Your cart is currently empty!
Arrêt n° 23/00213
12 Juin 2023
—————
N° RG 21/01093 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FPSP
——————
Tribunal Judiciaire de METZ- Pôle social
26 Mars 2021
18/01624
——————
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
Section 3 – Sécurité Sociale
ARRÊT DU
douze Juin deux mille vingt trois
APPELANT :
Monsieur [D] [U]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par l’association [9], prise en la personne de Mme [T] [V], salariée de l’association munie d’un pouvoir spécial
INTIMÉS :
SAS [17]
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Me Jean-christophe DUCHET, avocat au barreau de METZ substitué par Me ADJAOUI , avocat au barreau de Metz
FONDS D’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE
[Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 8]
représenté par Me BONHOMME, avocat au barreau de METZ
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE MOSELLE
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentée par Mme [N], munie d’un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Carole PAUTREL, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre
Mme Anne FABERT, Conseillère Mme Carole PAUTREL, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement après prorogation du 11.05.2022
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Né le 29 mars 1937, Monsieur [D] [U] a travaillé pour le compte de la Société [17] de façon non continue entre le 9 mars 1960 et le 30 juin 1989, en qualité de peintre.
Par formulaire du 28 juin 2016, accompagné d’un certificat médical initial du 30 mai 2016, diagnostiquant une asbestose, Monsieur [U] a formulé auprès de la caisse primaire d’assurance maladie de Moselle (ci-après la caisse ou CPAM), une demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre du tableau n°30A.
Après instruction, la caisse a informé Monsieur [U], par courrier du 20 décembre 2016, de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie dont il était atteint au titre du tableau n°30A des maladies professionnelles, relatif aux affections professionnelles consécutives l’inhalation de poussières d’amiante.
Le 13 mars 2017, la CPAM de Moselle a fixé à 10% le taux d’incapacité permanente partielle de Monsieur [U] et lui a attribué une rente trimestrielle d’un montant de 439,51 euros à compter du 31 mai 2016, lendemain de la date de consolidation.
Le 24 mai 2017, Monsieur [U] qui avait déjà été indemnisé par le FIVA en 2014 pour une première maladie professionnelle, plaques pleurales, reconnue par la caisse en 2013, a accepté l’offre complémentaire suivante du Fonds d’indemnisation des Victimes de l’Amiante (FIVA) au titre l’asbestose:
· réparation du préjudice moral : 500 euros ;
· réparation du préjudice physique : 500 euros ;
·réparation du préjudice d’agrément : 500 euros.
Monsieur [U] a introduit, le 9 octobre 2018, une demande de reconnaissance de faute inexcusable de son ancien employeur, la société [17], devant la caisse par courrier du 25 août 2017 pour la survenue de sa maladie professionnelle 30A du 30 mai 2016.
Après échec de la tentative de conciliation introduite devant la caisse, Monsieur [U] a, par lettre recommandée expédiée le 9 octobre 2018, saisi le Tribunal des affaires de Sécurité sociale de la Moselle, afin de voir reconnaître la faute inexcusable de son ancien employeur dans la survenance de sa maladie professionnelle reconnue par la caisse le 20 décembre 2016.
La CPAM de la Moselle a été mise en cause.
Le FIVA, informée de la procédure par le greffe, est intervenue volontairement à l’instance
Par jugement du 26 mars 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Metz, nouvellement compétent, a:
– déclaré le jugement commun à la caisse primaire d’assurance maladie de Moselle ;
– déclaré Monsieur [D] [U] recevable en sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son ancien employeur ;
– déclaré le Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante, subrogé dans les droits de Monsieur [D] [U], recevable en ses demandes ;
– dit que l’existence d’une faute inexcusable de la société [17] dans la survenance de la maladie professionnelle de Monsieur [D] [U] inscrite au tableau 30A n’est pas établie;
– débouté en conséquence Monsieur [D] [U] et le FIVA de leur demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur et de leurs demandes indemnitaires subséquentes ;
– déclaré en conséquence sans objet les demandes de la caisse primaire d’assurance maladie de Moselle ;
– déclaré sans objet la demande de mise en cause des autres employeurs de Monsieur [U] formulée par la société [17] ;
– débouté la société [17] de sa demande d’inopposabilité de la décision de la caisse de reconnaissance de la maladie professionnelle de Monsieur [U] du 20 décembre 2016 ;
– condamné in solidum Monsieur [U] aux entiers frais et dépens de l’instance ;
– débouté Monsieur [D] [U] et le FIVA de leurs demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamné in solidum Monsieur [D] [U] et le FIVA à verser la somme de 800 euros à la société [17] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.
Par acte remis au greffe le 16 avril 2021, Monsieur [U] a interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée par LRAR du 1er avril 2021 dont l’accusé de réception ne figure pas dans le dossier de première instance.
Par conclusions datées du 5 septembre 2022 et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoirie par son représentant, Monsieur [U] demande à la cour de :
– déclarer recevable et bien fondé l’appel formé par Monsieur [D] [U] ;
– infirmer intégralement le jugement entrepris.
Statuant à nouveau :
– juger que la maladie professionnelle du tableau 30A de Monsieur [D] [U] est due à une faute inexcusable de la société [17],
– juger que Monsieur [U] a droit à une majoration de sa rente en la portant au taux maximum conformément aux dispositions de l’article L 452-2 du Code de la Sécurité Sociale.
– condamner la caisse à lui payer cette majoration ;
– juger que :
* cette majoration prendra effet à la date de reconnaissance de la maladie professionnelle;
*En cas d’aggravation ultérieure, le taux de rente sera indexé au taux d’IPP ;
* En cas de décès imputable, la rente de conjoint sera majorée à son taux maximum et la caisse devra verser l’indemnité forfaitaire prévue par l’article 452-3 du code de sécurité sociale, de même qu’en cas d’aggravation du taux d’IPP à 100% ;
– condamner la société [17] à payer au demandeur la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du CPC
– la condamner aux entiers frais et dépens.
– juger que l’ensemble des sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement.
Par conclusions datées du 5 juillet 2022 et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoirie par son conseil, le FIVA demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré recevable Monsieur [U] en sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son ancien employeur, déclaré le Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante subrogé dans les droits de Monsieur [U] recevable en ses demandes,
– infirmer le jugement pour le surplus,
En conséquence :
– dire que la maladie professionnelle 30A dont est atteint Monsieur [U] est la conséquence de la faute inexcusable de la Société [17] ;
– fixer à son maximum la majoration de la rente servie à Monsieur [U], et juger que la CPAM de Moselle devra directement verser cette majoration de rente à Monsieur [U],
– dire que cette majoration devra suivre l’évolution du taux d’incapacité permanente de Monsieur [U], en cas d’aggravation de son état de santé,
– dire qu’en cas de décès de la victime imputable à sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.
– fixer l’indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [U] comme suit :
Souffrances morales 500 euros
Souffrances physiques 500 euros
– dire que la CPAM de Moselle devra verser cette somme au FIVA, créancier subrogé, en application de l’article L 452-3 alinéa 3, du Code de la sécurité sociale,
– condamner la Société [17] à payer au FIVA une somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner la partie succombante aux dépens, en application des articles 695 et suivants du Code de procédure civile.
Par conclusions reçues le 6 mars 2023 et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoirie par son conseil, la société [17] demande à la cour de :
– dire et juger Monsieur [D] [U] mal fondé en son appel ;
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [D] [U] et le FIVA de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;
A défaut, par substitution de motifs ;
Si par impossible, la cour infirmait le jugement ;
AVANT DIRE DROIT
Vu les dispositions de l’article 331 du Code de Procédure Civile,
– ordonner la mise en cause et appeler en intervention forcée dans la présente procédure les parties suivantes, et toute autre société ou entité juridique ayant été employeur de Monsieur [D] [U] : la Société [20] à [Localité 18], la Société [11] à [Localité 16], la Société [12] à [Localité 21], la Société [15] à [Localité 5], la Société [22], la Société [23], la Société [N] à [Localité 10], la Société [19], [14].
– Et sommer Monsieur [D] [U] de communiquer l’identité et les coordonnées de l’intégralité de ses employeurs auprès desquels il a travaillé tout au long de sa carrière professionnelle.
AU FOND
A TITRE PRINCIPAL
– mettre hors de cause la société [17] ;
A TITRE SUBSIDIAIRE
– déclarer la maladie professionnelle de Monsieur [D] [U], inopposable à la société [17] ;
A TITRE ENCORE PLUS SUBSIDIAIRE
– reconnaitre que Monsieur [D] [U] n’a pas été exposé à l’amiante au sein de la Société [17] ;
– reconnaitre que la Société [17] n’a commis aucune faute inexcusable à l’égard de Monsieur [D] [U] ;
En conséquence,
– mettre hors de cause la société [17] dans le cadre de la responsabilité de la maladie de Monsieur [D] [U] ;
– débouter Monsieur [D] [U] de l’intégralité de ses chefs de demandes à l’encontre de la Société [17] ;
– débouter la CPAM de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
– débouter le FIVA de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions
A défaut ;
– réduire les chefs de demandes indemnitaires du FIVA à de plus justes proportions ;
– condamner les précédents employeurs de Monsieur [D] [U] ;
– déclarer l’arrêt à venir commun et opposable à toutes les parties, et notamment à l’Etat français représenté par le Préfet de Moselle, à la présente instance.
EN TOUT ETAT DE CAUSE
– débouter Monsieur [D] [U], le FIVA et la CPAM de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions à hauteur de cour ;
– déclarer l’arrêt commun et opposable à toutes les parties à la présente instance ;
– condamner in solidum Monsieur [D] [U] et le FIVA à payer à la société [17] la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens au titre de la première instance.
– condamner in solidum Monsieur [D] [U] et le FIVA à payer à la société [17] la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens à hauteur de cour.
Par conclusions datées du 17 décembre 2022 et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoirie par son représentant, la CPAM de Moselle demande à la cour de :
– donner acte à la caisse qu’elle s’en remet à la sagesse de la cour en ce qui concerne la faute inexcusable reprochée à la société [17].
Et le cas échéant :
– donner acte à la caisse qu’elle s’en remet à la cour en ce qui concerne la fixation du montant des majorations de la rente réclamées par Monsieur [U] et le FIVA.
– prendre acte que la caisse ne s’oppose pas à ce que la majoration de la rente suive l’évolution du taux d’incapacité permanente partielle de Monsieur [U] [D]
– constater que la caisse ne s’oppose pas à ce que le principe de la majoration de la rente reste acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant, en cas de décès Monsieur [U] [D] consécutivement à sa maladie professionnelle.
– donner acte à la caisse qu’elle s’en remet à la cour en ce qui concerne la fixation du montant des préjudices extrapatrimoniaux subis par Monsieur [U] [D]
– condamner la société [17] à rembourser à la caisse les sommes qu’elle sera tenue de verser au titre de la majoration de la rente et des préjudices extrapatrimoniaux ainsi que des intérêts légaux subséquents, en application des dispositions de l’article L.452-3-1 du Code de la Sécurité Sociale
– Le cas échéant, rejeter toute éventuelle demande d’inopposabilité des décisions de prise en charge des maladies professionnelles n°30A de Monsieur [U] [D].
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l’audience, ainsi qu’aux pièces déposées par elles.
SUR CE,
SUR LA MISE HORS DE CAUSE DE LA SOCIETE [17] ET LA MISE EN CAUSE DES AUTRES EMPLOYEURS :
A titre principal, la société [17] soutient qu’elle n’a pas la qualité de dernier employeur de Monsieur [U] et sollicite donc sa mise hors de cause. Subsidiairement, elle fait valoir qu’il y a lieu d’appeler en la cause tous les autres employeurs de l’appelant dès lors que l’exposition au risque n’a pas pu se réaliser en son sein.
*********************
Il sera rappelé que lorsqu’une victime a été employée par plusieurs entreprises susceptibles de l’avoir exposée au risque professionnel du tableau de la maladie qu’elle déclare, elle est en droit de choisir l’employeur qu’elle entend poursuivre en faute inexcusable. Ainsi, le fait que la procédure administrative de prise en charge menée par la caisse ne l’ait pas été au contradictoire de la société [17] qui n’est pas le dernier employeur qui l’a exposé au risque, est sans incidence sur les conditions et les effets de la reconnaissance de la faute inexcusable.
Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L.452-1, L.452-4 alinéa 1 du code de la sécurité sociale et 31 du code de procédure civile que l’employeur, qui fait l’objet d’une action en reconnaissance de sa faute inexcusable, est recevable à rechercher, devant la juridiction de sécurité sociale, pour obtenir leur garantie, la faute inexcusable des autres employeurs au service desquels la victime a été exposée au même risque.
Faute pour la société [17] d’avoir sollicité la mise en cause des autres employeurs de M. [U] en fournissant au greffe leurs coordonnées précises permettant leur citation, la cour n’est pas saisie à l’égard de ces tiers . Cette absence de mise en cause des autres employeurs de M. [U] est sans incidence sur l’action dirigée contre elle par ce dernier et le FIVA.
SUR LA DEMANDE D’INOPPOSABILITE DE LA SOCIETE [17] :
Faisant valoir que la CPAM de Moselle ne l’avait pas informée de toutes les étapes de l’instruction, puis, au final de la reconnaissance de la maladie professionnelle de l’appelant, la société [17] sollicite l’inopposabilité à son encontre de la décision de prise en charge de la maladie déclarée par l’appelant au titre de la législation sur les risques professionnels pour violation du principe du contradictoire.
*******************
Il sera rappelé que, si un employeur peut soutenir, en défense à l’action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayant-droits, que la maladie n’a pas d’origine professionnelle, il n’est pas recevable en revanche à contester, à la faveur de cette instance, l’opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie par la caisse au titre de la législation sur les risques professionnels. L’action en reconnaissance de la faute inexcusable se caractérise en effet par son indépendance l’égard de la procédure administratives de prise en charge menée par la caisse.
La demande de la société [17] relative à l’inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie doit donc être déclarée irrecevable.
Il convient également de rappeler qu’une éventuelle inopposabilité de la décision de prise en charge est sans incidence sur l’action en reconnaissance de la faute inexcusable dirigée contre l’employeur et sur le droit de la caisse de récupérer auprès de l’employeur dont la faute inexcusable est reconnue, les compléments de rente et indemnités versés par elle.
Le jugement entrepris est donc confirmé sur ce point.
SUR LA FAUTE INEXCUSABLE DE LA SOCIETE [17] :
Monsieur [U] sollicite l’infirmation du jugement entrepris et soutient que les témoignages produits à hauteur d’appel confirment l’exposition au risque au sein de la société [17] dès lors que l’activité de peintre qu’il y a exercée le faisait intervenir quasi exclusivement sur la plate-forme chimique de [Localité 13] où l’amiante était présente de façon importante, notamment dans les calorifugeages des conduites qu’il devait repeindre.
Il sollicite la reconnaissance de la faute inexcusable de la société [17], dès lors qu’il estime que les attestations qu’il produit de Messieurs [X], [L], [B] et [O] ( nouvelle attestation produite), établissent l’absence des moyens de protection pris par l’employeur et sa parfaite connaissance du danger encouru.
Soutenant que Monsieur [U] n’a jamais été en contact avec de l’amiante en son sein, la société [17] conteste toute exposition au risque de l’appelant. Elle produit ainsi aux débats l’attestation d’un salarié ayant exercé, entre 1989 et 1993, dans des conditions similaires à celles de l’appelant et qui témoigne d’une absence d’exposition à l’amiante. La société [17] soutient également que les attestations produites par l’appelant ne permettent aucunement de caractériser une exposition au risque en son sein, dès lors que les témoins ont également travaillé pour un autre employeur chez lequel ils ont été exposés.
Elle fait valoir que l’appelant n’apporte aucunement la preuve des éléments constitutifs de la faute inexcusable et souligne la mise à disposition d’équipements de protection individuelle pour chacun de ses salariés, et notamment des masques de protection.
Le FIVA soutient les arguments développés par Monsieur [U].
La caisse s’en rapporte à l’appréciation de la cour.
**********************
Pour établir la faute inexcusable de l’employeur,le salarié doit établir son exposition professionnelle au risque, la conscience qu’avait l’employeur au moment de l’exposition du danger auquel il l’exposait et le fait que l’employeur n’a pas pris les mesures nécessaires pour le protéger.
Il ressort de l’annexe n° 11 de Monsieur [U] que celui-ci a été employé par la société [17] du 9 mars 1960 au 21 octobre 1972, puis du 25 février 1974 au 30 juin 1989, en qualité de peintre.
Les conditions de travail de Monsieur [U] sont décrites par quatre témoins en la personne de Messieurs [W] [X], [M] [L], [C] [B] et [I] [O] (pièces n°7 à 10 de M. [U]), l’attestation de Monsieur [I] [O] dayé du 19 octobre 2021 étant nouvelle devant la cour.
Or, il apparaît que ces attestations manquent de force probante.
S’agissant de la nouvelle attestation produite émanant de Monsieur [I] [O], ancien salarié de la plate forme chimique de [Localité 13], son attestation du 19 octobre 2021 ( pièce n° 10) est un copier- coller de l’attestation qu’il a rédigée pour Monsieur [X], le 15 octobre 2021 ( pièce n° 7 de la société [17]). De plus, Monsieur [I] [O] est, ou en tous cas a été, le Président de l’association [9], mandataire de l’appelant. Ces éléments conduisent la cour à écarter son témoignage dont l’impartialité n’est pas assurée.
Les autres attestations sont toutes rédigées en des termes généraux et similaires, sans aucune précision sur les chantiers sur lesquels ils ont travaillé avec la victime,alors que celle-ci fait état de ce qu’elle a quasi exclusivement travaillé sur la plate forme chimique de [Localité 13] ,laissant penser qu’ils ont recopié des modèles préétablis, ce qui ne permet pas d’en apprécier l’authenticité.
Les attestations de Messieurs [X] et [L] évoquent, en outre , sans faire de distinction, leurs activités auprès des sociétés [17] et [17] et [N] et apparaissent , par conséquent , insuffisamment circonstanciées.
La référence faite par M . [U] à de précédentes décisions de justice n’établit pas davantage que M [U] a été exposé aux poussières d’amiante lorqu’il était employé de de la société [17] dans les conditions constitutives d’une faute inexcusable de l’employeur, ces décisions n’ayant autorité de chose jugée qu’entre les parties concernées ; que tenu de motiver ses décisions, le juge doit se déterminer d’après les circonstances particulière de chaque instance .
S’agissant, par ailleurs, des pièces générales produites par Monsieur [U] ( cf son bordereau de pièces), elles ne permettent de tirer aucune conclusion sur son cas individuel tant au regard de ses conditions d’exposition que des mesures prises par l’employeur pour préserver sa santé.
Ainsi, en l’absence d’autres éléments produits de nature à justifier des conditions de travail de Monsieur [U], le jugement entrepris qui les a déboutés de leurs demandes en reconnaissance de la faute inexcusable de la société [17] est confirmé.
SUR LES FRAIS IRREPETIBLES ET LES DEPENS :
L’issue du litige conduit la cour à débouter Monsieur [U] et le FIVA de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile La cour confirme par ailleurs les dispositions du jugement entrepris à ce titre et déboute société [17] de toutes conclusions plus amples sur ce fondement,notamment de sa demande au titre des frais irrépétibles exposés en appel. Le FIVA et Monsieur [U] qui succombent dans leur voie de recours sont en outre condamnés aux dépens d’appel, ceux de première instance mis à leur charge étant confirmés sous réserve de préciser qu’il s’agit des dépens dont les chefs sont nés à compter du 1er janvier 2019, la procédure antérieure étant gratuite et sans frais.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME le jugement entrepris du 26 mars 2021 du pôle social du tribunal judiciaire de [Localité 5] sauf à préciser que les dépens de première instance mis in solidum à la charge de Monsieur [D] [U] et le FIVA sont ceux dont les chefs sont nés à compter du 1er janvier 2019
Y ajoutant,
DEBOUTE M. [D] [U] et le FIVA de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
DEBOUTE la société [17] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour l’instance d’appel.
CONDAMNE M. [D] [U] et le FIVA in solidum aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président