Tentative de conciliation : 17 février 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/00699

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Tentative de conciliation : 17 février 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/00699
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17/02/2023

ARRÊT N° 82/2023

N° RG 21/00699 – N° Portalis DBVI-V-B7F-N7IZ

MP.B/K.S

Décision déférée du 18 Janvier 2021

Pole social du TJ d’ALBI

19/00028

[H] [I]

S.A.S. [6]

C/

[W] [J]

CPAMDU [Localité 8]

Compagnie d’assurance [4]

INFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 3 – Chambre sociale

***

ARRÊT DU DIX SEPT FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A.S. [6]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représentée par Me Laurent BOGUET de la SCP CATALA & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE substitué par Me Martin VATINEL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉES

Madame [W] [J]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Charlotte CHACON de la SELARL TERRIE CHACON, avocat au barreau D’ALBI

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU [Localité 8]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

représentée par Mme [S] [O] (Membre de l’organisme) en vertu d’un pouvoir général

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Compagnie d’assurance [4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Georges DAUMAS de la SCP GEORGES DAUMAS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945.1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 8 décembre 2022, en audience publique, devant Mmes N. ASSELAIN et MP BAGNERIS, conseillères chargées d’instruire l’affaire, les parties ne s’y étant pas opposées.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

N. ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente

MP. BAGNERIS, conseillère

M. SEVILLA, conseillère

Greffier, lors des débats : S.THAUVIN

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

– signé par N.ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente, et par K. BELGACEM, greffière de chambre.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [W] [J] a été engagée par la société [6] en qualité d’hôtesse de caisse, suivant contrats de travail à durée déterminée à compter de décembre 2013, puis à durée indéterminée du 3 décembre 2014.

La déclaration d’accident du travail souscrite par l’employeur

le 29 octobre 2015 mentionne un accident du travail survenu le 27 octobre 2015 à 18 heures 44, relaté ainsi : ‘attaque à main armée à la station service’.

Le certificat médical initial du 28 octobre 2015 mentionne un état de stress post traumatique.

La caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du [Localité 8] a reconnu le caractère professionnel de l’accident.

Mme [W] [J] a été en arrêt de travail du 28 octobre 2015 au 20 mai 2018, date à laquelle son état de santé a été considéré comme consolidé, avec un taux d’incapacité permanente partielle 13%, dont 3% au titre de l’incidence professionnelle.

Elle a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail, et a fait l’objet d’un licenciement pour inaptitude le 28 juin 2018.

Par requête du 7 janvier 2019, après échec de la tentative de conciliation, Mme [W] [J] a saisi le tribunal pour obtenir reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

Par jugement du 26 janvier 2021, le tribunal judiciaire d’Albi a :

– accueilli l’intervention volontaire de la société [3] en qualité d’assureur de la société [6] et déclaré ‘irrecevable l’intervention volontaire du cabinet [E] [R], agent de la compagnie [3], formée par conclusions écrites déposées à l’audience du 23 novembre 2020, soit postérieurement à la clôture des débats du 17/9/2020′,

– dit que l’accident du travail dont a été victime Mme [W] [J]

le 27 octobre 2015 est dû à la faute inexcusable de la société [6]

– fixé au maximum la majoration du taux de la rente allouée à Mme [W] [J],

– déclaré le jugement commun à la CPAM du [Localité 8] qui fera l’avance à Mme [W] [J] des provisions et indemnités dues à cette dernière ainsi que des frais d’expertise et en récupérera le montant auprès de l’employeur ou son substitué,

– avant dire droit sur l’indemnisation des préjudices de Mme [W] [J], ordonné une expertise médicale, confiée au docteur [U],

– réservé les dépens et demandes formées au titre des frais irrépétibles,

– rejeté le surplus des demandes.

La société [6] a relevé appel de ce jugement par

déclaration du 15 février 2021.

La société [6], par conclusions visées au greffe le 12 mai 2021 et maintenues à l’audience, conclut à l’infirmation du jugement, au rejet des demandes de Mme [W] [J] et au paiement de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Soutenant que Mme [W] [J] ne démontre pas l’existence d’une faute inexcusable à l’origine de son accident du travail, elle indique qu’à la suite d’un premier braquage en 2000, elle a renforcé les mesures de sécurité de façon suffisante au regard des exigences de la loi et de la jurisprudence, produit le document unique de prévention des risques retenant l’hypothèse du braquage, et soutient qu’elle ne pouvait anticiper la commission de cette infraction volontaire.

Mme [W] [J], par conclusions visées au greffe

le 30 septembre 2021 et maintenues à l’audience, conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société [6] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles.

Se fondant sur l’article L 452-1 du code de la sécurité sociale, elle invoque la faute inexcusable de son employeur dans la survenance de l’accident en soulignant qu’elle n’a pas reçu de formation pour faire face au braquage survenu le 27 octobre 2015, dans un contexte où elle ne disposait pas de bouton d’alarme et où le système de vidéosurveillance ne concernait que le parking sud, et non le local dans laquelle elle travaillait.

Elle fait valoir en outre que cette station-service avait déjà été victime de braquages en 2000 et 2011 et reproche à la société [6] de ne pas avoir renforcé la sécurité pour prévenir la troisième attaque de 2015.

Elle invoque le non respect de l’obligation de l’employeur de transcrire dans un document unique l’ensemble des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs et relève que le document produit par celui-ci a été établi postérieurement à l’accident en litige.

Elle conteste la réalité des mesures de sécurité invoquées par la société [6].

La société [3], intervenue volontairement à l’instance en qualité d’assureur de la société [6], et le cabinet [E] [R], par conclusions visées au greffe le 14 septembre 2021 et maintenues à l’audience, concluent à la réformation du jugement, au rejet des demandes de Mme [W] [J] et à la mise hors de cause du cabinet [R], agent d’assurance.

Ils soutiennent que Mme [W] [J] ne rapporte pas la preuve l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur à l’origine de l’accident du travail.

Ils contestent l’existence d’un lien entre l’agression et une faute de l’employeur, affirmant qu’il a mis en place un dispositif de sécurité adapté et permis à Mme [W] [J] de suivre une formation à la sécurité.

La CPAM du [Localité 8], à l’audience, a déclaré s’en remettre à la décision de la juridiction, et dans l’hypothèse où une faute inexcusable serait retenue, demande que son action récursoire soit confirmée.

L’affaire a été débattue à l’audience du 8 décembre 2022 et la décision a été mise en délibéré au 17 février 2023.

MOTIFS

Sur la demande de mise hors de cause

Il conviendra de donner acte à la société [3] de son intervention volontaire en qualité d’assureur de la société [6], en lieu et place du cabinet [R], agent d’assurance, dont la demande de mise hors de cause devra être accueillie.

Le jugement, qui a improprement déclaré irrecevable une intervention volontaire du Cabinet [R] alors que ce dernier avait été attrait en la cause par Mme [W] [J], sera infirmé en ce sens.

Sur la faute inexcusable

En application des articles L 452-1 du code de la sécurité sociale,

L 412-1 et R 4121-4 du code du travail, déjà exposés dans le jugement auquel la cour renvoie, l’employeur est tenu de garantir la sécurité et protéger la santé de ses salariés.

Le manquement de l’employeur à cette obligation légale a le caractère d’une faute inexcusable lorsque celui-ci avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

En l’espèce, dans un contexte où il ressort des pièces produites que la station service exploitée par la société [6] avait déjà fait l’objet de plusieurs braquages, en 2000 et 2011, force est de constater que les mesures de sécurité n’ont pas été adaptées pour protéger Mme [W] [J] des nouveaux faits dont elle a été la victime en 2015.

En effet, au vu du rapport d’enquête des services de police du 15 janvier 2016, seule une caméra de surveillance de ‘qualité passable’ a pu rendre compte de l’arrivée dans la station-service de deux individus sur une moto.

En l’absence de caméra surveillant spécifiquement le local où travaillait Mme [W] [J], l’équipement existant s’est toutefois avéré insuffisant pour apporter des précisions sur la scène de l’agression dont elle a été victime.

En outre, le document produit par la société [6] pour prétendre que Mme [W] [J] aurait suivi une formation à la sécurité pour faire face à un tel événement n’étant ni daté ni émargé, il ne peut suffire à contredire la contestation opposée sur ce point (pièce 20).

Quant à la mise à disposition d’un téléphone invoquée par la société [6], elle ne saurait avoir l’efficacité d’une alarme, dont Mme [W] [J] déplore l’inexistence.

Enfin, le document d’évaluation des risques dont la société [6] se prévaut porte des mentions qui sont toutes postérieures au jour de l’accident en litige, de sorte qu’il est impropre à contredire le manquement constaté par le tribunal sur ce point, en application de l’article R 4121-4 du code du travail en sa teneur applicable à la cause (pièce 22).

Dans un tel contexte, et alors que la société [6] avait déjà confrontée à la survenance de plusieurs braquages,de sorte qu’elle ne pouvait ignorer la vulnérabilité et le risque de réitération auquel ce site était exposé, l’absence d’amélioration des dispositifs existants et de formation sur les conduites à suivre en cas d’agression a constitué un manquement de l’employeur à son obligation de préserver Mme [W] [J] des dangers auxquels il avait pourtant été sensibilisé.

C’est donc par une exacte appréciation des faits, par motifs adoptés par la cour, que le tribunal a reconnu le caractère inexcusable de la faute commise par la société [6] ayant concouru à la survenance

l’accident subi le 27 octobre 2015 par Mme [W] [J] lors de son travail, fixant en conséquence la majoration au maximum de la rente par application de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale et

ordonnant une expertise avant-dire-droit.

Cette décision sera en conséquence confirmée.

Sur les demandes annexes

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens.

Les dépens d’appel seront mis à la charge de la société [6] qui succombe.

Les considérations d’équité conduiront à condamner la société [6] à verser à Mme [W] [J] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société [6] étant tenue aux dépens, sa demande formée au titre des frais irrépétibles ne saurait aboutir.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 18 janvier 2021 en ce qu’il a déclaré ‘irrecevable l’intervention volontaire du cabinet [E] [R], agent de la compagnie [3], formée par conclusions écrites déposées à l’audience du 23 novembre 2020, soit postérieurement à la clôture des débats du 17/9/2020’ ;

Statuant à nouveau sur ce point,

Donne acte à la société [3] de son intervention volontaire en qualité d’assureur de la société [6], en lieu et place du cabinet [R], agent d’assurance, et prononce en conséquence la mise hors de cause du cabinet [R] ;

Confirme le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne la société [6] aux dépens et à verser 1 500 euros à Mme [W] [J] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes.

Le présent arrêt a été signé par N.ASSELAIN, conseillère faisant fonction de présidente et par K. BELGACEM, greffière de chambre.

LE GREFFIÈRE, LA PRESIDENTE,

K. BELGACEM N.ASSELAIN

.

 


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