déboute M. [G] [K] de sa demande de dommages et intérêts pour manquements contractuels ;
Déboute M. [G] [K] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Déboute M. [M] [O] et M. [G] [K] de leur demande formée en cause d’appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [M] [O] aux dépens d’appel.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
La Présidente,
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT