Tentative de conciliation ou de médiation : 14 février 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/00017

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Tentative de conciliation ou de médiation : 14 février 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/00017
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COUR D’APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence – Taxes

RG N° : N° RG 22/00017 – N° Portalis DBVY-V-B7G-HCR3

ORDONNANCE

Nous, Marie-France BAY RENAUD, première présidente de la Cour d’Appel de CHAMBERY, assistée de Sophie MESSA, greffière, avons rendu, le QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS, après débats tenus publiquement le 04 Octobre 2022, l’ordonnance suivante opposant :

– Mme [Z] [J]

demeurant [Adresse 2]

comparant

demanderesse au recours

à :

Maître [D] [N], avocat

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant

défendeur au recours

”’

[Z] [J] a confié à Maître [D] [N] la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure en divorce l’opposant à son époux Monsieur [W] [J].

[Z] [J] et Maître [D] [N] ont signé une convention d’honoraires au temps passé avec honoraire de résultat le 8 avril 2019.

Saisi par Monsieur [W] [J] suivant requête en date du 22 janvier 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d’Annecy a, par ordonnance rendue le 20 juin 2019, invité les époux à rencontrer un médiateur familial et fixé les mesures provisoires.

Le 29 octobre 2021, les époux, assistés de leurs conseil, ont signé une convention de divorce par consentement mutuel aux termes de laquelle Monsieur [W] [J] s’engage à verser une prestation compensatoire d’un montant de 291 225,42 euros.

Le 18 octobre 2021, Maître [D] [N] a émis une facture d’honoraires de résultat d’un montant de 14 561,27 euros HT ( 291 225,42 euros x5%). Le 21 octobre 2021, [Z] [J] a sollicité une nette réduction de cet honoraire en raison de l’importance de la prestation compensatoire et son impossibilité d’acheter un autre bien si elle devait régler la facture d’honoraires. Le 26 octobre 2021, Maître [D] [N] a modifié sa facture d’honoraires de résultant en la ramenant à la somme de 8 400 euros HT ( 291000euros -123 000 euros x5%).

Contestant la facturation de Maître [D] [N], [Z] [J] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau d’Annecy, qui, par décision du 22 juillet 2022, a dit bien fondé la contestation d’honoraires de résultat, a fixé à la somme de 3800 euros HT, soit 4560 euros l’honoraire de résultat dû par [Z] [J] à la SELARL CABINET [N] et condamné [Z] [J] à régler cette somme au titre de l’honoraire de résultat outre intérêts au taux légal.

Par lettre recommandée transmise le 27 août 2022, [Z] [J] a contesté devant la première présidente de la cour d’appel de Chambéry la décision du bâtonnier. Les parties ont été régulièrement convoquées par le greffe à l’audience du 4 octobre 2022 et l’affaire a été renvoyée et débattue à l’audience du 8 novembre 2022.

[Z] [J] soulève la caducité de la clause d’honoraires de résultat de 5%, à défaut sollicite de la voir dire abusive et à titre infiniment subsidiaire de voir constater l’inefficacité du travail de Maître [D] [N] sur l’obtention de la prestation compensatoire. A titre transactionnelle, elle propose de régler la somme de 2 280 euros en six mensualités de 380 euros. En tout état de cause, elle sollicite la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

[Z] [J] fait valoir que Maître [D] [N] a manqué à son obligation d’information alors qu’elle était dans un état de grande vulnérabilité, qu’elle s’est contentée de signer une convention toute faite, que la convention prévoyait un divorce contentieux qui a, en réalité, évolué vers un divorce par consentement mutuel sans que la convention d’honoraire ne soit revue, que malgré sa demande en date du 12 mai et du 31 mai 2021, Maître [D] [N] n’a pas voulu lui proposer une nouvelle convention d’honoraires, que l’absence de négociation l’a privé d’une chance de voir diminuer les honoraires. Elle ajoute que la décision de son ex mari de lui laisser 7 000 parts de leur SCI commune ne résulte pas de négociations entre avocats mais seulement de l’intervention de leur fille [T]. [Z] [J] expose que la convention d’honoraire est ambiguë sur le point de savoir sur quel type de bénéfice l’honoraire de résultat portait.

Maître [D] [N] sollicite de voir taxer ses honoraires à la somme de 8500 euros HT, soit 10 080 euros et de voir condamner [Z] [J] à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il expose que l’évaluation de la prestation compensatoire était d’environ 124 000 euros, que malgré cela, [Z] [J] espérait une somme de 400 000 à 500 000 euros, qu’à la suite de l’ordonnance de non conciliation, une tentative amiable a débuté entre les parties, Madame sollicitant une somme de 360 000 euros au titre de la prestation compensatoire, qu’à l’issue des négociations, Monsieur [J] a accepté de verser à titre de prestation compensatoire la contre valeur de 7 000 pars sociales détenues dans la SCI familiale. Il précise que les honoraires au temps passé se sont élevés à 3454,81 euros, soit largement moins qu’envisagées initialement et qu’ils ont été intégralement réglés.

Il fait valoir que [Z] [J] a accepté les termes de la convention d’honoraires en toute connaissance de cause, qu’elle n’était pas dans l’incapacité de contracter. Il ajoute que le juge taxateur ne peut porter atteinte à la lettre du contrat, que l’honoraire de résultat est sans lien avec le travail effectué, que la clause n’est pas ambiguë, que l’accord a été trouvé entre avocats, que le fait que le montant de la prestation compensatoire ait été plus important du fait d’un bon prix de vente du bien immobilier est indifférent à la fixation de l’honoraire.

MOTIVATION :

– Sur la recevabilité du recours :

Il résulte des dispositions de l’article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 rappelé dans le courrier de notification du bâtonnier que la décision ordinale est susceptible de recours devant le premier Président de la cour d’appel dans le délai d’un mois, lequel court à compter de la notification de la décision déférée.

L’examen de la procédure révèle que la décision déférée a été notifiée le 30 juillet 2022 et que le recours a été formé devant le premier président de la cour d’appel de Chambéry le 27 août 2022.

Dans ces conditions, le recours formé doit être déclaré recevable.

– Sur la contestation de la décision déférée :

La procédure de taxation des honoraires d’avocats est prévue par les dispositions du décret n° 91 1197 du 27 novembre 1991.

Aux termes de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, les honoraires de postulation, de consultation, d’assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client. Sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés. Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

Les parties ont signé une convention d’honoraires le 8 avril 2019 aux termes de laquelle l’avocat est chargé d’assurer la défense des intérêts de son client dans le cadre d’une procédure contentieuse devant le juge aux affaires familiales d’Annecy ; les honoraires de l’avocat sont constitués d’une part d’honoraires au temps passé, soit 220 euros HT pour l’intervention de l’avocat et 50 euros HT pour l’intervention du secrétariat, suivant un budget prévisionnel de 4950 euros HT et d’autre part d’honoraires de résultat.

Aux termes de la convention d’honoraire, l’honoraire de résultat est perçu par l’avocat en fonction des gains obtenus ou de l’économie réalisée ; la convention précise que le ou les gains obtenus sont constitués par les sommes allouées au client au titre des créances, d’éventuels dommages et intérêts et/ou de la prestation compensatoire (à définir) ; le taux est fixé à 5% des sommes obtenues ;

Il convient de constater que la convention ne prévoit pas le passage d’une phase contentieux à un divorce par consentement mutuel entre avocats ;

Sur la base de l’honoraire au temps, Maître [D] [N] a émis les factures suivantes :

– le 4 février 2019 d’un montant de 30 euros de frais et 648,67 euros HT d’honoraires, soit 814,40 euros TTC

– le 6 juin 2019 d’un montant de 844,16 euros HT d’honoraires, outre 290 euros HT de frais, soit 1134,16 euros HT ( 1360 euros TTC) et 13 euros de débours,

– le 6 septembre 2019 d’un montant de 83,34 euros et 235 euros de frais, soit 382,01 euros TTC ;

– le 4 novembre 2020 d’un montant de 600 euros HT, soit 720 euros TTC,

– le 18 octobre 2021 d’un montant de 137,01 euros HT, soit 134,14 euros ;

Toutes ces factures, d’un montant global de 3454,81 euros, ont été réglées par [Z] [J] ;

Sur la base de l’honoraire de résultat, Maître [D] [N] a finalement émis le 26 octobre 2021 une facture de 8 400 euros HT ( 291000euros -123 000 euros x5%) ;

[Z] [J] conteste l’application de la convention d’honoraires signée le 8 avril 2019 en ce qu’elle a été conclue dans le cadre d’un divorce contentieux alors qu’une convention de divorce par consentement mutuel par acte d’avocat a pu être signée ;

En application des articles 1108 et 1109 du code civil devenus respectivement 1128 et 1130 du code civil, le consentement de la partie qui s’oblige est l’une des conditions essentielles de la validité de la convention et il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol ;

[Z] [J] communique les messages échangés avec Maître [D] [N] aux termes desquels le 12 mai 2021 elle demandait la transmission d’une nouvelle convention d’honoraires dès lors qu’était négocié un divorce par consentement mutuel, le 31 mai 2021 elle relançait son avocat pour obtenir une nouvelle convention et précisait que la maison devait être vendue et que le compromis devait être signé le 15 juin ; le 6 septembre 2021 Maître [D] [N] répondait que bien qu’une convention de divorce allait être signée, la procédure était toujours pendante devant le juge aux affaires familiales, que la convention devrait être homologuée par le juge conformément à l’article 268 du code civil et non reçue par le notaire et que compte tenu de l’absence de changement de procédure, il n’y avait aucune nécessité de signer une nouvelle convention d’honoraires d’autant plus que celle-ci était stipulée au taux horaire et que son coût serait sans doute en de-ça de l’évaluation ;

Or, force est de constater que la convention signée par les époux le 29 octobre 2021 relève des dispositions des articles 229, 229-1 et 229-3 du code civil et a été déposée au rang des minutes d’un notaire ; ainsi, contrairement à l’information communiquée par Maître [D] [N], l’accord des parties n’a pas été communiqué au juge aux fins d’homologation ;

La convention d’honoraires signée par [Z] [J] et Maître [D] [N] stipulait précisément qu’elle régissait les honoraires dans le cadre d’une procédure de divorce contentieuse ; lorsque [Z] [J] a sollicité la signature d’une nouvelle convention d’honoraires dès lors que le divorce ne s’inscrivait plus dans un cadre contentieux, Maître [D] [N] a refusé de négocier et a répondu qu’il n’était pas nécessaire de modifier les termes de leur relation contractuelle puisque les honoraires étaient stipulés au taux horaire ; Cette information était de nature à tromper [Z] [J] sur le mode de calcul des honoraires qui lui seraient réclamés après la signature de la convention qui était en train d’être négociée ; ainsi, il ne peut être considéré qu’elle a valablement consenti à l’application de la convention conclue le 8 avril 2019 pour la fixation des honoraires de maître [N] dans le cadre du divorce par consentement mutuel ;

En conséquence, il convient de constater que la convention d’honoraires conclue le 8 avril 2019 ne s’applique pas à la fixation des honoraires de Maître [D] [N] dans le cadre de la convention de divorce par acte d’avocat ;

En l’absence de convention, les honoraires revenant à l’avocat doivent être fixés en application des critères de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991, et de l’article 10 du décret du 12 juillet 2005, aux termes desquels les honoraires sont fixés à défaut de convention entre l’avocat et son client, “selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de la notoriété et des diligences de celui-ci”.

Considérant que l’affaire ne présentait pas de difficultés particulières, considérant que Maître [N] est un avocat reconnu dans la matière traitée ayant de l’ancienneté dans le métier, il convient de fixer le taux horaire à 220 euros HT ;

Maître [D] [N] a produit aux débats le relevé de ses diligences (pièce 27), ainsi sur le temps passé sur chacune en différenciant le temps de secrétariat, le temps d’avocat et a établi un relevé des frais ;

Les diligences visées au relevé sont corroborées par les pièces communiquées attestant de la négociation intervenue entre les conseils des parties pour aboutir à un accord ;

Au vu de ces éléments, il convient de fixer les honoraires de Maître [D] [N] à la somme globale de 3294,52 euros HT outre les frais de 568 euros HT, soit 4635,02 euros TTC; [Z] [J] devra ainsi verser à Maître [D] [N] la somme complémentaire de 1180,21 euros ;

Il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’honoraire de se prononcer sur une demande tendant à la réparation d’une faute professionnelle éventuelle de l’avocat par voie d’allocation de dommages et intérêts ou de réduction du montant de ses honoraires.

L’équité n’appelle pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, en matière de contestation d’honoraires, au siège de la cour d’appel de Chambéry,

DÉCLARONS le recours recevable,

FIXONS les honoraires de Maître [D] [N] à la somme de 3862,52 euros HT, soit 4635,02 euro TTC,

DISONS que [Z] [J] devra verser à Maître [D] [N] la somme de 1180,21 euros au titre du solde des montants dus ; et l’y condamnons en tant que de besoins,

LAISSONS à chacune des parties les dépens engagés par eux, à l’exception des dépens d’exécution de la présente décision qui seront à la charge de [Z] [J],

DISONS qu’en application de l’article 177 du décret du 27 novembre 1991, la présente décision sera notifiée aux parties par le greffe de la cour par lettre recommandée avec accusé de réception.

Ainsi prononcé le quatorze Février deux mille vingt trois par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY RENAUD, première présidente, et Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERE LA PREMIERE PRESIDENTE

– Copie de la présente ordonnance notifiée aux parties en LRAR,

– copie pour information au BOA d'[Localité 3],

– retour des pièces aux parties à Me [N] avocat,

Fait le 14/02/2023

La greffière

 


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