COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88G
RND
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 01 JUIN 2017
R.G. N° 16/00864
AFFAIRE :
SA METROPOLE TELEVISION
C/
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D’ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Janvier 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTERRE
N° RG : 12-02035
Copies exécutoires délivrées à :
Me Anne-sophie DISPANS
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D’ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE
Copies certifiées conformes délivrées à :
SA METROPOLE TELEVISION
le :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE PREMIER JUIN DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
SA METROPOLE TELEVISION
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Anne-sophie DISPANS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0238
APPELANTE
****************
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D’ALLOCATIONS FAMILIALES ILE DE FRANCE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par M. [O] [K] (Inspecteur contentieux) en vertu d’un pouvoir général
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Novembre 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Olivier FOURMY, Président,
Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,
Madame Elisabeth WATRELOT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Mohamed EL GOUZI,
L’affaire a été mise en délibéré au 26 janvier 2017 puis prorogée successivement au 30 mars 2017 puis au 1er juin 2017
FAITS ET PROCÉDURE
La société Métropole Télévision a fait l’objet d’un contrôle relatif à l’application de la législation de la sécurité sociale de la part de l’Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales d’Ile de France (ci-après l’URSSAF), portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, qui a donné lieu à une lettre d’observations en date du 21 juin 2010, comportant neuf chefs de redressement pour un montant global de 444 507 euros.
Le litige porte uniquement sur le point n°9, relatif à la réintégration à hauteur de 115 259 euros, dans l’assiette des cotisations des indemnités de fin de collaboration versées à des animateurs à l’expiration de contrat à durée déterminée d’usage, en raison de leur nature salariale.
Suite aux observations de la société adressées le 21 juillet 2010, l’URSSAF a, le 21 septembre 2010, ramené à 83 094 euros, le montant des cotisations sociales et à 4 909 euros au titre des contributions d’assurance chômage et des cotisations AGS.
Le 13 décembre 2010, une lettre de mise en demeure de payer la somme de 83 094 euros a été notifiée à la société.
Entre-temps, le 21 octobre 2010, la société avait saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF qui a rejeté son recours en annulation du redressement, par décision rendue en sa séance du 20 juillet 2012 et notifiée par écrit, le 04 septembre 2012.
Par jugement rendu le 05 janvier 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine a :
– confirmé la décision de la commission de recours amiable ;
– dit que la situation professionnelle et sociale de Mlle [J] [V] était exclue du champ du redressement ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes y compris celles au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Métropole Télévision a relevé appel de ce jugement.
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour la société Métropole Télévision qui demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a exclu du champ du redressement la situation de Mlle [J] [V] ;
– le réformer sur la nature de l’indemnité de fin de contrat versée aux animateurs ;
– constater que l’indemnité prévue à l’article 5-2-4 de la convention collective de la production audiovisuelle du 13 décembre 2006 a un caractère indemnitaire ;
– dire que cette indemnité n’est pas soumis à cotisations sociales,
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par l’URSSAF qui demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qui concerne le principe du redressement ;
– infirmer le jugement concernant l’exclusion de la situation de Mlle [J] [V] ;
– confirmer la décision de la commission amiable du 20 juillet 2012 ;
– confirmer le chef de redressement contesté ;
– condamner la société Métropole Télévision au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l’audience ainsi qu’aux explications orales complémentaires rappelées ci-dessus, et aux pièces déposées par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le bien fondé du redressement
A l’appui de son appel, la société Métropole Télévision conteste la réintégration des indemnités de collaboration versées aux animateurs, estimant que ces sommes ont le caractère de dommages-intérêts et qu’elles ne doivent pas être assimilées aux indemnités de précarité applicables aux contrats à durée déterminée, en :
– arguant du caractère hybride de l’indemnité de 10% de fin de contrat à durée déterminée classique régie par l’article L. 1243-8 du code du travail, destinée à compenser la précarité liée à ce type de contrat mais que la Cour de cassation exclut du calcul du salaire moyen du salarié et du calcul du salaire servant à comparer en matière d’inégalité de traitement ;
– s’appuyant sur l’article L. 1243-10 du code du travail qui, par renvoi aux articles L. 1242-2 alinéa 23 et D. 1242-1, exclut le versement de l’indemnité de fin de contrat à durée déterminée pour les contrats à durée déterminée dit d’usage applicable au secteur audiovisuel ;
– soutenant qu’a nécessairement un caractère indemnitaire, l’indemnité de rupture prévue par l’article 5.7.2 de l’accord collectif national du 22 décembre 2006 ‘ Branche télédiffusion, salariés employés sous contrat à durée déterminée d’usage ‘ au profit des salariés ayant plus de deux ans d’ancienneté lorsque l’employeur ne peut pas proposer la continuité des relations contractuelles, en soulignant la spécificité de l’intitulé, du taux de cette indemnité qui commence à 20% de la deuxième à la cinquième année et qui s’élève progressivement à 35% au delà de la quinzième année 15 ans et de son assiette, faisant le parallèle avec le caractère indemnitaire de l’indemnité de licenciement.
L’URSSAF rappelle que l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale considère comme rémunérations, et soumet à cotisations sociales, toutes les sommes versées en contrepartie ou à l’occasion du travail notamment les salaires ou gains, indemnités ainsi que tous avantages en espèces ou en nature et exclut de l’assiette des cotisations les indemnités présentant le caractère de dommages-intérêts. Faisant une analyse différente des textes cités par la société, l’organisme maintient que ces indemnités constituent des éléments de salaire.
La cour relève, au travers des écritures des écritures des parties, plusieurs points d’accord sur les textes et les principes applicables mais dont elles tirent des conséquences radicalement opposées sur la nature indemnitaire ou salariale de l’indemnité versée.
La société Métropole Télévision, qui appartient au Groupe M6, est spécialisée dans le secteur d’activité de l’édition de chaînes de télévision généralistes.
Il n’est pas discuté que la société qui oeuvre dans le secteur d’activité de l’audiovisuel peut recourir à des contrat à durée déterminée dits d’usage comme le prévoient les articles L. 1242-2 et suivants du code du travail.
Il n’est pas davantage discuté qu’en vertu de l’article L. 1243-10 du code du travail, les entreprises du secteur audiovisuel recourant à de tels contrats à durée déterminée d’usage, ne sont pas tenues de verser l’indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité des salariés sous contrat à durée déterminé dit classique, de 10% prévue par l’article L. 1243-8.
Ce dernier texte qualifie expressément cette indemnité de complément de salaire, qui s’ajoute à la rémunération totale brute du salarié versée à l’issue du contrat en même temps que le dernier salaire.
La société Métropole Télévision plaide l’absence de précarité de ce type de contrat au motif que plusieurs contrats peuvent se succéder sans aucune limitation de durée et sans aucun délai de carence entre deux contrats et sans aucune durée minimale pour un contrat.
Toutefois, la cour constate que, nonobstant ce régime présenté comme favorable aux salariés, les entreprises du secteur audiovisuel ont pris l’initiative, dans le cadre de l’accord collectif national du 22 décembre 2006, de faire bénéficier les salariés qui ont cumulé une certaine durée de travail au service d’un même employeur, d’une indemnité dite de rupture.
La cour considère qu’en réalité, nonobstant les différences apparentes d’intitulé, de taux ou d’assiette, le versement de cette indemnité aux animateurs en fin de collaboration s’assimile à celui de l’indemnité de précarité : l’indemnité de rupture est versée en une fois à l’issue du dernier contrat, et est destinée à compenser la précarité de cette situation dérogatoire au droit commun qu’est le contrat à durée indéterminée. Il est d’ailleurs souligné par la société elle-même qu’elle s’est séparée de salariés dont certains avaient une ancienneté importante.
La société Métropole Télévision ne peut pas utilement tirer argument des décisions de jurisprudence prises en matière d’indemnité de précarité dans des domaines très précis, comme le calcul du salaire moyen, pour en déduire un caractère indemnitaire général.
L’URSSAF était donc fondée à considérer ces indemnités versées aux animateurs en fin de collaboration comme un élément de salaire et à les réintégrer dans l’assiette des cotisations.
S’agissant du montant du redressement, la cour relève, que le 21 septembre 2010, l’URSSAF avait pu réviser le chiffrage en excluant du fichier entreprise comprenant des salariés d’autres entités du Groupe M6, ceux qui disposaient d’un bulletin de paie prouvant leur non appartenance à la société Métropole Télévision.
La cour considère qu’il incombait à la société sollicitant le bénéfice d’une exonération totale de cotisation de démontrer qu’elle pouvait y prétendre ce qu’elle ne fait pas, dans le cas de Mlle [V], en produisant un simple courrier à en-tête de la société Métropole Production du 27 octobre 2009 mettant fin à toute collaboration professionnelle et non pas des contrat de travail ou bulletins de paie de la salariée.
La cour infirme le jugement de ce chef.
Sur les frais irrépétibles
La société Métropole Télévision qui succombe en son appel, sera déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à verser à l’URSSAF la somme de 1 500 euros de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, par décision contradictoire,
Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts de Seine (n°12-02035/N) sauf en ce qu’il a exclu la situation de Melle [J] [V] du champ du redressement ;
Infirme le jugement et statuant à nouveau de ce chef :
Dit que la situation de Mlle [J] [V] est inclue dans le champ du redressement ;
Déboute les parties de toute autre demande plus ample ou contraire ;
Y ajoutant :
Condamne la société Métropole Télévision SA à payer à l’Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales d’Ile de France la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que la procédure est exempte de dépens ;
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Mademoiselle Delphine Hoarau, Greffier placé en, préaffectation, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER,Le PRÉSIDENT,
Laisser un commentaire