SOC.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 octobre 2018
Rejet
Mme X…, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1551 F-D
Pourvoi n° M 16-15.898
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Bernard Y…, domicilié […] ,
2°/ le syndicat SNRT-CGT, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 25 février 2016 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige les opposant à la société France Télévisions, société anonyme, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
La société France Télévision a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l’appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l’article L. 431-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 26 septembre 2018, où étaient présents : Mme X…, conseiller doyen faisant fonction de président et rapporteur, Mme Monge, conseiller, Mme Prieur, conseiller référendaire ayant voix délibérative, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme X…, conseiller doyen, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Y…, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société France Télévisions, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 25 février 2016), que M. Y… a été engagé à compter du 7 août 1995 par la société France 2, aux droits de laquelle vient la société France Télévisions, en qualité d’opérateur de prise de vue, photographe, statut cadre, selon divers contrats à durée déterminée d’usage ou pour accroissement temporaire d’activité ; que le salarié et le syndicat SNRT-CGT ont saisi la juridiction prud’homale d’une demande en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet et en paiement de diverses sommes ;
Sur la déchéance partielle du pourvoi :
Attendu que le syndicat SNRT-CGT n’a ni remis au greffe de la Cour de cassation, ni signifié au défendeur un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée dans le délai fixé à l’article 978 du code de procédure civile ; qu’il s’ensuit que la déchéance du pourvoi est encourue à son égard ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande en requalification du contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et en paiement de rappels de salaire, alors, selon le moyen :
1°/ que selon l’article L 3123-14 du code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit ; qu’il mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine et entre les semaines du mois ; qu’il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps plein et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur ; que pour juger que M. Y… a travaillé à temps partiel pour la société France Télévisions et ordonner la continuation du contrat de travail sur cette base, l’arrêt attaqué relève que, nonobstant la présomption de temps complet en faveur du salarié, il ne pouvait être retenu que M. Y… demeurait à la disposition constante de la société France Télévisions ; qu’en statuant ainsi sans constater que l’employeur démontrait la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle du travail convenue, la cour d’appel a violé l’article susvisé ;
2°/ qu’en tout état de cause, qu’en s’abstenant de répondre aux conclusions d’appel de M. Y… qui faisait valoir que les divers contrats de travail à durée déterminée à temps partiel établis par la société France Télévisions ne respectaient pas les exigences légales et que pour combattre la présomption de travail à temps plein qui en résultait, cette dernière devait rapporter la preuve d’une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue et d’autre part qu’il n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir à sa disposition, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.
Mais attendu que la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée du travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat ; que réciproquement, la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ;
Et attendu qu’ayant procédé à la requalification des contrats à durée déterminée et dit que le salarié bénéficiait d’un contrat à durée indéterminée depuis l’origine, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à des allégations dépourvues de précision, a estimé qu’il ne pouvait être retenu que le salarié était demeuré à la disposition constante de la société France Télévisions, à la fois durant la relation contractuelle et entre deux contrats ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de limiter le montant des sommes allouées au titre de la prime d’ancienneté, de la prime de fin d’année, du supplément familial et des mesures FTV alors, selon le moyen ;
1°/ que le salarié à temps partiel bénéficie des droits reconnus au salarié à temps complet par la loi, les conventions et accords collectifs d’entreprise ou d’établissement sous réserve, en ce qui concerne les droits conventionnels, de modalités spécifiques prévues par une convention ou un accord collectif de travail ; qu’il résulte de l’article V-4-4 de la convention collective nationale de la communication et de la production audiovisuelles qu’une prime d’ancienneté, proportionnelle au salaire de référence du groupe de qualification du salarié d’une part, au nombre d’années d’ancienneté d’autre part, s’ajoute à l’élément de rémunération déterminé par le niveau indiciaire ; que l’article 1.4.2 de l’accord d’entreprise France Télévisions du 28 mai 2013, s’y substituant, prévoit que la prime d’ancienneté, qui s’ajoute au salaire mensuel de base, est calculée en fonction de l’ancienneté dans l’entreprise à raison de 0,8 % du salaire minimal garanti du groupe de classification 6 (cadre 2) par année d’ancienneté entreprise jusqu’à 20 ans puis 0.5 par année de 21 à 36 années ; qu’il résulte de ces dispositions conventionnelles que la prime d’ancienneté a un caractère forfaitaire pour tous les salariés ; qu’en appliquant un principe de proportionnalité pour fixer le montant du rappel de prime d’ancienneté au motif que M. Y… était employé à temps partiel, la cour d’appel a violé l’article L. 3123-11 devenu L. 3123-5 alinéa 1er du code du travail, ensemble des dispositions conventionnelles susvisées ;
2°/ que le salarié à temps partiel bénéficie des droits reconnus au salarié à temps complet par la loi, les conventions et accords collectifs d’entreprise ou d’établissement sous réserve, en ce qui concerne les droits conventionnels, de modalités spécifiques prévues par une convention ou un accord collectif de travail ; qu’il résulte de l’article I 3) de l’annexe 9 à la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles que les salariés en activité ou en congé rémunéré perçoivent un supplément familial fixé à 40 points d’indice pour chacun des deux premiers enfants à charge et à 100 points d’indice pour chacun des enfants à charge suivant ; qu’aux termes de l’article 3 de l’accord d’entreprise du 28 mai 2013, qui s’y substitue, le supplément familial s’élève à 35 € pour chacun des deux premiers enfants à charge et 87 € à compter du troisième enfant à charge ; qu’il résulte de ces dispositions conventionnelles que le supplément familial a un caractère forfaitaire pour tous les salariés ; qu’en appliquant un principe de proportionnalité pour fixer le montant du rappel de supplément familial au motif que M. Y… était salarié à temps partiel, la cour d’appel a violé l’article L. 3123-11 devenu L. 3123-5 alinéa 1er du code du travail, ensemble les dispositions conventionnelles susvisées ;
3°/ que le salarié à temps partiel bénéficie des droits reconnus au salarié à temps complet par la loi, les conventions et accords collectifs d’entreprise ou d’établissement sous réserve, en ce qui concerne les droits conventionnels, de modalités spécifiques prévues par une convention ou un accord collectif de travail ; que les mesures salariales 2011 pour les salariés de France Télévision prévoient une augmentation générale forfaitaire de 600 euros bruts sur l’année pour tous les collaborateurs ; qu’en appliquant un principe de proportionnalité pour déterminer le montant du rappel de salaire dû à ce titre au motif que M. Y… était salarié à temps partiel, la cour d’appel a violé l’article L. 3123-11 devenu L. 3123-5 alinéa 1er du code du travail, ensemble les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
4°/ qu’en allouant à M. Y… certaines sommes à titre de rappels de prime d’ancienneté, de prime de fin d’année, du supplément familial et de mesures FTV sans préciser les modalités de calcul et les éléments pris en compte déterminer ces sommes, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
5°/ qu’en déboutant M. Y… de ses demandes de rappels de salaire après avoir requalifié ses contrats à durée déterminée successifs à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps partiel sur la base des deux meilleures années non prescrites 2011 et 2012 et avoir constaté une baisse manifeste et injustifiée de sa collaboration à compter de 2013 lorsque le litige est né entre les parties, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision et a violé les articles 1134 du code civil, L.1221-1, L. 3123-1, L. 3123-2, L. 3123-14 du code du travail ;