Tentative de conciliation : 23 février 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/05670

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Tentative de conciliation : 23 février 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/05670
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 23 FÉVRIER 2023

N° 2023/ 184

Rôle N° RG 22/05670 N° Portalis DBVB-V-B7G-BJHZ3

S.A. MY MONEY BANK

C/

[I] [Y]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Isabelle FICI

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Tribunal Judiciaire de GRASSE en date du 17 Novembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 2020/131.

APPELANTE

S.A. MY MONEY BANK

nouvelle dénomination de la Société GE MONEY BANK, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 784 393 340, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social sis [Adresse 5]

représentée par Me Isabelle FICI de la SELARL LIBERAS FICI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Maeva LAURENS,avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Julien CHAMARRE de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

INTIME

Monsieur [I] [Y]

demeurant [Adresse 1]

signification DA le 25/05/2022 à l’étude,

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 11 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Février 2023.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Février 2023,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant acte reçu le 24 mai 2006 par maître [V] [S], notaire à [Localité 3], Mme [O] [L] et son époux M.[Y] [I] ont souscrit auprès de la SAS GE Money Bank deux prêts :

– le premier, n° 35033469310 (reprise de deux prêts immobiliers) expressément soumis aux dispositions des articles L.312-1 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction alors applicable, pour un montant en capital de 122 691,61 euros remboursable en 360 mois avec intérêts au taux de 5,2262% l’an ;

– le second n°35077812792 ( reprise de crédits à la consommation) non soumis aux dispositions légales susvisées, pour un montant en capital de 35 308,39 euros remboursable en 360 mois avec intérêts au taux de 5,5543 % l’an.

Ces prêts étaient garantis par une hypothèque conventionnelle inscrite sur un bien commun des emprunteurs situé [Adresse 1] à [Localité 4] (06).

Le 22 septembre 2020, la SA My Monek Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, a, en vertu de cet acte authentique, déposé une requête en saisie des rémunérations à l’encontre de M. [I], pour obtenir paiement de la somme de 189 928,48 euros en principal, intérêts et frais, puis par acte d’huissier de justice du 5 février 2021, elle a fait citer le débiteur à l’audience de tentative de conciliation, à laquelle il ne s’est pas présenté.

Par ordonnance du 17 novembre 2021 le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Grasse a rejeté la requête aux fins de saisie des rémunérations de M.[I], pour forclusion du créancier demandeur.

Il énonce en ses motifs que les parties ont volontairement soumis les prêts aux dispositions des articles L.312-1 et suivants du code de la consommation, alors que les créances de la banque ont fait l’objet de moratoires par jugement d’un tribunal d’instance rendu le 14 juin 2016 dans le cadre de la procédure de surendettement des époux [I], l’une pendant une période de 18 mois, l’autre pendant une période de 12 mois suivie d’une période de 6 mois avec des versements de 848 euros mensuels, le débiteur devant reprendre le cours normal des échéances à l’issue de ces périodes de 18 mois, or aucun paiement n’a été enregistré par la société My Money Bank après le 14 décembre 2017, de sorte que le premier incident de paiement non régularisé au sens de l’article R.312-35 du code de la consommation, daterait du 10 janvier 2018. Dans ces conditions l’action du demandeur, qui a engagé sa première procédure d’exécution le 15 juillet 2020, soit plus de deux ans après le premier incident non régularisé, est jugée forclose par le magistrat.

La société My Money Bank a interjeté appel de cette décision par déclaration du 15 avril 2022.

Aux termes de ses écritures transmises au greffe par voie électronique le 13 mai 2022, signifiées à M.[I] le 25 mai 2022 , auxquelles il est expressément fait référence pour plus ample exposé de ses moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, elle demande à la cour de :

– la déclarer recevable en son appel de l’ordonnance rendue le 17 novembre 2021 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Grasse, statuant en matière de saisie des rémunérations enregistrée sous le n° 2020/131,

– infirmer en toutes ses dispositions ladite ordonnance,

En conséquence, et statuant à nouveau,

– dire que l’action de la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, n’est ni forclose, ni prescrite

– dire que la société My Money Bank est munie d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible,

– déclarer recevable la société My Money Bank en sa demande d’une saisie des rémunérations de M.[I],

– ordonner au bénéfice de la société My Money Bank, qu’il soit procédé à la saisie des sommes dues à titre de rémunérations de M.[Y] [I] entre les mains de son employeur la SARL Betons Services -Transports Afif Sard -[Adresse 2], pour avoir paiement de la somme totale de 194 533,66 euros, suivant décomptes arrêtés au 13 mai 2022, au titre des prêts n° 35031312514 et n° 35080255356

– condamner M.[I] au paiement d’une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, en ce compris le coût de la requête aux fins de saisie des rémunérations et de la citation en conciliation aux fins de saisie des rémunérations, dont distraction au profit de maître Isabelle Fici de la Selarl Liberas Fici & Associés, avocat au barreau d’Aix-en-Provence, sous sa due affirmation de droit.

S’agissant en premier lieu de la recevabilité de son appel, la société My Money Bank précise que l’ordonnance critiquée ne lui a pas été notifiée par le greffe au moyen d’une lettre recommandée avec avis de réception , mais a été adressée à son huissier de justice par lettre simple datée du 22 novembre 2021, ne comportant aucune mention des voies, délais et modalités de recours et que cet huissier l’en a informée par courrier du 7 janvier 2022. Elle estime en conséquence que le délai d’appel, qui ne peut courir qu’à compter de la notification à la partie elle-même et par pli recommandé, n’a pas couru.

Elle relève par ailleurs que le juge a statué par voie d’ordonnance à l’issue de la tentative de conciliation à laquelle le débiteur cité, n’a pas comparu, alors qu’il devait être renvoyé à une audience de jugement, l’absence de débat lui étant préjudiciable puisqu’elle n’a pu opposer la non forclusion de son action.

Elle soutient en substance que les prêts en cause ne sont pas soumis à la forclusion biennale prévue par l’article R.312-35 du code de la consommation, dès lors qu’il ressort des offres de prêts que les crédits sont soumis aux anciens articles L.312-1 et suivants dudit code applicables aux crédits immobiliers, qui relèvent uniquement à la prescription biennale prévue par l’ancien article L.137-2, devenu L.218-2 du code de la consommation.

L’appelante ajoute que contrairement à ce qui est indiqué dans l’ordonnance, le prêt n° 35031312514 (anciennement codifié 35033469310) a fait l’objet d’un moratoire de 42 mois et le prêt n° 35080255356 (anciennement codifié 35077812792) a fait l’objet d’un moratoire de 36 mois en vertu du plan de redressement fixé dans le dispositif du jugement en date du 14 juin 2016, suivi du paiement de 6 échéances d’un montant de 848 euros. Dans ces conditions, par application de l’article L 733-16 du code de la consommation, elle ne pouvait agir qu’après le 14 décembre 2019 pour le premier prêt et qu’après le 14 juin 2019 pour le second . En conséquence le premier incident de paiement, point de départ de la prescription biennale pour les échéances impayées, ne pouvait être fixé qu’au 10 janvier 2020 pour le premier prêt et au 10 juillet 2019 pour le second.

Et elle indique que cette prescription a été interrompue par un commandement aux fins de saisie vente délivré à M.[I] le 15 juillet 2020, puis par la requête aux fins de saisie des rémunérations en date du 22 septembre 2020 et l’acte de citation du débiteur, en date du 5 février 2021, aux fins de tentative de conciliation, en sorte que son action est recevable.

M.[I] cité par acte du 25 mai 2022 délivré à domicile par remise à l’étude de l’huissier de justice n’a pas constitué avocat.

L’instruction de l’affaire a été déclarée close par ordonnance du 13 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l’article 473 alinéa 1du code de procédure civile le présent arrêt sera rendu par défaut ;

Il ne ressort pas du dossier que l’ordonnance entreprise a été notifiée à l’appelante en sorte que le délai d’appel n’ayant pas couru, son recours est recevable ;

Selon l’article R.3252-1 du code du travail le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie des sommes dues à titre de rémunération par un employeur à son débiteur ;

S’agissant du prêt n°35033469310 désormais codifié 35031312514 :

L’appelante argue à bon droit que la forclusion édictée par l’article R.312-35 du code de la consommation visé par le premier juge, n’est pas applicable à ce prêt immobilier, soumis à la prescription biennale de l’article L.218-2 ,anciennement L.137-3 ,du code de la consommation;

Il s’ensuit la réformation de l’ordonnance entreprise de ce chef ;

En vertu de l’article L.218-2 susvisé, il est jugé qu’à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ;

La banque a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée datée du 3 août 2020 ;

La demande des époux [I] au bénéfice d’une procédure de surendettement avait été déclarée recevable par décision de la commission compétente datée du 28 janvier 2014 dont les recommandations ont été contestées par les débiteurs et par jugement du14 juin 2016 le tribunal d’instance de Grasse a entre autres dispositions, imposé pour ce prêt un moratoire de 42 mois, et non de 18 mois comme retenu par erreur par le premier juge ;

L’appelante rappelle à juste titre qu’en application de l’article L.733-16 , anciennement L.733-17, du code de la consommation elle ne pouvait exercer aucune exécution à l’encontre des biens des débiteurs pendant la durée d’exécution des mesures préconisées dans le surendettement ;

Et l’article L.721-5 du même code prévoit que ‘ la demande du débiteur formée en application du premier alinéa de l’article L. 733-1 interrompt la prescription et les délais pour agir.’

En application de l’article 2231 du code civil qui dispose que l”interruption efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l’ancien, un nouveau délai de prescription a commencé à courir à compter du 14 décembre 2019, date à laquelle le plan de redressement a cessé de produire ses effets ;

En sorte qu’à la date de la requête en saisie des rémunérations présentée le 23 septembre 2020 la prescription de l’action de la société Money Bank en recouvrement forcé de ce prêt n’était pas acquise ;

S’agissant du prêt n°35077812792 désormais codifié 35080255356 :

L’article R.312-35 du code de la consommation qui soumet l’action en paiement du prêteur au délai préfix de deux ans qui court à compter de l’événement qui lui a donné naissance, s’applique à ce prêt consistant en un prêt de restructuration destiné à regrouper plusieurs crédits à la consommation, au remboursement d’un découvert bancaire et à l’attribution d’une trésorerie;

Ce texte prévoit dans son alinéa 2 que lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 ou après décision de la commission imposant les mesures prévues à l’article L. 733-1 ou la décision du juge de l’exécution homologuant les mesures prévues à l’article L. 733-7.

En l’espèce, le jugement précité du 14 juin 2016 a, pour ce prêt, imposé un moratoire de 36 mois, et non de 12 mois comme retenu par erreur par le premier juge, moratoire suivi de 6 échéances mensuelles de 848 euros, en sorte qu’à raison l’appelante soutient que le premier incident de paiement ne peut être fixé qu’au 10 juillet 2019 ;

Ainsi à la date de la requête en saisie des rémunérations présentée le 23 septembre 2020 la forclusion de l’action en recouvrement forcé de ce prêt n’était pas acquise ;

Il s’ensuit la réformation de l’ordonnance querellée en toutes ses dispositions ;

Il y a lieu au vu du décompte produit arrêté au 13 mai 2022, de l’acte authentique de prêts et des conditions générales annexées, ainsi que des tableaux d’amortissement communiqués d’autoriser la saisie des rémunérations de M.[I] pour un montant total de 194 533,66 euros correspondant à :

Au titre du prêt n°35033469310 ( désormais 3503132514):

– capital restant dû à la date de la déchéance du terme :…………………………… 125 338,47 euros

– intérêts échus et impayés à cette date : ……………………………………………….. 232,65 euros

– cotisations d’assurance- groupe impayées à cette date :…………………………. . 4582,44 euros

– échéances impayées :…………………………………………………………………………. 4 696,89 euros

– indemnité de déchéance du terme : ……………………………………………………… 8773,69 euros

– intérêts de retard au taux de 3,2262 % à compter de la déchéance du terme : 7759,47 euros

– frais : ……………………………………………………………………………………………….. 227,76 euros

Au titre du prêt n°35077812792 ( désormais 35080255356) :

– capital restant dû à la date de la déchéance du terme :…………………………….. 28 983, 80 euros

– intérêts échus et impayés à cette date : ……………………………………………….. 59,27 euros

– échéances impayées :…………………………………………………………………………. 6 385,08 euros

– indemnité de déchéance du terme : ……………………………………………………… 2 479,97 euros

– intérêts de retard au taux de 6,5543 % à compter de la déchéance du terme :.. 4 141,55 euros

– frais : ………………………………………………………………………………………………….. 872,62 euros

Aucune considération d’équité ne commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de l’appelante qui sera en conséquence déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

L’intimé, partie perdante supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en voir délibéré conformément à la loi, par arrêt par défaut prononcé par mise à disposition au greffe,

INFIRME l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

AUTORISE la saisie des rémunérations de M.[Y] [I], pour avoir paiement de la somme totale de 194 533,66 euros, arrêtés au 13 mai 2022, au titre des prêts n° 35031312514 et n° 35080255356 (anciennement codifiés 30533469310 et n°35077812792) ;

DEBOUTE la SA My Money Bank de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE M.[Y] [I] aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers distraits au profit de Maître Isabelle Fici de la Selarl Liberas Fici & Associes, avocat au barreau d’Aix-en-Provence.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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