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ARRÊT N°23/199
AP
N° RG 21/01454 – N° Portalis DBWB-V-B7F-FTHQ
[J]
C/
Association DELEGATION REGIONALE AGS CENTRE OUEST DEPARTEMENT DE LA REUNION
S.E.L.A.R.L. FRANKLIN [S] PARTEMENT DE LA REUNION
Etablissement Public DEPARTEMENT DE LA REUNION
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 23 JUIN 2023
Chambre sociale
Vu l’arrêt de la cour de Cassation en date du 11 mars 2020 ayant cassé et annulé l’arrêt rendu le 27 mars 2018 suite à l’arrêt rendu par le COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS en date du 27 MARS 2018 rg n° 11/02651 suivant déclaration de saisine en date du 05 AOUT 2021
APPELANTE :
Madame [F] [J]
[Adresse 2]
[Localité 6] / Franc
Représentant : Me Xavier BELLIARD de l’AARPI BELLIARD-RATRIMOARIVONY, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMEES :
Association DELEGATION REGIONALE AGS CENTRE OUEST DEPARTEMENT DE LA REUNION
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Nathalie JAY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
S.E.L.A.R.L. FRANKLIN [S] es qualités de mandataire judiciaire de l’A.R.A.S.T
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentant : Me Chafi AKHOUN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Etablissement Public DEPARTEMENT DE LA REUNION
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Christine CHANE-KANE de la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉBATS : En application des dispositions des articles 778, 779 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Mars 2023 devant la Cour composée de :
Président : Monsieur Alain CHATEAUNEUF, Premier président
Conseiller : Madame Aurélie POLICE, Conseillère
Conseiller : M. Cyril OZOUX, Président de chambre
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
Greffier lors des débats et du prononce : Madame Marina BOYER, Greffière.
A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 23 Juin 2023.
****
LA COUR :
Exposé du litige :
Mme [J] a été engagée par l’association régionale d’accompagnement social territorialisé (ARAST), à compter du 1er mars 1976, en qualité de technicienne d’intervention sociale et familiale dans le secteur de l’aide à l’enfance.
Par jugement du 27 novembre 2009, le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion a prononcé la liquidation judiciaire sans poursuite d’activité de l’ARAST. Le mandataire liquidateur a alors sollicité l’autorisation de l’inspecteur du travail de procéder aux licenciements des salariés protégés.
Par décision du 18 janvier 2010, l’inspecteur du travail refusait le licenciement de Mme [J].
Sur recours hiérarchique et par décision du 16 juillet 2010, le ministère du travail annulait la décision de l’inspection du travail et autorisait le licenciement de Mme [J], décision contestée par celle-ci devant le tribunal administratif qu a, par jugement du 26 septembre 2013, rejeté son recours.
Le 7 septembre 2010, Mme [J] a été licenciée pour motifs économiques.
Sollicitant la garantie de la délégation régionale Unedic de l’association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) pour le paiement des salaires échus et d’indemnités de licenciement, Mme [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Denis de la Réunion qui, par jugement en formation de départage du 23 novembre 2011 et après avoir retenu l’absence de transfert des activités de l’association et des contrats de travail au département, a ordonné à l’AGS de faire l’avance des créances de Mme [J] entre les mains de Me [G], mandataire liquidateur, pour les sommes de 22 320,12 euros à titre de dommages et intérêts et de 22 320,12 euros au titre de l’indemnité de licenciement, dans les limites de sa garantie légale, débouté Mme [J] de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et condamné Me [G], ès qualités, aux dépens.
Appel de cette décision a été interjeté par l’AGS le 28 décembre 2011.
Par arrêt avant dire droit du 30 juin 2014, rectifié par arrêt du 13 décembre 2016, la cour d’appel a sursis à statuer dans l’attente d’une décision irrévocable de la juridiction administrative sur le contentieux de l’annulation de l’autorisation de licenciement et invité Mme [J] à soumettre à la cour administrative d’appel compétente le moyen de la transparence de l’ARAST.
Par arrêt définitif du 12 janvier 2015, la cour administrative d’appel a annulé la décision ministérielle ainsi que le jugement du tribunal administratif du 26 septembre 2013 qui rejetait le recours de Mme [J].
Par arrêt du 27 mars 2018, la cour d’appel a :
– confirmé le licenciement en ce qu’il n’a pas retenu l’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail ainsi que sur les deux créances salariales de 22 320,12 euros afférentes à l’indemnité de licenciement et à l’indemnisation du préjudice distinct ainsi que sur les dépens,
– dit le licenciement de Mme [J] nul du fait de l’annulation de l’autorisation de son licenciement,
– fixé la créance salariale de Mme [J] au passif de la liquidation judiciaire de l’ARAST pour l’indemnité de licenciement nul à la somme de 5 000 euros, avec le bénéfice de la garantie de l’AGS dans la limite des plafonds légaux,
– rejeté toute autre demande,
– condamné l’AGS aux dépens d’appel.
Un pourvoi a été formé par Mme [J].
Par arrêt du 11 mars 2020, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi en ce qu’il était dirigé contre l’arrêt du 30 juin 2014 de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion et cassé et annulé l’arrêt rendu par la même cour d’appel le 27 mars 2018, mais seulement en ce qu’il fixe la créance de Mme [J] dans la procédure collective de l’ARAST à titre d’indemnité pour licenciement nul à la somme de 5 000 euros, avec bénéfice de la garantie de l’AGS, dans la limite des plafonds légaux, et a remis sur ce point l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée.
La Cour de cassation a en outre mis hors de cause le département de la Réunion, condamné Me [S], de la SELARL Franklin [S], ès qualités, aux dépens et à payer à Mme [J] la somme de 750 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, la demande formée par le département de la Réunion à ce titre étant rejetée.
Au visa de l’article L. 2422-4 du code du travail, la Cour de cassation a en effet jugé que la salariée, qui ne demandait pas sa réintégration, avait droit à une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l’expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision d’annulation de l’autorisation de licenciement.
La cour d’appel de renvoi a été saisie par Mme [J] le 5 août 2021.
Par dernières conclusions notifiées le 3 mai 2022 et oralement soutenues lors de l’audience de plaidoiries du 17 mars 2023, Mme [J] demande de voir:
– dire recevables et bien fondées ses demandes,
– fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de l’ARAST au titre de l’indemnité de licenciement nul à la somme de 27 090,77 euros nets,
– ordonner l’inscription des sommes allouées sur les relevés de créance salariale,
– dire que l’AGS garantira lesdites sommes,
– condamner la SELARL Franklin [S], ès qualités de mandataire judiciaire de l’ARAST, à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2022 et oralement soutenues lors de l’audience de plaidoiries, l’AGS sollicite de voir :
– constater que le justificatif de son statut de salarié protégé, la lettre de licenciement, l’autorisation de licencier, l’arrêt de la cour d’appel administrative de Bordeaux du 12 janvier 2015 et les bulletins de salaire de Mme [J] ne sont pas versés aux débats,
– infirmer la décision de première instance en ce qu’elle a retenu une créance de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
A titre subsidiaire, l’AGS demande de voir :
– constater que Mme [J] n’a jamais formulé de demande tendant à réparer les conséquences de la violation de son statut protecteur, mais a limité ses demandes à l’indemnisation d’un licenciement nul, demandes qui ne tendent pas aux mêmes fins,
– déclarer irrecevable la demande fondée sur l’article L. 2422-4 du code du travail et retenir le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail,
– limiter la demande indemnitaire, en l’absence de bulletins de paie et de justificatifs de l’importance du préjudice, à la somme de 16 074,72 euros,
En tout état de cause, sur la garantie, l’AGS demande de voir :
– dire que la décision à intervenir ne sera opposable à l’AGS, que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
– dire en conséquence que la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à l’un des trois plafonds définis à l’article D. 3253 du code du travail,
– exclure de la garantie de l’AGS les créances aventuellement inscrites au titre des frais irrépétibles et des dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 5 juillet 2022 et oralement soutenues lors de l’audience de plaidoires, la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de madataire liquidateur de l’ARAST, demande de voir :
– juger que Mme [J] ne justifie pas de son statut de salarié protégé et ne verse aux débats aucun éléments laissant présager d’un tel statut,
– infirmer la décision rendue par le juge départiteur en ce qu’il a retenu une créance de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
– juger qu’il s’agit d’une demande nouvelle et que l’article L. 2422-4 n’a pas vocation à s’appliquer,
– juger que le délai de prescription de l’action est soumis à un délai de trois ans et non de cinq ans,
– juger que Mme [J] n’apporte nullement la preuve du préjudice qu’elle allègue,
– juger que Mme [J] n’apporte aucun élément probatoire sérieux justifiant de sa demande d’indemnisation,
En conséquence,
– débouter Mme [J] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires à l’encontre de la SELARL Franklin [S] agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de l’ARAST, et, subsidiairement, ramener son indemnisation à de plus justes proportions et limiter son indemnisation à hauteur de six mois de salaires,
– condamner Mme [J] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 27 octobre 2021 et oralement soutenues lors de l’audience de plaidoiries, le département de la Réunion demande de voir condamner Mme [J] au paiement de la somme de 1 085 euros au titre des frais irrépétibles, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu’aux développements infra.
Sur ce :
Sur le périmètre du litige :
Par effet de la cassation partielle de l’arrêt du 27 mars 2018, la cour de renvoi n’est saisie que du montant de la somme allouée à Mme [J] par la cour d’appel pour licenciement nul.
L’AGS et la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’ARAST, demandent à ce que le jugement soit infirmé au motif que Mme [J] ne justifierait ni de son staut de salariée protégée, ni de son licenciement, ni des décisions relatives à l’autorisation de licenciement.
Il convient toutefois de constater que par arrêt du 27 mars 2018, la cour d’appel a dit le licenciement de Mme [J] nul du fait de l’annulation de son autorisation de licenciement, ce qui implique nécessairement que la salariée disposait de la protection attachée au mandat électif.
La Cour de cassation n’a pas censuré cette disposition de l’arrêt qui se trouve désormais revêtue de l’autorité de la chose jugée, de sorte que la présente cour n’est valablement saisie que des demandes d’irrecevabilité de la demande fondée sur l’article L. 2422-4 du code du travail, de rejet de ses prétentions et de limitation de la demande indemnitaire.
Sur l’indemnisation
L’AGS et la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’ARAST, se prévalent des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile pour considérer que la demande formée par Mme [J] sur le fondement de l’article L. 2422-4 du code du travail, pour l’indemnisation de la violation de son statut protecteur, est irrecevable pour avoir été présentée pour la première fois à hauteur d’appel.
Toutefois, l’article R. 1452-6 du code du travail, dans sa version applicable préalablement à l’entrée en vigueur du décret n°2016-660 du 20 mai 2016, prévoit que toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu’elles émanent du demandeur ou du défendeur, l’objet d’une seule instance. Cette règle n’est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud’hommes.
L’article R. 1452-7 du même code, dans cette même version, dispose également que les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel.
L’absence de tentative de conciliation ne peut être opposée. Même si elles sont formées en cause d’appel, les juridictions statuant en matière prud’homale connaissent les demandes reconventionnelles ou en compensation qui entrent dans leur compétence.
L’article 8 du décret n°2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail a implicitement abrogé l’article R. 1452-6 cité ci-dessus qui édictait la règle d’unicité des demandes.
L’article 45 du même décret prévoit cependant que : « les articles 8, 12 et 23 sont applicables aux instances introduites devant les conseils de prud’hommes à compter du 1er août 2016. ».
En l’espèce, l’instance a été introduite devant le conseil de prud’hommes par requête du 8 février 2010.
Cette instance, introduite avant l’entrée en vigueur du décret du 20 mai 2016, reste donc soumise aux dispositions anciennes dont les termes ont été rappelés ci-dessus.
La demande de Mme [J] de se voir indemnisée sur le fondement de l’article L. 2422-4 du code du travail ne peut donc être considérée comme étant une demande nouvelle puisque découlant du même contrat et opposant les mêmes parties.
En application du principe d’unicité de l’instance, la demande indemnitaire de Mme [J] sera donc déclarée recevable.
La SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’ARAST, soulève la prescription de l’action considérant que le délai de prescription de trois ans doit s’appliquer à la demande en répétition du salaire, conformément à l’article L. 3245-1 du code du travail.
Il est toutefois établi que Mme [J] a engagé une action aux fins de paiement d’une indemnité correspondant à ses salaires échus et d’une indemnité de licenciement dès le 8 février 2010, alors qu’elle n’a eu connaissance de la décision d’annulation de l’autorisation de licenciement qu’à la date de l’arrêt de la cour administrative d’appel du 12 janvier 2015 alors que l’instance engagée en 2010 était toujours en cours.
Ainsi, le délai de prescription, interrompu par l’introduction de l’instance, est suspendu depuis lors.
La présente action sera donc déclarée recevable pour être non prescrite.
L’article L. 2422-4 du code du travail dispose que lorsque l’annulation d’une décision d’autorisation est devenue définitive, le salarié investi d’un des mandats mentionnés à l’article L. 2422-1 a droit au paiement d’une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s’il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision.
L’indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l’expiration du délai de deux mois s’il n’a pas demandé sa réintégration.
Ce paiement s’accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire.
L’AGS et la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’ARAST, font valoir que Mme [J] sollicite l’indemnisation de son licenciement et en déduisent que l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version antérieure applicable au litige, doit s’appliquer, le montant de l’indemnité devant dès lors être limité à six mois de salaire.
D’une part, l’article dont se prévaut l’AGS et le mandataire liquidateur indemnise le licenciement intervenu sans cause réelle et sérieuse, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
D’autre part, l’article L. 2422-4 du code du travail prévoit une indemnisation intégrale du préjudice de la salariée dont le statut protecteur a été violé, de sorte que l’indemnité ne saurait être limitée à six mois de salaire.
Il est établi que la salariée dont l’autorisation de licenciement a été définitivement annulée ou retirée peut prétendre au paiement d’une indemnité correspondant à la totalité du préjudice, tant matériel que moral, subi au cours de la période qui s’est écoulée entre son licenciement et, à défaut de réintégration, l’expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision d’annulation de l’autorisation de licenciement.
Mme [J] a droit, au titre de son préjudice matériel, seul réclamé en l’espèce, au paiement d’une somme dans la limite du montant des salaires dont elle a été privée, déduction faite des revenus de remplacement ayant pu être perçus, au titre d’une activité professionnelle, de pensions de retraite ou d’allocations de chômage.
Aucune faute de l’employeur n’a à être caractérisée pour ouvrir droit à indemnisation.
De même, le fait que Mme [J] ne justifie pas de recherches d’emploi est sans emport.
Contrairement à ce que soutiennent l’AGS et la SELARL Franklin [S], ès qualités, Mme [J] justifie du montant du salaire perçu préalablement à son licenciement, ayant communiqué ses bulletins de salaire des mois de janvier à octobre 2009. Sur le dernier bulletin, son salaire brut mensuel s’élevait à 2 505,06 euros.
Mme [J], âgée de 57 ans au jour de son licenciement, justifie également des sommes perçues par Pôle emploi au titre d’allocations, de pensions de retraite et revenus professionnels, pour la période du 7 septembre 2010 au 31 décembre 2014, les attestations et avis d’imposition de Mme [J] étant versés au débat.
Le fait que, durant cette période, Mme [J] ait fait valoir ses droits à la retraite, ne met pas fin à la période servant de référence à l’évaluation du préjudice, dès lors que Mme [J] n’avait pas atteint l’âge légal de mise à la retraite d’office.
Il s’en déduit que Mme [J] établit avoir perçu la somme de 68 798 euros au titre d’allocations chômage, pensions de retraite et revenus d’activité entre son licenciement et le 31 décembre 2014 alors qu’elle aurait dû percevoir un revenu de 129 595,10 euros brut.
Il convient toutefois de relever que Mme [J] évalue son préjudice matériel à partir de ses revenus nets, de sorte qu’elle retient un salaire mensuel de 1 853,52 euros pour calculer le montant des salaires qu’elle aurait dû percevoir, évalué sur la période concernée à 95 888,77 euros.
De surcroît, Mme [J] limite sa demande, ne sollicitant aucune indemnisation pour la période comprise entre le 1er janvier 2015 et la date correspondant au délai de deux mois suivant la notification de la décision de la cour adminisrtrative d’appel du 12 janvier 2015.
Enfin, deux sommes de 22 320,12 euros ont été allouées, pour la première à titre de dommages et intérêts, et, pour la seconde, au titre de l’indemnité de licenciement. Ces indemnités n’ont pas été remises en cause par la Cour de cassation, de sorte qu’il convient de veiller à ce que le même préjudice ne soit pas indemnisé deux fois.
Il résulte de l’arrêt de cour d’appel que la première indemnisation correspond au préjudice spécifique et distinct afférent à la période postérieure à la liquidation judiciaire durant laquelle la salariée n’a perçu aucun salaire sans pour autant être licenciée. Il est donc établi que cette indemnité couvre la période précédant le licenciement alors que l’indemnité de l’article L. 2422-4 du code du travail concerne la période débutant à la date du licenciement, de sorte que l’indemnité allouée n’a pas à être déduite.
La seconde indemnité de 22 320,12 euros allouée par le conseil de prud’hommes est destinée à indemniser la rupture de la relation de travail et a donc un fondement distinct de l’indemnité prévue par l’article L. 2422-4 du code du travail, destinée à indemniser la violation du statut protecteur. Cette seconde indemnité ne doit pas davantage être déduite.
En conséquence, Mme [J] sollicite à bon droit la somme de 27 090,77 euros au titre de l’indemnité fondée sur l’article L. 2422-4 du code du travail, cette créance devant être fixée au passif de la liquidation judiciaire de l’ARAST.
Sur la garantie de l’AGS
Vu les articles L. 3253-6 et suivants, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
La garantie due par l’AGS doit s’exercer dans la limite des plafonds légaux et réglementaires.
Sur les demandes accessoires
En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens et à payer à l’autre partie une somme que le juge détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
La SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’ARAST, qui succombe, supportera les dépens de l’instance, sera déboutée de sa demande d’indemnité de procédure et sera condamnée à payer à Mme [J] la somme de 1 500 euros au titre des frais non répétibles.
En revanche, il est établi que Mme [J] a rappelé le département de La Réunion dans la procédure après cassation, alors que celui-ci a été mis hors de cause aux termes de l’arrêt du 11 mars 2020. Mme [J] sera dès lors condamnée à verser au département de La Réunion la somme de 1 085 euros au titre des frais non répétibles.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en audience de renvoi après cassation, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par voie de mise à disposition,
Vu l’arrêt de la cour d’appel de céans du 27 mars 2018 et l’arrêt de la Cour de cassation du 11 mars 2020 ;
Dit recevable la demande indemnitaire fondée sur l’article L. 2422-4 du code du travail ;
Fixe la créance de Mme [J] à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de l’association régionale d’accompagnement social territorialisé (ARAST) à hauteur de 27 090,77 euros au titre de l’indemnité fondée sur l’article L. 2422-4 du code du travail ;
Dit que la garantie due par l’association UNEDIC délégation AGS CGEA de Saint-Denis s’exercera dans les plafonds légaux et réglementaires ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’association régionale d’accompagnement social territorialisé (ARAST), à payer à Mme [J] la somme de 1 500 euros au titre des frais non répétibles d’instance ;
Déboute la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’association régionale d’accompagnement social territorialisé (ARAST), de sa demande au titre des frais non répétibles d’instance ;
Condamne Mme [J] à payer au département de La Réunion la somme de
1 085 euros au titre des frais non répétibles d’instance ;
Condamne la SELARL Franklin [S], agissant ès qualités de mandataire liquidateur de l’association régionale d’accompagnement social territorialisé (ARAST), aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Alain CHATEAUNEUF, Premier président, et par Madame Marina BOYER, Greffière, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La GREFFIERE signé Le PREMIER PRESIDENT