Tentative de conciliation : 21 septembre 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/02297

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Tentative de conciliation : 21 septembre 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/02297
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 21/09/2023

N° de MINUTE : 23/781

N° RG 22/02297 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UITP

Jugement (N° 20/01222) rendu le 05 Avril 2022 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de Cambrai

APPELANTE

Madame [I] [N] épouse [B]

née le 18 Février 1951 à [Localité 7] – de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean-Philippe Vérague, avocat au barreau d’Arras

INTIMÉS

Monsieur [S] [K]

né le 31 Mai 1977 à [Localité 7] – de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

Madame [T] [E] épouse [K]

née le 09 Octobre 1955 – de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

EARL [K]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentés par Me Philippe Meillier, avocat au barreau d’Arras

DÉBATS à l’audience publique du 25 mai 2023 tenue par Véronique Dellelis et Emmanuelle Boutié magistrates chargées d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, ont entendu les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en ont rendu compte à la cour dans leur délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Mme [I] [N] épouse [B] est propriétaire d’une parcelle sise commune d'[Localité 8] cadastrée ZD [Cadastre 6] pour une superficie de 3 ha 12 a 00 ca.

Cette parcelle a fait l’objet d’un bail verbal au profit de Mme [T] [E] épouse [K].

Suivant acte de Maître [F], huissier de justice à [Localité 7], en date du 27 mai 2020, Mme [I] [N] épouse [B] a fait délivrer un congé à M. [S] [K] et à l’EARL [K], notifiant par ce congé le refus de renouvellement du bail à son échéance au 30 novembre 2021, en indiquant faire reprise de la parcelle aux fins d’exploitation de cette dernière par son fils [H] [B].

Le 19 août 2020, Mme [T] [E] épouse [K], M. [S] [K] et l’EARL [K] ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Cambrai en demandant la convocation de la propriétaire et sollicitant l’annulation du congé ainsi délivré, Mme [T] [E] épouse [K] demandant par ailleurs à être autorisée à céder son droit au bail sur la parcelle litigieuse à son fils [S].

Le 30 mars 2021, Mme [I] [N] épouse [B] a fait signifier un congé à Mme [T] [E] épouse [K] et ce pour la date du 30 septembre 2022, cette fois fondée sur les dispositions de l’article L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime, et ainsi sur l’atteinte de l’âge de la retraite par la preneuse à bail.

Le 27 juillet 2021, Mme [T] [E] épouse [K] a à nouveau saisi la juridiction paritaire de Cambrai aux fins de contestation de ce congé, la demanderesse sollicitant à nouveau l’autorisation de céder son droit au bail rural à son fils [S].

La tentative de conciliation s’est soldée par un échec et les deux affaires ont été renvoyées en audience de jugement.

Les deux affaires ont été évoquées ensemble et retenues lors de l’audience de plaidoirie du 1er février 2022.

Suivant jugement en date du 5 avril 2022, auquel il est expressément renvoyé pour un exposé complet de la procédure antérieure au jugement et du dernier état des demandes et moyens des parties, le tribunal paritaire des baux ruraux de Cambrai a :

-ordonné la jonction des procédures répertoriées sous les numéros 21/01169 et 21/01222 ;

-annulé le congé délivré à la requête de Mme [I] [N] épouse [B] le 27 mai 2020 par Maître [F], à M. [S] [K] et l’EARL [K] ;

-autorisé Mme [T] [E] épouse [K] à céder les droits qu’elle tient du bail verbal existant entre Mme [I] [N] épouse [B] sur la parcelle ZD [Cadastre 6] sise sur la commune d'[Localité 8] d’une superficie de 3 hectares 12 ares à son fils, M. [S] [K] et constaté que ce dernier indiquait qu’il poursuivrait la mise à disposition de cette parcelle au profit de l’EARL [K] ;

-débouté les parties de leurs autres demandes ;

-laissé à chacune des parties la charge des frais par elle engagés.

Mme [I] [N] épouse [B] a relevé appel des dispositions de ce jugement par l’intermédiaire de son conseil par courrier électronique adressé au secrétariat-greffe de cette cour le 10 mai 2022, critiquant les dispositions du jugement qui ont :

-annulé le congé délivré à la requête de Mme [I] [N] épouse [B] le 27 mai 2020 par Maître [F], à M. [S] [K] et l’EARL [K] ;

-autorisé Mme [T] [E] épouse [K] à céder les droits qu’elle tient du bail verbal existant entre Mme [I] [N] épouse [B] sur la parcelle ZD [Cadastre 6] sise sur la commune d'[Localité 8] d’une superficie de 3 hectares 12 ares à son fils, M. [S] [K] et constaté que ce dernier indiquait qu’il poursuivrait la mise à disposition de cette parcelle au profit de L’EARL [K] ;

-débouté les parties de leurs autres demandes ;

-laissé à chacune des parties la charge des frais par elle engagés.

Les parties ont été régulièrement convoquées devant cette cour par lettres recommandées avec accusé de réception.

Après renvoi, l’affaire a été retenue lors de l’audience du 25 mai 2023.

Lors de l’audience, Mme [I] [N] épouse [B], représentée par son conseil, soutient oralement les conclusions déposées et dûment visées par le greffe par lesquelles elle demande à cette cour de :

Au visa des dispositions des articles L. 411-35, L. 411-37 et L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime,

-infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l’exception de celle ayant ordonné la jonction des procédures ;

-débouter Mme [T] [E] épouse [K] de sa demande d’autorisation de cession de bail

-valider le congé délivré le 30 mars 2021 ;

En conséquence,

-ordonner l’expulsion de la parcelle sise commune d'[Localité 8] cadastrée ZD [Cadastre 6] de Mme [T] [E] épouse [K] dans le délai d’un mois suivant la date du 30 septembre 2022 et passé ce délai sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

-condamner Mme [T] [E] épouse [K] au paiement de la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-la condamner aux dépens.

Mme [T] [E] épouse [K], M. [S] [K], et l’EARL [K] représentés par leur conseil, soutiennent les écritures déposées lors de l’audience et dûment visées par le greffe par lesquelles ils demandent à cette cour de :

Au visa des dispositions des articles L. 411-47, L. 411-58 et L. 411-59 et L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime,

-déclarer Mme [B] [N] irrecevable en sa demande de validation du congé ;

A titre subsidiaire,

-confirmer le jugement en ce qu’il a annulé le congé ;

En tout état de cause,

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions en ce qu’il a autorisé Mme [E] épouse [K] à céder ses droits au bail rural qui lui a été consenti sur la parcelle sise à [Localité 8] cadastrée ZD [Cadastre 6] au profit de son fils [S] [K] ;

-condamner Mme [B] née [N] à payer aux parties intimées une indemnité de 3000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Il est renvoyé aux écritures susvisées pour un exposé complet des moyens des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE :

Il sera précisé à titre liminaire que la déclaration d’appel concerne également la disposition du jugement entrepris qui a annulé le congé pour reprise délivré par Mme [B] épouse [N] le 27 mai 2020.

Les parties intimées contestent l’appel interjeté de ce chef faisant valoir qu’il est irrecevable dès lors que la bailleresse avait admis en première instance que ledit congé était irrégulier, se référant à cet égard aux motifs du jugement énonçant que le congé délivré le 27 mai 2020 était affecté de plusieurs causes de nullité lesquelles étaient reconnues par la bailleresse qui acquiesçait ainsi à la demande de nullité de l’acte. Elles font valoir en tout état de cause que le congé litigieux est atteint de multiples causes d’irrégularité, tenant au fait qu’il n’a pas été délivré à une personne ayant la qualité de preneur, qu’il a été délivrée pour une date erronée, qu’il ne porte pas mention de l’adresse du bénéficiaire de la reprise et en tout état de cause qu’il n’a pas été justifié de ce que M. [H] [B] présentait les qualités attendues du bénéficiaire de la reprise.

Il s’évince cependant des écritures de la partie appelante qu’elle ne remet pas en cause en réalité le jugement en ce qu’il a annulé le premier congé délivré le 27 mai 2020. Dès lors la cour sera amenée à confirmer purement et simplement la décision entreprise de ce chef.

Cependant, Mme [B] épouse [N] fait grief au jugement entrepris de ne pas avoir statué sur la validité du second congé délivré pour atteinte par le preneur de l’âge de la retraite. Il sera observé toutefois que les premiers juges n’ont été saisis d’aucune demande d’annulation du congé pour vice de forme ou vice de fond. Simplement, le congé délivré pour atteinte de l’âge de retraite, même s’il n’est pas atteint d’une nullité en la forme ou au fond, est susceptible d’être privé d’effet dans l’hypothèse où il est fait droit à la demande du preneur de céder son droit au bail rural à un descendant. C’est précisément ce qu’à décidé le jugement entrepris sans énoncer expressément dans son dispositif que le congé délivré le 30 mars 2021 était privé d’effet.

Ces points étant précisés, il y a lieu d’examiner la demande d’autorisation de cession.

Sur la demande d’autorisation de cession des baux présentée par Mme [T] [E] épouse [K]:

Aux termes des dispositions de l’article L.411-64 du code rural et de la pêche maritime, le droit de reprise tel qu’il est prévu aux articles L.411-58 à L.411-63, L.411-66 et L.411-67 ne peut être exercé au profit d’une personne ayant atteint, à la date prévue pour la reprise, l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles, sauf s’il s’agit, pour le bénéficiaire du droit de reprise, de constituer une exploitation ayant une superficie au plus égale à la surface fixée en application de l’article L.732-39. Si la superficie de l’exploitation ou des exploitations mises en valeur par le preneur est supérieure à cette limite, le bailleur peut, par dérogation aux articles L.411-5 et L.411-46:

– soit refuser le renouvellement du bail au preneur ayant atteint l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles;

– soit limiter le renouvellement à l’expiration de la période triennale au cours de laquelle le preneur atteindra cet âge.

Le preneur peut demander au bailleur le report de plein droit à la date d’effet du congé à la fin de l’année culturale où il aura atteint l’âge lui permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein.

Dans les cas mentionnés aux deuxième et troisième alinéas, le bailleur doit prévenir le preneur de son intention de refuser le renouvellement du bail ou d’y mettre fin par acte extrajudiciaire signifié au moins dix-huit mois à l’avance.

Les dispositions du présent article sont applicables que le propriétaire entende aliéner ou donner à bail à un preneur dont l’âge est inférieur à l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles ou exploiter en faire-valoir direct. Dans ce dernier cas, sauf s’il s’agit pour le bailleur de constituer une exploitation dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article, il ne doit pas avoir atteint l’âge de la retraite retenu en matière d’assurance vieillesse des exploitants agricoles.

Le preneur évincé en raison de son âge peut céder son bail à son conjoint, ou au partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, participant à l’exploitation ou à l’un de ses descendants ayant atteint l’âge de la majorité ou ayant été émancipé, dans les conditions prévues à l’article .411-35. Le bénéficiaire de la cession a droit au renouvellement de son bail.

A peine de nullité, le congé donné en vertu du présent article doit reproduire les termes de l’alinéa précédent.

Pour se prononcer sur la cession, le juge doit rechercher si la cession projetée ne risque pas de nuire aux intérêts légitimes du bailleur. Ces intérêts sont appréciés au regard, d’une part, du comportement du preneur cédant au cours de son bail, et d’autre part, au regard des conditions de mise en valeur de l’exploitation par le cessionnaire candidat.

S’agissant du preneur cédant, le tribunal paritaire apprécie sa « bonne foi » en vérifiant qu’il n’a pas commis de manquements graves à ses obligations en cours de bail. La cession est une faveur accordée au preneur qui s’est acquitté de ses obligations et la bonne exécution du bail s’apprécie sur toute la durée des relations contractuelles.

S’agissant du cessionnaire, il doit pouvoir offrir des garanties pour assurer une bonne exploitation du fonds : être titulaire d’une autorisation d’exploiter, avoir des aptitudes professionnelles suffisantes, disposer des moyens matériels et financiers nécessaires à l’exploitation du fonds loué.

Sur la bonne foi du preneur :

Pour prétendre que la bonne foi de la preneuse à bail ferait défaut en l’espèce, Mme [I] [N] épouse [B] fait valoir d’une part que Mme [T] [E] épouse [K] ne l’a pas informée dans les forme et délai requis par l’article L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime de la mise à disposition de la parcelle au profit de L’EARL [K] et que par ailleurs il y a eu un incident concernant le règlement d’un fermage pendant le cours de la procédure.

Sur le défaut d’information sur la mise à disposition de la parcelle :

L’article L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime dans sa version applicable à la date de création de l’EARL [K] et de la mise à disposition de la parcelle litigieuse au profit de cette dernière disposait que :

A la condition d’en aviser le bailleur au plus tard dans les deux mois qui suivent la mise à disposition, par lettre recommandée, le preneur associé d’une société à objet principalement agricole peut mettre à la disposition de celle-ci, pour une durée qui ne peut excéder celle pendant laquelle il reste titulaire du bail, tout ou partie des biens dont il est locataire, sans que cette opération puisse donner lieu à l’attribution de parts. Cette société doit être constituée entre personnes physiques et, soit être dotée de la personnalité morale, soit, s’il s’agit d’une société en participation, être régie par des statuts établis par un acte ayant acquis date certaine.

L’avis adressé au bailleur mentionne le nom de la société, le tribunal de commerce auprès duquel la société est immatriculée et les parcelles que le preneur met à sa disposition. Le preneur avise le bailleur dans les mêmes formes du fait qu’il cesse de mettre le bien loué à la disposition de la société ainsi que de tout changement intervenu dans les éléments énumérés ci-dessus. Cet avis doit être adressé dans les deux mois consécutifs au changement de situation.

Le bail ne peut être résilié que si le preneur n’a pas communiqué les informations prévues à l’alinéa précédent dans un délai d’un an après mise en demeure par le bailleur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La résiliation n’est toutefois pas encourue si les omissions ou irrégularités constatées n’ont pas été de nature à induire le bailleur en erreur

Il sera précisé que la bonne foi du preneur s’apprécie sur toute la durée des relations contractuelles entre les parties et Mme [E] épouse [K] ne peut donc se prévaloir de ce que la mise à disposition des terres est antérieure de plus de cinq années à la date de la saisine de la juridiction paritaire pour prétendre que la demande de la bailleresse tendant à se prévaloir d’un prétendu défaut d’information conformément aux dispositions susvisées est en tout état de cause prescrite.

Il sera précisé également que si le défaut d’information du bailleur sur la mise à disposition des parcelles données à bail n’est susceptible de justifier le prononcé de la résiliation que sous certaines conditions et notamment la nécessité pour le bailleur de justifier d’un préjudice lié à la carence du locataire, l’absence d’information du bailleur dans l’hypothèse d’une mise à disposition est susceptible de constituer une faute privant le preneur du droit de céder son droit au bail sans qu’il soit nécessaire pour le bailleur de démontrer un grief découlant de cette information. Cette sévérité est liée au fait que le droit pour le preneur de céder ses droits liés au bail constitue une dérogation exceptionnelle à l’interdiction de cession du bail.

Néanmoins, cette solution ne signifie pas que toute mise à disposition effectuée sans qu’il puisse être justifié de la lettre recommandée d’information du bailleur soit sanctionnée ipso facto par la perte pour le preneur de céder ultérieurement son droit au bail.

En l’espèce, il est constant que Mme [E] épouse [K] a indiqué qu’elle ne disposait pas de la preuve de la notification à la bailleresse de la mise à disposition de la parcelle.

Cependant, c’est exactement que le jugement entrepris a énoncé que depuis à tout le moins l’année 2011, cette année correspondant au plus ancien appel de fermage produit aux débats, Mme [I] [N] épouse [B] qui établissait elle-même ces appels de fermage les a adressés directement à l’EARL [K] de sorte que la mise à disposition de la parcelle au profit de cette personne morale a indiscutablement été portée à sa connaissance de nombreuses années avant l’introduction de la présente procédure devant la juridiction paritaire. Il y a lieu de constater que la bailleresse n’a jamais, antérieurement à la présente procédure, fait d’observation particulières à Mme [E] épouse [K] au sujet d’un quelconque manquement de cette dernière aux obligations issues de l’article L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime, n’a jamais envoyé à l’intéressée une mise en demeure prévue par cet article pour avoir des informations sur l’EARL bénéficiant de la mise à disposition et a laissé ensuite le bail se renouveler par tacite reconduction en 2013.

C’est ainsi par une motivation pertinente et que la cour adopte que les premiers juges ont conclu que l’information de la bailleresse avait été réalisée et que ladite bailleresse avait accepté les modalités de cette information et qu’en conséquence, alors qu’il était par ailleurs démontré que Mme [T] [E] épouse [K] était bien associée exploitante dans L’EARL [K] et n’avait ainsi commis aucune cession illicite sous couvert d’une mise à disposition, Mme [N] épouse [B] ne caractérisait pas de manquements de Mme [E] épouse [K] dans le cadre de la mise à disposition de la parcelle remettant en cause la qualité de preneur de bonne foi de cette dernière.

Sur l’incident dans le règlement des loyers :

Mme [B] fait également grief à sa locataire d’avoir réglé en retard son fermage en 2022, ce grief étant ajouté en cause d’appel à celui qu’elle avait formulé en première instance.

Il résulte effectivement des éléments de la cause que suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 avril 2023, le conseil de Mme [B] a mis en demeure la locataire d’avoir à régler le fermage au titre de l’année 2022 pour un montant de 649,82 euros et que c’est par chèque du 17 avril 2023 que l’EARL [K] a réglé ce fermage.

Il apparaît toutefois des éléments de la cause que l’habitude avait été prise antérieurement entre les parties que le fermage soit réglé après que la bailleresse ait envoyé un appel de fermage, l’absence d’appel de fermage pendant le cours de la procédure pouvant expliquer dans une certaine mesure la carence de la locataire.

En tout état de cause, alors que l’incident concernant le fermage de l’année 2022 est unique, qu’il a par ailleurs été instantanément régularisé après l’envoi de la lettre de mise en demeure du conseil de la propriétaire et s’explique également par le contexte de la procédure, la cour estime qu’il ne peut à lui seul faire perdre à Mme [E] épouse [K] sa qualité de preneur de bonne foi.

Dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il n’a pas écarté la bonne foi de Mme [E].

Sur les qualités du cessionnaire :

L’article L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime qui s’applique également dans le cadre de l’appréciation des qualités du cessionnaire dispose que :

Le bénéficiaire de la reprise doit, à partir de celle-ci, se consacrer à l’exploitation du bien repris pendant au moins neuf ans soit à titre individuel, soit au sein d’une société dotée de la personnalité morale, soit au sein d’une société en participation dont les statuts sont établis par un écrit ayant acquis date certaine. Il ne peut se limiter à la direction et à la surveillance de l’exploitation et doit participer sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation. Il doit posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir.

Le bénéficiaire de la reprise doit occuper lui-même les bâtiments d’habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l’exploitation directe.

Le bénéficiaire de la reprise doit justifier par tous moyens qu’il satisfait aux obligations qui lui incombent en application des deux alinéas précédents et qu’il répond aux conditions de capacité ou d’expérience professionnelle mentionnées aux articles L. 331-2 à L. 331-5 ou qu’il a bénéficié d’une autorisation d’exploiter en application de ces dispositions.

Il est acquis aux débats en l’espèce que M. [S] [K] est le fils de la locataire en place. Il dispose indiscutablement de la capacité professionnelle prévues aux articles L. 331-2, R 331-2 et D 343-4 du code rural et de la pêche maritime, étant titulaire d’un brevet de technicien supérieur agricole obtenu en juin 2001 et il est associé depuis 2020 au sein de L’EARL [K] avec sa mère locataire en place ce qui démontre qu’il dispose, en plus de la capacité professionnelle attestée par son diplôme, d’une expérience professionnelle de plus d’une dizaine d’années et que sa vocation agricole est parfaitement réelle.

Il a de surcroît été parfaitement justifié de ce que M. [S] [K] habite à [Localité 10] soit à 7 kms de la parcelle donnée à bail.

Par ailleurs, il est établi que M. [S] [K] va disposer au travers de l’EARL [K] des matériels d’exploitation qui apparaissent au bilan 2019 de la société, étant précisé que la liste des immobilisations de l’EARL en cause porte mention de herses, d’une charrue, d’un tracteur, d’un pulvérisateur et autres matériels pour une valeur nette comptable de 111958 euros. Par ailleurs, l’EARL [K] est adhérente de la CUMA des 4 chemins qui lui met effectivement à disposition du matériel complémentaire. Il est donc ainsi parfaitement justifié des conditions matérielles futures d’exploitation de la parcelle en cause.

Aucune situation de pluri-activité ne vient affecter l’examen de la situation du candidat à la cession alors qu’il résulte des éléments de la cause dont la déclaration d’impôt de l’intéressé pour l’année 2021 au titre des revenus de l’année 2020 que M. [S] [K] ne dispose que de revenus agricoles.

S’agissant de la conformité au contrôle des structures, dès lors que M. [S] [K] va exploiter la parcelle litigieuse dans le cadre d’une mise à disposition au profit de L’EARL [K], cette conformité doit s’apprécier en la personne morale même.

Il résulte en l’espèce des pièces produites aux débats que l’EARL [K] a été créée en 1999. Les époux [K] avaient demandé à l’autorité préfectorale l’autorisation de créer ladite société. Par lettre en date du 16 septembre 1999, le préfet du Nord a répondu que la demande était enregistrée comme une simple déclaration préalable et qu’il n’y avait pas lieu de la soumettre à la commission départementale d’orientation et d’agriculture.

M. [S] [K] est ensuite entrée dans L’EARL à compter du 1er avril 2010, sans agrandissement de la structure alors que la parcelle objet du présent litige était déjà mise à disposition de la personne morale.

Des agrandissements d’exploitation ont eu lieu ensuite et en dernier lieu un agrandissement de l’exploitation agricole lié à l’intégration dans le parcellaire exploitée par cette dernière d’une parcelle ZB [Cadastre 3] de 16 hectares environ sise à [Localité 9]. Dans le cadre de cet agrandissement, il a été sollicité par Mme [T] [E] et pour le compte de la personne morale une autorisation d’exploiter cette nouvelle parcelle, demande d’autorisation d’exploiter pour laquelle il est produit un accusé de réception complet en date du 15 janvier 2018, étant précisé que l’absence de réponse de l’administration à la demande vaut autorisation tacite. L’examen de la situation de L’EARL a été fait en dernier lieu par l’autorité administrative à cette époque.

Il apparaît ainsi des éléments de la cause que M. [S] [K] se propose d’exploiter la parcelle litigieuse dans des conditions conformes au contrôle des structures.

Dès lors, c’est à bon droit que le jugement entrepris a considéré que les qualités du cessionnaire étaient réunies.

Il convient dès lors pour la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande d’autorisation de cession de son droit au bail présentée par Mme [T] [E] épouse [K].

Il sera simplement précisé en tant que de besoin dans le dispositif de la présente décision que le congé délivré par Mme [I] [N] épouse [B] le 30 mars 2021 sur le fondement des dispositions de l’article L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime est dépourvu d’effet du fait de l’autorisation donnée à Mme [T] [E] épouse [K] de céder son droit au bail à son fils

Sur les dépens et sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Le sort des dépens a été exactement réglé par le jugement entrepris. Ce dernier sera confirmé de ce chef.

Mme [N] épouse [B] succombant dans son recours en supportera les dépens.

Il sera fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel comme indiqué au présent dispositif.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Précise en tant que de besoin que le congé délivré par Mme [I] [N] épouse [B] le 30 mars 2021 sur le fondement des dispositions de l’article L. 411-64 du code rural et de la pêche maritime est dépourvu d’effet du fait de l’autorisation donnée à Mme [T] [E] épouse [K] de céder son droit

au bail à son fils ;

Condamne Mme [I] [N] épouse [B] aux dépens d’appel ;

Condamne Mme [I] [N] épouse [B] à payer à Mme [T] [E] épouse [K], M. [S] [K], et l’EARL [K] une indemnité globale de 1500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Véronique DELLELIS

 


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