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SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 janvier 2023
Cassation partielle
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 17 F-D
Pourvoi n° K 20-12.601
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 JANVIER 2023
La société Vorwerk France, société en commandite simple, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° K 20-12.601 contre l’arrêt rendu le 16 janvier 2020 par la cour d’appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l’opposant :
1°/ à Mme [I] [M], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Vorwerk France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [M], après débats en l’audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Nancy, 16 janvier 2020), Mme [M] a été engagée par la société Vorwerk France (la société) à compter du 1er janvier 2013 en qualité de responsable de secteur, au statut de voyageur-représentant-placier (VRP) non exclusif puis à celui de VRP exclusif en vertu d’un nouveau contrat de travail conclu le 1er janvier 2016.
2. Elle a pris acte de la rupture de ce contrat le 27 mai 2017.
3. Elle a saisi le 3 novembre 2017 la juridiction prud’homale afin de dire que sa prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’obtenir en conséquence diverses indemnités.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. L’employeur fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande de nullité de la requête introductive présentée par la salariée, alors « qu’aux termes de l’article R. 1452-2, alinéa 2, du code du travail, la requête comporte les mentions prescrites à peine de nullité à l’article 58 du code de procédure civile ; qu’aux termes de ce dernier texte, sauf justification d’un motif légitime tenant à l’urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu’elle intéresse l’ordre public, la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance précise les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige ; que la circonstance que la procédure propre à la prise d’acte de la rupture du contrat de travail dispense du préalable de conciliation ne constitue pas un motif légitime au sens de ce texte, dès lors que le préalable de conciliation ne se confond pas avec les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, qui s’imposent en toute matière ; qu’au contraire, une telle dispense, étant rappelé que l’auteur de la prise d’acte est également dispensé des obligations résultant de l’article 1226 du code civil imposant la mise en demeure préalable avant la résolution unilatérale d’un contrat, rend les diligences visées par l’article 58 du code de procédure d’autant plus nécessaires ; qu’une carence à cet égard n’impose nullement la preuve d’un grief ; que, pour dire que la requête de Mme [M], qui ne faisait pas état des diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, n’était pas entachée de nullité, la cour d’appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que la procédure accélérée prévue par le code du travail en matière de prise d’acte s’analysait en un motif légitime tenant à l’urgence, et que la preuve d’un grief n’était pas faite ; qu’en statuant ainsi, elle a violé les articles 58 et 114 du code de procédure civile, R. 1252 et L. 1451-1 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable. »
Réponse de la Cour
5. Selon l’article R. 1452-2 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017, l’acte de saisine de la juridiction prud’homale comporte les mentions prescrites à peine de nullité par l’article 58 du code de procédure civile.
6. Aux termes de ce texte, dans sa rédaction applicable au litige issue du décret n° 2015-282 du 11 mars 2015, la requête ou la déclaration (
) contient à peine de nullité :
1° Pour les personnes physiques : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ;
Pour les personnes morales : l’indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l’organe qui les représente légalement ;
2° L’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée, ou, s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
3° L’objet de la demande.
7. Le troisième alinéa de ce texte ajoute que sauf justification d’un motif légitime tenant à l’urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu’elle intéresse l’ordre public, la requête ou la déclaration précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.
8. Il en résulte que l’obligation de préciser dans la requête ou la déclaration les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige n’est assortie d’aucune sanction et ne constitue pas une formalité substantielle ou d’ordre public. S’il n’est pas justifié de son respect, le juge ne peut, selon l’article 127 du code de procédure civile, que proposer aux parties une mesure de conciliation ou de médiation.
9. Le moyen, qui postule que cette exigence est prescrite à peine de nullité, n’est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10. L’employeur fait grief à l’arrêt de dire que la rupture des relations contractuelles entre la salariée et la société présente la nature d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à payer à la salariée certaines sommes à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, d’indemnité de licenciement, d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et au titre de l’article 700 du code de procédure civile, de le condamner à rembourser à Pôle emploi les sommes correspondant aux indemnités de chômage versées à l’intéressée dans la limite de trois mois avec intérêts de droit à compter de la décision, et de le débouter de sa demande tendant à la condamnation de la salariée à lui payer une certaine somme à titre d’indemnité compensatrice de préavis, alors « que les juges sont tenus de respecter les termes du litige ; qu’en l’espèce, tant au soutien de sa lettre de prise d’acte du 15 mai 2017 que dans ses écritures, la salariée ne reprochait nullement à l’employeur de ne pas lui avoir donné d’objectifs pour les années 2016 et 2017, soit entre la signature de son nouveau contrat du 1er janvier 2016 et sa prise d’acte, mais de ne pas l’avoir informée de ses objectifs avant qu’elle ne signe ce contrat, prétendant en particulier qu’elle n’en aurait pris connaissance qu’ ”au début du mois de janvier 2016, par son intranet”, et faisait également valoir que ces objectifs n’auraient pas été réalisables ; qu’en retenant, pour dire la prise d’acte fondée, qu’il n’était pas démontré que les objectifs de la salariée lui auraient été fixés tant pour l’année 2016 que pour l’année 2017, en sorte qu’elle aurait été dans l’impossibilité de connaître le montant de sa rémunération, ce qui était contraire à la thèse soutenue par l’intéressée se plaignant d’objectifs non-réalisables et dont elle n’aurait pris connaissance qu’au début du mois de janvier 2016, la cour d’appel a méconnu les termes du litige et ainsi violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »