Tentative de conciliation ou de médiation : 16 mars 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/00910

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Tentative de conciliation ou de médiation : 16 mars 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/00910
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MINUTE N° 146/2023

Copie exécutoire à

– Me Marion BORGHI

– Me Joseph WETZEL

Le 16 mars 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 16 mars 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00910 – N° Portalis DBVW-V-B7F-HQDN

Décision déférée à la cour : 08 Janvier 2021 par le tribunal judiciaire de SAVERNE

APPELANTE :

Madame [U] [S]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Marion BORGHI, avocat à la cour.

INTIMÉE :

Madame [P] [O]

demeurant chez Mme [I] [C]

[Adresse 2]

représentée par Me Joseph WETZEL, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Octobre 2022, en audience publique, devant la cour composée de

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction.

ARRET contradictoire

– prononcé publiquement après prorogation du 19 janvier 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCÉDURE

Mme [U] [S] exerce la profession de masseur kinésithérapeute en secteur libéral, au sein d’un cabinet situé à [Localité 3] (67).

Le 4 juillet 2011, elle a signé avec Mme [P] [O] un contrat intitulé « contrat d’assistant collaborateur » aux termes duquel cette dernière s’est notamment engagée à effectuer les soins sur les patients présentés par Mme [S] ou sur ceux ayant pris directement rendez-vous avec elle dans les locaux et avec le matériel mis à disposition par cette dernière.

Le 16 janvier 2017, Mme [O] a cessé toute relation contractuelle avec Mme [S] qui, à la suite de cela, l’a fait assigner le 14 février 2017 devant le tribunal de grande instance de Saverne, aux fins d’obtenir sa condamnation au paiement de différentes sommes et indemnités.

Par jugement du 8 janvier 2021, le tribunal, devenu le tribunal judiciaire de Saverne, a déclaré la demande de Mme [S] irrecevable et l’a condamnée aux dépens ainsi qu’à payer à Mme [O] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ayant relevé que l’article 789 6° du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 12 décembre 2019, qui donnait compétence au juge de la mise en état pour statuer sur les fins de non-recevoir, n’était applicable qu’aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, il a considéré que la demanderesse n’avait pas respecté la clause de conciliation préalable obligatoire prévue au contrat, avant la saisine de la juridiction.

Or, une telle clause constituait une fin de non-recevoir s’imposant au juge, dès lors qu’elle était invoquée par l’une des parties, ce qui était le cas en l’espèce.

Celle-ci, prévue à l’article 4 du contrat ayant lié les parties, stipulait : « dans le cas où des difficultés surgiraient dans l’exécution ou l’interprétation de leur contrat, les parties avant toute action en justice, en vue d’une conciliation amiable, demanderont l’arbitrage d’un syndicat professionnel local ou national ».

Contrairement à ce que soutenait Mme [S], cette clause ne pouvait être considérée comme une simple déclaration d’intention et les conditions de son application étaient suffisamment explicites pour garantir son effectivité en cas de litige entre les parties.

Or, Mme [S] ne soutenait pas qu’elle avait saisi un syndicat professionnel avant la délivrance de l’assignation et, si une tentative de conciliation avait été organisée le 16 mars 2016 devant le conseil de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, elle l’avait été dans le cadre d’un litige de nature disciplinaire, différente du litige civil dont était saisi le tribunal et, de plus, le conseil départemental de l’ordre des masseurs kinésithérapeutes ne pouvait être assimilé à un syndicat professionnel au sens de l’article 4. Cette tentative de conciliation ne pouvait donc dispenser la demanderesse du respect de l’obligation de conciliation préalable prévue contractuellement, alors que le litige portait sur l’application du contrat et qu’elle reprochait à Mme [O] de ne pas respecter ses obligations contractuelles.

Mme [S] a interjeté appel de ce jugement par déclaration datée du 5 février 2021.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 03 mai 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 24 février 2022, Mme [S] sollicite que la cour reçoive son appel, infirme la décision et, notamment, statuant à nouveau déboute Mme [O] de toutes ses prétentions et fins de non-recevoir et qu’elle dise recevables et bien fondées ses demandes et, en conséquence, condamne l’intimée :

– à lui verser la somme de 15 927,47 euros au titre de l’indemnité réparant la violation de la clause instaurant un délai de préavis contractuel,

– à lui verser la somme de 127 419,80 euros au titre de l’indemnité réparant la violation de l’obligation de non-concurrence,

– à lui verser la somme de 9 375 euros au titre des honoraires dus et restant à régulariser sur l’exercice 2016,

– en tous les dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les frais et dépens.

En premier lieu, Mme [S] soutient qu’aucun recours à un arbitrage n’a été prévu, que la clause contenue à l’article 4 du contrat ayant lié les parties n’est pas une clause compromissoire, qu’elle n’a pas institué une procédure de conciliation obligatoire préalable, mais qu’il s’agit du simple aménagement contractuel de la possibilité d’y recourir, d’une simple déclaration d’intention désignant à l’avance le conciliateur.

Elle affirme que, Mme [O] ayant, dans le cadre de la procédure disciplinaire, sollicité qu’il soit sursis à statuer jusqu’à l’intervention de la décision du tribunal de grande instance de Saverne saisi au fond de la validité des clauses du contrat, elle a ainsi renoncé à se prévaloir d’une quelconque irrecevabilité des demandes soumises au tribunal, ce dont il résulte que celles-ci doivent être déclarées recevables.

En second lieu, les parties ont tenté de se concilier devant le conseil départemental de l’ordre des masseurs kinésithérapeutes du Bas-Rhin, la tentative de conciliation ayant porté sur les mêmes points que ceux débattus dans la présente procédure et non pas uniquement sur l’aspect disciplinaire. Son échec emporte, à titre principal, satisfaction de la clause litigieuse, et à titre subsidiaire, renonciation à cette clause, qui est devenue sans objet et sans intérêt.

En outre, la substitution du conseil de l’ordre au syndicat professionnel prévu par l’article 4 du contrat a permis de pallier les lacunes de rédaction de cette clause concernant la détermination du conciliateur. Aucune des parties n’étant syndiquée, l’exécution de la clause était en effet impossible. De plus, le conseil de l’ordre peut être désigné pour une tentative de conciliation amiable en application de l’article R.4321-99 du code de la santé publique.

Par ailleurs, l’appelante fait valoir que :

– le litige né de la rupture du contrat n’est pas expressément soumis à la tentative de conciliation par l’article 4 dudit contrat, qui vise seulement « l’exécution et l’interprétation » ; or, Mme [O] avait déjà rompu le contrat lorsque la tentative de conciliation a eu lieu devant le conseil de l’ordre ;

– si la clause d’un contrat prévoyant une procédure de conciliation préalable à la saisine du juge d’une juridiction constitue une fin de non-recevoir, celle prévoyant une tentative de règlement amiable non assortie de conditions particulières de mise en ‘uvre, ce qui était le cas en l’espèce, ne constitue pas une telle procédure de conciliation obligatoire préalable.

Par ailleurs, Mme [S] s’oppose à toute requalification du contrat, soutenant que celle-ci n’est pas justifiée. Ce contrat est un contrat d’assistanat, par lequel le collaborateur assistant renonce à se constituer une clientèle personnelle. Les interventions de Mme [O] sur sa clientèle ne constituaient pas des dépannages occasionnels mais relevaient de l’exécution de ce contrat et justifiaient l’instauration d’une clause de non-concurrence et d’un préavis de rupture.

Or, Mme [O] a rompu le contrat de manière abusive, n’ayant pas respecté le délai de préavis fixé à l’article 2 .10 du contrat et ayant violé l’obligation de non-concurrence prévue à l’article 3.

Sur la violation du délai de préavis, Mme [S] soutient que le contrat signé avec Mme [O] a bien prévu un préavis de six mois, ce qu’admet désormais l’intimée. Or, cette dernière ne lui a jamais accordé le moindre délai, ne s’étant plus présentée sur le lieu de travail dès l’envoi de la lettre recommandée du 14 janvier 2016, et ayant constitué une société civile de moyens dès le 1er février 2016 avec Mme [H] et Mme [C] à La Claquette.

Sur la faute professionnelle invoquée par Mme [O] pour être dispensée de préavis, Mme [S] fait valoir que le mauvais état du matériel et l’inadaptation des locaux à l’intimité des soins, qui ne sont pas formellement démontrés par le constat d’huissier produit, ne caractérisent aucune faute professionnelle de sa part, de même que la longueur du délai de constitution d’une société civile de moyens en cours de discussion depuis quatre mois. Surtout, les chambres disciplinaires successives n’ont retenu aucune faute professionnelle à son encontre et la décision disciplinaire a acquis l’autorité de la chose jugée sur ce point.

En outre, elle employait bien une secrétaire qui était en arrêt pour maladie depuis deux mois au moins lorsque Mme [O] et Mme [H] ont décidé de rompre leur contrat. Mme [O] connaissait les conditions d’exercice lorsqu’elle a signé le contrat et des attestations de témoignage démontrent sa mauvaise foi.

Sur le calcul de l’indemnité de préavis, elle indique se référer à l’article 2.10 du contrat.

Sur la violation de la clause de non-concurrence, Mme [S] fait valoir que celle-ci est dépourvue de toute ambiguïté, prévoyant l’interdiction, pour Mme [O], d’exercer sa profession pendant deux années à la fin du contrat, sur un rayon de 25 km. Or, elle s’est installée dans un bourg relevant de la ville de [Localité 3], à moins de 2 km de son cabinet, qui se trouve en zone montagneuse et non pas au sein d’une ville majeure, sa zone d’influence étant particulièrement large. Cette clause est proportionnée, tant au regard du périmètre d’interdiction que de sa durée et, en tout état de cause, elle a été librement acceptée par les parties.

La réinstallation de Mme [O], au sein de la même commune, est de nature à créer un risque de confusion pour les patients et, de plus, Mme [S] indique produire des attestations caractérisant un détournement de clientèle de la part de l’intimée, qui a été sanctionné par la chambre nationale disciplinaire.

Sur le montant de l’indemnité, Mme [S] se réfère à l’article 3 du contrat.

Enfin, l’appelante soutient qu’une somme de 9 375 euros reste due par Mme [O] sur les sommes qu’elle devait lui reverser, compte tenu notamment d’une régularisation opérée début 2016, corrélativement au départ de l’intimée.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 5 août 2021, Mme [O] sollicite la confirmation du jugement déféré.

Subsidiairement, elle demande notamment que la cour déboute l’appelante de ses fins et conclusions et, très subsidiairement, qu’elle modère les montants mis en compte par cette dernière au titre des clauses pénales.

Elle sollicite la condamnation de Mme [S] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ainsi qu’aux dépens de cette procédure d’appel.

Rappelant la clause prévue à l’article 4 du contrat conclu entre les parties, Mme [O] soutient que c’est à bon droit que le tribunal a jugé que Mme [S] n’avait pas respecté la clause de conciliation préalable obligatoire prévue au contrat et qu’il convient en conséquence d’accueillir sa fin de non-recevoir.

Elle fait valoir que :

– l’article 4 prévoit le recours à l’arbitrage d’un syndicat professionnel local ou national dans la perspective d’une conciliation amiable, avant toute action en justice, et Mme [S] a engagé la procédure sans solliciter cet arbitrage,

– la chambre disciplinaire du conseil de l’ordre d’Alsace n’est pas un syndicat professionnel local national et ne peut être saisie en vue d’une conciliation amiable, en cas de difficulté dans l’exécution ou l’interprétation du contrat, la conciliation qu’elle a opérée n’ayant porté que sur les seuls aspects disciplinaires et non pas sur les aspects civils du litige,

– dans ces conditions, il ne peut être considéré que les parties auraient renoncé à l’arbitrage,

– seule la constatation d’une nullité ou de l’inapplicabilité manifeste de la clause d’arbitrage permettrait au juge d’écarter son application, ce qui n’est pas le cas.

Subsidiairement, Mme [O] affirme que la dénomination du contrat pose des difficultés d’interprétation, les termes d’assistant et de collaborateur étant contradictoires, le premier s’engageant à ne pas développer de patientèle personnelle, contrairement au second, et le contrat litigieux n’excluant pas l’existence ou la constitution d’une clientèle personnelle. De plus, Mme [S] ne démontre pas qu’elle a mis à sa disposition sa patientèle personnelle, chacune ayant pris en charge sa propre patientèle et elle-même n’ayant pris en charge celle de Mme [S] que lors des remplacements qu’elle assurait en son absence.

Elle affirme que Mme [S] vivait essentiellement des rétrocessions perçues de ses quatre ou cinq « assistants collaborateurs », qui développaient leur propre clientèle, et que le contrat conclu entre elles ne constituait qu’un contrat de simple mise à disposition des locaux ne justifiant aucune clause de non-concurrence.

Elle indique avoir, ainsi que Mme [H], demandé à Mme [S] de réaliser des travaux, dans la mesure où les installations mises à leur disposition étaient vétustes et dangereuses, et de modifier les conditions de travail, le secret professionnel n’étant pas respecté, de même que les normes.

C’est dans ces conditions qu’après l’échec de leurs discussions, chacune d’elles a rompu le contrat, après mise en demeure.

Mme [O] soutient que le contrat ayant lié les parties ne comporte pas de préavis, et que le chiffre de six mois a été ajouté par Mme [S] sur son exemplaire. En tout état de cause, aucun préavis ne peut s’appliquer, dès lors que divers manquements peuvent lui être opposés.

L’intimée soulève la nullité de la clause de non-concurrence, au motif que ses effets excèdent la tentative de prévenir une éventuelle concurrence déloyale, alors qu’elle doit répondre à un intérêt légitime et rester proportionnée au but recherché, ce qui n’est pas le cas.

Enfin, à titre subsidiaire, sur les montants réclamés, Mme [O] soutient que les indemnités prévues au contrat, au titre du non-respect du préavis et de la clause de non-concurrence, constituent des clauses pénales soumises aux dispositions de l’article 1152 du code civil, en application desquelles les montants réclamés doivent être modérés, étant manifestement excessifs. Notamment, le montant de 127 419,80 euros réclamé au titre de la violation de l’obligation de non-concurrence correspond à un an de son chiffre d’affaires en 2015.

Par ailleurs, la demande au titre des honoraires n’est pas justifiée, aucun décompte n’ayant notamment été versé au débat.

*

Pour l’exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

MOTIFS

I ‘ Sur la fin de non-recevoir tirée du non respect de la clause de conciliation préalable prévue au contrat

En application de l’article 1442 du code de procédure civile, dans sa version applicable jusqu’au 1er mai 2011, la clause compromissoire est définie comme la convention par laquelle les parties à un contrat s’engagent à soumettre à l’arbitrage les litiges qui pourraient éventuellement naître relativement à ce contrat.

Elle instaure une procédure d’arbitrage, les conclusions de l’arbitre s’imposant aux parties.

Il n’en va pas de même de la médiation ou de la conciliation conventionnelle, par laquelle les parties tentent de parvenir à un accord amiable en dehors de toute procédure judiciaire, avec l’aide d’un tiers choisi par elles. Ce médiateur ou conciliateur intervient alors dans le but de rapprocher les parties, sans pouvoir leur imposer une solution, contrairement à l’arbitrage.

Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées ; dès lors qu’elle est licite, la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en ‘uvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent. Il en est de même de la clause instaurant une procédure d’arbitrage.

Dans la situation présente, l’article 4 du contrat signé entre les parties le 16 décembre 2009, intitulé « CONCILIATION » stipule :

« Dans le cas où des difficultés surgiraient dans l’exécution ou l’interprétation de leur contrat, les parties avant toute action en justice, en vue d’une conciliation amiable, demanderont l’arbitrage d’un syndicat professionnel local ou national. »

En premier lieu, il ne peut être tiré de conséquence, dans le cadre de la présente instance, des écritures présentées par Mme [O] dans le cadre de la procédure disciplinaire devant l’ordre national des masseurs-kinésithérapeutes, les deux instances étant totalement distinctes et le principe de l’estoppel ne s’appliquant que dans le cadre d’une même procédure.

En second lieu, s’agissant du caractère obligatoire de la dite clause, il résulte de ses termes que celle-ci a bien précisé l’objet des différends entre les parties auxquels elle devait s’appliquer, le moment de sa mise en oeuvre, à savoir avant toute action en justice, ainsi que l’organe devant être saisi à cette fin. Ces précisions, ainsi que la conjugaison du verbe employé au futur de l’indicatif suffisent à démontrer que cette clause stipule bien une mesure obligatoire préalable à toute action en justice, et non pas une simple déclaration d’intention, même si elle n’a pas prévu toutes les mentions invoquées par l’appelante, concernant notamment l’absence de délai, de sanction et de mode de désignation applicable en cas de désaccord des parties sur le syndicat chargé de les concilier.

Si elle stipule que les parties demanderont « l’arbitrage » d’un syndicat professionnel, cette clause, intitulée « CONCILIATION » évoque une démarche en vue d’une « conciliation amiable » préalable à toute action en justice. Mme [S] exclut qu’elle puisse constituer une clause de conciliation préalable obligatoire, et a fortiori une clause d’arbitrage, Mme [O] utilisant les termes de clause compromissoire et de clause de conciliation préalable obligatoire, tour à tour, pour la qualifier. Cette clause évoquant bien une conciliation amiable préalable à toute action en justice et ne faisant nullement état d’une décision d’arbitre s’imposant aux parties, c’est la première qualification qui doit être retenue. En tout état de cause, ainsi qu’il a été précisé plus haut, les conséquences sont les mêmes, s’agissant de la fin de non-recevoir s’appliquant au non-respect de cette clause, quelle que soit la qualification retenue.

Enfin, si une réunion de conciliation a eu lieu entre les parties, avant la saisine du premier juge par Mme [S], elle a été organisée par la Commission de conciliation du Conseil départemental de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes du Bas-Rhin le 16 mars 2016, suite à la plainte de Mme [S] à l’encontre de Mme [O] pour rupture abusive du contrat, non respect du préavis et de la clause de non-concurrence et pour détournement de patientèle, et dans le cadre du traitement de cette plainte par le Conseil départemental de l’Ordre.

Cette réunion ayant conduit à une non-conciliation, « en raison du désaccord persistant au sujet de la clause de non-concurrence, du détournement de patientèle et du préavis prévu par le contrat », selon les termes du procès-verbal de cette réunion, la procédure disciplinaire a été engagée et a conduit à une décision de la chambre disciplinaire de première instance du 3 février 2017, réformée par la chambre disciplinaire nationale, en ce que la sanction de l’avertissement prononcée en première instance a été substituée par une interdiction temporaire d’exercer pendant 3 mois assortie du sursis en sa totalité.

Il doit être souligné que cette tentative de conciliation, organisée en préalable à la procédure disciplinaire, ne peut à ce titre constituer celle prévue au contrat liant les parties, n’ayant visiblement pas été mise en ‘uvre à l’initiative des parties, concernant un litige de nature différente et n’ayant donc pas le même objet et la même cause que celle prévue par ce contrat, et ce alors que, de plus, l’organisme qui y a procédé n’est pas celui désigné par l’article 4 du contrat, quand bien même différents chefs du présent litige ont pu y être, au moins partiellement, évoqués. Il ne peut donc être considéré que la participation des parties à cette tentative de conciliation et l’échec de celle-ci aient emporté renonciation, pour elles, à se prévaloir de la dite clause contractuelle.

De plus, Mme [S] ne justifie nullement de l’impossibilité de solliciter l’arbitrage d’un syndicat professionnel au motif qu’aucune des parties n’aurait été syndiquée, situation qui n’est au demeurant nullement confirmée, s’agissant de Mme [O].

Enfin, la clause litigieuse du contrat exigeant le recours à une conciliation amiable dans l’hypothèse où des difficultés surgiraient dans l’exécution ou l’interprétation du contrat des parties, et si le contrat signé entre elles avait été rompu avant l’introduction de l’instance devant le premier juge, il n’en demeure pas moins que le présent litige entre les parties porte bien sur l’exécution des clauses du contrat relatives à sa rupture et à ses conséquences, à savoir celles relatives au préavis et à l’obligation de non-concurrence, mais aussi sur l’interprétation de ce contrat lui-même, et en premier lieu celle de sa qualification. Il porte également sur l’interprétation des stipulations contractuelles relatives aux indemnités prévues au titre de l’obligation de non-concurrence et du non respect du préavis, que Mme [O] qualifie de clauses pénales.

Dès lors, l’objet des difficultés survenues entre les parties justifiait bien la mise en ‘uvre de la tentative de conciliation préalable à toute action en justice prévue au contrat.

Il résulte de tous ces éléments qu’aucun des motifs invoqués par Mme [S], de nature à justifier l’absence de mise en ‘uvre de la clause de conciliation préalable obligatoire prévue au contrat signé entre les parties n’étant fondé, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a accueilli la fin de non recevoir soulevée par Mme [O].

II – Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.

De plus, l’appel de Mme [S] étant rejeté, celle-ci assumera les dépens d’appel. Dans ces circonstances, sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu’elle a engagés en appel, sera rejetée. En revanche, l’équité commande de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros qu’elle devra régler à Mme [O] au même titre et sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties par le tribunal judiciaire de Saverne le 8 janvier 2021,

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [U] [S] aux dépens d’appel,

CONDAMNE Mme [U] [S] à payer à Mme [P] [O] la somme de 1 500,00 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens que cette dernière a engagés en appel,

REJETTE la demande de Mme [U] [S] présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu’elle a engagés en appel.

Le greffier, Le président,

 


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