SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 septembre 2020
Rejet non spécialement motivé
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10725 F
Pourvoi n° K 19-17.772
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020
M. M… E…, domicilié […] , a formé le pourvoi n° K 19-17.772 contre l’arrêt rendu le 10 avril 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l’opposant à l’Institut national de l’audiovisuel, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est […] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations écrites de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. E…, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l’Institut national de l’audiovisuel, après débats en l’audience publique du 15 juillet 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. E… aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour M. E…
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR rejeté la demande de M. E… de reclassification ;
AUX MOTIFS QUE, sur la classification, si la position du salarié est notamment définie par le niveau et le coefficient hiérarchique qui lui est attribué, en matière de qualification, les fonctions exercées sont déterminantes ; qu’un salarié est donc en droit de demander la réévaluation de son coefficient hiérarchique sans qu’il puisse lui être opposé qu’il aurait renoncé -en exécutant son contrat de travail- à solliciter les avantages que la convention collective attribue en fonction de la qualification de l’emploi effectivement exercé ; que lorsqu’il est saisi d’une contestation à ce sujet, le juge compare les conditions prévues par la convention collective pour accéder à la qualification demandée et la situation exacte du salarié dans l’entreprise ; que par ailleurs, lorsqu’il invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal », le salarié doit soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération avec des salariés placés dans une situation identique ; qu’il incombe alors à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence de traitement, le juge appréciant ensuite leur pertinence ; que le salarié, qui obtient son reclassement au niveau hiérarchique supérieur, a droit â un rappel de salaire correspondant au minimum conventionnel de rémunération afférent à ce coefficient ; qu’en l’espèce, le conseil des prud’hommes de Créteil a accueilli la demande du salarié d’être reclassé en qualité de « cadre technique d’exploitation multimédia » et lui a accordé le rappel de salaire qu’il réclamait à ce titre, aux motifs : -qu’il résultait des pièces produites que M. E… avait pris part et réalisé des études, des projets, des missions et des travaux complexes dans son domaine de compétence comme en témoignent les conceptions de sites internet, de couverture de livre, -qu’il avait développé et amélioré de nombreux programmes, avait également été amené à établir des comptes rendus d’activités et des rédactions de méthodes et procédures, -qu’il avait également pris part à la traduction de langue étrangère telle que le portugais et s’était déplacé jusqu’au Brésil pour poursuivre une expertise, -qu’il était régulièrement invité à traduire et comprendre des documents en portugais, -qu’il avait été choisi pour former en multimédia des étudiants de licence et rémunéré en ce sens, -qu’il avait assuré une présentation et démonstration du médiascope prévue pour une vingtaine d’étudiants de licence, réalisé plusieurs missions de conception de couvertures de livre impliquant un formalisme strict imposé par la charte visuelle de l’Ina et un projet plateforme ressources durant trois ans, -qu’il avait eu la responsabilité de devis pour le service captation TV de façon autonome, effectuait des formations de cadres en interne comme le démontre sa fiche carrière, et avait assumé la responsabilité de chef de magasin, -qu’à la lecture des nombreux échanges et directives transmises par ses supérieurs, il apparaissait qu’il exerçait les fonctions de cadre technique d’exploitation, -que ses explications et les calculs détaillés pour demander un rappel de salaire étaient probants ; que M. E… demande la confirmation de ce jugement en faisant valoir au surplus que la signature de l’avenant du 1er janvier 2013 ne pouvait faire obstacle à sa demande, laquelle était fondée sur l’exécution de sa prestation de travail, correspondant à des fonctions de cadre, depuis février 2006 ; qu’il s’appuie sur la description d’un poste du groupe 5 dans la fiche de poste ainsi que sur ses compétences en développement informatique, son expertise et ses compétences linguistiques, les formations qu’il avait encadrées et reçues et les missions qu’il a réalisées ; qu’iI compare également le déroulement de sa carrière avec celui de collègues effectuant les mêmes missions ou ayant reçu la même formation que lui, estimant avoir été désavantagé, et ce sans motif légitime, invoquant une importante inégalité de traitement ; que de son côté, l’Ina objecte qu’il a fait l’objet d’un avancement au choix en janvier 2010 et d’une promotion sur un poste classé B11 le 1er janvier 2012 à la suite de réunions de commissions paritaires et elle fait à bon droit valoir que ces commissions sont composées de membres de la direction et d’organisations syndicales, conformément aux dispositions de la convention collective de la communication de la production audiovisuelle alors applicable, et qu’elles statuent sur la base d’éléments objectifs pouvant justifier d’éventuelles disparités de classification et de rémunération au sein du personnel ; que par ailleurs, M. E… n’a jamais postulé sur un quelconque poste de niveau supérieur à celui qui lui était attribué ; qu’or, les dispositions conventionnelles applicables subordonnent l’évolution d’un groupe de classification vers un groupe supérieur à une candidature sur un autre poste, laquelle ne peut intervenir qu’après deux ans d’ancienneté dans le poste ; qu’au contraire, le 1er janvier 2013, M. E… a signé un avenant par lequel il a été rétroactivement classé groupe 3, sur des fonctions de technicien de maîtrise dans le cadre du nouveau statut collectif ; qu’en outre, s’il invoque avoir subi une pression à ce sujet, il n’en justifie nullement tandis que l’Ina produit au contraire un mail adressé à tous les salariés et destiné à les aviser qu’à défaut de retour de l’avenant, la rémunération conserverait sa structure initiale telle que prévue dans l’ancienne convention ; que la cour constate également que, peu important les initiatives qu’il avait -unilatéralement- prises dans le domaine technique qu’il affectionnait, M. E… n’établit pas qu’il lui avait été confié des fonctions d’encadrement d’équipe, de supervision de prestations ou de coopération en termes de choix d’équipement, telles que définies pour le groupe 5 de l’ancienne convention ou le niveau B20 du nouvel accord d’entreprise ; que s’agissant de ses interventions dans le domaine de la formation, l’Ina établit que qu’il pouvait statutairement bénéficier d’indemnités de chargé d’enseignement y compris en sa qualité de technicien de maîtrise et qu’il était ponctuellement intervenu dans des formations dispensées par divers intervenants pour apporter des éclairages essentiellement techniques ; que lui-même avait bénéficié d’une seule formation relevant d’un cursus « cadre et maîtrise » en octobre 2012, ses autres formations -antérieuresétant des formations « métier » ou techniques, ce qui ne permet pas de démontrer qu’il exerçait des fonctions de cadre ; que s’agissant de l’inégalité de traitement également invoquée, la cour constate que : -M. G… -qui appartient au groupe « ingénierie et contrôle de qualité »- a une ancienneté bien supérieure à celle de M. E…, étant entré à l’Ina dix ans plus tôt (en 1988), n’a jamais occupé le même poste que le salarié et a fait preuve d’une plus grande mobilité fonctionnelle, -MM. A… et J… -dont le salarié affirme qu’il ont suivi la même formation que lui- sont entrées dans l’entreprise à des dates différentes (1993 pour le premier et 2003 pour le second) et n’ont pas été embauchés sur les mêmes postes (contrat de qualification puis technicien de labo film B9 pour le premier et technicien spécialisé B9 pour le second), alors que M. E… avait été engagé sur un poste d’agent technicien gestion des stocks classé B6 en 1998, -M. H… – qui exerçait dans la filière « magasin » – a été engagé en 1987 et son ancienneté ainsi que ses fonctions précédentes (« magasinier chef » de 1992 â 1998) peuvent expliquer qu’il ait été classé coefficient B11 lorsqu’il a été nommé « responsable principal de magasin » sur un emploi vacant en 1998, tandis que M. E… -qui exerçait dans la filière « technique »- s’est vu attribuer le coefficient B09 lors d’une promotion au poste de « responsable de magasin » en 2003, quatre ans après son embauche et l’exercice de fonction d’« agent technique de gestion des stocks », les deux situations n’étant donc pas davantage comparables, -M. F… R… a été engagé en 1987 sur un poste de magasinier classé A3, et il a normalement évolué pour aboutir -sur un plus grand nombre d’années- à la même classification que M. E…, – M. X… est entré en contrat de travail à durée déterminée en 1999 à l’Ina avec un baccalauréat A3 Audiovisuel et a été titularisé sur un poste relevant du niveau B9 en 2000, – Mme B…, qui était titulaire d’un diplôme d’études supérieures de cinématographie et de techniques audiovisuelles a, pour sa part, été directement été recrutée en contrat de travail à durée indéterminée en 2010 sur un poste de niveau B15, après un contrat de travail à durée déterminée ayant débuté en 2008, et elle encadre actuellement une équipe de sept personnes, dont M. E… ; que le salarié n’établit donc pas qu’il se trouvait dans une situation identique à celle des salariés avec lesquels il se compare et la différence d’évolution de carrière s’explique par des éléments objectifs expliquant un traitement différencié ; qu’en conséquence le jugement entrepris sera infirmé et M. E… débouté de ses demandes à ce titre (v. arrêt, p. 5 à 8) ;
1°) ALORS QUE lorsqu’il est saisi d’une contestation relative à la classification, le juge doit comparer les conditions prévues par les accords collectifs pour accéder à la qualification demandée et la situation exacte du salarié dans l’entreprise ; qu’en retenant, pour rejeter la demande de M. E… de reclassification, qu’il n’avait jamais postulé à un quelconque poste de niveau supérieur à celui qui lui était attribué, qu’au contraire, il avait signé un avenant par lequel il avait été rétroactivement classé groupe 3 sur des fonctions de technicien de maîtrise dans le cadre du nouveau statut collectif, qu’il n’établissait pas qu’il lui avait été confié des fonctions d’encadrement, de supervision ou de coopération et que, s’agissant de ses interventions dans le domaine de la formation, cela ne correspondait pas à des fonctions de cadre, sans de la sorte comparer les conditions prévues par les accords collectifs pour accéder à la qualification demandée et la situation exacte du salarié dans l’entreprise, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de la convention collective de la communication de la production audiovisuelle et de l’accord collectif portant statut des salariés de l’Ina ;
2°) ALORS QUE lorsqu’il invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal », le salarié doit soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération avec des salariés placés dans une situation identique ou similaire ; qu’en ajoutant, au titre de l’inégalité de traitement, que M. E… n’établissait pas qu’il se trouvait dans une situation identique à celle des salariés avec lesquels il se comparaît, quand il lui appartenait uniquement de faire état de salariés placés dans une situation identique ou similaire, la cour d’appel a violé le principe susvisé.