Tentative de conciliation ou de médiation : 16 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16500

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Tentative de conciliation ou de médiation : 16 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16500
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2023

N° 2023/ 168

Rôle N° RG 19/16500 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFCFC

[H] [D] veuve [X]

C/

Société [N] [T] [P]

S.C.P. [F] [C]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Philippe MONNET

Me Joëlle MICHEL

Me Paul GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 05 Septembre 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/05846.

APPELANTE

Madame [H] [D] veuve [X]

née le 05 Avril 1955 à [Localité 11] (75), demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Philippe MONNET de la SELARL PHILIPPE MONNET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEES

Société [N] [T] [P], demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Joëlle MICHEL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substitué par Me Laure MICHEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

S.C.P. [F] [C] Titulaire d’un Office Notarial

demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ – MONTERO – DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Jean-luc FORNO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 04 Avril 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Danielle DEMONT, Conseillère

Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2023,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par acte authentique du 10 octobre 2014, dressé par la SCP [F]-[C], notaires, la SCI [N] [T] [P] a vendu à Mme [H] [D] veuve [X] les parcelles n° K- [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], sur laquelle avait été édifiée par le vendeur une maison avec et piscine et [Cadastre 5], sises à [Localité 10] (Var).

L’aquéreur expose qu’alors que la taxe foncière pour l’année 2014 s’élevait à 952 € sur laquelle elle a réglé le prorata temporis, comme cela avait été indiqué dans l’annonce immobilière et dans l’acte, il lui a été réclamé à ce titre la somme de 2604 € pour l’année 2015.

Mme [D] précise n’avoir rien obtenu, à la suite d’une mise en demeure recommandée adressée au notaire et qu’une tentative de conciliation réalisée par un notaire médiateur a échoué le 18 janvier 2017.

Vu l’assignation du 31 juillet 2017 , par laquelle Mme [H] [D] veuve [X] a fait citer la SCI [N] [T] [P] et la SCP [F] et [C], devant le tribunal de grande instance de Draguignan, aux fins d’obtenir leur condamnation in solidum à lui payer la somme de 40’319 € à titre de dommages et intérêts.

Vu le jugement rendu le 5 septembre 2019, par cette juridiction ayant :

Constaté que les biens acquis sont situés au [Adresse 8] et non au 507,

Condamné la SCI [N] [T] [P] à payer à Mme [H] [D] veuve [X] la somme de 10.000,00 €, à titre de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle, pour manquement à son devoir d’information,

Rejeté la demande formée par Mme [X] à l’encontre de la SCP [F] et [C] sur le fondement de la responsabilité délictuelle,

Condamné Mme [H] [D] veuve [X] à payer à la SCI [N] [T] [P], la somme de 300,82 €, correspondant au prorata de la taxe foncière réellement due pour l’année 2014, outre intérêts au taux légal, à compter de la décision,

Rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la SCI [N] [T] [P] pour procédure abusive.

Condamné la la SCI [N] [T] [P] à payer à Mme [X], une somme de 1.000,00 €, au titre des frais irrépétibles.

Vu la déclaration d’appel du 24 octobre 2019, par Mme [H] [D] veuve [X].

Vu les conclusions transmises le 25 janvier 2021, par l’appelante.

Elle observe que l’acte mentionne que les parcelles vendues se trouvent au numéro 507 du chemin du Train des Pignes, auquel est applicable une taxe foncière d’environ 1000 €, alors qu’elles sont situées au numéro [Adresse 8] dont la taxe foncière s’élève à environ 2500 €.

L’appelante rappelle que le notaire devait, procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l’utilité et l’efficacité de son acte en faisant tirer un extrait de la matrice cadastrale et que sa responsabilité délictuelle est engagée de ce chef.

Elle reproche une faute contractuelle au vendeur, dès lors qu’il a donné des informations inexactes sur le montant de la taxe foncière correspondant aux parcelles concernées.

Mme [X] insiste sur l’importance de son préjudice, alors que ses revenus ne dépassent pas

1800 € par mois et qu’elle est âgée de 62 ans.

Elle fait valoir que la demande reconventionnelle de paiement au prorata de la taxe foncière sur son montant réel révèle la reconnaissance de l’erreur de montant mentionnée dans l’acte.

Vu les conclusions transmises le 16 février 2023, par la SCI [N] [T] [P].

Elle affirme que le bien vendu s’est toujours trouvé au numéro [Adresse 9] comme l’indiquent le relevé de propriété et tous les actes de la procédure, précisant que la parcelle [Cadastre 4] sur laquelle est situé le bâti, figure, à la fois, au [Adresse 8] et au [Adresse 9] et que ce fait est à l’origine de la confusion s’agissant de la taxe foncière.

La SCI [N] [T] [P] conteste l’existence d’un vice du consentement, alors que le montant de la taxe foncière n’était pas mentionné dans le compromis et déclare n’avoir jamais fourni un avis de taxe foncière erroné à l’agence immobilière, rappelant que celui-ci n’apparaît pas sur le texte imprimé de l’annonce, mais de manière manuscrite.

Elle fait valoir que l’acquéreur ne lui a jamais demandé de justificatif de la taxe foncière et qu’elle ne peut être tenue pour responsable des erreurs de l’administration fiscale.

Vu les conclusions transmises le 24 août 2020, par la SCP [F] et [C].

Le notaire relève que le montant de la taxe foncière n’était pas mentionné dans le compromis et que l’acquéreur ne démontre pas que celui-ci avait un caractère déterminant pour son consentement.

Il soutient que sa responsabilité civile ne peut être engagée, dès lors qu’il a reporté les indications relatives au numéro de voirie fournies par l’agent immobilier et que les vendeurs lui ont transmis un avis d’imposition de taxe foncière pour l’année 2014, lié au numéro [Adresse 9]. Il affirme n’avoir disposé d’aucun élément lui permettant de remettre en cause la pertinence de ce montant.

La SCP [F] et [C] souligne qu’il ne peut être réclamé sa condamnation in solidum avec le vendeur à une somme correspondant, en réalité à une réfaction du prix.

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 7 mars 2023.

SUR CE

Sur la responsabilité du vendeur:

Dès lors que la vente est intervenue le10 octobre 2014, il y a lieu d’appliquer les dispositions du Code civil dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016.

Il convient d’observer que Mme [H] [D] veuve [X] évoque l’existence d’un vice du consentement, lié à une erreur sur une qualité substantielle de la chose vendue qui aurait été déterminante de ce chef, mais ne réclame pas l’annulation de la vente.

Elle invoque un manquement au devoir d’information engageant la responsabilité contractuelle du vendeur.

Le vendeur, même non professionnel est tenu d’une obligation complète et loyale envers l’acquéreur sur les caractéristiques principales et accessoires du bien immobilier vendu.

Il apparaît au vu des pièces produites que les représentants de la SCI [N] [T] [P] ont remis à l’agent immobilier, puis au notaire, un avis d’impôt 2014 pour la taxe foncière correspondant aux biens situés au numéro [Adresse 9] pour un montant de 952 €, relatif à une parcelle leur appartenant mais distincte de l’immeuble vendu se trouvant au numéro [Adresse 8].

L’avis d’imposition 2015 pour la taxe foncière concernant l’immeuble situé au numéro [Adresse 8] sur un montant de 2604 €.

Les relevés de propriété produit aux débats révèlent que la maison d’habitation objet de la vente se trouve sur la parcelle K [Cadastre 3] située au [Adresse 8] et que le numéro 507se trouve sur la parcelle K [Cadastre 4], étrangère à la vente.

La transmission d’un document ne se rapportant pas à l’immeuble vendu constitue une faute imputable au vendeur.

Il ne peut tenter de s’exonérer en évoquant une erreur de l’administration fiscale, alors qu’il savait que le bien vendu portant sur une parcelle d’une superficie plus importante, sur laquelle est édifiée une maison avec piscine, faisait l’objet d’une imposition plus élevée que le terrain conservé par lui.

Cette différence de 1652 € par an, soit 137,66 € par mois, constitue un élément important, ayant pu avoir une influence sur la décision d’achat par une personne indiquant percevoir des revenus modestes.

La responsabilité contractuelle de la SCI [N] [T] [P] est donc engagée, en application des dispositions de l’article 1147 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige.

Sur la responsabilité du notaire:

Le notaire doit s’assurer de l’efficacité de l’acte qu’il rédige.

Il lui appartient, notamment, d’éclairer les parties sur la validité, la portée des engagements qu’elles contractent et de veiller à ce que ses actes ne soient entachés d’aucun vice susceptible d’entraîner la nullité ou de causer un préjudice à l’une d’elles.

Le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques de l’acte auquel il prête son concours, notamment quant à ses incidences fiscales.

L’acte authentique du 10 octobre 2014 mentionne de manière erronée dans la rubrique ‘Désignation’ une maison à usage d’habitation située [Adresse 9] à [Localité 10].

Il reporte ensuite les mentions du relevé de propriété visant la parcelle K [Cadastre 3] correspondant au [Adresse 8].

En sa page 28 dans la rubrique ‘quote-part impôt contributions et charges’, l’acte comporte un calcul, visant la somme de 952 € au titre de la taxe foncière, se référant à l’avis susvisé correspondant, comme cela est précisé au verso, au n° 507 de la voie qui ne concerne pas le bien vendu.

Il incombait en toute rigueur au notaire de vérifier que l’avis d’imposition transmis correspondait bien à la parcelle concernée et de reporter dans son acte le numéro de voie conforme au relevé de propriété établi par le service du cadastre.

Il a ainsi commis une faute professionnelle engageant sa responsabilité civile délictuelle en application des dispositions de l’article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige.

Sur le préjudice

Mme [H] [D] veuve [X] expose que les manquements du vendeur et du notaire, l’ont privée de la possibilité de renoncer à l’opération.

Ainsi, le préjudice ne peut être la différence du montant de la taxe foncière, cumulée sur la période théorique d’espérance de vie de la demanderesse.

Il est constitué par la perte de chance pour Mme [H] [D] veuve [X] de ne pas avoir acquis le bien si elle avait connu le montant réel de la taxe foncière.

Celle-ci demeure modérée, compte tenu du montant global de la transaction.

La réparation de la perte d’une chance ne pouvant équivaloir à la chance perdue, cette perte de chance sera entièrement réparée par l’octroi de la somme de 10’000 € à titre de dommages-intérêts.

Cette somme ne constituant pas comme l’affirme le notaire une réfaction du prix, la SCI [N] [T] [P] et la SCP [F] et [C] doivent être condamnées in solidum au paiement de ce montant.

Sur les demandes accessoires:

Indépendemment des conséquences de son défaut d’information, la SCI [N] [T] [P] est fondée à réclamer le complément du prorata de la taxe foncière réellement due au titre de l’année 2014, pour un montant de 300,82 € qui n’est pas contesté en lui-même.

La SCI [N] [T] [P] ne démontre pas que l’action en justice a été engagée de mauvaise foi à son encontre, ni fondée sur une une erreur grossière équivalente au dol, avec l’intention de nuire au défendeur. Sa demande en dommages et intérêts formée de ce chef est donc rejetée.

Le jugement est confirmé, sauf en ce qui concerne la responsabilité du notaire et la condamnation à son profit, en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il y a lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel, seulement à l’encontre du notaire.

Les parties perdantes sont condamnées aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré,sauf en ce qui concerne la responsabilité du notaire et la condamnation à son profit, en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum la SCI [N] [T] [P] et la SCP [F] et [C] à payer à Mme [H] [D] veuve [X], la somme de 10 000 €, à titre de dommages et intérêts.

Dit n’y avoir lieu à la condamnation de Mme [H] [D] veuve [X] à payer une somme en application de l’article 700 du code de procédure civile, en première instance,

Y ajoutant,

Condamne la SCP [F] et [C] à payer à Mme [H] [D] veuve [X], la somme de 2000 €, en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SCI [N] [T] [P] et la SCP [F] et [C] aux dépens de première instance et la SCP [F] et [C] aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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