Tentative de conciliation : 10 novembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/12457

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Tentative de conciliation : 10 novembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/12457
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 10 NOVEMBRE 2023

N°2023/ 195

RG 19/12457

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEWFP

[N] [S]

C/

SARL DESIGN MAAFA

Copie exécutoire délivrée

le 10 Novembre 2023 à :

-Me Pierre ARNOUX, avocat au barreau de MARSEILLE

– Me Sandy LEVY, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 09 Juillet 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F18/00934.

APPELANT

Monsieur [N] [S], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Pierre ARNOUX de la SELARL SELARL ARNOUX-POLLAK, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SARL DESIGN MAAFA, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Sandy LEVY, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Juin 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Octobre 2023, délibéré prorogé en raison de la survenance d’une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 10 Novembre 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2023.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [N] [S] a été engagé par la société Design Maafa par contrat à durée indéterminée à compter du 19 octobre 2017, en qualité de peintre en bâtiment pour une durée de travail de 35 h du lundi de 8h à 12 h au vendredi 13h30 à 16h30, pour une rémunération mensuelle brute de 1 480,27 € .

La convention collective nationale applicable était celle des ouvriers employés dans les entreprises du bâtiment (moins de 10 salariés) .

M. [S] faisait l’objet le 13 février 2018 d’une mise à pied.

Il était en arrêt maladie du 19 février 2018 au 24 janvier 2019.

Le 24 janvier 2019 à la visite de reprise, le médecin du travail rendait un avis d’inaptitude, indiquant «l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Le salarié était convoqué le 31 janvier 2019 à un entretien préalable à une mesure de licenciement, fixé au 8 février 2019. Il était licencié pour inaptitude d’origine non professionnelle avec impossibilité de reclassement par courrier du 13 février 2019.

Préalablement, M. [S] avait saisi le 7 mai 2018 le conseil de prud’hommes de Marseille en résiliation de son contrat de travail et en paiement d’indemnités.

Par jugement du 9 juillet 2019, le conseil de prud’hommes a statué comme suit :

« Déboute le salarié de sa demande de résiliation judiciaire et confirme le licenciement pour inaptitude de Monsieur [S] [N].

Déboute le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre de ses congés payés et de faire valoir ses droits auprès de la Caisse des Congés Payés du bâtiment,

Déboute le salarié au titre du paiement des indemnités de trajets y afférent,

Déboute le salarié au titre du paiement tardif du salaire,

Déboute le salarié du paiement au titre des heures supplémentaires,

Déboute le salarié au titre du paiement pour travail dissimulé,

Déboute le salarié au titre d’absence d’organisation de la visite d’information et de prévention.

Condamne la SARL Design Maafa à payer à Monsieur [N] [S], les sommes suivantes :

– 346 € (trois cent quarante-six euros) au titre du rappel de salaire de la mise à pied conservatoire;

– 300 € (trois cents euros) au titre des dommages et intérêts pour le préjudice subi ;

– 700 € (sept cents euros) au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Ordonne la remise des documents sociaux conformes au présent jugement.

Déboute Monsieur [S] [N] du surplus de ses demandes.

Déboute la Sarl Design Maafa de sa demande reconventionnelle.

Condamne la Sarl Design Maafa aux entiers dépens. ».

Par acte du 29 juillet 2019, le conseil du salarié a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 24 octobre 2019, M. [S] demande à la cour de :

«Accueillir Monsieur [N] [S] en son appel du jugement rendu le 09 juillet 2019 par le Conseil de prud’hommes de Marseille ;

Le déclarer régulier en la forme et fondé au fond ;

Débouter la SARL Design Maafa de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– Débouté le salarié de sa demande de résiliation judiciaire et confirmé le licenciement pour inaptitude de Monsieur [S]

– Débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre de ses congés payés et de faire valoir ses droits auprès de la Caisse des Congés Payés du bâtiment

– Débouté le salarié au titre du paiement des indemnités de trajets y afférents

– Débouté le salarié au titre du paiement tardif du salaire

– Débouté le salarié du paiement au titre des heures supplémentaires

– Débouté le salarié au titre du paiement pour travail dissimulé

– Débouté le salarié au titre d’absence d’organisation de la visite d’information et de prévention

– Ordonné la remise des documents sociaux conformes au présent jugement

– Débouté Monsieur [S] [N] du surplus de ses demandes.

Le Confirmer pour le surplus,

Et, statuant de nouveau :

Constater que la SARL Design Maafa ne rapporte pas la preuve de l’accomplissement de ses obligations envers la Caisse des Congés Payés du Bâtiment concernant Monsieur [S]

Constater que Monsieur [S] n’a perçu aucune somme a ce titre par la Caisse des Congés Payés du Bâtiment ;

En conséquence,

Condamner la société Design Maafa au paiement de la somme totale de 241,93 € à titre de dommages-intérêts ;

Constater les déplacements effectués par Monsieur [S] à la demande de la société Design Maafa ;

Constater l’absence de paiement des indemnités de trajet y afférent ;

En conséquence,

A titre principal, en application du barème des indemnités de petits déplacements des travaux publics du 1er janvier 2018 produit par Monsieur [S] :

Condamner, la société Design Maafa à verser à Monsieur [S] la somme totale de 1.593,50 € au titre de l’indemnité de petits déplacements, déduction faite des sommes déjà versées à ce titre ;

A titre subsidiaire, suivant application du barème des indemnités de petits déplacements de l’accord du 4 novembre 2016 (accord IDCC 1596) produit par la SARL Design Maafa :

Condamner l’employeur à verser à Monsieur [S] la somme totale de 1527,98 € au titre de l’indemnité petits déplacements, déduction faite des sommes déjà versées ;

Constater le paiement tardif du salaire de Monsieur [S] par la société DESIGN MAAFA ;

En conséquence,

Condamner la société Design Maafa, à verser à Monsieur [S] la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi ;

Constater que Monsieur [S] a accompli au total 53,5 supplémentaires ;

En conséquence,

Condamner l’employeur au paiement de la somme de 671,83 € brut à titre de rappel de salaires pour les heures supplémentaires accomplies sur la période courant du 19.10.17 au 31.01.18 ;

Condamner la SARL Design Maafa au paiement de la somme de 8.409,60 à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

Constater l’absence d’organisation de la visite d’information et de prévention par la SAR Design Maafa;

En conséquence,

Dire et Juger que la SARL Design Maafa a manqué à son obligation de sécurité de résultat envers Monsieur [S] ;

Constater le préjudice du salarié ;

Condamner la SARL Design Maafa à verser à Monsieur [S], la somme de 1.401,60 € à titre de dommage-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat ;

Constater le caractère injustifié de la mise à pied du 12 février 2018 ;

Constater la nature incertaine de la mise a pied (disciplinaire ou conservatoire) ;

Constater l’absence de procédure disciplinaire et de notification des griefs ;

Constater le caractère infondé des griefs allégués par la SARL Design Maafa à l’encontre de Monsieur [S] pour justifier le prononcé de la mise à pied ;

En conséquence,

Prononcer 1’annulation de la mise à pied ;

Condamner la SARL Design Maafa au paiement de la somme de 346 € à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied ainsi qu’aux Congés Payés afférents ;

La Condamner également au paiement de la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi ;

Constater les manquements de l’employeur ;

En conséquence,

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [S] aux torts exclusifs de la SARL Design Maafa ;

Fixer la date de la rupture du contrat de travail à la date de la décision à intervenir ;

Condamner la SARL Design Maafa à verser à Monsieur [S] les sommes suivantes, actualisées au jour de la décision à intervenir :

– 1.401,60 € au titre de rappel de salaires concernant l’indemnité de préavis ;

– 350,40 € au titre de l’indemnité légale de licenciement : (1401,60 /4) x 1= 350,40 € ;

À titre principal, 2.803,20 €à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail en application des dispositions de la Charte sociale européenne,

À titre subsidiaire 1.401,60 € suivant l’article L.1235-3 du code du travail ;

En tout état de cause :

Débouter la SARL Design Maafa de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Ordonner la remise des documents sociaux de rupture conformément à la décision à intervenir sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de la décision, la Cour se réservant le droit de liquider la dite astreinte ;

Dire et Juger que les condamnations prononcées seront assorties d’intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud’hommes ;

Ordonner la capitalisation des intérêts ;

Condamner la SARL Design Maafa, outre aux entiers dépens de l’instance, à verser la somme de 1.500€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ».

Dans ses dernières écritures communiquées au greffe par voie électronique le 13 février 2023, la société demande à la cour de :

« Recevoir la concluante en ses écritures et les juger recevables

Débouter Monsieur [S] de l’ensemble de ses demandes.

Infirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a :

Condamné la SARL Design Maafa E1 payer à M. [S] les sommes suivantes .

– 346 € au titre de rappel de salaire de la mise à pied conservatoire

– 300 € au titre des dommages et intérêts pour le préjudice subi

– 700 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Ordonné la remise des documents sociaux conformes au présent jugement

Débouté la SARL Design Maafa de sa demande reconventionnelle

Condamné la SARL Design Maafa aux entiers dépens

Le Confirmer pour le surplus

Sur les indemnités de petits déplacements

Dire et Juger que Mr [S] a utilisé un véhicule loué par la Société pour les mois d’octobre et novembre 2017.

En conséquence,

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de ses demandes en paiement de l’indemnité de transport au titre des mois d’octobre et novembre 2017

Constater que Monsieur [S] a perçu la somme de 500 € à titre de « prime véhicule » au titre de l’utilisation de son propre véhicule pour les mois de décembre 2017 à février 2018

En conséquence,

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de ses demandes au titre des indemnités de transport pour les mois de décembre 2017 à février 2018

Constater un trop perçu au titre des indemnités de trajet et repas à hauteur de 129 €.

En conséquence,

Infirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté la Société Design Maafa de sa demande tendant à voir Condamner Mr [S] au paiement de la somme de 129 € au titre du trop perçu d’indemnité de trajet et repas.

Condamner Mr [S] à payer à la Société Design Maafa le trop perçu d’indemnité de petits déplacements à hauteur de 129 €

Sur les demandes au titre du paiement tardif du salaire

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de ses demandes au titre du prétendu paiement tardif du salaire.

Sur les demandes relatives aux heures supplémentaires

Dire et Juger que toutes les heures supplémentaires effectuées par Mr [S] ont été réglées.

Dire et Juger qu’aucune autre heure supplémentaire n’a été effectué par Mr [S]

Ecarter des débats les attestations produites par Mr [S]

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de sa demande en paiement d’heures supplémentaires.

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé

Sur les demandes de congés payés sur les rappels de salaire

Constater que la Société Design Maafa est affiliée à la Caisse des Congés Payés du Bâtiment

Dire et Juger que l’employeur n’est pas redevable des indemnités de Congés Payés

Constater que l’employeur a satisfait à ses obligations en matière de congés

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de ses demandes au titre des Congés Payés

Sur les demandes au titre de prétendus manquements à l’obligation de sécurité

Constater que l’employeur n’a pas manqué à ses obligations en matière d’organisation de visite d’information et de prévention

Constater l’absence de démonstration de tout préjudice

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [S] de ses demandes au titre de 1’obligation de sécurité résultat.

Sur la mise à pied disciplinaire

Réformer le Jugement entrepris en ce qu’il a condamné la Société Design Maafa au paiement des sommes suivantes :

– 346 € au titre du rappel de salaire de mise à pied conservatoire

– 300 € au titre des dommages et intérêts pour le préjudice subi

Dire et Juger que les manquements de Mr [S] justifient la mise à pied disciplinaire

Débouter Monsieur [S] de ses demandes au titre de la mise à pied disciplinaire

Sur la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail

Constater que Mr [S] a été licencié pour inaptitude le 13 février 2019.

Constater que l’indemnité légale de licenciement a été versée par l’employeur le 22 février 2019

Dire et Juger qu’aucun manquement ne saurait être reproché à l’employeur

Principalement.

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mr [S] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de ses demandes financières subséquentes

Débouter Monsieur [S] de sa demande en paiement de dommages et intérêts et indemnités de préavis.

Débouter Mr [S] de sa demande en paiement de l’indemnité légale de licenciement.

Subsidiairement, et si par extraordinaire la Cour devait réformer le jugement entrepris et

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail

Dire et Juger qu’il sera fait application des dispositions de l’article L1235-3 du Code du Travail tel qu’il résulte de l’Ordonnance n°20l7-1387.

Constater que Mr [S] cumule un an et quatre mois d’ancienneté à la date du licenciement.

Constater que Mr [S] ne justifie pas de sa situation actuelle et d’un éventuel préjudice résultant de la rupture du contrat de travail.

Débouter Mr [S] de sa demande de condamnation de l’employeur au paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail

Dire et Juger que la date de la rupture du contrat de travail ne pourra qu’être celle de la date du licenciement.

Infirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a condamné la Société Design Maafa au paiement de la somme de 700 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile

Condamner Mr [S] au paiement de la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens ».

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution du contrat de travail

1.Sur les indemnités de petits déplacements et de repas

Le salarié indique que c’est à tort que le conseil des prud’hommes a considéré que la convention collective applicable était celle de la convention collective des ouvriers du bâtiment employant moins de 10 salariés et qu’il a été retenu que la société avait loué un véhicule pour le salarié.

Il estime ne pas avoir été rempli de ses droits concernant le paiement des indemnités au titre des petits déplacements puisque la totalité des déplacements effectués n’a pas été prise en compte.

Il conteste le planning de la société estimant que l’employeur a très bien pu le remplir lui-même pour les besoins de la cause et dont il n’a jamais été destinataire.

Il souligne que les factures de location du véhicule sont au nom de M. [X] [J] et correspondent à un montant beaucoup plus onéreux que le paiement des indemnités de transport devant être allouées au salarié et fait valoir qu’il a toujours effectué des petits déplacements dans le cadre de son travail aussi bien en zone 1 qu’en zone 2 et zone 5.

Il relève que la somme de 250 € perçue au mois de décembre 2017 est une prime exceptionnelle et que celle du mois de janvier 2018 correspond à une prime véhicule qui pour autant ne saurait se substituer à l’indemnité de transport due au titre de l’indemnité de petits déplacements.

La société objecte que le salarié applique le mauvais barème et ne produit aucun élément justificatif de ses déplacements. Elle souligne que ses allégations sont contredites par le planning produit, qu’il ne précise pas les lieux de chantiers sur lesquels il prétend s’être déplacé se contentant d’affirmer d’avoir travaillé dans telle ou telle zone.

La société conteste l’indemnité de transport au titre du mois d’octobre et novembre 2017 dans la mesure où le salarié bénéficiait d’un véhicule de location loué par la société, ledit véhicule permettant le transport sur un chantier de plusieurs ouvriers et le salarié ne rapportant pas la preuve qu’il utilisait son véhicule personnel. Concernant la période de décembre 2017 à février 2018, la société reconnaît que ce dernier utilisait son véhicule personnel mais indique qu’il a perçu une prime véhicule de 500 € qui a vocation à se substituer à l’indemnité de transport.

Concernant le repas elle fait valoir qu’il existe un trop-perçu même si elle a appliqué sur les bulletins de salaire une indemnité erronée à hauteur de 9 euros par jour dans la mesure où le salarié déjeunait chez lui.

La convention collective des ouvriers employés dans les entreprises du bâtiment employant moins de 10 salariés visée dans le contrat de travail doit être appliquée au litige.

Les indemnités de remboursement de frais sont journalières, forfaitaires, et fixées en valeur absolue. Leur montant est déterminé périodiquement à l’échelon régional, certaines régions pouvant toutefois fixer des taux différents pour les départements posant des problèmes particuliers.

L’accord IDCC du 4 novembre 2016 Provence-Alpes-Côte d’Azur relatif aux indemnités de petits déplacements fixe :

– des indemnités de repas (10 euros),

– des indemnités de frais de trajets qui sont la contrepartie de la mobilité du lieu de travail inhérente à l’emploi sur chantier et qui ont pour objet d’indemniser forfaitairement l’amplitude que représente le trajet nécessaire pour se rendre quotidiennement sur le chantier et en revenir après la journée de travail. Les indemnités sont fixées en fonction de zones déterminées ( zone 1 de 0 à 10 km: 2 €, zone 2 de 10 à 20 km: 3,18 €, zone 3 de 20 à 30 km: 4,29 € et zone 4 de 30 à 40 km : 5,68 € et zone 5 de 40 à 50 km: 6,75 €),

– des indemnités de transports selon les mêmes zones (zone1 : 3,09 €, zone 2: 5,44 €, Zone 3: 7,31 €, zone 4 :9,55 € , zone 5 :12,53 €)

En application des dispositions de l’article 8-16 de la convention collective, « l’indemnité de transport est un remboursement de frais ayant pour objet d’indemniser les frais de transport engagés par le salarié pour se rendre sur le chantier et en revenir. Elle n’est pas due si le salarié n’engage pas de frais de transport, si l’entreprise assure gratuitement le transport ou remboursement les titres de transport ».

En application de l’article 8.4 précité, le point de départ des petits déplacements est fixé au lieu d’établissement de l’employeur (siège social, agence régionale ou bureau local).

L’indemnité de repas prévue par les dispositions de l’article 8-15 de la convention collective a pour objet d’indemniser le supplément de frais occasionnés par la prise du déjeuner en dehors de la résidence habituelle de l’ouvrier. L’indemnité de repas n’est pas due par l’employeur lorsque l’ouvrier prend effectivement son repas à sa résidence habituelle, un restaurant d’entreprise existe sur le chantier, le repas est fourni avec une participation financière de l’entreprise égale au montant de l’indemnité de repas et le repas est fourni gratuitement ou avec une participation financière de l’entreprise égale au montant de l’indemnité de repas.

S’agissant de l’indemnité de trajet et de transport

Le contrat de travail ne mentionne pas que le salarié bénéficie d’une voiture de société pour ses déplacements. Les factures de location du véhicule Renault Kangoo pour le mois d’octobre et novembre 2017 sont par ailleurs au nom de [X] [J] et la société ne justifie pas que ce dernier travaillait sur les mêmes chantiers que M. [S], de sorte qu’il ne peut en être tenu compte.

Le planning produit par la société doit être retenu en l’absence d’éléments contraires de la part du salarié qui n’indique pas les lieux de des chantiers (pièce intimée 8 et 11).

– octobre et novembre 2017 :

Pour le mois d’octobre 2017 (9 jours), le salarié a réalisé 8 déplacements en zone 1 et1 déplacement en zone 5, soit la somme de 60 €.

Pour le mois de novembre 2017 (22 jours), le salarié a réalisé 15 déplacements en zone 1, 2 en zone 2, 3 en zone 3, 2 en zone 5, soit la somme de 170,29 €.

Compte tenu du règlement de la somme de 44 € au titre des indemnités de trajet petit déplacements BTP zone 1 au vu de son bulletin de salaire, il lui reste dû la somme de 126,69 €.

– décembre 2017, janvier 2018 et février 2018 :

Pour le mois de décembre 2017 (20 jours), la « prime exceptionnelle » d’un montant de 250 € mentionnée sur son bulletin de salaire – dont aucune indication ne laisse présumer de lien avec le véhicule – n’a pas vocation à se substituer à l’indemnité de transport.

Le salarié a réalisé 8 déplacements en zone 1 et 12 déplacements en zone 5, soit la somme de 272,08€. Compte tenu du règlement de la somme de 40 € au titre des indemnités de trajet petit déplacements BTP zone 1, il lui reste dû la somme de 232,08 €.

Pour le mois de janvier 2018 (21 jours ), la « prime véhicule » d’un montant de 250 € mentionnée sur le bulletin de salaire doit être prise en compte pour l’entretien et les frais liés au véhicule. Dès lors seule l’indemnité de trajet doit être retenue.

Le salarié a réalisé 3 déplacements en zone1, 1 déplacement en zone 3, 16 déplacements en zone 5, soit la somme de 118,29 €. Compte tenu du règlement de la somme de 36 € au titre des indemnités de trajet petit déplacements BTP zone 1, il lui reste dû la somme de 82,29 €.

Pour le mois de février 2018 (7 jours) , le salarié a réalisé 3 jours en zone 1, 2 déplacements en zone 4 et 2 déplacements en zone 5, soit la somme de 84,29 €. Compte tenu du règlement de la somme de 14 € au titre des indemnités de trajet petit déplacements BTP zone 1, il lui reste dû la somme de 70,29 € .

En conséquence, le montant total des indemnités au titre des frais de trajet/transport dû par la société s’élève à la somme de 511,35 €.

S’agissant de l’indemnité de repas

Au vu de son contrat de travail, le salarié est domicilié dans le [Localité 1] de [Localité 4] et il est manifestement difficile pour lui de rejoindre son domicile en raison du temps de pause déjeuner de 1heure 30, de la distance entre les lieux des chantiers qui peuvent être éloignés en zone 1 et de la circulation sur [Localité 4].

Dès lors, le salarié ayant travaillé pendant 79 jours, a droit à la somme de :

790 € (79 €x10) – 603€ déjà versées au titre de l’indemnité de repas =187 €.

2.Sur le paiement tardif des salaires

Le salarié soutient qu’il percevait son salaire entre le 15 et le 20 du mois par virement et non le 30 du mois comme indiqué sur son bulletin de salaire, ce qui a entraîné une situation financière obérée.

La société réplique qu’il n’existe aucune disposition légale imposant le règlement du salaire le 30 du mois, que le salarié était payé tous les mois entre le 12 et le 15 du mois et que le virement prenait plus de temps car effectué sur un livret A à la Poste.

Les dispositions de l’article L.3242-1 du code du travail prévoient que la rémunération des salariés doit être mensuelle et effectuée une fois par mois. L’employeur n’a pas la faculté de différer le paiement du salaire au-delà du délai mensuel qu’il prévoit.

En l’espèce, en l’état des pièces produites, il y a lieu de constater que le compte du salarié n’est pas un livret A mais un compte chèque postal (CCP).

Le salaire du mois d’octobre 2017 de 541,14 € a fait l’objet d’un virement par la société du 13 novembre 2017 mais n’a été porté au crédit du compte CCP du salarié que le 20 novembre 2017.

Le salaire du mois de novembre 2017 de 1384,36 € a été porté au compte du salarié le 14 décembre 2017.

Le salaire du mois de décembre 2017 de 1532,18 € a fait l’objet d’un virement le 15 janvier 2018 et a été porté au compte du salarié le 18 janvier 2018.

Le salaire du mois de janvier 2018 a été remis par chèque le 14 février 2018 au salarié et mis sur son compte le 17 février 2018.

Le paiement tardif des salaires est donc établi. De ce fait, le salarié s’est trouvé en difficulté pour régler ses charges et notamment son assurance et justifie d’un préjudice suite à ces retards (pièces appelant 11 et 12).

La cour condamne la société à verser au salarié la somme de 300 € à titre de dommages-intérêts.

3.Sur les heures supplémentaires

L’article L.3171-4 du code du travail prévoit en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

En l’espèce, le salarié réclame le paiement de 53,50 heures supplémentaires, précisant que seulement 8 heures supplémentaires majorées à 25 % lui ont été payées, en novembre 2017 (5 heures) et en décembre 2017 (3 heures).

Il souligne que le planning produit par la société ne lui a jamais été donné au cours de la relation contractuelle et qu’aucune date d’édition ne figure sur ce dernier.

Il produit les éléments suivants :

– un décompte du nombre d’heures par jour et par semaine (pièces 2 et 3)

– le témoignage de Mme [K], femme de ménage qui indique : « les ouvriers M. [S] [N], M. [D] [N], et M. [A] [U] sont venus travailler à mon domicile au mois de janvier pour refaire la salle d’eau sans manger et sans boire le midi et en finissant très tardivement le soir » (pièce 15).

– le témoignage de Mme [W], sans emploi, qui indique : « les ouvriers désignés M. [N] [S], [N] [D], [A] [U] ont été obligés d’intervenir (…) Sans ces trois gars ma salle d’eau n’aurait pas pu être finie (…) Les trois personnes citées ont fait (…) et jusqu’à la fin de chantier sans me laisser tomber de 7h50 jusqu’à 22 h sans manger ni boire » (pièce 16)

– le témoignage de M. [I], agent d’exploitation, (pièce 14) : « (…)M. [D] [N] travaillait jusqu’à très tard le soir chez moi par manque de temps vu qu’il a été sollicité à plusieurs reprises par son employeur pour intervenir sur d’autres chantiers (…) j’ai été témoin qu’un soir il a été rejoint à mon domicile par son collègue de travail M. [S] [N] afin de l’aider le soir » ( pièce 14)

– le témoignage de M. [A] qui indique « je confirme que M. [S] [N] ouvrier de l’entreprise Maafa Design (…) finissait très tard qu’il a bien travaillé avec moi pour le mois de janvier 2018 (…) » (pièce17)

Les éléments apportés par le salarié sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Contestant la valeur probante des éléments versés aux débats par le salarié, la société explique que le contrat de travail prévoyait que les horaires du salarié étaient répartis du lundi au vendredi de 8 h à 12h et de 13h30 à 16h30, que le salarié n’a travaillé que quatre mois et que les 8 heures supplémentaires lui ont été réglées.

Elle relève que le tableau produit par ce dernier n’est appuyé par aucun élément probant et ne mentionne pas les horaires accomplis les jours où il prétend avoir effectué des heures supplémentaires.

Elle précise qu’en comparant le tableau du salarié et le planning de la société, le salarié prétend avoir travaillé sur des chantiers ne correspondant pas au planning et surtout il indique avoir travaillé le 21 janvier 2018 à [Localité 5] alors que cette journée est un dimanche.

Elle s’interroge sur la véracité et l’authenticité des témoignages établis selon elle pour les besoins de la cause, les trois salariés qui ont attesté étant en litige avec la société et indiquant qu’il était impossible qu’ils aient pu travailler sur les mêmes chantiers au vu des plannings.

Elle conteste l’attestation de M. [I] du fait que l’intervention portait uniquement sur les prestations de plomberie et que le salarié était peintre en bâtiment.

La société produit les pièces suivantes :

– le témoignage de M. [X] [J], salarié de la société, qui indique : « [D] et [N] [S] n’ont jamais fait des heures supplémentaires chez Madame [W] car c’était moi et un autre salarié [P] qui ont réalisé des gros travaux ( remplacement de bas à douche lavabo et WC (…)». (pièce 13)

– le bon de travaux au domicile de Mme [K] indiquant le remplacement d’un bac à douche et pose d’une cloison de 2 m² avec faïence (pièce 35 )

– le bon de réclamation de l’intervention au domicile de Mme [W] qui mentionne un dysfonctionnement du cumulus en vue d’un remplacement. ( pièce 36)

– le bon de travaux dans l’appartement de M. [I] (pièce 37)

– les plannings de M. [A], M. [D] et M. [S] pour le mois de janvier 2018 ( pièces 8-11- 12 ).

La cour relève que les pièces produites par la société contredisent les éléments apportés par le salarié. En effet, les plannings des salariés diffèrent en ce qui concerne les lieux des chantiers et démontrent que ces derniers ne pouvaient se retrouver ensemble et au même moment au domicile de Mme [K] ou de Mme [W].

Il en est de même s’agissant de l’amplitude des horaires de travail, les témoignages de M. [I] et M. [A] étant imprécis, ne permettant pas de déterminer les heures supplémentaires travaillées au-delà de la durée contractuelle.

Il est également noté des incohérences dans le tableau du salarié en pièce 3. En effet, il est indiqué en tête du tableau 53 h 30 heures supplémentaires alors que seules 37 heures du 23 octobre 2017 au 31 janvier 2018 sont comptabilisées.

Au surplus, le nombre d’heures sollicité est en contradiction avec son courrier du 17 février 2018 mentionnant à cette date 32 heures supplémentaires.

Confrontant les éléments produits de part et d’autre , et soulignant l’absence manifeste d’outils fiables utilisés par l’employeur pour comptabiliser les heures de travail de ses salariés, la cour a la conviction que le salarié a accompli des heures supplémentaires qui ne lui ont été rémunérées, mais pas dans la proportion affichée.

La cour fixe le volume d’heures supplémentaires non réglées à 20 heures sur la période considérée et en conséquence, la créance salariale à la somme de (10,99 € x 125 % x 20 heures) = 274,75 € bruts.

4. Sur le travail dissimulé

Aux termes de l’article L.8821-5 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur notamment de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois le travail dissimulé n’est caractérisé que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle. Ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

En l’espèce, le caractère intentionnel du travail dissimulé n’est démontré d’aucune façon par le salarié, de sorte que ce dernier doit être débouté de ce chef de demande.

5. Sur l’obligation de sécurité

Le salarié soutient qu’ il n’a jamais bénéficié de la visite d’information et de prévention alors que cet examen est obligatoire et qu’il aurait dû être réalisé au plus tard le 19 janvier 2018.

Il relève que la demande de suivi médical a été effectuée postérieurement à son courrier de mise en demeure et que le préjudice est démontré puisqu’il a été en arrêt de travail à compter du 19 février 2018.

La société réplique qu’elle a bien accompli les formalités permettant l’organisation de la visite d’information et de prévention dès le 19 octobre 2017, jour de son embauche, et qu’elle a fait le nécessaire pour le salarié soit convoqué pour le mardi 29 mai 2018.

Elle souligne que le salarié ne justifie pas d’un préjudice dans la mesure où il n’est pas établi que les arrêts de travail du salarié soient liés à ses conditions de travail.

Selon les dispositions de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et il doit assurer l’effectivité de l’obligation de sécurité qui lui incombe en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise.

L’article R4624-10 du code du travail prévoit que l’employeur doit prendre les dispositions nécessaires pour soumettre le salarié à la visite d’information et de prévention dans le délai légal de trois mois à compter de la prise effective du poste de travail.

Si la société a bien réalisé les formalités par la déclaration préalable à l’embauche, il s’avère toutefois que la visite qui doit être faite à son initiative n’a pas été effectuée dans le délai imparti de trois mois.

Le salarié ne démontre cependant pas le lien entre le non respect de la visite et l’arrêt de travail dont il se prévaut.

C’est donc à bon droit que les premiers juges l’ont débouté de sa demande à ce titre.

6. Sur la mise à pied

Le salarié invoque un usage abusif de son pouvoir disciplinaire par l’employeur, relevant d’une part un non respect de la procédure et d’autre part, l’absence de bien fondé de la mesure, en demandant l’annulation.

Il fait valoir qu’il est mentionné une mise à pied conservatoire, que la société n’a pas respecté la procédure en ne le convoquant pas à un entretien préalable par un courrier recommandé, par lettre remise en main propre contre décharge et en ne lui notifiant pas la sanction dans un délai minimum de deux jours et maximum d’un mois après le jour fixé pour l’entretien préalable.

Il ajoute que la mise à pied est une sanction disciplinaire qui doit être prévue dans le règlement intérieur et que celui produit par la société est postérieur à la sanction comme étant daté du 20 février 2018 .

La société indique que suite au refus du salarié d’exécuter son travail 2018, elle a notifié à ce dernier une mise à pied disciplinaire le 12 février 2018 qui a été confirmée par un courrier recommandé avec accusé de réception le lendemain et que c’est par erreur que le courrier mentionne ‘mise à pied disciplinaire conservatoire’.

Elle fait valoir que le règlement intérieur n’est obligatoire que pour les entreprises de plus de 20 salariés et que les sanctions disciplinaires peuvent être prononcées même en l’absence de règlement intérieur.

Comme l’indique la société, au visa de l’article L.1311-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, le règlement intérieur n’était pas obligatoire dans les entreprises de moins de 20 salariés, étant précisé que la mise à pied disciplinaire est inhérente au pouvoir disciplinaire de l’employeur, lequel a la faculté, en l’absence de dispositions restrictives d’un règlement intérieur ou d’une convention collective, d’en faire usage.

Après un entretien informel, la société a adressé le 13 février 2018 un courrier recommandé au salarié lui notifiant une mise à pied disciplinaire de cinq jours et a envisagé un entretien prévu le 16 février 2018 pour recueillir les explications du salarié sur les griefs reprochés.

Ce faisant, elle a donc enfreint les dispositions des articles L.1332-1 & L.1332-2 du code du travail lesquels prévoient que lorsque l’employeur envisage une sanction autre que l’avertissement, ayant une incidence immédiate ou non sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, il doit convoquer le salarié à un entretien préalable, étant précisé que l’entrevue du 12 février ne peut retenue comme correspondant à un entretien préalable valide en l’absence de garantie donné au salarié notamment concernant son assistance, étant souligné en outre que la sanction est intervenue moins de deux jours ouvrables après cet «entretien».

En conséquence, sans qu’il soit besoin d’examiner le bien fondé de la mesure, il convient d’annuler la mesure de mise à pied disciplinaire et de confirmer les sommes allouées par les premiers juges concernant le rappel de salaire et à titre de dommages et intérêts.

Sur la résiliation judiciaire

En cas de saisine de la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire suivie d’un licenciement du salarié, le juge doit examiner prioritairement la demande de résiliation judiciaire, avant de se prononcer sur la régularité du licenciement.

Le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations, de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

La cour n’a pas retenu la totalité des manquements invoqués par le salarié mais la sanction de la mise à pied, sans laisser au salarié la possibilité de s’expliquer sur les griefs invoqués, constitue assurément une faute grave de la part de l’employeur, ne permettant pas la poursuite du contrat de travail et justifiant la résiliation de celui-ci aux torts exclusifs de la société.

La résiliation judiciaire a les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et doit être fixée au 13 février 2019, date du licenciement.

Sur les conséquences financières de la rupture

Les dispositions de l’article 10.4 de la convention collective prévoient que la durée des interruptions pour maladie, accident, maternité pour l’ancienneté dans l’entreprise doit être prise en compte au titre de l’ancienneté.

Le salarié a été employé du 19 octobre 2017 au 13 février 2019, soit 1 année et 2 mois.

Le salaire de référence mensuel brut est de 1 480,30 euros.

Toutefois, le salarié réclame la somme de 1 401,60 € à ce titre, de sorte que les indemnités sont fixées sur cette base.

– Sur les indemnités de rupture

Les dispositions de l’article 10.1 de la convention collective prévoit en cas de rupture du contrat de travail un préavis d’un mois pour une ancienneté inférieure à 2 années.

En conséquence, il convient de fixer l’indemnité due à ce titre à la somme de 1 401,60 €.

Selon l’article L. 1234-9 du code du travail dans sa rédaction issue de l’ordonnance nº 2017-1387 du 22 septembre 2017 applicable au litige, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte 8 mois d’ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

L’indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1º Un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à dix ans ;

2º Un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années à partir de dix ans.

En conséquence, le salarié est en droit de prétendre à une indemnité de :

(1 401,60 € x 1/4 ) x 1+ (1 401,60 € x 1/4 ) x 3/12 = 438 €

Le reçu pour solde de tout compte mentionne que le salarié a perçu la somme de 515 € au titre de l’indemnité de licenciement, de sorte qu’il a été rempli de ses droits et doit être débouté de ce chef de demande.

– Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le salarié au visa des dispositions de l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail et 24 de la Charte Sociale Européenne, demande que les nouvelles dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail soient écartées.

Les stipulations de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT), qui créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir à l’encontre d’autres particuliers et qui, eu égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale de la convention, ainsi qu’à son contenu et à ses termes, n’ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l’intervention d’aucun acte complémentaire, sont d’effet direct en droit interne.

Aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail, dans leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi et assurent le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l’employeur, sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Après cet avis, la Cour de Cassation a récemment rappelé le caractère impératif du barème et affirmé à nouveau que celui-ci s’appliquait peu importe les faits de l’espèce, le juge du fond n’ayant pas à apprécier la situation personnelle du salarié pour dépasser le plafond d’indemnisation. (Cass.soc 1er fév. 2023, n°21-21.011).

Il en résulte que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention précitée.

En conséquence, il appartient à la présente juridiction d’apprécier la situation concrète du salarié pour déterminer le montant de l’indemnité due entre les montants minimaux et maximaux déterminés par l’article L. 1235-3 du code du travail

Il en résulte que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention précitée.

Les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version issue de l’ordonnance du 22 septembre 2017 doivent donc s’appliquer.

Au moment de la rupture M. [S] comptait une année complète d’ancienneté et l’entreprise employait moins de 10 salariés. Les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail prévoient une indemnité de 0,5 mois de salaire, soit la somme de 700 €.

La cour condamne la société au paiement de cette somme.

– Sur les congés payés

Le salarié réclame la somme de 241,13 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à :

– la somme de 34,58 € sur les rappels de salaire au titre de la mise à pied,

– celle de 67,19 € au titre des heures supplémentaires,

– celle de 140,16 € sur le rappel de salaire au titre de l’indemnité de préavis.

Il souligne que le certificat attestant du respect des obligations relatives aux congés payés au chômage intempéries date du 20 janvier 2018 et concerne le paiement des cotisations au 30 septembre 2017 antérieurement à la date d’embauche et à l’ouverture de ses droits à congés payés.

La société s’y oppose expliquant qu’elle est affiliée à la caisse de congés payés du bâtiment et qu’elle n’est pas redevable de l’indemnité de congés payés et qu’elle est en règle auprès de la caisse.

En étant affilié à la Caisse de Congés Payés du Bâtiment et des Travaux publics, l’employeur n’est pas personnellement redevable du paiement des indemnités de congés payés.

Il doit, en cas de litige, justifier auprès du salarié qu’il a effectivement mené toutes les diligences nécessaires pour que celui-ci puisse faire valoir auprès de la caisse, ses droits à l’indemnité de congé payé.

En cas de manquement par l’employeur aux obligations légales lui incombant, l’employeur sera tenu débiteur de ces sommes et le salarié pourra prétendre à des dommages-intérêts en raison du préjudice subi.

Il s’avère au vu des pièces produites par la société que les bulletins de salaire mentionnent les congés payés et il est justifié du respect des obligations relatives aux congés payés et au chômage intempéries au vu des attestations produites, notamment celle du mois d’avril 2018.

Il s’ensuit que la société a respecté ses obligations légales et a transmis à la caisse les éléments nécessaires au règlement des congés payés du salarié (pièces 22, 43,49 et 50).

Toutefois, au regard des heures supplémentaires non réglées, la société n’a pas pu accomplir ses obligations envers la caisse des congés payés du bâtiment et le salarié justifie d’un préjudice de 27,47 € à titre de dommages-intérêts.

De la même façon, il est en droit de percevoir la somme de 140,16 € à titre de dommages-intérêts pour les congés payés afférents à l’indemnité compensatrice de préavis.

Enfin, il est en droit d’obtenir 34,60 euros à titre de dommages et intérêts pour les congés payés afférents au rappel de salaire de la mise à pied.

Soit au total la somme de 202,21 €.

Sur les autres demandes

Les créances salariales doivent porter intérêts au taux légal à compter de la date de présentation de la lettre recommandée de la convocation de l’employeur à l’audience de tentative de conciliation valant mise en demeure et les créances indemnitaires à compter du présent arrêt.

La cour ordonne la capitalisation des intérêts en fonction en application de l’article 1343-2 du code civil.

Il convient d’ordonner la remise de documents sociaux conformes au présent arrêt sans qu’il y ait lieu à une astreinte laquelle n’est pas justifiée.

La société qui succombe doit s’acquitter des dépens, être déboutée de sa demande faite en application de l’article 700 du code de procédure civile, et à ce titre, condamnée à payer au salarié la somme supplémentaire de 1 500 € .

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, en matière prud’homale,

Infirme le jugement déféré SAUF s’agissant de l’application de la convention collective des ouvriers du bâtiment de moins de 10 salariés, du rejet des demandes au titre du travail dissimulé et de la visite d’information de prévention, et des sommes allouées au titre de la mise à pied disciplinaire, et des dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et des dépens,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et Y ajoutant,

Prononce l’annulation de la mise à pied disciplinaire ;

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société Design Maafa au 13 février 2019 ;

Condamne la société Design Maafa à payer à M. [N] [S] les sommes suivantes:

– 511,35 € à titre d’indemnité de trajet et de transport,

– 187 € à titre d’indemnité repas,

– 274,75 € bruts au titre du rappel de salaire pour des heures supplémentaires du mois d’octobre 2017 au mois de janvier 2018,

– 1 401,60 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 202,21 € à titre de dommages et intérêts pour les congés payés afférents aux sommes allouées,

– 300 € à titre de dommages-intérêts pour paiement tardif du salaire,

– 700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit que les sommes allouées de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 09/05/2018 et les créances indemnitaires à compter du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation de ces intérêts à condition qu’ils soient dus pour une année entière;

Ordonne à la société Design Maafa de remettre à M. [N] [S] un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt;

Rejette la demande d’astreinte ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société Design Maafa aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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