Tentative de conciliation : 14 avril 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/02471

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Tentative de conciliation : 14 avril 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/02471
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2ème Chambre

ARRÊT N° 209

N° RG 20/02471 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QUT4

(3)

M. [T] [L]

C/

M. [N] [H] [D]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me Erwan PRIGENT

– Me Marie VERRANDO

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 AVRIL 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 24 Janvier 2023

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Avril 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe

****

APPELANT :

Monsieur [T] [L]

né le 22 Juillet 1987 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Erwan PRIGENT de la SELARL ACTAVOCA, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Florence de FREMINVILLE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

Monsieur [N] [H] [D]

né le 05 Avril 1952 à [Localité 8]

‘[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Emeric MARTIN- de POULPIQUET, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

2

EXPOSÉ DU LITIGE :

En août et septembre 2013 M. [N] [H] [D] ( ci-après M. [D]) a confié à M. [T] [L] l’entraînement de ses deux chevaux ‘ Enzo du Roch’ et ‘Jalafré de Kérozen’.

Quatre factures de pension en mai, juin, juillet et août 2014 n’ayant pas été réglées par M. [D], M. [L] lui a adressé une mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 septembre 2014. Son conseil a réitéré cette mise en demeure le 29 janvier 2015.

Après une vaine tentative de conciliation, M. [L] a fait assigner M. [N] [D] en paiement devant le tribunal d’instance de Saint-Brieuc par acte d’huissier en date du 8 avril 2015.

Par jugement avant dire droit en date du 11 septembre 2017, le tribunal a ordonné une expertise judiciaire confiée au Docteur [E], vétérinaire. Une consignation de 3 000 euros a été mise à la charge de M. [D] qui ne l’a pas réglée. M. [L] a donc payé cette consignation pour que l’expertise ait lieu. L’expert a rendu son rapport le 8 février 2019. L’instance a pu reprendre.

Par jugement en date du 31 décembre 2019, le tribunal a :

– condamné M. [N] [D] à payer à M. [T] [L] la somme de 6 161,76 euros TTC au titre des factures impayées avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 septembre 2014, les intérêts étant calculés sans être capitalisés,

– condamné M. [T] [L] à payer à M. [N] [D]:

la somme de 916,24 euros de restitution de frais injustifiés,

la somme de 120 euros en paiement du coût de remplacement du livret signalétique d’Enzo du Roch rendu très endommagé,

la somme de 5 000 euros en réparation des conséquences du défaut de soins portés à Enzo du Roch avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

– ordonné la compensation entre les sommes dues par les parties,

– débouté M. [N] [D] de sa demande en paiement de la somme de 9 000 euros au titre de la perte de chance de remporter la course du 6 octobre 2013,

– débouté M. [T] [L] de sa demande en dommages-intérêts de la somme de 5 000 euros,

– débouté les parties de leur demande en paiement fondée sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– fait masse des dépens et dit que chacune des parties en supportera la moitié y compris les frais d’expertise judiciaire.

Par déclaration en date du 2 juin 2020, M. [L] a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 1er septembre 2020, il demande à la cour de:

Vu les articles 1134,1147et 1927 du code civil,

– le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

Y faisant droit,

Par conséquent,

– réformer la décision entreprise,

– condamner M. [N] [D] à payer à M. [T] [L] la somme de 6.934,56 euros, avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 29 septembre 2014, correspondant aux factures impayées, lesdits intérêts capitalisés,

– réformer la décision entreprise en ce qu’elle a condamné M [L] à restituer la somme de 916,24 euros à l’intimé,

– réformer la décision entreprise en ce qu’elle a condamné M [L] à payer une somme de 5.000 euros à titre de réparation du préjudice,

– réformer la décision entreprise en ce qu’elle en ce qu’elle a condamné M [L] à payer la somme de 120 euros au titre du duplicata du livret signalétique,

– confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a débouté M [D] de sa demande de paiement de dommages et intérêts à hauteur de 9.000 euros, de 5.000 euros, de 500 euros,

– réformer la décision entreprise en ce qu’elle a débouté M [L] de sa demande de dommages et intérêts,

Par conséquent,

-condamner M [N] [D] à payer à M [L] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

-condamner M [N] [D] à payer à [T] [L] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner M [N] [D] aux entiers dépens de l’instance comprenant les frais d’expertise judiciaire avancés par M [L].

Dans ses dernières conclusions signifiées le 25 octobre 2022, M. [D] demande à la cour de :

Vu les articles 1134 (devenu 1103 et 1104), 1915,1927,1929 et suivant du code civil,

Vu les articles 1235( devenu 1302) 1376 (devenu 1302-1) et 1377 ( devenu 1302-2) du code civil,

Vu l’article 1315 ( devenu 1353) du code civil,

Vu le code de la consommation ( article L. 112-1 ) et le code de déontologie vétérinaire ( article R 242-48),

– le recevoir en son appel incident et le dire bien fondé,

– juger irrecevable et en toute hypothèse infondé M [L] en l’ensemble de ses demandes, l’en débouter,

– confirmer le jugement rendu le 31 décembre 2019 par le tribunal d’instance de Saint-Brieuc en ce qu’il a condamné M [L] à régler à M [D] :

la somme de 916,24 € en restitution de frais injustifiés,

débouté M [L] de sa demande de dommages et intérêts,

débouté M [L] de sa demande de capitalisation des intérêts

Pour le reste, l’infirmer,

Et statuant à nouveau :

– dire que la créance de M [L], pour les mois de mai, juin, juillet et août 2014, ne saurait excéder :

– pour Enzo du Roch : 1764 euros,

– pour Jalafré de Kérozen : 3145,56 euros,

Après avoir dit que M [L] a manqué à ses obligations contractuelles, le condamner à régler à M [D] les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :

– Pour Jalafré de Kérozen :

9000 euros au titre de la perte de chance de remporter la course du 6/10/2014 et d’emporter les gains et la prime à l’éleveur,

5000 euros au titre de la perte de chance de le voir participer à d’autres courses et pour son propriétaire de remporter des gains et primes, pendant le temps de convalescence et de pré entraînement,

500 euros au titre des frais d’hébergement du cheval, inutilement exposés,

200 euros au titre du livret signalétique rendu détérioré,

– pour Enzo du Roch :

7000 euros en réparation des conséquences du défaut de soins,

– dire que l’ensemble des sommes pour lesquelles M [L] aura été condamné à paiement, porteront intérêts au taux légal à compter, non du 31 décembre 2019, date du premier jugement, mais de la première demande de condamnation à leur paiement par conclusions, devant le tribunal d’instance de Saint-Brieuc,

– ordonner la compensation entre la créance de M [L] et les sommes qui auront été mises à sa charge, au profit de M [D],

Et rejetant toutes prétentions contraires, comme irrecevables et en tout cas non fondées,

– le condamner à régler à M [D] la somme de 3500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel, au visa de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux entiers dépens, de première instance et d’appel ainsi qu’aux frais d’expertise judiciaire.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 24 novembre 2022.

EXPOSÉ DES MOTIFS :

Sur la demande en paiement de M. [L] :

M. [D] a confié deux de ses chevaux, Enzo du Roch et Jalafré de Kerosen, le premier en août 2013, le second en septembre 2013 à M. [L]. Aucun contrat écrit n’a été signé entre les parties mais elles s’accordent pour dire qu’il était convenu d’un contrat verbal mixte comportant une partie pension et soins et une autre partie entraînement.

Par ailleurs, il est constant que les tarifs des prestations de M. [L] étaient les suivants : 15 euros par jour et par cheval pour le seul hébergement et 35 euros par cheval et par jour lorsque un entraînement était dispensé en plus de l’hébergement. Ces frais ont été facturés mensuellement à M. [D].

Il résulte des éléments produits par M. [L] que M. [D] ne s’est jamais acquitté du règlement des factures mensuelles qui lui étaient adressées à échéance et qu’il a toujours payé en retard. Ainsi :

– les factures des mois d’août, septembre, octobre et novembre 2013 ont été réglés le 24 février 2014,

– celle du mois de décembre le 10 avril 2014,

– les factures de janvier, février et mars 2014 ont été payées le 12 mai 2014,

– celle d’avril 2014 le 26 juin 2014.

Peu importe donc les attestations émanant de trois autres entraîneurs pour justifier qu’il paie régulièrement ses factures en tant que propriétaire de chevaux de course puisqu’il est établi qu’à l’égard de M. [L], M. [D] n’a jamais payé les factures à présentation. Il sera souligné qu’il a réglé sans discuter, même si tardivement, les factures présentées jusqu’au mois d’avril 2014. S’il a récupéré le cheval Jalafré de Kerosen le 8 juillet 2014 et le cheval Enzo du Roch le 8 août 2014, il n’a pas payé les factures de mai, juin, juillet et août 2014, émises pour un montant total de 6 934,56 euros, malgré deux mises en demeure et une tentative de conciliation.

Le paiement de ces factures est l’objet du présent litige. M. [L] sollicite le paiement de la somme de 6 934,56 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure et capitalisation des intérêts. Il a fait appel du jugement qui ne lui a pas donné satisfaction sur l’intégralité de cette somme mais a fixé le montant de la somme due à 6 161,76 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 septembre 2014 et l’a condamné à restituer la somme de 916,24 euros au titre de frais injustifiés.

M. [D] n’explique nullement les raisons qui l’ont amené à ne plus payer M. [L] à partir du1er mai 2014 jusqu’au départ des chevaux. Il produit la copie d’un courrier en date du 17 août 2014 qu’il aurait adressé à M [L] dans lequel il se plaint de l’état physique dans lequel les chevaux lui ont été rendus, de ce qu’il n’a pas été prévenu du retour du cheval Enzo du Roch ni tenu au courant de la pathologie présentée par celui-ci et de ce que Jalafré de Kerosen lui a été rendu avec une tendinite. Il ne mentionne pas le montant des factures dont il est redevable sauf pour signaler qu’il réglera les factures relatives au cheval Enzo du Roch avec ses gains, une fois qu’il aura remboursé le prix d’achat du cheval, à la condition que ce cheval puisse courir à nouveau.

Il apparaît que c’est à l’occasion de la présente instance que M. [D] a émis des contestations sur le montant qui lui est réclamé, consistant en une critique du tarif de 35 euros retenu par l’entraîneur sur certaines périodes pendant lesquelles les chevaux étaient, selon lui, au repos et une critique des frais vétérinaires et de pharmacie qui ne seraient pas justifiés.

Les frais de pension du cheval Jalafré de Kerosen :

M. [D] conteste l’application du plein tarif non seulement pour les dix derniers jours de juin 2014, comme en première instance, mais également à compter du 9 juin 2014. Il prétend en effet que le cheval n’a plus été à l’entraînement après la blessure dont il a été victime le 8 juin 2014 lors d’une course.

Le premier juge a considéré qu’aucun vétérinaire n’avait préconisé que ce cheval cesse immédiatement son entraînement après cette blessure et que ce n’est que le 2 juillet 2014 que le docteur vétérinaire [B] a évoqué la possibilité d’une réforme du cheval en raison d’une desmite sévère et chronique, date à laquelle, M. [L] a appliqué le tarif de 15 euros par jour jusqu’au départ du cheval.

Pour rapporter la preuve qui lui incombe, en tant qu’entraîneur, de ce que le cheval Jalafré de Kerosen a été à l’entraînement tout le mois de juin 2014, nonobstant la blessure du 8 juin 2014, M. [L] fait valoir les conclusions de l’expert judiciaire, le docteur [E], qui a examiné les chevaux et les pièces du dossier à l’occasion de la réunion d’expertise du 28 septembre 2018.

L’expert a considéré que du 8 juin au 20 juin 2014, l’entraîneur, dans l’attente de l’avis du diagnostic du docteur vétérinaire [P] et de l’échographie le 20 juin 2014, a maintenu Jalafré de Kerosen en travail léger, promenade monté sur un suspenseur en raison de la desmite chronique récidivante, soulignant que le cheval dans ce cas n’était pas boiteux ou faiblement. Il a cependant indiqué que dès l’échographie du 20 juin 2014, la sévérité de l’affection était posée et qu’elle a été confirmée par la seconde échographie réalisée par le docteur [B] le 2 juillet 2014.

Dans le cadre de l’expertise, M. [L] a proposé une tarification à 15 euros à partir du 20 juin 2014 alors que disposant des éléments relevés par l’expert, il avait néanmoins facturé tout le mois de juin à 35 euros par jour.

Par ailleurs, aucun élément ne vient en fait attester de la réalité d’un entraînement du cheval, même léger, entre le 9 et le 20 juin 2014 comme l’expert l’indique, tout en soulignant qu’il fait confiance sur ce point aux dires de l’entraîneur. M [L] produit un certificat émanant du docteur [P], vétérinaire de l’hippodrome de [Localité 5], en date du 20 novembre 2015 qui atteste avoir examiné l’animal à trois reprises en juin 2014 :

-le 9 juin 2014 suite à sa course pour une enflure importante sur le membre antérieur droit, enflure trop importante pour faire une échographie de sorte qu’il conseille d’attendre quelques jours,

– le 16 juin 2014, l’inflammation est encore trop importante,

– le 20 juin 2014 à l’interprétation de l’échographie, à partir de laquelle il conseille au regard de l’âge du cheval et de la sévérité de la lésion, une retraite des courses.

Quant à l’expert, il rapporte les propos de ce vétérinaire avec lequel il s’est entretenu pour dire que son confère lui a présenté M. [L] comme un professionnel honnête et consciencieux. Il en conclut, sans que cela lui ait été demandé que les allégations de mensonge de la part de M. [L] lui semblent excessives.

En conséquence, il n’existe aucune preuve tangible en dehors des allégations de l’entraîneur pour établir que malgré l’état du cheval après le 8 juin 2014, avec une enflure du membre antérieur droit, l’animal a été soumis à un entraînement même léger. La tarification pour ce cheval sera donc ramenée du 8 au 30 juin à 15 euros par jour, ce qui porte le montant de la facture du mois de juin 2014 pour le cheval Jalafré de Kerosen à 610 euros HT pour la pension. Compte tenu du déplacement en [Localité 2] pour le 8 juin 2014 facturé à 386, 90 euros, c’est un total de 996,90 euros HT qui est dû pour le mois de juin 2014 pour le cheval Jalafré de Kerosen par M. [D].

Les frais de pension du cheval Enzo du Roch :

Il sera constaté que dans ses dernières écritures, l’intimé ne conteste plus le montant de la facture du mois de mars 2014 mais soutient que le cheval n’a jamais repris l’entraînement après le 8 avril 2014 jusqu’à son départ de l’écurie [L]. Il en veut pour preuve que le cheval est arrivé chez lui ferré seulement des antérieurs et que cette ferrure était ancienne d’au moins deux mois, selon le maréchal ferrant qui l’a examiné le 8 août 2014 à son retour. Il conteste en conséquence l’application du tarif plein du 1er juin au 24 juillet 2014.

Pour justifier le tarif appliqué pendant la période contestée, M. [L] soutient que le cheval a repris l’entraînement le 24 mai 2014 après avoir subi une échographie de contrôle le 23 mai. Il fait valoir également que le cheval qui était engagé le 23 juillet pour le 3 août, a été boiteux suite à un travail sur steeple le 24 juillet 2014.

Mais c’est à juste titre que le tribunal a considéré qu’au regard de la fiche du maréchal ferrant, M. [C], produite par M. [L], le cheval n’avait été ferré que des deux antérieurs du 8 avril au 1er juillet 2014 de sorte qu’il n’avait pu subir d’entraînement sans être correctement équipé qui plus est, après une blessure importante.

Toutefois, le tribunal n’est pas allé au bout de sa démonstration puisqu’il n’a réduit les frais de pension que du 1er au 24 juillet 2014 alors qu’il est manifeste, compte tenu de l’attestation du maréchal ferrant au retour du cheval, que ce cheval n’a plus été ferré des quatre pieds à compter du 8 avril 2014 jusqu’à son retour le 8 août de sorte qu’il ne pouvait subir d’entraînement du 1er juin au 24 juillet et que c’est à tort que M. [L], qui n’établit nullement la réalité de l’entraînement allégué, est repassé sur cette période à une tarification à 35 euros par jour.

les frais vétérinaires et pharmaceutiques :

Sur les factures litigieuses, M. [D] conteste devoir les frais de l’échographie pratiquée par le vétérinaire espagnol [M] [I] le 23 mai 2014, facturés 143 euros hors taxes et indiqués sous la simple mention ‘pharmacie’ ainsi que les frais de vermifuges mentionnés pour la première fois, à part, sur les factures des mois de juin et juillet 2014 alors que ces frais ont été, selon lui, inclus dans les frais de petite pharmacie les mois précédents sauf à démontrer que les chevaux n’ont pas eu de traitement vermifuge.

M. [L] soutient que s’il n’a pas sollicité M. [D] avant de faire pratiquer cette échographie de contrôle le 23 mai 2014 c’est parce que l’intervention de ce praticien était motivée par la nécessité d’obtenir son avis à la suite d’un problème du cheval à l’entraînement. Rappelant que le cheval Enzo du Roch avait présenté une lésion tendineuse à la suite d’une course à [Localité 6] le 16 mars 2014 et qu’il lui avait été prescrit deux mois de marcheur, l’appelant fait valoir que le cheval ne pouvait reprendre le travail sans échographie de contrôle.

Cependant, il convient de souligner que l’expert s’est lui-même interrogé sur la ligne pharmacie de la facture du mois de juillet 2014 pour 143 euros ne sachant pas à quoi elle pouvait correspondre, et que c’est à l’occasion de la procédure, que M [L] a révélé que cette somme ne correspondait pas à des frais de pharmacie mais au montant d’une échographie de contrôle pratiquée par un vétérinaire espagnol, le docteur [M] [I] le 23 mai 2014.

Il apparaît donc que M [L] a fait intervenir un autre vétérinaire que son vétérinaire habituel pour faire pratiquer une échographie sur le cheval Enzo du Roch sans en informer le propriétaire du cheval alors qu’il disposait des deux mois de marcheur prescrit au cheval pour convenir en amont de la nécessité de cette dépense avec M. [D]. Il est de surcroît, pour le moins curieux qu’il n’ait pas clairement facturé cette dépense comme des frais vétérinaires et non de façon tout à fait opaque comme des frais de pharmacie, sauf à s’interroger comme l’expert, sur le droit de ce praticien espagnol à travailler en France ou à conclure que l’entraîneur n’était pas certain d’obtenir l’accord du propriétaire. Au regard de la particularité de cet acte vétérinaire, dont la nécessité n’est pas établie puisque la preuve de la reprise de l’entraînement n’est pas rapportée, et des conditions particulières de sa facturation, il convient de déduire ces frais de la facture concernée.

S’agissant des frais de vermifuge mentionnés à part des frais de petite pharmacie pour les seules factures des mois de juin et juillet 2014, la cour constate que si l’expert précise qu’un cheval doit être vermifugé régulièrement, il n’indique pas la fréquence de l’administration d’un vermifuge ni en quoi le fait que l’achat des vermifuges de chevaux n’ait pas été encadré en 2014 et de ce fait soit plus accessible aux entraîneurs explique la raison pour laquelle ce poste de dépense n’est jamais apparu dans les factures précédentes. En conséquence, la cour estime qu’il n’est pas démontré que M. [D] ait consenti à une facturation de ces frais à part pour Enzo du Roch en juin et pour Jalafré de Kerosen en juillet.

Le premier juge sera donc approuvé pour avoir déduit la somme de 196,80 euros TTC de la facture du mois de juillet 2014 correspondant aux frais d’échographie et de vermifuge. Il convient également de déduire les frais de vermifuge pour Enzo du Roch en juin pour la somme de 25,20 euros TTC.

En conséquence, il convient de condamner M. [N] [D] à payer à M. [T] [L] la somme de 4 867,56 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2014. Il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts échus pour une année entière formée par l’appelant.

Sur les demandes reconventionnelles de M. [D] :

le remboursement des frais de pharmacie, vétérinaire et ostéopathie des factures d’août 2013 à mai 2014

M. [D] sollicite le remboursement de certains frais vétérinaires et de pharmacie que M. [L] n’est pas en mesure de justifier.

Interrogé sur ce point, l’expert a indiqué que les lignes pharmacie et frais vétérinaires figurant sur l’ensemble des factures émises par l’entraîneur étaient discutables. Il a souligné toutefois que le forfait pharmacie était à la fois raisonnable et imprécis puisqu’il était impossible de savoir quel cheval était concerné, tout en indiquant qu’il était d’usage qu’un forfait ‘petite pharmacie’ soit inclus dans les frais de pension, les chevaux nécessitant des soins réguliers d’hygiène, de massage et autres. Il a également noté l’imprécision des lignes de factures ‘ostéopathie ou vétérinaire’, faisant valoir que c’était au vétérinaire de facturer directement, ce qui permettait d’éviter ainsi la redondance de TVA. Il a néanmoins indiqué qu’il s’agissait là d’un usage assez répandu parmi les entraîneurs pour éviter des impayés à leur vétérinaire. Il a souligné que le docteur [B] lui a indiqué n’avoir pas toujours été payée par M. [D] pour l’échographie pratiquée le 2 juillet 2014 et que le docteur [P] avait dû recourir à un huissier pour le recouvrement de ses frais de consultation.

Il apparaît donc que les frais litigieux sont d’usage et que leur montant n’est pas anormal. Ils se rapportent à la prise en charge de deux chevaux de course. La cour constate de surcroît, que M [D] qui n’a pas pris la précaution de conclure un contrat écrit et n’a pas réglé ses factures avec diligence, n’a pour autant, jamais remis en cause le paiement de ces frais et ne l’a fait qu’une fois actionné en paiement par M. [L] sur les factures impayées. Il ne peut se retrancher derrière une absence de communication de M. [L] sans démontrer avoir de son côté exigé une telle communication, et notamment la justification de ces frais. Il sera également constaté que lors de la réunion d’expertise, M. [D] n’avait rien préparé et a dit à l’expert ne pas se souvenir de ses demandes et réclamations.

En conséquence, en l’absence de toute contestation au moment de l’émission des factures et en l’état des paiements effectués, M. [D] apparaît avoir accepté que le forfait de pension avec ou sans entraînement inclut des frais de petite pharmacie mais également avoir entériné les frais mentionnés comme frais de pharmacie, frais vétérinaire et ostéopathie sur les factures d’août 2013 à mai 2014. Il ne peut réclamer le remboursement de ces frais dont il ne démontre pas qu’ils sont sans réalité et dont il n’a jamais réclamé communication des justificatifs. Le jugement sera donc infirmé pour avoir condamné M. [L] à rembourser la somme de 916,24 euros à ce titre.

la demande en dommages-intérêts de M. [D] à raison des manquements de M. [L] à ses obligations contractuelles :

M [D] réclame les sommes de :

-9 000 euros au titre de la perte de chance pour le cheval Jalafré de Kerosen de remporter la course du 6 octobre 2013 et pour lui d’emporter les gains et la prime de l’éleveur,

– 5 000 euros au titre de la perte de chance de voir ce cheval participer à d’autres courses et pour son propriétaire de remporter des gains et des primes pendant le temps de convalescence et de pré-entraînement,

– 500 euros au titre des frais d’hébergement inutilement exposés,

– 200 euros au titre du livret signalétique du cheval Jalafré de Kerosen rendu détérioré,

– 7 000 euros en réparation des conséquences du défaut des soins pour le cheval Enzo du Roch.

Il est constant que le cheval Jalafré de Kerosen s’est blessé au postérieur gauche en sautant un mur de pierre lors de sa course de steeple avec handicap, en [Localité 2], le 6 octobre 2013. Le cheval s’est entaillé le postérieur gauche au-dessus du boulet et cette blessure a nécessité quinze points de suture. M [D] reproche à M. [L] d’avoir fait courir le cheval sans avoir protégé ses quatre membres par des guêtres, conformément à sa demande, relayée par son fils présent sur place et réitérée par lui-même par téléphone. Il soutient que la blessure que le cheval a subi, quatre minutes après le début de la course et qui l’a contraint à abandonner la course alors qu’il était en tête, ne serait pas survenue si le cheval avait eu les quatre membres protégés comme il l’avait expressément demandé . Il considère avoir perdu une chance sérieuse que le cheval remporte la course ce qui lui aurait rapporté la somme de 10 080 euros au titre des gains outre la prime de 1 052 euros au titre de la prime à l’éleveur. Il en est résulté pour lui également une perte de chance pour le cheval de remporter d’autres courses puisque le cheval a été immobilisé pendant plusieurs mois.

M. [L] fait valoir qu’il est connu pour faire courir les chevaux qui lui sont confiés sans guêtre. Il verse aux débats l’attestation du docteur [B], spécialiste en pathologie locomotrice des équidés, qui indique que la mise en place de guêtres favorise le développement d’irritations cutanées par frottement et qu’elles n’empêchent nullement les traumatismes cutanés de la région tendineuse métacarpienne et métatarsienne. Elle ajoute que la grande majorité des entraîneurs ne mettent pas de guêtres. Elle conclut en précisant que les lésions tendineuses couramment observées des régions métacarpiennes et métatarsiennes sont des lésions de fatigue liées à la conformation des chevaux et à leur discipline de sorte que la mise en place de guêtre n’a pas d’effet préventif dans ce genre de lésion.

M. [L] ajoute que le cheval s’est parfaitement remis de sa blessure, a participé à d’autres courses et a remporté d’importants gains.

L’expert judiciaire a estimé que la blessure de Jalafré de Kerosen le 6 octobre 2013 était un fait fortuit, fréquent malheureusement pour les chevaux, précisant que les courses de steeple venaient d’être interdites dans certains pays du fait de leur dangerosité. Il a indiqué que, compte tenu de la position de la blessure ‘juste dorsalment à l’articulation du boulet’, il avait la conviction qu’une guêtre d’obstacle n’aurait pas empêché cet incident précisant toutefois qu’il ne pouvait le certifier.

M. [D] communique des photos de chevaux de l’écurie [L] en pleine course avec des guêtres témoignant ainsi de ce que celui-ci a recours à des guêtres quelquefois. Il produit également un dire à l’expert rédigé par le docteur [U], vétérinaire, expert près la cour d’appel d’Angers, qui indique de son côté que ‘même si la guêtre de course s’arrête au niveau du boulet, on peut observer qu’elle crée une surépaisseur qui pouvait éviter au cheval une telle blessure sur le mur de l’obstacle’. Cet expert ajoute qu’ ‘il est raisonnable de penser que le port des guêtres lors de la course pouvait éviter ou minimiser l’accident du cheval Jalafré’.

Il ressort de l’avis de ces différents professionnels d’une part, que la survenance de la blessure n’est pas due à l’absence du port des guêtres et d’autre part, qu’il n’y a aucune certitude que le port des guêtres ait pu éviter la survenance de la blessure du cheval Jalafré de Kerosen le 6 octobre 2013. La perte de chance de gagner la course le 6 octobre 2013 et de remporter les gains afférents à cette réussite, de même que celle pour le cheval de participer plus rapidement à d’autres courses, augmentant ainsi les chances de gains de l’éleveur, ne sont donc nullement consécutives à un manquement de l’entraîneur, notamment à son refus de mettre des guêtres au cheval Jalafré de Kerosen pour cette course. . Le tribunal sera confirmé pour avoir débouté M. [D] de ses demandes en dommages-intérêts au titre des pertes de chances alléguées.

S’agissant des frais d’hébergement inutilement exposés en juin 2014 parce que l’entraîneur aurait tardé à faire voir le cheval par un vétérinaire et à tenir M [D] informé de l’état de son cheval, retardant d’autant son retour chez l’éleveur, il sera rappelé que la preuve a été rapportée de ce que le cheval a été vu dès le 9 juin par le docteur [P] qui a constaté que le membre blessé était trop enflé pour effectuer une échographie, puis revu le 16 juin jusqu’à l’échographie du 20 juin où ce vétérinaire a conseillé une retraite des courses.

S’il ne peut être reproché à M. [L] un manque de soins, il est manifeste que la communication entre les parties a été insuffisante. La présence du fils de M. [D] lors de la course, ne pouvait suffire, contrairement à ce qu’a relevé le tribunal, à renseigner le propriétaire sur l’état de son cheval et sur l’opportunité de le laisser pension puisque le vétérinaire n’a pu se prononcer qu’après deux consultations et une échographie. Si rien n’empêchait M. [D] de se renseigner sur l’état de son cheval après la course, M [L] se devait de transmettre des informations au propriétaire sur la santé de Jalafré de Kerosen.

Or, dès le 20 juin 2014, l’entraîneur savait que le cheval ne pouvait plus courir. L’avis du docteur [B], le 2 juillet 2014, à l’occasion d’une deuxième échographie n’a fait que confirmer cette nécessité d’une retraite. L’expert a considéré légitime ce deuxième avis compte tenu des diplômes du docteur [B] avant une décision de réforme. Néanmoins, M. [L] pouvait solliciter l’avis du propriétaire du cheval sur l’opportunité de cette deuxième échographie, ce qu’il n’a pas fait empêchant M [D] de prendre la décision de récupérer plus tôt son cheval et de s’épargner des frais d’hébergement à partir du 21 juin 2014, soit dix-sept jours à quinze euros. Il doit donc lui être remboursé la somme de 255 euros.

Par ailleurs, c’est par une exacte appréciation des faits et du dommage causé, que le tribunal a indemnisé la détérioration du livret de signalement par l’allocation de la somme de 120 euros, soulignant que le dépositaire se devait de restituer la chose déposée dans l’état où elle lui avait été confiée, étant observé toutefois que le premier juge a opéré une confusion et que c’est le livret du cheval Jalafré de Kerosen qui a été détérioré.

Enfin, le tribunal sera également approuvé pour avoir considéré que M. [L] était tenu d’une obligation de garde renforcée à compter du 8 avril 2014 concernant le cheval Enzo du Roch, alors au repos et qu’il a fait preuve de négligence dans la prise en charge de ce cheval. Les attestations émises par le maréchal ferrant [A] [W] et l’ostéopathe [F] [Y] témoignent du mauvais état des pieds du cheval à son retour le 8 août 2014 et confirment les photographies prises par le fils de M. [D] qui a réceptionné Enzo du Roch. L’expert émet l’hypothèse que M. [L] ait pu se montrer moins attentif à la ferrure, qui a pourtant été effectuée le 1er juillet 2014 sur les deux antérieurs, en raison des différents et des impayés avec le propriétaire. Le docteur [U] a cependant indiqué que l’ancienneté de la ferrure n’avait eu aucune incidence sur la desmite chronique dont souffrait le cheval. En conséquence, l’indemnisation du préjudice subi sera ramenée à la somme de 2 000 euros.

Sur la demande en dommages-intérêts de M. [L] :

Au regard de la solution apportée au litige par la cour, il apparaît que M [L] a fait preuve de certaines négligences dans sa facturation et dans le suivi du cheval Enzo du Roch de sorte que le jugement sera confirmé pour l’avoir débouté de sa demande en dommages-intérêts.

Sur les demandes accessoires :

Compte tenu de la solution du litige, chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d’appel.

Les circonstances de l’espèce ne justifient pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ni en première instance ni en appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme partiellement le jugement rendu le 31 décembre 2019 par le tribunal d’instance de Saint-Brieuc,

Statuant à nouveau sur l’entier litige :

Condamne M. [N] [H] [D] à payer à M. [T] [L] la somme de 4 867,56 euros avec intérêt au taux légal à compter du 29 septembre 2014,

Autorise la capitalisation des intérêts pour chaque année échue,

Condamne M. [T] [L] à payer à M. [N] [H] [D] les sommes de :

– la somme de 255 euros au titre des frais d’hébergement inutilement exposés,

– 120 euros au titre en paiement du coût de remplacement du livret signalétique de Jalafré de Kerosen,

– la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de soin au cheval Enzo du Roch, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

Ordonne la compensation entre les sommes dues par les parties,

Déboute M. [N] [H] [D] de ses demandes en dommages-intérêts au titre de la perte de chance de remporter la course du 6 octobre 2013 et les gains en découlant pour l’éleveur et au titre de la perte de chance de voir le cheval Jalafré de Kerosen participer à d’autres courses et pour son propriétaire de remporter d’autres gains pendant le temps de convalescence et de pré-entraînement,

Déboute M. [T] [L] de sa demande en dommages-intérêts,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d’appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.

 


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