Tentative de conciliation : 27 juin 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 22/01161

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Tentative de conciliation : 27 juin 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 22/01161
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COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

GROSSE à :

Me [C] [M]

SELARL [8]

CPAM DU CHER

EXPÉDITION à :

[X] [B]

SOCIÉTÉ [10]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire de BOURGES

ARRÊT du : 27 JUIN 2023

Minute n°297/2023

N° RG 22/01161 – N° Portalis DBVN-V-B7G-GSMD

Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de BOURGES en date du 4 Mars 2022

ENTRE

APPELANT :

Monsieur [X] [B]

CCAS

[Adresse 9]

[Localité 3]

Représenté par Me Bertrand COUDERC, avocat au barreau de BOURGES

D’UNE PART,

ET

INTIMÉES :

SOCIÉTÉ [10]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Florian GROBON de la SELARL ELECTA JURIS, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Laetitia LOPEZ, avocat au barreau de LYON

CPAM DU CHER

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée par Mme [R] [G], en vertu d’un pouvoir spécial

PARTIE AVISÉE :

MONSIEUR LE MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Non comparant, ni représenté

D’AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

Madame Nathalie LAUER, Président de chambre,

Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller.

Greffier :

Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l’arrêt.

DÉBATS :

A l’audience publique le 11 AVRIL 2023.

ARRÊT :

– Contradictoire, en dernier ressort.

– Prononcé le 27 JUIN 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Madame Nathalie LAUER, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

M. [X] [B], salarié de la société [10], employé en qualité de conducteur d’engin, a fait parvenir à la caisse primaire d’assurance maladie du Cher une déclaration de maladie professionnelle le 20 mai 2016 mentionnant une hernie discale L2.

Le certificat médical initial du 19 mai 2016 fait état d’une hernie discale L2 confirmée par I.R.M.

Par décision du 12 août 2016, la caisse primaire d’assurance maladie du Cher a reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [B] s’agissant de la sciatique par hernie discale L4-L5 inscrite au tableau n° 97.

L’état de santé de M. [B] a été déclaré consolidé le 22 avril 2017 et une indemnité en capital lui a été attribuée sur la base d’un taux d’IPP de 5 %.

Par courrier du 1er mars 2019, M. [B] a sollicité la CPAM du Cher aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur.

Par courrier du 8 mars 2019, la CPAM du Cher a indiqué au conseil de M. [B] qu’elle estimait que sa demande était prescrite, le point de départ le plus favorable du délai de prescription étant le 15 janvier 2017, date de fin de versement des indemnités journalières.

Par requête du 28 mars 2019, [X] [B], a saisi le tribunal judiciaire de Bourges aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur, la société [10].

Par jugement du 4 mars 2022, le Pôle social du tribunal judiciaire de Bourges a :

– déclaré l’action diligentée par [X] [B] contre la société [10] irrecevable du fait de la prescription,

– condamné [X] [B] à payer à la société [10] la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– débouté [X] [B] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné [X] [B] aux entiers dépens,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par conclusions du 28 décembre 2022, soutenues oralement à l’audience, M. [B] invite la Cour à :

Vu les articles L. 452-1 et suivants du Code de la sécurité sociale,

– déclarer recevable et bien fondé l’appel formé par M. [X] [B] à l’encontre des chefs du jugement rendu par le Pôle social du tribunal judiciaire de Bourges le 4 mars 2022,

– réformer le jugement rendu en première instance par le Pôle social du tribunal judiciaire de Bourges le 4 mars 2022 en ce qu’il a :

* déclaré l’action diligentée par M. [B] contre la société [10] irrecevable du fait de la prescription,

* condamné M. [B] à payer à la société [10] la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

* débouté M. [B] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

* débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Et, en conséquence de cette réformation,

– dire et juger que l’action diligentée par M. [B] est recevable et non prescrite,

– dire et juger qu’une faute inexcusable de la société [10], employeur de M. [B], est à l’origine de sa maladie professionnelle,

– dire et juger que les prestations, capital ou rente, devront être portés à leur montant ou taux maximum,

– débouter la société [10] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– ordonner une expertise consistant à décrire l’ensemble des préjudices subis avec la mission habituelle en matière de faute inexcusable, c’est-à-dire avec la mission suivante :

* de convoquer les parties et de recueillir leurs observations,

* d’examiner la victime et de recueillir ses observations et doléances,

* de se faire communiquer par les parties tous documents médicaux relatifs aux lésions subies,

* de fournir tous renseignements sur l’identité de la victime, sa situation familiale, son niveau d’études ou de formation, sa situation professionnelle antérieure et postérieure à l’accident,

* de décrire en détail les lésions initiales sur la base des déclarations de la victime et des documents médicaux fournis, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d’hospitalisation et pour chaque période d’hospitalisation la nature et le nom d’établissement ainsi que le ou les services concernés et la nature des soins,

* de retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial ainsi que le cas échéant les différents documents médicaux permettant de connaître les lésions initiales, les principales étapes de l’évolution ainsi que les lésions qui auraient pu apparaître secondairement en conséquence du traumatisme initial. Et pour ce faire de prendre connaissance d’interpréter les examens complémentaires produits,

* de décrire un éventuel état antérieur en interrogeant la victime, l’état antérieur s’entendant des antécédents qui ont pu avoir une incidence ou interférer sur les lésions ou leurs séquelles,

* décrire précisément les séquelles consécutives à l’accident, directes ou indirectes, les actes et gestes devenus limités impossibles,

* de procéder dans le respect du contradictoire à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime,

* de décrire en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime les conditions de reprise de l’autonomie et lorsque la nécessité d’une aide temporaire et alléguée, la consigner et émettre un avis motivé sur sa nécessité et son imputabilité : indiquer si des dépenses liées à la réduction de l’autonomie sont justifiées si l’assistance constante ou occasionnelle d’une tierce personne a été nécessaire avant la consolidation,

* d’interroger la victime sur ses besoins d’aménagement de logement et de véhicule et de donner son avis sur leur opportunité,

* de déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire c’est-à-dire les périodes pendant lesquelles du fait de l’accident la victime a été perturbée ou a dû interrompre ses activités habituelles professionnelles et, si cette incapacité n’a été que partielle, en en indiquant le taux,

* d’interroger la victime quant à une répercussion de l’accident et de ses conséquences dans l’exercice de ses activités professionnelles, de recueillir ses doléances à cet égard et les analyser,

* de donner son avis sur l’existence et l’importance d’une éventuelle diminution des possibilités de promotion professionnelle et en en précisant les raisons,

* de décrire les souffrances physiques ou morales résultant des lésions, de leur traitement, de leur évolution et des séquelles de l’accident en évaluant sur une échelle de un à sept,

* de questionner la victime sur l’existence d’un éventuel préjudice d’agrément c’est-à-dire sur une impossibilité ou une diminution des possibilités de se livrer à des activités sportives ou de loisirs et de donner son avis médical sur cette impossibilité ou cette diminution,

* d’interroger la victime quant à l’existence d’un éventuel préjudice sexuel celui-ci s’entendant d’une diminution de la libido, de la possibilité d’exécuter l’acte sexuel proprement dit (impuissance ou frigidité), des difficultés d’adopter telle ou telle posture, de la fertilité,

* de donner tous renseignements propres à éclairer le tribunal quant à un éventuel préjudice exceptionnel,

* d’établir un état récapitulatif de l’ensemble des postes énumérés ci-dessus,

– fixer la date à laquelle au plus tard le rapport définitif de l’expert devra être déposé,

– dire et juger que ce rapport définitif devra être précédé du dépôt d’un pré-rapport à la suite duquel les parties disposeront d’un délai minimum de un mois pour présenter à l’observateur leurs observations ou un dire dans les conditions prévues par le Code de procédure civile,

– condamner la société [10] à verser à M. [B] la somme de 5 000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation complémentaire de son préjudice corporel,

– condamner la société [10] au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 3 avril 2023 et soutenues oralement à l’audience, la société [10] prie la Cour de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

‘DECLARE l’action diligentée par [X] [B] contre la Société [10] irrecevable du fit de la prescription.

CONDAMNE [X] [B] à payer à la Société [10] la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

DEBOUTE [X] [B] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile.

CONDAMNE [X] [B] aux entiers dépens’,

En conséquence,

Et même par substitution de motifs,

A titre liminaire,

– juger M. [B] prescrit et donc irrecevable en ses demandes.

A titre principal,

– juger que le caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [B] au titre du tableau n° 97 des maladies professionnelles n’est pas démontré,

– juger en tout état de cause, qu’aucune faute inexcusable n’est établie à l’encontre de la société [10],

En conséquence,

-débouter M. [B] de l’intégralité de ses demandes injustifiées et non fondées,

A titre subsidiaire sur les demandes de M. [B],

– débouter M. [B] de sa demande de majoration d’indemnité en capital injustifiée et non fondée,

– débouter M. [B] de sa demande de provision infondée et injustifiée,

– juger que, si une expertise médico-légale doit être ordonnée aux fins d’évaluation des préjudices de M. [B], la mission de l’expert ne pourra qu’être strictement limitée aux postes de préjudices suivants :

* aux postes de préjudices en lien direct, certain et exclusif avec la maladie déclarée le 19 mai 2016,

* souffrances physiques et morales,

* déficit fonctionnel temporaire,

Tout autre poste étant exclu sans que, en tout état de cause :

* l’expertise médicale ne puisse en aucun cas être conforme à la nomenclature Dintilhac,

* ou encore intégrer des postes de préjudices d’ores et déjà soumis en tout ou partie au Livre IV du Code de la sécurité sociale,

* ou encore intégrer des postes de préjudice dont l’existence et le principe ne sont même pas démontrés,

– juger que cette expertise aura lieu aux frais avancés de la caisse primaire d’assurance maladie,

– donner acte à la société [10] de son droit à discussion, tant sur le principe que sur le quantum de l’indemnisation des postes de préjudices qui seront soumis à expertise, les droits de la concluante demeurant intégralement réservés à cet effet.

En tout état de cause,

– débouter M. [B] de l’intégralité de ses demandes injustifiées et non fondées,

– condamner M. [B] ou qui mieux le devra à verser à la société [10] une indemnité de 4 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner M. [B] aux entiers dépens de l’instance.

Par conclusions soutenues oralement à l’audience, la caisse primaire d’assurance maladie du Cher prie la Cour de :

– confirmer le jugement rendu le 4 mars 2022 par le tribunal judiciaire de Bourges en ce qu’il a déclaré prescrit le recours de M. [B],

À défaut :

– prendre acte que la CPAM du Cher se rapporte à la justice sur :

* l’existence de la faute inexcusable de l’employeur,

* la fixation en pourcentage du degré de gravité de cette faute inexcusable,

* le montant des indemnités dues à la victime en réparation de ses préjudices personnels,

– dans l’hypothèse où la faute inexcusable de l’employeur serait retenue : condamner la société [10] à rembourser à la CPAM du Cher les sommes qu’elle sera amenée à régler en application des articles L. 452-1 et suivants du Code de la sécurité sociale.

SUR CE, LA COUR

La prescription de l’action de M. [B]

Pour juger prescrite l’action de M. [B], les premiers juges ont retenu que la prescription était acquise le 15 janvier 2019, le point de départ du délai de prescription étend le jour de la cessation du paiement des indemnités journalières, soit le 15 janvier 2017.

M. [B] poursuit l’infirmation du jugement déféré ainsi. À l’appui, il fait valoir que le tribunal a, à juste titre, rappelé que le point de départ de la prescription à retenir est le plus favorable à la victime ; qu’il est ainsi de jurisprudence constante que le délai ne peut courir qu’à compter du jour où le salarié a été effectivement informé de la prise en charge de son accident ou de sa maladie au titre des risques professionnels (Civ. 2ème, 17 mars 2011, pourvoi n° 10-14.898) ; que c’est alors à celui qui se prévaut de la prescription d’en rapporter la preuve conformément aux dispositions de l’article 1353 du Code civil ; qu’or ni la CPAM du Cher, ni la société [10] ne sont en mesure d’établir la date à laquelle il a effectivement été informé de la prise en charge de sa maladie au titre des risques professionnels ; que le tribunal a retenu à tort qu’il avait connaissance de la décision de prise en charge dès le 12 août 2016 en ce qu’il la mentionne dans le courrier de son conseil saisissant la caisse aux fins de tentative de conciliation datée du 1er mars 2019 ; qu’en effet il ne se déduit aucunement de ce courrier qu’il avait eu connaissance de cette reconnaissance le 12 août 2016, ni le 13, ni les jours et mois suivants ; que tout au plus, ce courrier permet de conclure qu’il en avait connaissance le 1er mars 2019 ; que le tribunal a également déduit la connaissance de cette prise en charge du fait qu’il utilisait les formulaires d’arrêt de travail ‘maladie professionnelle’ ; que la cour observera néanmoins qu’il utilisait ces formulaires avant même la décision de prise en charge, ce qui est bien la démonstration que cet élément n’a aucune valeur probante ; que le tribunal n’a fait que supputer la date à laquelle il aurait effectivement été informé de la décision de prise en charge ; qu’en l’espèce la date de la notification de la décision de prise en charge est manifestement inconnue ; que dans la mesure où ni la CPAM, ni la société [10] ne rapporte la preuve que le salarié a pris connaissance de la décision de prise en charge, les juges du fond estiment que le délai de prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur n’a commencé à courir qu’à compter de la date à laquelle le salarié a été informé de l’attribution d’une rente au titre de cet accident du travail, et non à compter de la date de la reconnaissance de l’origine professionnelle de son accident (Civ. 2ème, 17 mars 2011, pourvoi n° 10-14.898 ; CA Riom 26 janvier 2010) ; qu’en l’espèce la société [10] n’est pas en mesure d’établir qu’il a effectivement reçu le courrier de prise en charge prétendument envoyée le 12 août 2016 où qu’il avait prie connaissance avant le 2 juin 2017 de la prise en charge de sa maladie au titre de la législation professionnelle ; qu’il s’est vu notifier l’attribution d’une indemnité en capital le 2 juin 2017 ; qu’à défaut de connaître avec certitude la date à laquelle il a effectivement été informé de la décision de prise en charge, la cour retiendra comme point de départ du délai de prescription biennale, la date à laquelle il a été informé de l’attribution d’une indemnité, soit le 2 juin 2017, de sorte que son action n’est pas prescrite.

La caisse primaire d’assurance maladie du Cher, au visa de l’article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale, conclut principalement à la confirmation du jugement déféré. Elle expose qu’en l’espèce, le jour le plus favorable à M. [B] pour le point de départ du calcul du délai de prescription est le jour de la cessation du paiement des indemnités journalières ; que M. [B] a perçu ces dernières au titre de sa maladie professionnelle jusqu’au 15 janvier 2017 ; qu’il avait donc jusqu’au 15 janvier 2019 pour sollicité la mise en ‘uvre de la procédure de conciliation alors que son avocat n’a saisi la caisse d’une telle demande que par courrier du 1er mars 2019 de sorte que la demande de reconnaissance de faute inexcusable, effectuée au-delà du délai de deux ans, est prescrite.

La société [10] conclut à la confirmation du jugement sur ce point. Elle dit s’associer à l’argumentation de la caisse primaire d’assurance maladie. Elle précise qu’ il semble curieux que dans son courrier de saisine de la caisse primaire d’assurance maladie, l’avocat de M. [B] ait mentionné la date de la notification de prise en charge alors que, à le suivre, M. [B] est censé ne jamais en avoir eu connaissance. Elle observe que les certificats médicaux produits par M. [B] avant la décision de prise en charge du 12 août 2019 indiquent une date de maladie professionnelle au 20 mai 2016, qui correspond à la date de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle et à la date du certificat initial alors que à compter de la décision de prise en charge rendue par la caisse le 12 août 2016, les certificats médicaux indiquent dorénavant une date de maladie professionnelle au ’19 mai 2016′ qui est la date indiquée par la CPAM sur son courrier de notification de prise en charge. Elle souligne également que la date de notification de la rente ne constitue pas un point de départ du délai de prescription au sens de l’article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale.

Appréciation de la Cour

Il convient de rappeler qu’en application des articles L. 431-2 et L. 461-1 du Code de la sécurité sociale, les droits de la victime ou de ses ayants droit au bénéfice des prestations et indemnités prévues par la législation professionnelle se prescrivent par deux ans à compter soit de la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle, soit de la cessation du travail en raison de la maladie constatée, soit de la cessation du paiement des indemnités journalières, soit encore de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie (Civ. 2ème, 12 juillet 2012, pourvois n° 11-17.663 et 11-17.442, Bull II n° 136).

En l’espèce, la caisse primaire d’assurance maladie du Cher a pris en charge la maladie de M. [B] au titre de la législation professionnelle le 12 août 2016. Selon la jurisprudence, le délai de prescription ne peut commencer à courir qu’à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie (Civ. 2ème, 20 septembre 2016 pourvoi n° 04-30.055 et Civ. 2ème,11 octobre 2005 pourvoi n° 04-30.360). Toutefois, ni la caisse primaire d’assurance maladie ni la société [10] ne soutiennent que le point de départ du délai de prescription doit être situé en l’espèce à la date de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle, soit le 12 août 2016, ce point de départ devant, selon les intimées, être situé au 15 janvier 2017, M. [B] ayant perçu des indemnités journalières jusqu’à cette date.

Ce raisonnement constitue une stricte application de l’article L. 431-2 du Code de la sécurité sociale qui permet de prendre comme point de départ du délai de prescription soit la date de cessation de paiement des indemnités journalières, soit celle de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, étant observé en l’espèce que la date du 15 janvier 2017 est plus favorable au salarié que celle de la date de reconnaissance de la maladie professionnelle antérieure.

Conformément à ce texte, le délai de prescription a donc commencé à courir à compter du 15 janvier 2017. Si M. [B], à titre de moyens de défense, fait valoir que la prescription n’a pu commencer à courir qu’à partir du moment où il a eu connaissance de la prise en charge de la maladie professionnelle et donc, selon lui, à compter de la date où la caisse lui a attribué une rente, comme le tribunal l’a observé de manière pertinente, M. [B] s’est vu servir des indemnités journalières au taux majoré qui, précisément, n’ont vocation à l’être qu’au titre de la législation professionnelle. Il s’en déduit que la preuve est rapportée en l’espèce de ce qu’il a eu connaissance de la décision du 12 août 2016 de prise en charge de la maladie professionnelle au plus tard à la date du versement des premières indemnités journalières au taux majoré et non pas seulement à la date d’attribution de la rente.

Les arrêts cités par M. [B] ne sont pas transposables au cas d’espèce dès lors d’une part que la Cour de cassation a retenu que la cour d’appel, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et de la portée des preuves soumises à son examen, a pu déduire que l’action était recevable et d’autre part que le moyen qui lui était soumis prétendait que la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie constituait au cas d’espèce le point de départ du délai de prescription.

En conséquence, c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu que la date de fin de versement des indemnités journalières étant du 15 janvier 2017, la caisse devait être saisie au plus tard le 15 janvier 2019 de sorte que, ne l’ayant été que le 1er mars 2019, l’action est prescrite.

Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions y compris accessoires.

La cour rappelle par ailleurs que si, à titre de moyens de défense au fond à une action engagée à son encontre au titre de la faute inexcusable, l’employeur est fondé à invoquer le défaut de caractère professionnel de la maladie, il n’y a pas lieu de statuer sur ce point, l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur étant jugée prescrite.

En tant que partie perdante tenue aux dépens, M. [B] ne peut qu’être débouté de sa propre demande au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et en équité de le condamner à une indemnité complémentaire de 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel de la société [10].

PAR CES MOTIFS:

Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 mars 2022 par le Pôle social du tribunal judiciaire de Bourges ;

Et, y ajoutant,

Déboute M. [B] de sa propre demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Le condamne à payer à ce titre la somme de 500 euros à la société [10],

Condamne M. [B] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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