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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78H
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 JANVIER 2023
N° RG 21/07255 – N° Portalis DBV3-V-B7F-U36J
AFFAIRE :
[X] [F]
[D] [V] [L] épouse [F]
C/
[E] [I]
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 23 Novembre 2021 par le Tribunal de proximité d’ASNIERES
N° RG : 2020/A299
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 19.01.2023
à :
Me Bruno ADANI de la SELARL ADANI, avocat au barreau de VAL D’OISE
Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [X] [F]
né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 8] (Salamanca – Espagne)
de nationalité Espagnole
[Adresse 5]
[Localité 7]
Madame [D] [V] [L] épouse [F]
née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentant : Me Bruno ADANI de la SELARL ADANI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 183 – N° du dossier 207962
APPELANTS
****************
Monsieur [E] [I]
né le [Date naissance 4] 1983
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Catherine WOJAKOWSKI de l’AARPI IW AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0269 – Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20220040
INTIMÉ
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Décembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Se prévalant d’une ordonnance de référé réputée contradictoire rendue par le tribunal d’instance d’Asnières-sur-Seine, le 8 juillet 2019 qui a constaté l’acquisition de la clause résolutoire au 20 septembre 2017, et d’une ordonnance rectificative du 6 septembre 2019, M [F] a, par requête reçue le 7 février 2020, saisi le tribunal de proximité d’Asnières d’une demande aux fins de saisie des rémunérations de M. [I], à hauteur de la somme de 26 934,32 euros en principal correspondant à un solde de loyers, charges et indemnités d’occupation, outre des frais à hauteur de 3277,08 euros.
Par ordonnance non contradictoire rendue le 6 octobre 2020, la saisie des rémunérations de M. [I] a été autorisée pour la somme globale de 34 902,96 euros.
M. [I] ayant contesté la procédure de saisie des rémunérations le 22 octobre 2020, les parties ont alors été régulièrement convoquées en difficultés d’exécution par le greffe du tribunal de proximité d’Asnières, et le tiers saisi, la société Les Trois chênes Villechenève, a été enjoint d’interrompre, momentanément, les prélèvements opérés sur les salaires de M. [I], par courrier du 26 novembre 2020.
Par ordonnance contradictoire rendue le 23 novembre 2021, le tribunal de proximité d’Asnières a :
déclaré irrecevable M. [F] en sa demande tendant à la saisie des rémunérations de M. [I],
ordonné la mainlevée de la saisie des rémunérations de M. [I], diligentée à la requête de M. [F] et notifiée au tiers-saisi, la société Les Trois chênes Villechenève,
ordonné la restitution à M. [I] des sommes prélevées sur ses rémunérations avant la suspension de la procédure notifiée au tiers saisi le 26 novembre 2020,
débouté M. [I] de ses demandes reconventionnelles en dommages et intérêts et frais irrépétibles,
laissé les dépens de la présente instance la charge de M. [F].
Le 6 décembre 2021, M. [F] auquel s’est jointe Mme [D] [L] son épouse, a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de leurs dernières conclusions transmises au greffe le 5 février 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les appelants demandent à la cour de :
les dire et juger recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
infirmer l’ordonnance en date du 23 novembre 2021 rendue par le tribunal de proximité d’Asnières en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
dire et juger qu’ils justifient d’un titre exécutoire définitif,
dire et juger que la procédure de saisie des rémunérations diligentée à l’encontre de M. [I] est parfaitement régulière et bien fondée,
ordonner la saisie des rémunérations de M. [I] entre les mains de la société Les Trois chênes Villechenève, [Adresse 10],
fixer leur créance à l’égard de M. [I] à la somme de 42 994,89 euros, termes de juillet 2021 inclus, outre les intérêts, les frais d’huissier et de procédure,
A titre subsidiaire,
fixer la créance de M. et Mme [F] à l’égard de M. [I] à la somme de 24 616,45 euros, termes de juin 2019 inclus, toutes causes confondues,
En tout état de cause,
condamner M. [I] au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ,
condamner M. [I] aux entiers dépens lesquels comprendront, notamment, le timbre fiscal de 225 euros et les frais de signification de la déclaration d’appel et des présentes conclusions.
Au soutien de leurs demandes M. et Mme [F] font valoir :
que l’ordonnance de référé rendue le 8 juillet 2019 et l’ordonnance rectificative rendue le 6 septembre 2019 par le tribunal d’Asnières-sur-Seine ont force de chose jugée, depuis l’arrêt confirmatif rendu par la cour d’appel de Versailles le 3 juin 2021 ; que dès lors, le titre en vertu duquel la demande de saisie des rémunérations a été effectuée est un titre exécutoire définitif, constatant l’existence d’une créance certaine, liquide et exigible, conformément à l’article L.111-2 du code des procédures civiles d’exécution ; que l’arrêt rendu le 3 juin 2021 par la cour d’appel de Versailles a sécurisé toute la procédure de sorte qu’il n’est plus possible de remettre en cause, ni la délivrance de l’assignation, ni celle de la signification de la décision ;
qu’au demeurant, l’assignation en référé et la signification de l’ordonnance de référé en date du 16 juillet 2019 sont régulières pour avoir été opérées par dépôt à l’étude de huissier, après vérification de son domicile par trois éléments qui constituent des « vérifications utiles » ; que M. [I] n’a jamais notifié au mandataire locatif son départ des lieux et n’a pas délivré congé en ce sens ;
que la solidarité de l’article 220 du code civil a vocation à s’appliquer aux dettes locatives et aux indemnités d’occupation mensuelles ; que les bailleurs n’ont jamais été informés de la procédure de divorce, lequel n’a été publié sur l’acte d’état-civil de M. [I] que le 18 juin 2019, soit postérieurement à l’audience de référé du 20 mai 2019, de sorte qu’il ne leur est pas opposable avant cette date conformément à l’article 262 du code civil ; qu’en outre, en raison de la co-titularité du bail, il était légitime que M. [I] soit attrait à la procédure en qualité de locataire.
Par dernières conclusions transmises au greffe le 16 février 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, l’intimé, demande à la cour de :
le dire et juger recevable et bien fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions,
débouter les consorts [F] de l’intégralité de leurs prétentions plus amples et contraires,
En conséquence,
confirmer purement et simplement l’intégralité des dispositions de l’ordonnance rendue le 23 novembre 2021 par le tribunal de proximité d’Asnières ,
condamner les consorts [F] au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
condamner les consorts [F] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Lafon, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes M. [I] fait valoir :
que le juge de l’exécution est parfaitement compétent pour apprécier la validité de la signification de l’ordonnance de référé, la cour d’appel de Versailles, dans son arrêt rendu le 3 juin 2020 n’ayant pas analysé le fond du dossier ni statué sur la régularité de cette signification, ainsi que pour ordonner la mainlevée de cette saisie ;
que, comme l’a affirmé le juge de l’exécution, les consorts [F] ont signifié l’ordonnance de référé rendue le 8 juillet 2019 à une adresse à laquelle M. [I] ne résidait plus depuis 2013 ce que le bailleur a reconnu au vu des mentions figurant dans l’ordonnance même ; que l’ordonnance non valablement signifiée ne vaut pas titre exécutoire ;
qu’il n’a pas non plus été valablement convoqué à la tentative de conciliation devant précéder la mise en place d’une saisie des rémunération en application de l’article R.3252-12 du code du travail, dont il n’a été averti que par son employeur, ce qui lui a permis de la contester ;
que contrairement à ce que prétendent les consorts [F], la solidarité de l’article 220 du code civil ne joue pas en matière d’indemnité d’occupation, considérant qu’elle est due en raison de la faute quasi délictuelle commise par celui qui se maintient illégalement dans les lieux ; qu’au demeurant, le jugement de divorce a été rendu le 15 novembre 2017, puis retranscrit le 18 juin 2019, ce qui ne permet plus de le tenir des dettes postérieures à cette date, par application de l’article 1751 du code civil.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 18 octobre 2022. L’audience de plaidoirie a été fixée au 14 décembre 2022 et le prononcé de l’arrêt au 19 janvier 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, pour autant qu’elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion et ne répond aux moyens que pour autant qu’ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions, étant souligné que les « dire et juger » qui sont des rappels des moyens invoqués à l’appui des demandes, ne conférant pas -hormis les cas prévus par la loi- de droit à la partie qui les requiert, ne sont pas des prétentions, au sens de l’article 4 du code de procédure civile.
Pour statuer comme il l’a fait, le juge de l’exécution a constaté que la signification de l’ordonnance de référé au mari faite en connaissance de cause, à l’adresse de l’ancien domicile conjugal à laquelle ne résidait plus M [I] depuis l’ordonnance de non-conciliation du 9 avril 2013 qui en a attribué la jouissance à l’épouse, ne permettait pas au bailleur de se prévaloir d’un titre exécutoire valable pour fonder une saisie des rémunérations contre M [I].
M [F] conteste cette décision au motif que l’appel de M [I] contre l’ordonnance de référé ayant été déclaré irrecevable, l’arrêt rendu le 3 juin 2021 par la cour d’appel de Versailles, soit avant que ne statue le juge de l’exécution, avait sécurisé toute la procédure de sorte qu’il ne lui était plus possible de remettre en cause, ni la délivrance de l’assignation, ni celle de la signification. Il soutient qu’il n’appartient pas au juge de l’exécution de remettre en cause le titre exécutoire qui sert de fondement aux poursuites et que désormais le titre en vertu duquel il demande la saisie des rémunérations de M [I], qui constate l’existence d’une créance certaine liquide et exigible, est définitif.
En application de l’article L213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution, qui a pour vocation de connaître des difficultés d’exécution des titres exécutoires, est parfaitement compétent pour apprécier le caractère exécutoire d’une décision de justice invoquée dans le cadre de la contestation d’une mesure d’exécution forcée. Or, en vertu de l’article 503 du code de procédure civile, une décision même définitive ne peut être exécutée contre celui auquel elle est opposée qu’après lui avoir été notifiée, à moins que l’exécution n’en soit volontaire.
L’arrêt du 3 juin 2021 a déclaré l’appel irrecevable comme tardif pour la seule raison selon les termes de l’arrêt, que M [I] avait saisi la cour d’appel au dispositif de ses conclusions d’une demande tendant au constat de la recevabilité de son appel, reposant sur un moyen de nullité de la signification de l’ordonnance de référé développé dans la discussion, sans avoir fait figurer au dispositif des conclusions, une prétention tendant à la nullité de la signification. Cet arrêt, qui en application de l’article 504 du code de procédure civile a eu pour effet de rendre exécutoire l’ordonnance de référé au seul motif qu’elle n’est désormais plus susceptible d’un recours suspensif, ne peut lui-même être exécuté contre M [I] sans lui avoir été valablement signifié.
A défaut de justification de la signification de cette décision, la demande de saisie des rémunérations de M [I] ne peut prospérer.
A ce motif, l’ordonnance du juge de l’exécution sera confirmée, et les appelants déboutés de toutes leurs demandes.
Les appelants supporteront les dépens d’appel et aucune considération d’équité ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne les appelants aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l’article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,