Tentative de conciliation : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/05003

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Tentative de conciliation : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/05003
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 19/01/2023

N° de MINUTE : 23/48

N° RG 21/05003 – N° Portalis DBVT-V-B7F-T3KN

Jugement (N° 20-000003) rendu le 30 Août 2021 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de Tourcoing

APPELANT

Monsieur [P] [I]

[Adresse 3]

[Localité 19]

Représenté par Me Vincent Bué, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS (INTERVENANTS VOLONTAIREMENT)

Monsieur [F] [Y]

de nationalité Française

[Adresse 13]

[Localité 19]

Monsieur [K] [Y]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 12]

Représentés par Me Charles-Eric Thoor, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l’audience publique du 17 novembre 2022 tenue par Véronique Dellelis et Emmanuelle Boutié, magistrats chargés d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, ont entendu les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en ont rendu compte à la cour dans leur délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Par acte sous seing privé en date du 1er décembre 1994, Mme [G] [O] Veuve [Z] a donné à bail à M. [P] [I] des parcelles de terre sises à [Localité 19] (Nord) et cadastrées section AT n°[Cadastre 14] d’une contenance de 2ha 61a et 37 ca, section AT n°[Cadastre 15] d’une contenance de 1ha 01a 98ca, section AT n°[Cadastre 1] d’une contenance de 0ha 72a 19 ca, et des parcelles en nature de pâtures sises à [Localité 19] et cadastrées section AT n°[Cadastre 2] et AT n°[Cadastre 17].

Par acte d’huissier de justice en date du 30 mars 2020, Mme [N] [Y], venant aux droits de Mme [G] [O] Veuve [Z], propriétaire en pleine propriété de la parcelle cadastrée section AT n°[Cadastre 14] devenue AT n°[Cadastre 4], a délivré à M. [P] [I] un congé pour exploitation personnelle par le descendant du bailleur, Mme [D] [Y], à effet du 30 septembre 2020 et portant sur cette parcelle.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception reçue au greffe le 7 juillet 2020, M. [P] [I] a fait attraire Mme [N] [Y] devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Tourcoing aux fins notamment de voir annuler le congé délivré par acte d’huissier de justice en date du 30 mars 2020.

Il a été procédé à la tentative de conciliation lors de l’audience non publique du 15 mars 2021 et aucun accord n’a pu être trouvé. L’affaire a été renvoyée en audience de jugement.

Par jugement en date du 30 août 2021,auquel il est expressément renvoyé pour un exposé complet de la procédure antérieure au jugement et des demandes et moyens des parties, le tribunal paritaire des baux ruraux de Tourcoing a:

– rejeté l’exception de nullité du congé pour reprise du 30 mars 2020 soulevée par M. [P] [I],

– dit que le congé pour reprise délivré par Mme [N] [Y] à M. [P] [I] le 30 mars 2020 est valable;

– dit que M. [P] [I] devra avoir libéré la parcelle située sur la commune de [Localité 19] et cadastrée section Atn°[Cadastre 4] pour le 30 septembre 2021 au plus tard;

A défaut pour lui d’avoir libéré les lieux loués à cette date,

– ordonné l’expulsion de M. [P] [I] ainsi que de tous occupants de son chef de la parcelle sise à [Localité 18] et cadastrée section AT n°[Cadastre 4] avec l’assistance de la force publique si besoin est,

– rejeté la demande d’expertise judiciaire formulée par M. [P] [I] aux fins de voir le montant de l’indemnité due au preneur sortant fixé;

– condamné M. [P] [I] aux dépens;

– débouté M. [P] [I] de sa demande d’indemnité procédurale formulée en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

– condamné M. [P] [I] à verser à Mme [N] [Y] la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

– rappelé que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de droit conformément aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile.

M. [P] [I] a interjeté appel de cette décision, la déclaration d’appel visant l’ensemble des dispositions du jugement entrepris.

Mme [N] [Y] est décédée le 15 mars 2022 et ses deux fils, MM. [K] et [F] [Y] sont intervenus volontairement à l’instance.

Lors de l’audience devant cette cour, M. [P] [I], représentée par son conseil, soutient ses conclusions déposées lors de l’audience et dûment visées par le greffe, par lesquelles il demande à cette cour d’infirmer en totalité le jugement entrepris et statuant à nouveau, de:

– annuler le congé pour exploitation personnelle délivrée par la SELARL Millois Spatari Cornelio, huissiers de justice associés à [Localité 21] le 30 mars 2020 sur la parcelle sise à [Localité 18]: section AT [Cadastre 4] [Localité 20] 87 a 60 ca,

– dire en conséquence le bail renouvelé,

A titre subsidiaire,

En cas de validation du congé reprise,

– ordonner une mesure d’expertise par un expert agricole et foncier aux fins de déterminer et fixer l’indemnité due au preneur sortant;

*les parties et conseils préalablement convoqués,

*se rendre sur les lieux ; les décrire ; collationner tout document utile ;

* procéder à l’estimation des améliorations de toutes natures apportées par le preneur aux biens loués ; les chiffrer ; fixer le montant de l’indemnité due le cas échéant aux preneurs sortants dans le respect des termes de l’article L.411-71 et R.411-18 du code rural et de la pêche maritime;

* dire que l’expert saisi procédera conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile;

* fixer la consignation à valoir sur les frais d’expertise que M. [I] devra verser à la régie des avances et des recettes du tribunal judiciaire de Lille,

* dire que faute de consignation dans le délai imparti par votre juridiction, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet,

* dire le délai pour déposer le rapport définitif après pré rapport et observations des parties,

* dire que le président du tribunal paritaire est compétent pour suivre les opérations d’expertise ;

Dans tous les cas:

– condamner Messieurs [F] et [K] [Y] à payer à M. [P] [I] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

M. [I] soutient que le congé délivré le 30 mars 2020 ne contient pas les mentions exigées par l’article L.411-47 du code rural et de la pêche maritime dans la mesure où il fait mention que Mme [Y] est ‘étudiante’ et demeure au ‘[Adresse 10] à [Localité 19]’ sans mention de l’existence d’un bâtiment agricole. En outre, il précise que le défaut de mention de structure sociétaire dans le congé constitue une imprécision qui est de nature à induire le preneur en erreur.

Par ailleurs, M. [I] fait valoir qu’il n’est pas justifié par la bailleresse des prescriptions de l’article L.411-59 du code rural et de la pêche maritime pour valider le congé rural pour exploitation personnelle, la bénéficiaire du droit de reprise ne détaillant qu’un projet professionnel sommaire et non abouti économiquement et financièrement. Il expose que Mme [Y] ne démontre pas posséder sur place de bâtiment agricole adapté ni de bâtiment d’élevage destiné à accueillir les ovins et ne produit aucun titre de propriété ou bail attestation de la réalité et de la gélaité de l’occupation de l’immeuble.

De plus, il soutient que Mme [Y] ne justifie pas de la capacité ou de l’expérience requise prévue par les articles L.331-2 du code rural et de la pêche maritime et ne démontre pas être en conformité avec le contrôle des structures agricoles ni disposer du matériel agricole nécessaire pour exploiter la parcelle.

Enfin, à titre subsidiaire, il ajoute qu’il exploite les parcelles depuis le début de l’automne 1984 et que l’entretien et la bonne exploitation de la parcelle n’est pas contestée.

Lors de l’audience devant cette cour, MM. [F] et [K] [Y], venant aux droits de Mme [N] [Y], représentés par leur conseil, soutiennent leurs conclusions déposées lors de l’audience et dûment visées par le greffe, par lesquelles ils demandent à la cour de rejeter l’appel, de confirmer le jugement entrepris et condamner M. [I] au paiement d’une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MM. [F] et [K] [Y] font essentiellement valoir que l’adresse figurant sur le congé était celle de Mme [Y] au jour de la délivrance du congé et qu’à cette même date, Mme [D] [Y] était encore ‘étudiante’ en brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole. Ils précisent que l’article L.411-47 du code rural et de la pêche maritime ne mentionne pas, parmi les mentions obligatoires, l’inventaire des bâtiments agricoles et que Mme [D] [Y] disposait, à la date d’effet du congé, soit le 30 septembre 2021, du bagage académique et d’une première expérience professionnelle, lui permettant d’assumer pleinement son projet de reprise.

Ils soutiennent aussi que Mme [Y] est exempte d’autorisation au titre du contrôle des structures, la superficie reprise étant inférieure au seuil prévu par le SDREA, qu’elle réside à proximité de la parcelle reprise et exploite d’autres parcelles adjacentes, qu’elle justifie de l’achat en vue de son installatin de divers matériels agricoles adaptés à une exploitation de maraichage bio et qu’elle s’est vue délivrer une certification Ecocert en mars 2021.

Il est pour le surplus renvoyé aux écritures des parties pour un exposé complet de leurs moyens et arguments.

SUR CE ,

Sur la validité formelle du congé

Aux termes des dispositions de l’article L.411-47 du code rural et de la pêche maritime, le propriétaire qui entend s’opposer au renouvellement doit notifier congé au preneur, dix-huit mois au moins avant l’expiration du bail, par acte extrajudiciaire.

A peine de nullité, le congé doit:

– mentionner expressément les motifs allégués par le bailleur;

– indiquer, en cas de congé pour reprise, les nom et prénom, âge, domicile et profession du bénéficiaire ou des bénéficiaires devant exploiter conjointement le bien loué et, éventuellement, pour le cas d’empêchement, d’un bénéficiaire subsidiaire, ainsi que l’habitation ou éventuellement les habitations que devront occuper après la reprise le ou les bénéficiaires du bien repris;

– reproduire les termes de l’alinéa premier de l’article L.411-54.

La nullité ne sera toutefois pas prononcée si l’omission ou l’inexactitude constatée ne sont pas de nature à induire le preneur en erreur.

Par acte d’huissier de justice en date du 30 mars 2020, Mme [N] [Y] a fait délivrer à M. [I] un congé pour reprise au profit de Mme [D] [Y], sa petite-fille, rédigé ainsi:

‘ A LA DEMANDE DE

Madame [Y] [N] [R] [M], de nationalité française, née le 20 septembre 1930 à [Localité 19] demeurant [Adresse 11] à [Localité 19] venant aux droits de Mme [Z] [G].

(…)

Congé vous est donné pour le terme du 30 septembre 2020

Aux motifs suivants:

reprise pour permettre l’installation du projet agricole de la bénéficiaire, petite-fille de la propriétaire, en vue de mener un projet de maraichage biologique avec poules pondeuses, fruitiers, petits fruitiers et brebis shropshire pour l’entretien du futur verger.

Au bénéfice de:

[Y] [D]

36 ans

Etudiante en Brevet Professionnel d’Entreprise Agricole (BPREA), diplômée en décembre 2020 demeurant [Adresse 9] à [Localité 19], domicile qui sera occupé après la reprise’.

En cause d’appel, M. [I] invoque la nullité du congé en faisant valoir que la profession de Mme [D] [Y], bénéficiaire de la reprise, n’est pas reprise dans le congé et que celui-ci ne mentionne aucune forme sociale d’exploitation, le défaut de mention de structure sociétaire constituant une imprécision de nature à induire le preneur en erreur.

Alors que la régularité du congé s’apprécie à la date de sa délivrance, le tribunal a justement relevé que la mention dans le congé du statut d’étudiante de Mme [D] [Y] n’est pas de nature à induire M. [I] en erreur sur le caractère sérieux du projet de reprise, celle-ci étant à la date de sa délivrance, étudiante en Brevet Professionnel d’Entreprise Agricole, ayant entrepris des études dans le domaine agricole dans le cadre d’une reconversion professionnelle et obtenu son diplôme le 10 juillet 2020.

En outre, si M. [I] soutient que l’absence de mention de la structure sociétaire constitue une imprécision de nature à induire le preneur en erreur, force est de constater que Mme [D] [Y] n’avait au jour de la délivrance du congé, que le statut d’étudiante sans que les dispositions de l’article L.411-47 du code rural et de la pêche maritime susvisées ne rendent obligatoire la mention de la forme juridique de l’exploitation envisagée dans le cadre de la reprise.

Par ailleurs, il convient de relever qu’en tout état de cause, M. [I] ne rapporte pas la preuve d’un grief résultant de l’absence de ces mentions.

Il y a donc lieu de rejeter l’exception de nullité du congé soulevée par M. [I], la décision entreprise étant confirmée de ce chef.

Sur la validation au fond du congé pour reprise

L’article L. 411-59 du code rural dispose que :

Le bénéficiaire de la reprise doit, à partir de celle-ci, se consacrer à l’exploitation du bien repris pendant au moins neuf ans soit à titre individuel, soit au sein d’une société dotée de la personnalité morale, soit au sein d’une société en participation dont les statuts sont établis par un écrit ayant acquis date certaine. Il ne peut se limiter à la direction et à la surveillance de l’exploitation et doit participer sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation. Il doit posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir.

Le bénéficiaire de la reprise doit occuper lui-même les bâtiments d’habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l’exploitation directe.

Le bénéficiaire de la reprise doit justifier par tous moyens qu’il satisfait aux obligations qui lui incombent en application des deux alinéas précédents et qu’il répond aux conditions de capacité ou d’expérience professionnelle mentionnées aux articles L. 331-2 à L. 331-5 ou qu’il a bénéficié d’une autorisation d’exploiter en application de ces dispositions.

Il résulte des pièces produites que Mme [D] [Y], petite-fille de Mme [N] [Y] et bénéficiaire de la reprise, est titulaire d’un brevet professionnel de responsable d’entreprise agricole délivré le 10 juillet 2020, ce diplôme marquant l’aboutissement d’une reconversion professionnelle après une année de stage en maraîchage réalisé sur la commune de [Localité 22] et dispose ainsi de la compétence professionnelle et des diplômes nécessaires à la date d’effet du congé de nature à justifier le projet de reprise des terres à son profit, point qui n’est d’ailleurs pas discuté par l’appelant.

En outre, s’agissant de la conformité du projet au contrôle des structures, Mme [Y] a produit la réponse du Préfet du Nord à sa demande tendant à se voir autorisée à exploiter les parcelles objet du présent litige, réponse en date du 8 mars 2021, dans laquelle l’autorité administrative précise que compte tenu des informations communiquées la demande de l’intéressé n’est pas soumise à autorisation préalable au titre de la réglementation du contrôle des structures.

Indépendamment de cette réponse administrative, la cour précisera qu’il résulte des éléments de la cause que les seuils de contrôle tels que prévus par l’article L. 331-2 du code rural et le schéma directeur départemental ne sont pas franchis dans le cadre de l’opération considérée.

La contestation porte en réalité sur les moyens dont dispose Mme [D] [Y] pour assurer la faisabilité de son projet.

En premier lieu, M. [I] soutient que Mme [Y] ne justifie pas disposer d’un bâtiment agricole adapté permettant l’exploitation directe des biens repris ainsi que le stockage des matériels et engins agricoles.

Alors qu’il résulte des termes du congé délivré à M. [I] que Mme [Y] dispose d’un logement d’habitation situé au [Adresse 9] à [Localité 19], situé à proximité immédiate de la parcelle objet de la reprise, le plan cadastral produit aux débats fait état de l’existence d’un hangar jouxtant l’habitation de Mme [Y] et les parcelles exploitées permettant d’entreposer le matériel nécessaire à l’exploitation agricole.

En outre, si M. [I] fait état de l’absence de bâtiment d’élevage destiné à accueillir les ovins, il convient de relever que la déclaration de création d’une entreprise agricole effectuée par Mme [Y] le 29 juin 2020 fait état d’une activité principale de ‘culture de légumes, de melons, de racines et de tubercules’.

Par ailleurs, si le procès-verbal de constat établi le 11 septembre 2020 précise que ‘ces parcelles ne sont pas exploitées ; je note la présence d’herbes hautes et de trois moutons’, ces éléments ne suffisent pas à remettre en cause la réalité de la volonté de Mme [D] [Y] d’exploiter la parcelle litigieuse, le tribunal ayant justement relevé d’une part, que les parcelles bénéficient d’une classification en agriculture biologique aux termes du rapport d’audit réalisé par la SAS Ecocert le 10 mars 2021 et que, d’autre part, qu’il résulte du courrier établi par le 2 avril 2021 par la direction départementale des territoires et de la mer de la Préfecture du Nord que l’administration ne peut s’opposer au retournement des parcelles sises à [Localité 19] et cadastrées section AT n°[Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7] et [Cadastre 8].

Ainsi, le simple fait que l’exploitation des terres par Mme [D] [Y] soit très différente de celle de M. [I] , s’agissant de cultures maraîchères réalisées dans les conditions de l’agriculture biologique, ce qui demande un certain temps d’adaptation pour que les terres correspondent aux requis de cette forme d’agriculture ne permet pas de caractériser l’absence de volonté réelle du bénéficiaire de la reprise d’exploiter la parcelle objet de cette reprise. A cet égard, le constat produit par l’appelant pour tenter de démontrer que les terres ne seraient plus convenablement exploitées n’est pas significatif.

En outre, s’agissant du matériel agricole, c’est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le tribunal a retenu d’une part, que Mme [Y] démontre avoir acquis outre trois agnelles, du matériel agricole de petite taille destiné à son installation dans le cadre d’une exploitation maraîchère sans mécanisation et disposer des fonds nécessaires au financement de l’achat d’un surplus de matériel et notamment d’une serre et d’autre part, qu’elle communique le projet d’installation qui porte sur une exploitation maraîchère sans mécanisation inspirée de la permaculture insérée dans un quartier résidentiel, le budget prévisionnel, le plan de financement et le projet de résultat en cinq ans, l’importance des démarches réalisées démontrant à la fois la volonté réelle de Mme [Y] d’exploiter personnellement la parcelle reprise et la crédibilité économique du projet de reprise en dépit de son originalité au regard de la structuration des exploitations locales.

De plus, en cause d’appel, le caractère pérenne du projet porté par Mme [Y] est conforté par les pièces communiquées devant la cour, s’agissant de la conclusion de plusieurs partenariats avec des entreprises locales dans le cadre de la livraison de paniers bio et de l’organisation d’ateliers pédagogiques sur son exploitation.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, la cour estime qu’il est suffisamment établi que Mme [Y] dispose des moyens nécessaires propres à justifier du caractère réel et sérieux de son installation.

Enfin, il convient d’observer d’ailleurs que l’entreprise de Mme [D] [Y] est inscrite au registre du commerce et des sociétés depuis le 26 août 2020 et les premières factures liées au fonctionnement de cette entreprise ainsi créée sont produites en cause d’appel.

Dès lors, il convient de valider le congé délivré le 30 mars 2020 en ce qu’il a été délivré pour reprise pour exploitation par Mme [D] [Y].

La décision entreprise sera donc confirmée sur ce point.

Sur la demande subsidiaire d’expertise sur l’évaluation de l’indemnité due au preneur sortant

Aux termes des dispositions de l’article L.411-69 alinéas 1 et 2 du code rural et de la pêche maritime, le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué, a droit, à l’expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail.

Sont assimilées aux améliorations les réparations nécessaires à la conservation d’un bâtiment indispensable pour assurer l’exploitation du bien loué ou l’habitation du preneur, effectuées avec l’accord du bailleur par le preneur et excédant les obligations légales de ce dernier. Il en est de même des travaux ayant pour objet de permettre d’exploiter le bien loué en conformité avec la législation ou la réglementation.

Au soutien de sa demande subsidiaire tendant à la désignation d’un expert agricole et foncier afin de calculer l’indemnité de sortie due au preneur sortant, M. [I] fait valoir qu’il exploite les parcelles litigieuses depuis le début de l’automne 1984.

Toutefois, si l’entretien et les conditions d’exploitation de la parcelle ne sont pas contestés en l’espèce, c’est à juste titre que le tribunal a relevé que M. [I] ne justifie pas des améliorations culturales apportées au fonds loué, en l’absence de tout élément de preuve produit aux débats sur ce point.

Ainsi, il y a lieu de rejeter sa demande d’expertise judiciaire, une telle mesure d’expertise judiciaire n’ayant pas pour objet de pallier la carence d’une partie dans l’administration de la preuve, la décision entreprise étant confirmée de ce chef.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

M. [I], partie perdante, sera condamné à supporter les dépens d’appel en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable de le condamner à verser à MM. [Y] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Condamne M. [P] [I] à verser à MM. [F] et [K] [Y] la somme de

1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

Condamne M. [P] [I] aux dépens d’appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Véronique DELLELIS

 


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