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CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 mars 2023
Cassation
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 155 FS-B+L
Pourvoi n° N 22-10.679
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023
Mme [G] [Y], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-10.679 contre l’arrêt rendu le 24 novembre 2021 par la cour d’appel de Montpellier (4e chambre civile), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société PVB Avocats, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ au procureur général près la Cour d’appel de Montpellier, domicilié en son [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de Mme [Y], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société PVB Avocats, et l’avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l’audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, Conseiller doyen, MM. Jessel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes Le Gall, de Cabarrus, Feydeau-Thieffry et M. Serrier, conseillers référendaires, Mme Mallet-Bricout, avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 24 novembre 2021), le 29 octobre 2020, à la suite de la rupture de son contrat de collaboration libérale, Mme [Y], avocate, a conclu une transaction avec la société PVB avocats.
2. Le 1er décembre 2020, Mme [Y] a, sur le fondement de l’article 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats de Montpellier en nullité de la transaction et en paiement d’une indemnité de préavis et d’une indemnité au titre d’un préjudice moral.
3. Par décision du 30 décembre 2020, le bâtonnier a rejeté la fin de non-recevoir invoquée et tirée de l’absence de conciliation préalable, prononcé la nullité de la transaction, condamné la société PVB avocats à payer à Mme [Y] une indemnité de préavis et Mme [Y] à lui restituer l’indemnité transactionnelle, ordonné la compensation de ces sommes et alloué à Mme [Y] des dommages-intérêts. La société PVB avocats a formé appel de la décision.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen relevé d’office
5. Après avis donné aux parties conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l’article 620, alinéa 2, du même code.
Vu les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée et 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 modifié :
6. Selon le premier de ces textes, les litiges nés d’un contrat de travail ou d’un contrat de collaboration libérale sont, en l’absence de conciliation, soumis à l’arbitrage du bâtonnier.
7. Selon le second, à défaut de conciliation, le bâtonnier du barreau auprès duquel l’avocat collaborateur ou salarié est inscrit est saisi par l’une ou l’autre des parties et l’acte de saisine précise, à peine d’irrecevabilité, l’objet du litige, l’identité des parties et les prétentions du saisissant.
8. Si ces dispositions prévoient une conciliation préalable à l’arbitrage du bâtonnier, elles n’instaurent toutefois pas une procédure de conciliation obligatoire dont le non-respect serait sanctionné par une fin de non-recevoir.
9. Pour déclarer irrecevable la requête aux fins d’arbitrage formée le 1er décembre 2020 par Mme [Y], l’arrêt retient que la procédure de conciliation pour les litiges nés à l’occasion d’un contrat de collaboration entre avocats est un préalable obligatoire à l’engagement de toute action contentieuse auprès du bâtonnier et relève que Mme [Y], s’étant bornée à adresser, le 6 novembre 2020, à la société PVB avocats une mise en demeure d’avoir à lui régler les sommes dues au titre de son préavis, n’a présenté aucune demande de conciliation.
10. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le premier moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 24 novembre 2021, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ;
Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Lyon ;
Condamne la société PVB avocats aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société PVB avocats et la condamne à payer à Mme [Y] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme [Y]
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Madame [G] [Y] fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D’AVOIR déclaré irrecevable la demande d’arbitrage du 1er décembre 2020 formé à l’encontre de la Selas PVB Avocats ;
1°) ALORS QUE si la tentative de conciliation est un préalable à la procédure d’arbitrage du Bâtonnier, elle ne revêt pour autant aucun formalisme particulier, seuls étant exigés la présence des parties et l’objet des demandes soumises, en l’absence de conciliation, à l’arbitrage du Bâtonnier ; qu’en l’espèce, il résultait expressément de la décision du Bâtonnier que celui-ci avait, « préalablement à tout débat au fond », « demandé ( ) aux parties s’il était possible d’engager une discussion sur les conditions d’une conciliation ( ) » et avait « constaté le défaut de toute conciliation possible » ; qu’une tentative de conciliation avait donc eu lieu ; qu’en déclarant cependant irrecevable la demande d’arbitrage du Bâtonnier faute d’avoir été précédée d’une tentative de conciliation, cette absence rendant « la saisine du Bâtonnier ( ) irrégulière », la cour d’appel a violé les articles 7 et 21 de la loi du 31 décembre 1971, ensemble les articles 142 et 179-1 du décret du 27 novembre 1991 ;
2°) ALORS QUE si la tentative de conciliation est un préalable à la procédure d’arbitrage du Bâtonnier, aucun texte n’impose que cette tentative émane nécessairement d’une partie ; qu’en l’espèce, il résultait expressément de la décision du Bâtonnier que celui-ci avait, « préalablement à tout débat au fond », « demandé ( ) aux parties s’il était possible d’engager une discussion sur les conditions d’une conciliation ( ) et avait « constaté le défaut de toute conciliation possible » ; qu’une – vaine – tentative de conciliation avait donc eu lieu à l’initiative du Bâtonnier lui-même ; qu’en conséquence, en déclarant irrecevable la demande d’arbitrage du Bâtonnier motif pris de ce que « Me [Y] n’a présenté aucune demande de conciliation » et que, partant, « la saisine du Bâtonnier était irrégulière », la cour d’appel a, en toute hypothèse, encore violé les articles 7 et 21 de la loi du 31 décembre 1971, ensemble les articles 142 et 179-1 du décret du 27 novembre 1991.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Madame [G] [Y] fait grief à l’arrêt attaqué de l’AVOIR déboutée de toutes ses demandes après avoir déclaré irrecevable sa demande d’arbitrage en date du 1er décembre 2020 ;
ALORS QUE le juge qui statue au fond après avoir déclaré une demande irrecevable excède ses pouvoirs ; qu’en l’espèce, après avoir déclaré irrecevable la demande d’arbitrage du Bâtonnier, la cour d’appel a débouté Mme [G] [Y] de ses demandes ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a excédé ses pouvoirs et a ainsi violé l’article 122 du code de procédure civile.