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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 13
ARRÊT DU 06 janvier 2023
(n° , 4 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 18/12300 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6VJP
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Bobigny RG n° 18-00920/B
APPELANTE
Madame [K] [X]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Chaouki GADDADA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739 substitué par Me Faustine GRENIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739
INTIMEES
GIE [7]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Géraldine KESPI-BUNAN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0426 substituée par Me Maud FRAJERMAN, avocat au barreau de PARIS
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SAINT DENIS
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre
Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller
Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller
Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le vendredi 02 décembre 2022, prorogé au vendredi 06 janvier 2023,
les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre et par Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l’appel interjeté par la [K] [X] (l’assurée) d’un jugement rendu le 25 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l’opposant au GIE [7] (la société) en présence de la caisse primaire d’assurance maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse).
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que l’assurée a été engagée par la société le 14 avril 2014 en qualité de secrétaire médicale ; qu’elle a été victime le 15 février 2016 d’une agression physique par un patient ; qu’un certificat médical initial a été rédigé le 2 mars 2016 mentionnant un burn-out constaté pour la première fois le 15 février 2016 ; que le 4 avril 2016, la caisse a informé l’assurée que son médecin-conseil avait estimé que la consolidation des lésions résultant de l’accident du travail du 15 février 2016 pouvait être fixée à la date du 1er mars 2016 et qu’il ne subsistait pas de séquelle indemnisable ; que le 5 décembre 2016, la caisse a pris en charge la maladie déclarée le 2 mars 2016 au titre de la législation sur les risques professionnels après avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que le 25 avril 2017, l’assurée a saisi le tribunal pour reconnaître la faute inexcusable de la société.
Par jugement en date du 25 septembre 2018 virgule le tribunal a :
– Déclaré irrecevable le recours de l’assurée pour défaut de saisine préalable de la caisse ;
– Rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires ;
– Déclaré le jugement commun à la caisse en application des dispositions de l’article L. 452-4 du code de la sécurité sociale.
Le tribunal a estimé qu’en application des dispositions de l’article L. 452-4 du code de la sécurité sociale, la saisine de la caisse préalablement à la saisine du tribunal est obligatoire et a pour effet d’interrompre la prescription de l’article L. 431-2 du même code.
Le jugement a été régulièrement notifié le 9 octobre 2018 à l’assurée qui en a interjeté appel par voie électronique le 31 octobre 2018.
Par conclusions écrites et développées oralement à l’audience par son avocat, et visées par le greffe, l’assurée demande à la cour de :
– Réformer le jugement attaqué en ce qu’il a déclaré son recours irrecevable ;
– Évoquer l’affaire au fond ;
En conséquence,
– Déclarer l’action en faute inexcusable de l’employeur recevable ;
– Dire que la société a commis une faute inexcusable ;
– Dire que la rente ou le capital servi sera majoré au maximum ;
– Ordonner avant dire droit, une expertise judiciaire et fixer les missions de l’expert comme suit :
* Convoquer les parties ;
* Se faire remettre l’entier dossier médical de l’assurée ;
* Examiner l’assurée ;
* Déterminer le déficit fonctionnel temporaire et le quantifier ;
* Évaluer le pretium doloris en lien direct avec la maladie professionnelle déclarée par l’assuré ;
* Déterminer si l’assurée a subi un préjudice esthétique et d’agrément en lien direct et exclusif avec la maladie professionnelle ;
* Déposer un pré-rapport qui sera soumis au contradictoire des parties qui pourront présenter des dires ;
* Déposer un rapport et l’adresser aux parties ;
– Condamner la société à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
L’assurée expose qu’il est de jurisprudence constante que la phase de conciliation n’est pas un préalable obligatoire au recours contentieux. Le juge de première instance ne pouvait ainsi, pas prendre prétexte d’une prétendue « volonté du législateur de développer la conciliation avant toute procédure contentieuse », alors que le texte en cause ne prévoit aucune sanction à défaut de saisine préalable de la caisse et que la Cour de cassation, saisie de la question, s’est très clairement prononcée en faveur du caractère facultatif de la saisine préalable.
Au fond, l’assurée a ajouté que la société avait pleinement conscience du danger encouru par sa salariée et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’éviter. Elle l’avait en effet alerté à de nombreuses reprises et plusieurs mois avant son accident du travail, sur la dangerosité de ses conditions de travail et sur les agressions récurrentes dont elle était la victime. Le docteur [C] en a fait de même sans que l’employeur ne prenne aucune mesure pour assurer la sécurité de son personnel. Le syndrome dépressif dont elle est victime est donc la conséquence de l’inaction de son employeur alors que celui-ci avait été alerté à plusieurs reprises par la salariée et d’autres membres du personnel de l’entreprise.
Par conclusions écrites et développées oralement à l’audience par son avocat, et visées par le greffe, la société demande à la cour de :
À titre principal,
– Confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny en date du 25 septembre 2018 en ce qu’il a déclaré irrecevable le recours de l’assurée ;
En conséquence,
– Débouter l’assurée de l’ensemble de ses demandes ;
À titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour de céans considère le recours de l’assurée recevable,
– Recueillir l’avis d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles autre que celui de la région Paris-Île-de-France précédemment désigné ;
En conséquence,
– Surseoir à statuer sur la demande en reconnaissance de la faute inexcusable formulée par l’assurée ;
– Désigner le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d’une des régions les plus proches ;
En tout état de cause,
– Condamner l’assurée à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
La société expose que la saisine de la caisse aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur est un préalable à la saisine du tribunal. Comme l’a parfaitement expliqué le tribunal, l’arrêt du 25 juillet 1984 cité par l’assurée dans ses conclusions d’appelante, est inopérant. En effet, cet arrêt ne porte pas sur la saisine préalable de la caisse par le salarié mais la décision de la caisse une fois celle-ci saisie.
Sur la demande de saisine d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la société ajoute que l’opposabilité de la décision de reconnaissance d’une maladie professionnelle ne prive pas l’employeur, dont la faute inexcusable est recherchée, de la possibilité de contester le caractère professionnel de l’accident. Elle indique contester formellement le caractère professionnel de la maladie reconnue par l’avis du comité régional.
La caisse ne verse aucun écrit et oralement observe que la cour est saisie sur une demande de faute inexcusable et s’étonne qu’entre 2016 et 2022 il n’y ait pas eu de consolidation. La caisse indique qu’elle s’associe à la position de l’assurée sur la recevabilité de son recours en faute inexcusable et s’en rapporte sur les mérites de la demande en faute inexcusable. Sur la demande de la société, à savoir la nécessité de saisir un second CRRMP, elle s’en rapporte sur la demande d’évocation.
En application du deuxième alinéa de l’article 446-2 et de l’article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées le 10 octobre 2022 pour l’exposé des moyens développés et soutenus à l’audience.
SUR CE :
L’article L. 452-4 du code de la sécurité sociale dispose qu’à défaut d’accord amiable entre la caisse et la victime d’une part et l’employeur d’autre part, sur l’existence de la faute inexcusable reprochée à ce dernier, ainsi que sur le montant de la majoration et des indemnités mentionnées à l’article L. 452-3 du même code, il appartient à la juridiction de la sécurité sociale compétente, saisie par la victime ou par la caisse, d’en décider.
Il résulte de ces dispositions que la victime n’est pas tenue, préalablement en l’instance contentieuse, de saisir la commission de recours amiable de cet organisme dans les conditions prévues par l’article R. 142-1 du code de la sécurité sociale.
Dès lors, c’est à bon droit, que l’assurée souligne que la tentative de conciliation prévue par l’article L. 452-4 du code de la sécurité sociale n’est pas prescrite à peine d’irrecevabilité de l’action contentieuse en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Le jugement sera dès lors infirmé.
Au regard de la nature du contentieux et des demandes formulées en défense, il n’y a pas lieu d’évoquer l’affaire.
La société, succombant en cette instance, devra en supporter les dépens d’appel.
Les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile par l’assurée et la société seront rejetées.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Déclare l’appel recevable ;
Infirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny du 25 septembre 2018 en toutes ses dispositions ;
Et statuant à nouveau,
Déclare le recours de [K] [X] en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, le GIE [7] recevable ;
Dit n’y avoir lieu d’évoquer l’affaire et renvoie les parties devant le Pôle social du tribunal judiciaire de Bobigny ;
Rejette les demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile présentées par [K] [X] et le GIE [7] ;
Condamne le GIE [7] aux dépens d’appel.
La greffière, La présidente,