Convention collective de la production audiovisuelle : 4 juillet 2018 Cour d’appel de Paris RG n° 16/12063
Convention collective de la production audiovisuelle : 4 juillet 2018 Cour d’appel de Paris RG n° 16/12063

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRÊT DU 04 Juillet 2018

(n° , 09 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 16/12063

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Septembre 2016 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS RG n° 14/02362

APPELANTE

SYNDICAT NATIONAL DE RADIODIFFUSION ET DE TÉLÉVISION DU GROUPE FRANCE TÉLÉVISIONS – SNRT CGT

Agissant en substitution de Madame Manuella X…

[…]

représentée par Me Joyce Y…, avocat au barreau de PARIS, toque : B0053

INTIMEE

SA FRANCE TELEVISIONS

[…]

N° SIRET : 432 766 947

représentée par Me Marie Z…, avocat au barreau de PARIS, toque : U0001 substitué par Me Nicolas B…, avocat au barreau de PARIS, toque : U0001

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Mai 2018, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Véronique PAMS-TATU, Président de chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, conseiller

Madame Florence A…, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 10 avril 2018

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Valérie LETOURNEUR, lors des débats

ARRET :

– contradictoire- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Véronique PAMS-TATU, président de chambre et par Madame Valérie LETOURNEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE’

Madame X… a été engagée par la SA France Télévisions dans le cadre de différents contrats de travail à durée déterminée sur la période du 20 décembre 2000 au 23 décembre 2005 puis à compter du 14 août 2007, toujours en qualité de chef monteuse.

Ses tâches consistent à monter les sujets et reportages diffusés quotidiennement dans les différentes éditions du journal télévisé et les magazines d’information de la chaîne Réunion première, soit l’une des antennes de RFO.

La relation contractuelle était régie par la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle à laquelle s’est substitué l’accord d’entreprise du 28 mai 2013.

Le 17 février 2014, le syndicat national de radiodiffusion et de télévisions du groupe France Télévisions SNRT-CGT agissant en substitution de Madame X… a saisi le conseil de prud’hommes de Paris afin de voir requalifier la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 20 décembre 2000 et de voir condamner l’employeur à lui verser l’indemnité de requalification, des rappels de salaire et les congés payés afférents, des rappels de primes d’ancienneté, de fin d’année, outre les congés payés afférents, un rappel de supplément familial et de mesures «’FTV».

Par un jugement du 16 décembre 2016, le conseil de prud’hommes de Paris, statuant en départage a requalifié la relation contractuelle entre la SA France Télévisions et Madame X… en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 20 décembre 2000, a condamné la SA France Télévisions à verser :

– à Madame X…, l’indemnité de requalification à concurrence de 3000 €,

– au syndicat national de radiodiffusion et de télévision du groupe France Télévisions- SNRT’CGT, la somme de 1000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Le conseil de prud’hommes a débouté le syndicat national de radio diffusion et de télévision du groupe France Télévisions SNRT-CGT, agissant substitution de Madame X… du surplus de ses demandes et condamné la SA France Télévisions aux dépens.

Le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT a relevé appel du jugement déféré par remise au greffe par voie électronique d’une déclaration d’appel, le 26 septembre 2016.

Par des écritures remises par voie électronique auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens invoqués, le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a requalifié la relation contractuelle entre Madame X… et la SA France Télévisions en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 20 décembre 2000 et en ce qu’il a alloué une indemnité de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, mais à son infirmation pour le surplus.

Il demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner l’employeur à verser à Madame X… une indemnité de requalification de 20 000 €.

Selon que le salaire sera fixé à titre principal à 3281 €, à titre subsidiaire à 3181 €, à titre infiniment subsidiaire à 2580,42 euros, le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT, agissant par substitution de Madame X… sollicite les rappels de salaire suivants:

* A titre principal,

si le salaire de base est fixé à 3281 €

– 113’992 € au titre de rappel de salaire outre les congés payés afférents

si le salaire est fixé à la somme de 3181 €,

– 107’092 € au titre du rappel de salaire outre les congés payés afférents,

si le salaire est fixé à 2580,42 euros,

– 68’231 € au titre du rappel de salaire outre les congés payés afférents,

* à titre subsidiaire, Madame X… travaillant à temps plein depuis la signature du contrat de travail à durée indéterminée du 1er août 2014,

si le salaire est fixé à 3281 €,

– 31’526 euros au titre du rappel de salaire outre les congés payés afférents,

si le salaire est fixé à 3181 €,

– 27’026 € au titre du rappel de salaire outre les congés payés afférents.

En tout état de cause, le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT demande à la cour de condamner la SA France Télévisions à verser à Madame X… les sommes suivantes :

– 13’362 € au titre de la prime d’ancienneté, outre les congés payés afférents,

– 3935 € au titre de la prime de fin d’année,

– 500 € au titre des mesures FTV.

Il réclame enfin une indemnité de 7000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par des écritures remises par voie électronique auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens invoqués, la SA France Télévisions a relevé appel incident du jugement déféré, en ce qu’il a requalifié la relation contractuelle de travail en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 22 décembre 2000 et en ce qu’il l’a condamnée à verser 3000 € à la salariée au titre de l’indemnité de requalification et une indemnité de 1000 € au syndicat SNRT-CGT en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SA France Télévisions conclut à la confirmation du jugement pour le surplus, soulève la prescription de l’action pour une partie des contrats, en tout état de cause, s’oppose aux demandes formulées par le syndicat agissant parsubstitution de Madame X…, subsidiairement, elle précise que la salariée n’est pas fondée à obtenir une prime de supplément familial son mari la percevant déjà, que, tout au plus, elle peut aussi bénéficier du paiement des sommes suivantes :

– 2704,02 € au titre de l’indemnité de requalification,

– 853,01 euros au titre de la prime d’ancienneté,

– 830,57 euros pour le rappel de prime de fin d’année,

– 149, 08 euros au titre des mesures FTV.

La SA France Télévisions réclame également une indemnité de 7000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture des débat a été fixée au 24 avril 2018. L’audience a eu lieu le 22 mai 2018.

MOTIFS’

Sur la prescription’

La SA France Télévisions soulève la prescription de la demande de requalification au moins pour une partie des contrats de travail à durée déterminée et ce, sur le fondement des dispositions de l’article L. 1471-1 du code du travail, limitant à deux années le délai pour exercer une action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Elle expose que la relation contractuelle n’a pas été unique et continue, dès lors que la relation a connu d’importantes périodes d’interruption entre les contrats. Elle relève tout particulièrement que la salariée n’a pas pas travaillé pour France Télévisions pendant près de deux années entre le 23 septembre 2005 et le 14 août 2007.

Le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT répond que la prescription ne court qu’à compter du terme du dernier contrat, l’employeur ayant eu dans le cas présent recours à des contrats de travail à durée déterminée successifs alors que la salariée occupait en réalité un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Il observe que la saisine du conseil de prud’hommes remonte au 3 mars 2014 alors que le terme du dernier contrat de travail à durée déterminée n’était pas atteint.

Dans le cas présent, l’action en requalification présentée par le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT n’est pas fondée sur l’absence d’une mention obligatoire devant figurer sur le contrat, mais sur le fondement de l’article L. 1245-1 du code du travail, et plus spécialement au motif que la salariée occupait en réalité un emploi lié à l’activité permanente et pérenne de l’entreprise en sorte que le point de départ du délai de prescription est le terme du dernier contrat.

L’action ayant été engagée avant le terme du dernier contrat à durée déterminée, le moyen tiré de la prescription est inopérant.

Sur la demande de requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée depuis le 20 décembre 2000′

Le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT conclut à la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée en invoquant plusieurs moyens.

Outre qu’il considère que les dispositions prévues par le code du travail en matière de contrat de travail à durée déterminée d’usage sont irrégulières au regard du droit communautaire, le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT soutient que la succession de contrats de travail à durée déterminée au regard du droit interne est illicite, le recours aux contrats de travail à durée déterminée n’étant autorisé que suivant des conditions strictes et sous réserve qu’il ne s’agisse pas de pourvoir un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Il considère qu’en qualité de chef monteur, Madame X… a occupé un emploi permanent. Il renvoie aux dispositions conventionnelles qui définissent la fonction de chef monteur laquelle consiste à réaliser le montage des images et des sons d’une émission pour lui donner sa continuité son rythme, à contribuer à l’écriture du montant et à assurer le traitement technique et artistique des images et des sons selon le plan de montage, les intentions artistiques, les normes de qualité et de diffusion. Il précise que la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle et l’accord d’entreprise du 28 mai 2013 s’y substituant, prévoient expressément qu’un chef monteur soit recruté dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

Il ajoute au surplus que les besoins en remplacement de salariés sont structurels, que la société ne peut utilement invoquer et établir la réalité de périodes d’accroissement d’activité pour certains des contrats souscrits, la salariée ayant été affectée à des programmes pérennes s’agissant du journal télévisé et des magazines d’information. Il relève enfin que la société ne produit pas une partie des contrats de travail à durée déterminée en cause.

La SA France Télévisions revendique la possibilité donnée tant par la loi que les dispositions conventionnelles de recourir à des contrats de travail à durée déterminée d’usage pour le métier de chef monteur. Elle explique que dans le cas d’espèce, la salariée a travaillé en moyenne 6 jours par mois entre le 14 août 2007 et le 31 juillet 2014, qu’elle n’a pas collaboré entre le 23 septembre 2005 et le 14 août 2007, considère en conséquence qu’elle n’a pas occupé un emploi pérenne et qu’elle disposait de toute latitude pour occuper un emploi auprès d’autres employeurs.

S’il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2,, L. 1245-1 et D. 1242-1 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable, que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive n° 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi .

L’article D. 1242-1 du code du travail vise expressément le secteur audiovisuel parmi les secteurs d’activité dans lesquels des contrats de travail à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir aux contrats de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

L’accord national’«’branche de la télédiffusion’» en date du 22 décembre 2006 vise les fonctions de montage, post-production, graphisme parmi celles pour lesquelles il est possible de recourir au contrat de travail à durée déterminée d’usage.

L’article 1. 2 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle prévoit que pour les métiers énumérés dans l’annexe 1 ( dans laquelle est mentionné le métier de chef monteur) les parties reconnaissent[…], pour des activités temporaires, la possibilité de recourir à des contrats à durée déterminée.

Pour autant, la détermination par le décret et par l’accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d’usage ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné.

Il ressort des éléments communiqués que Madame X… a toujours exercé les mêmes fonctions de chef monteuse et avait pour mission de monter les sujets et les reportages diffusés quotidiennement dans les différentes éditions du journal télévisé et des magasines d’information, sur l’une des antennes de RFO sur l’île de la Réunion. Elle était amenée à travailler tout au long de l’année, et de façon continue. Elle était aussi secrétaire du CHSCT, ce qui conforte la réalité de son intégration au sein d’une équipe.

Au surplus, la cour relève que la SA France Télévisions ne communique pas tous les contrats ayant été signés par les parties ni ne justifie des motifs invoqués pour certains d’entre eux s’agissant de remplacements et d’accroissement temporaire d’activité.

Il découle des constats ainsi opérés que la SA France Télévisions disposait d’un volant de plusieurs chefs monteurs qu’elle pouvait alternativement solliciter, que Madame X… a de manière quasi ininterrompue entre septembre 2000 et septembre 2005 puis d’août 2007 à la date de la signature du contrat de travail à durée indéterminée occupé un emploi dans des conditions strictement identiques.

Nonobstant le nombre limité de jours travaillés et rémunérés chaque année par la SA France Télévisions au cours de cette collaboration, les conditions concrètes des interventions de la salariée révèlent que l’activité elle-même de montage des journaux télévisés et des magasines d’information sur l’antenne de RFO était permanente, de même que l’activité de la salariée, employée régulièrement suivant un nombre de jours quasi-constant, alors qu’il n’est pas utilement contesté que d’autres chefs monteurs assuraient les mêmes tâches, suivant les mêmes directives ou chartes de programme.

Il est aussi justifié qu’entre le 23 septembre 2005 et le 14 août 2007, la salariée a suivi une formation dans le domaine d’intervention qui était le sien, soit le montage.

Il s’ensuit que les contrats à durée déterminée successifs avaient, dans le cas d’espèce, pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de requalification remontant au premier contrat, la salariée étant réputée avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier, soit depuis le 20 décembre 2000, peu important que la relation ne soit pas constituée d’une succession ininterrompue de contrats de travail à durée déterminée et qu’il y ait eu des périodes non travaillées.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l’indemnité de requalification’

Il résulte de l’article L.1245-2 du code du travail que le montant minimum de l’indemnité de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée est calculé selon la dernière moyenne de salaire mensuel.

Madame X… a perçu des salaires nets imposables de 27’759 € pour l’année 2014, soit 2313,25 euros nets en moyenne.

Le conseil de prud’hommes a fait une exacte évaluation du préjudice subi par la salariée en fixant l’indemnité de requalification par référence à la moyenne des salaires et en lui allouant la somme de 3000 euros.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande tendant à la fixation de la rémunération de base’

Le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT soutient que lors de la remise à la salariée du contrat de travail à durée indéterminée, France Télévisions a retenu unilatéralement la classification de technicien supérieur, niveau de classification 4C maîtrise, niveau de placement 9 et fait valoir Madame X… subit une disparité de traitement par rapport aux chefs monteurs disposant d’une ancienneté comparable.

Comme faits laissant présumer l’existence d’une disparité de traitement, le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT constate que la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle applicable jusqu’en 2013 prévoyait que l’emploi de chef monteur relevait du groupe de classifications B16, que l’annexe I de l’accord France Télévisions reprenant les dispositions de la convention collective faisaient apparaître 2 types d’évolution de carrière. Les salariés B15 à B 18 accèdent sur proposition au niveau d’encadrement B19 à B 21 après 3 ans d’ancienneté puis au niveau de l’encadrement supérieur B 22 à B 24 après 3 nouvelles années d’exercice. Les salariés B 15 à B 18 accèdent automatiquement après 10 ans d’ancienneté au niveau d’encadrement B 21’1.

Il communique également un tableau, extrait d’une synthèse générale établie par le comité d’entreprise de la chaîne Réunion première, faisant apparaître que 3 salariés disposant d’une ancienneté comparable à celle de la salariée sont classés 5S.

Il fait observer que le salaire de base est fixé à la somme de 2580,42 euros alors que le salaire annuel minimal garanti par l’accord d’entreprise pour le groupe 5S niveau expertise placement 19 est de 39’381 € soit 3281 € par mois hors prime d’ancienneté, que la moyenne des salaires attribués à 4 chefs monteurs exerçant les mêmes fonctions que la salariée disposant d’une ancienneté comparable ressort à 3181 €.

Les bulletins de salaires de 4 chefs monteurs sont en effet communiqués aux débats.

Ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l’existence d’une disparité de traitement.

L’employeur répond que la salariée a vu sa date d’ancienneté établie conformément à l’article 3. 11 de l’accord d’entreprise qui précise que les périodes de collaboration sous contrats de travail à durée déterminée de toutes natures, effectuées pour l’entreprise, sont prises en compte pour la détermination de l’ancienneté à partir de la date de première collaboration et proportionnellement aux périodes d’emploi et à la durée du travail de l’intéressé. Il note que le syndicat agissant en substitution de la salariée a signé cet accord d’entreprise et a donc accepté cette disposition dont il critique à tort l’application dans le cas d’espèce.

Il ajoute qu’aucune disposition légale ou conventionnelle ne prévoit qu’un salarié embauché en contrat de travail à durée déterminée acquiert de l’ancienneté pendant les périodes non travaillées entre ses différents contrats de travail à durée déterminée.

Toutefois, il a déjà été précisé que la salariée est réputée occuper l’emploi à durée indéterminée depuis l’engagement dans le cadre du premier contrat soit en l’espèce depuis le 20 décembre 2000, même si le contrat est réputé avoir été suspendu pendant près de deux années entre le 23 Septembre 2005 et le 14 août 2007 soit pendant qu’elle a suivi une formation.

Pour autant, au regard des éléments communiqués, l’employeur ne justifie pas par des éléments objectifs le fait qu’il n’ait pas réservé à Madame X… un traitement salarial équivalent à celui qu’il a réservé à des chefs monteurs exerçant les mêmes fonctions dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée et disposant d’une ancienneté comparable.

Une véritable disparité de traitement a été réservée à la salariée.

Compte tenu de la demande formulée et des éléments dont elle dispose, la cour rétablira la salariée au positionnement lui revenant en retenant comme salaire de référence, celui de 3181 euros.

Sur les demandes de rappels de salaires’ pour la période d’avril 2011 à avril 2018

Le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT demande qu’un rappel de salaire pour un travail à temps complet soit alloué à la salariée depuis avril 2011, ce à quoi s’oppose la SA France Télévisions qui rappelle à juste titre qu’il appartient à la salariée d’établir qu’elle s’est tenue à la disposition de son employeur pendant les périodes interstitielles.

Elle rappelle que la salariée n’a pas travaillé entre le 23 septembre 2005 et le 14 août 2007, notamment.

Il résulte des éléments communiqués par le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT que Madame X… n’a pas reçu de revenus professionnels autres que les rémunérations qui lui ont été versées par la SA France Télévisions, ainsi qu’en attestent les avis d’imposition. Il s’en déduit qu’elle n’avait pas d’autres employeurs.

Les bulletins de salaire montrent aussi qu’elle ne travaillait jamais les mêmes jours d’une semaine sur l’autre ou les mêmes semaines d’un mois sur l’autre ce qui corrobore l’affirmation selon laquelle elle ne savait pas quand ni combien de fois elle serait appelée chaque mois pour travailler.

Il n’est au surplus ni soutenu, ni justifié que la salariée a refusé une quelconque mission lorsqu’elle a été contactée à cette fin.

S’agissant de la période du 23 septembre 2005 au 14 août 2007, il est prouvé que la salariée a entrepris une formation, une attestation de fin de formation en ce sens étant communiquée aux débats.

Il est aussi constant que la demande de rappel de salaire à temps plein ne couvre pas cette période.

Enfin, le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT met à juste titre l’accent sur le fait que l’employeur a admis que la salariée devait bénéficier d’un contrat de travail à temps plein lors de la signature du contrat de travail à durée indéterminée en août 2014.

Dans ces conditions la salariée établit qu’elle se tenait à la disposition de son employeur pendant les périodes interstitielles.

En conséquence, il sera fait droit à la demande de rappel de salaire pour la période d’avril 2011 à avril 2018 en tenant compte tout à la fois du salaire de référence retenu et du fait que la salariée est fondée à obtenir une requalification de la relation contractuelle à temps plein.

Une somme de 107 092 euros lui sera allouée outre les congés payés afférents.

Sur les autres demandes’

Sur la demande relative à la prime d’ancienneté

Selon l’article V4′.4 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle, une prime d’ancienneté s’ajoute au salaire de base de qualification et s’établit proportionnellement à l’ancienneté, au taux de 0, 8 % jusqu’à 20 ans et au taux de 0,5 % au-delà sans pouvoir excéder 21 % du salaire de référence.

Outre qu’elle conteste les modalités de calcul présentées par le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT, la SA France télévisions sollicite l’application du principe de proportionnalité, les salariés à temps partiel ne pouvant prétendre à la même prime d’ancienneté que ceux qui travaillent à temps complet pour une ancienneté similaire.

Dans le cas d’espèce, il a été retenu que la salariée devait bénéficier d’un rappel de salaire pour un travail à temps complet.

Ce moyen tiré du principe de proportionnalité est donc inopérant.

Dès lors que le salaire de référence est, en application de l’accord d’entreprise France télévisions du 28 mai 2013, le salaire minimum garanti du groupe de classifications 6, que la salariée n’a perçu aucune prime d’ancienneté du fait de son statut précaire jusqu’au 14 août 2014, puis qu’elle n’a perçu qu’une partie de cette prime ensuite, l’employeur n’ayant pas retenu l’ancienneté depuis le 20 décembre 2000, la cour, au regard des éléments qui lui sont soumis, fera droit à la demande présentée par le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT à ce titre.

Les primes d’ancienneté mensuelles sont à inclure dans la rémunération annuelle. Aussi, les congés payés seront-ils accordés ainsi que le demande à juste titre le syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT.

Le jugement déféré sera réformé sur ce point. Il sera fait droit aux demandes à cet égard ainsi ce que cela sera précisé dans le dispositif du présent arrêt.

Sur la prime de fin d’année’

Le principe de proportionnalité n’ayant pas vocation à être appliqué, et compte tenu du protocole «’salaires 2003’» prévoyant le versement d’une prime de fin d’année, appréciée en fonction du salaire mensuel et ce, jusqu’au 31 décembre 2012, il sera fait droit à la demande à ce titre également, suivant les modalités précisées dans le dispositif du présent arrêt.

Le jugement déféré sera réformé sur ce point.

Sur les mesures FTV

L’employeur admet que les mesures FTV pour un temps plein s’élève à 450 euros.

Il sera fait droit à cette demande dans la limite de la somme de 450 euros. Le jugement sera donc réformé sur ce point également.

Sur les demandes d’indemnités en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’

L’équité commande tout à la fois de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a accordé au syndicat National de Radiodiffusion et de Télévisions du groupe France Télévisions- SNRT-CGT une indemnité de 1000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de lui allouer une nouvelle indemnité de 2000 euros sur le même fondement pour les frais exposés par lui en cause d’appel.

La SA France Télévisions, qui succombe dans la présente instance sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a requalifié les contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée remontant au 20 décembre 2000 et alloué outre une indemnité de requalification de 3000 euros à Madame X…, une indemnité de 1000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit du syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT,

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe le salaire de Madame X… à la somme de 3181 euros par mois’;

Condamne la SA France Télévisions à verser à Madame X… les sommes suivantes’:

– 107’092 € au titre du rappel de salaire pour un travail à temps plein depuis avril 2011 jusqu’à avril 2018 inclus, outre les congés payés afférents ,

– 13’362 € au titre de la prime d’ancienneté, outre 1336,20 euros pour les congés payés afférents,

– 3935 € au titre de la prime de fin d’année,

– 450 € au titre des mesures FTV.

Condamne la SA France Télévisions à verser au syndicat National de Radiodiffusion et de Télévision du groupe France Télévisions- SNRT-CGT la somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SA France Télévisions de ses demandes,

Condamne la SA France Télévisions aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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