Tentative de conciliation : 22 novembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/01914

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Tentative de conciliation : 22 novembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/01914
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MINUTE N° 522/23

Copie exécutoire à

– Me Dominique HARNIST

– Me Joëlle LITOU -WOLFF

Le 22.11.2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 22 Novembre 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/01914 – N° Portalis DBVW-V-B7F-HR2L

Décision déférée à la Cour : 31 Mars 2021 par le Juge des référés commerciaux du Tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE – INTIMEE INCIDEMMENT :

S.A.R.L. SONEST prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

Représentée par Me Dominique HARNIST, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me LITAS, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMES – APPELANTS INCIDEMMENT :

Monsieur [D] [Y] [Adresse 13]

Monsieur [G] [I] [Adresse 11]

S.A.S. ELAF-SOLUTIONS, en liquidation judiciaire

[Adresse 2]

Représentés par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me [E], avocat au barreau de STRASBOURG

PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES :

S.E.L.A.R.L. MJ AIR prise en la personne de Maître [C] [B], liquidateur judiciaire de la société ELAF-SOLUTIONS

[Adresse 7]

S.A.S. WEIL- GUYOMARD – [N], prise en la personne de Me [C] [N], administrateur de la société ELAF-SOLUTIONS

[Adresse 4]

Représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me [E], avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 Octobre 2023, en audience publique, un rapport de l’affaire ayant été présenté à l’audience. devant la Cour composée de :

M. WALGENWITZ, Président de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme RHODE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

– signé par M. Franck WALGENWITZ, président et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Vu l’ordonnance rendue par le juge des référés commerciaux du tribunal judiciaire de Strasbourg le 31 Mars 2021 qui a :

Rejeté l’exception de nullité de la requête ;

S’est déclaré incompétent pour connaître du moyen tiré de la nullité de l’ordonnance ;

Rétracté son ordonnance du 6 octobre 2020 en toutes ses dispositions ;

Constaté en conséquence la nullité des mesures d’exécution de cette ordonnance ;

Condamné la société SONEST aux dépens ;

Condamné la société SONEST à payer à monsieur [I] une indemnité de 2 000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens ;

Condamné la société SONEST à payer à monsieur [Y] une indemnité de 2 000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens ;

Condamné la société SONEST à payer à la société ELAF SOLUTIONS une indemnité de 2 000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens,

Vu l’appel interjeté par la SARL SONEST par déclaration au greffe par la voie électronique en date du 9 Avril 2021,

Vu la constitution d’intimés de Monsieur [Y], Monsieur [I] et la SAS ELAF-SOLUTIONS par déclaration au greffe par la voie électronique en date du 18 Mai 2021,

Vu l’arrêt du 9 novembre 2022 ordonnant la réouverture des débats à l’audience du 23 Janvier 2023 afin que Monsieur [Y], Monsieur [I] et la SAS ELAF-SOLUTIONS versent aux débats la requête du 30 septembre 2020 et que la société SONEST présente ses observations sur l’étendue de la saisine de la Cour d’Appel, eu égard à l’absence de prétentions dans le dispositif de ses dernières conclusions,

Vu le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 1er février 2023 plaçant la SAS ELAF-SOLUTIONS en redressement judiciaire,

Vu l’intervention de la SAS [O]-[N], prise en la personne de Me [N], en qualité d’administrateur de la SAS ELAF-SOLUTIONS en date du 17 mars 2023,

Vu l’intervention de la SELARL DMJ, prise en la personne de Me [B], en qualité de mandataire judiciaire de la SAS ELAF-SOLUTIONS en date du 2 mai 2023,

Vu l’intervention de la SELARL DMJ, prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ELAF-SOLUTIONS en date du 10 août 2023,

Vu les dernières conclusions déposées par la société SONEST le 28 septembre 2023, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

STATUANT SUR L’APPEL INCIDENT

DEBOUTER la société ELAF SOLUTIONS, Monsieur [I] et Monsieur [Y] de leur appel incident subsidiaire, ainsi que de l’intégralité de leurs fins, moyens et conclusions,

CONFIRMER ainsi notamment l’ordonnance entreprise en tant qu’elle a rejeté l’exception de nullité de la requête

STATUANT SUR L’APPEL PRINCIPAL

DECLARER l’appel de la société SONEST bien fondé,

Y FAISANT DROIT,

INFIRMER l’ordonnance de référé rétractation (no de minute 21/00062 ‘ no RG 20/01822) rendue le 31 mars 2021 par Madame le Juge des référés commerciaux du Tribunal Judiciaire de Strasbourg en ce qu’elle a :

– Rétracté l’ordonnance du 6 octobre 2020 en toutes ses dispositions,

– Constaté en conséquence la nullité des mesures d’exécution de cette ordonnance,

– Condamné la société SONEST aux dépens,

– Condamné la société SONEST à payer à Monsieur [I] une indemnité de 2000 euros en couverture de ses frais non compris dans les dépens,

– Condamné la société SONEST à payer à Monsieur [Y] une indemnité de 2000 euros en couverture de ses frais non compris dans les dépens,

– Condamné la société SONEST à payer à la société ELAF SOLUTIONS une indemnité de 2000 euros en couverture de ses frais non compris dans les dépens,

ORDONNER la mainlevée de la consignation de tous les éléments recueillis par Me [S] à l’exception de ceux qui pourraient être couverts par le secret professionnel étant rappelé que la demande de modification des intimés n’est pas nécessaire car tout échange qui serait couvert par le secret professionnel sera de facto écarté par l’Huissier qui procédera au dépouillement et qu’en cas de difficulté, il pourra toujours s’en remettre à Madame le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du barreau de Strasbourg, garant naturel du secret professionnel,

En tout état de cause,

CONDAMNER Monsieur [Y] et Monsieur [I] à verser chacun à la Société SONEST la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du CPC,

CONDAMNER in solidum Monsieur [Y], Monsieur [I] aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel en ce compris les frais exposés pour l’accomplissement des mesures visées par l’ordonnance du 6 octobre 2020,

CONSTATER la créance de la Société SONEST à l’encontre de la société ELAF SOLUTIONS, au titre de l’article 700 du CPC et des dépens ET FIXER son montant à la somme de 2.500 € pour l’article 700, 7.279,81 € au titre des frais exposés pour l’accomplissement des mesures visées par l’ordonnance du 6 octobre 2020 outre les dépens de la présente procédure de première instance et d’appel.

Vu les dernières conclusions déposées par Monsieur [Y], Monsieur [I] et la SELARL MJ AIR, prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur de la société ELAF-SOLUTIONS en date du 16 août 2023, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, aux termes desquelles ils demandent à la cour de :

DONNER ACTE la SELARL MJ AIR, prise en la personne de Maître [C] [B], es-qualité de liquidateur de la société ELAF-SOLUTIONS en liquidation judiciaire, de son intervention,

DONNER ACTE à la société ELAF-SOLUTIONS, en liquidation judiciaire, qu’elle verse aux débats la requête du 30 septembre 2020,

CONSTATER que la société SONEST est incapable d’expliquer et a fortiori de pallier l’absence de prétentions dans le dispositif de ses dernières conclusions, qui ne sont donc pas de nature à saisir la Cour,

SUR L’APPEL PRINCIPAL DE LA SARL SONEST

CONSTATER que la Cour n’est saisie d’aucune prétention lui demandant, sur infirmation, d’autoriser la SARL SONEST à faire procéder à la saisie de documents détenus par les intimés,

DIRE en conséquence que la Cour ne peut que CONFIRMER la décision entreprise,

DIRE en tant que de besoin l’appel irrecevable,

DEBOUTER la société SONEST de toutes conclusions contraires,

Subsidiairement

DIRE l’appel mal fondé,

DEBOUTER la société SONEST de l’intégralité de ses fins, moyens et prétentions,

CONFIRMER le jugement entrepris sous réserve de l’appel incident subsidiaire,

Encore plus subsidiairement :

A tout le moins, INTERDIRE pour prévenir toute atteinte au secret professionnel :

– la saisie de toute correspondance entre Maître Franck MERKLING, Avocat au Barreau de STRASBOURG, y demeurant [Adresse 3] à [Localité 8] et la société ELAF-SOLUTIONS, Monsieur [I] ou Monsieur [Y],

– la saisie de toute correspondance entre le cabinet [M], [V] [W], [T] et ASSOCIES, Cabinet de Maître Franck MERKLING, Avocat au Barreau de STRASBOURG, y demeurant [Adresse 3] à [Localité 8] et la société ELAF-SOLUTIONS, Monsieur [I] ou Monsieur [Y],

– la saisie de toute correspondance entre Maître Nicolas BOISSERIE, Avocat au Barreau de STRASBOURG, y demeurant [Adresse 12], et la société ELAF-SOLUTIONS, Monsieur [I] ou Monsieur [Y],

– la saisie de toute correspondance entre Maître [L] [Z], Avocate au Barreau de STRASBOURG, y demeurant [Adresse 12], et la société SONEST, Monsieur [I] ou Monsieur [Y],

– la saisie d’e-mails, de courriers ou de tout document mentionnant ‘[F] [U]’, ‘[M], [V] [W], [T] et ASSOCIES’, ‘[X] [E]’ et les adresses e-mails suivantes : et [Courriel 15] ; [Courriel 17] ; [Courriel 16]

– plus généralement de toutes les adresses e-mails dont les adresses s’achèvent par : ‘@boisserie.fr’, ‘@alexandre-avocats.fr’,

– la saisie de toute correspondance entre le service juridique de la CFTC, les délégués de la CFTC :

Mr [H] [P] e-mail : [Courriel 14], Mr [J] [A] (e-mails [Courriel 18] [Courriel 19],) et Monsieur [I],

– et ce, quel que soit le support d’échange, e-mail, fax, courrier’

– la saisie de pièces communiquées à l’appui des échanges (notamment les pièces jointes d’e-mails),

DEBOUTER la société SONEST de toutes conclusions contraires,

SUR APPEL INCIDENT subsidiaire :

REFORMER l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté l’exception de nullité de la requête et statuant à nouveau :

ANNULER la requête en date du 30 septembre 2020 et par voie de conséquence l’ordonnance du 6 octobre 2020,

DIRE ET JUGER qu’en conséquence toutes les mesures d’exécution postérieures sont nulles,

En tout état de cause,

CONDAMNER la Société SONEST à verser 5.000 € à chaque intimé et intervenant sur le fondement de l’article 700 du CPC au titre de la procédure d’appel,

La CONDAMNER aux entiers dépens d’appel.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se référera aux dernières conclusions des parties pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 9 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Or, ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir ‘constater’ ou ‘dire et juger’ en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d’emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour n’y répondra qu’à la condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif mais dans ses motifs.

Sur la saisine de la cour :

Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement (Cass. 2ème chambre civile, 17 Septembre 2020 – n° 18-23.626).

En l’espèce, dans ses conclusions la société SONEST demande à la cour d’infirmer l’ordonnance de référé rétractation rendue le 31 mars 2021 par Madame le Juge des référés commerciaux du Tribunal Judiciaire de Strasbourg.

Cette demande d’infirmation est une prétention et, ainsi que l’appelante le souligne, en cas d’infirmation de l’ordonnance du 31 mars 2021, l’ordonnance sur requête du 6 octobre 2020 aura vocation à produire pleinement ses effets.

Sur la nullité de la requête et de l’ordonnance du 6 octobre 2020 :

L’article 54 du code de procédure civile dispose que la demande initiale est formée par assignation ou par requête remise ou adressée au greffe de la juridiction. La requête peut être formée conjointement par les parties.

A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L’objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative.

Aux termes de l’article 57 du code de procédure civile, lorsqu’elle est formée par le demandeur, la requête saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé. Lorsqu’elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

Elle contient, outre les mentions énoncées à l’article 54, également à peine de nullité :

– lorsqu’elle est formée par une seule partie, l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

– dans tous les cas, l’indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

Elle est datée et signée.

Il résulte de l’article 114 du code de procédure civile, qu’aucun acte de procédure ne peut être

déclaré nul pour vice de forme, si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

En l’espèce, les mentions visées à l’article 54 et 57 du code de procédure civile ne figurent pas, comme il est d’usage, au début de la requête. Toutefois, les noms, prénoms, domiciles des personnes contre lesquelles elle est dirigée figurent dans son dispositif et sont repris dans l’ordonnance sur requête rendue le 6 octobre 2020. Ces mentions sont incomplètes concernant la personne morale (forme, organe qui la représente).

Toutefois, les intimés ne peuvent sérieusement soutenir qu’ils n’avaient pas la certitude d’être ‘bien visés’ par l’ordonnance sur requête qui évoque :

– M. [D] [Y] demeurant [Adresse 1]

– M. [G] [I] demeurant [Adresse 11] à [Localité 9]

– La société ELAF SOLUTIONS sise [Adresse 6] à [Localité 10].

Dès lors, Monsieur [Y], Monsieur [I] et la SELARL MJ AIR, prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur de la société ELAF-SOLUTIONS, ne justifient d’aucun préjudice et il n’y a pas lieu d’annuler la requête de la société SONEST du 30 septembre 2020.

Les autres griefs au soutien de la nullité de l’ordonnance sur requête, ne seront pas examinés par la cour qui n’est saisie, aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, que par les prétentions figurant dans le dispositif des conclusions des parties. Or, aux termes de ces dernières, la cour est saisie de la prétention suivante ‘ANNULER la requête en date du 30 septembre 2020 et par voie de conséquence l’ordonnance du 6 octobre 2020’, qui n’envisage la nullité de l’ordonnance que comme une conséquence de la nullité de la requête.

La requête n’ayant pas été annulée, il n’y a pas lieu d’annuler l’ordonnance rendue le 6 octobre 2020.

Sur la rétractation :

L’article 145 du Code de procédure civile dispose que, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits, dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Aux termes de l’article 493 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

Le juge des requêtes, saisi d’une demande fondée sur l’article 145 du Code procédure civile, n’a pas à rechercher si le requérant aurait manqué à un devoir de loyauté dans l’exposé des faits, puisqu’il doit statuer au vu des seules conditions de ce texte (Cass. 2ème civ., 20 mars 2014, n° 12-29.568).

En l’espèce, la requête présentée par la société SONEST exposait, notamment que :

– La branche phytosanitaire de la société SONEST reposait sur un fournisseur essentiel : la société FLUGEL,

– La branche phytosanitaire de la société SONEST était dirigée par Monsieur [G] [I] depuis le 1er septembre 1998,

– La société SONEST a employé Monsieur [D] [Y] par contrat à durée indéterminée du 5 juin 2019 en qualité de responsable commercial du pole hygiène (‘). Elle a mis fin à sa période d’essai le 10 octobre 2019,

– Le 27 novembre 2019, la société FLUGEL a mis brutalement fin à ses relations commerciales avec la société SONEST prenant prétexte d’un prétendu impayé,

– La résiliation du contrat de distribution exclusive par FLUGEL conduira de facto la société SONEST à cesser toute activité de vente de produits phytosanitaires et à fermer sa branche dédiée à cette activité,

– Monsieur [I] demandera d’ailleurs à être licencié pour motif économique (‘). Son contrat de travail sera rompu le 21 mars 2020,

– A partir de cette date, la société SONEST a découvert plusieurs faits lui portant directement grief :

. La constitution par Monsieur [I] et Monsieur [Y] de la société ELAF SOLUTIONS dont les statuts ont été signés le 11 février 2020,

. Le démarchage systématique des clients de la société SONEST par la société ELAF SOLUTIONS,

. La mise en ‘uvre d’une campagne de dénigrement contre la société SONEST,

. L’utilisation frauduleuse de la vidéo SONEST par la société ELAF SOLUTIONS.

Or, le courrier de résiliation de la société FLUGEL du 17 novembre 2019 évoque des impayés datant des mois de juin et juillet 2019 à hauteur de 29 059,29 € ainsi que de multiples relances et mises en demeure datant des 22 août, 30 août, 5 septembre, 27 septembre et 2 octobre 2019. La société FLUGEL a d’ailleurs assigné la société SONEST en paiement de cette somme. Les retards de paiement ont été reconnus par le conseil de la société SONEST dans un courrier du 17 décembre 2019 aux termes duquel ce dernier soutenait toutefois que ces retards avaient toujours été admis dans la pratique contractuelle des parties.

Ainsi, les retards de paiement de la société SONEST sont clairement établis et il n’est pas question d’un ‘prétendu impayé’. Des retards de paiement constituent une inexécution contractuelle et, aux termes de l’article 1217 du code civil, un motif de résiliation des relations contractuelles.

Par ailleurs, les intimés produisent une attestation établie par M. [A], conseiller ayant assisté M. [I] lors de son entretien de licenciement du 20 février 2020 et délégué CFTC, relatant ainsi l’entretien ‘Mr [I] ne comprend pas la décision de Mr [K] au sujet de l’arrêt de l’activité espaces verts et forêts, il prend note de l’annonce de son licenciement économique pour les raisons citées ci-dessus. Il évoque auprès de Mr [K] la possibilité dans un futur proche ou lointain de continuer son activité sous d’autres formes à définir. Mr [K] précise qu’il ne voyait aucuns inconvénients à ce que M. [I] reprenne une activité similaire. Mr [I] fait référence à certains fournisseurs dont FLUGEL. Mr [K] précise qu’il ne voit pas d’inconvénients à ce que Mr [I] commercialise ou travail avec les produits de ce fournisseur ou d’autres, il l’encourage même pour lui permettre d’envisager un emploi futur ou une création d’entreprise. Mr [K] rappelle que SONEST n’est plus intéressé par ces gammes de produits et que par ailleurs les différents avec FLUGEL avaient été entièrement réglés. Mr [I] demande aussi à Mr [K] si l’idée de traiter avec d’anciens clients lui posait un souci ‘ Mr [K] rappelle que cette activité sera stoppée et donc qu’ils ne seraient plus démarchés par SONEST’ (SIC).

Rien ne permet de remettre en cause l’attestation établie par M. [A], qui en sa qualité de conseiller salarié a prêté serment de remplir ses devoirs avec intégrité, étant au surplus relevé que l’attestation établie ne comporte pas que des éléments favorables à M. [I], mais permet aussi de démontrer que ce dernier n’avait pas indiqué à son employeur qu’il avait déjà créé la société ELAF SOLUTIONS. Il en résulte néanmoins que M. [I] a informé son ancien employeur de ses intentions futures et qu’il a bénéficié de l’aval de ce dernier.

Ces deux éléments contredisent la présentation des faits réalisée par la société SONEST dans sa requête du 30 septembre 2020 et remettent en cause le motif légitime de cette dernière pour solliciter les mesures ordonnées le 6 octobre 2020.

En outre, c’est à juste titre que le premier juge a rappelé que, s’il était établi par le constat d’huissier que la société ELAF SOLUTIONS avait détourné à son profit une vidéo de présentation du FLEXI-TRONC tournée en 2019 par la société SONEST, cette preuve était suffisante à fonder une action en justice de sorte que toute mesure d’investigation supplémentaire serait illégitime dans ce cadre.

Enfin, si les commentaires négatifs laissés sur la page Google de la société SONEST et les commentaires parallèles favorables laissés sur la page Google de la société ELAF SOLUTIONS, interrogent sur l’existence d’une campagne de dénigrement orchestrée à l’encontre de cette première, force est de constater que les mesures sollicitées via la requête du 30 septembre 2020 et octroyées par ordonnance du 6 octobre 2020, ne sont pas circonscrites dans leur objet, c’est-à-dire aux faits de dénigrement. En effet, l’objectif de la société SONEST, rappelé dans ses conclusions (page 31) est de démontrer une possible opération de récupération de l’activité phytosanitaire de SONEST par la société ELAF SOLUTIONS et les mesures sollicitées sont des mesures générales d’investigation prohibées.

Ces éléments permettent, sans qu’il y ait lieu d’examiner l’ensemble des arguments présentés par les parties, de considérer que la société SONEST ne justifie pas d’un motif légitime pour solliciter les mesures ordonnées le 6 octobre 2020 de sorte que c’est à bon droit que le juge a rétracté ladite ordonnance.

Dès lors, il y a lieu de confirmer l’ordonnance rendue le 31 mars 2021 par le juge des référés commerciaux.

Sur les demandes accessoires :

Eu égard à l’issue du litige, les dispositions de l’ordonnance du 31 mars 2021 statuant sur les dépens et les frais irrépétibles seront confirmées.

La société SONEST sera condamnée aux dépens de la procédure et à payer à chaque intimé la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Ses demandes présentées au titre des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme l’ordonnance rendue par le juge des référés commerciaux du tribunal judiciaire de Strasbourg le 31 Mars 2021 en ce qu’elle a :

Rejeté l’exception de nullité de la requête ;

Rétracté son ordonnance du 6 octobre 2020 en toutes ses dispositions ;

Constaté en conséquence la nullité des mesures d’exécution de cette ordonnance ;

Condamné la société SONEST aux dépens ;

Condamné la société SONEST à payer à monsieur [I] une indemnité de 2 000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens ;

Condamné la société SONEST à payer à monsieur [Y] une indemnité de 2 000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens ;

Condamné la société SONEST à payer à la société ELAF SOLUTIONS une indemnité de 2 000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [Y], Monsieur [I] et la SELARL MJ AIR, prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur de la société ELAF-SOLUTIONS de leur demande tendant à faire constater l’absence de prétentions de la SARL SONEST,

Déboute Monsieur [Y], Monsieur [I] et la SELARL MJ AIR, prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur de la société ELAF-SOLUTIONS de leur demande d’annulation de l’ordonnance du 6 octobre 2020, en conséquence de l’annulation de la requête du 30 septembre 2020,

Condamne la SARL SONEST aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne la SARL SONEST à payer à chacun des intimés la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SARL SONEST de ses demandes présentées au titre des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière : le Président :

 


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