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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 56B
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 JANVIER 2023
N° RG 21/04105 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UTHY
AFFAIRE :
S.A. CAR DATA
C/
S.A.S. KEY PERFORMANCE GROUP
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Juin 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
N° Chambre : 3
N° RG : 2020F00619
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Daphné PUGLIESI
Me Dan ZERHAT
TC VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A. CAR DATA
RCS Versailles n° 500 942 990
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Daphné PUGLIESI, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 487
APPELANTE
****************
S.A.S. KEY PERFORMANCE GROUP
RCS Paris n° 479 638 991
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Dan ZERHAT de l’AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Novembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,
EXPOSE DU LITIGE
La SA Car Data a pour activité la création et l’exploitation de sites internet commerciaux et en particulier d’un site de recherche autos et motos.
La SAS Key Performance Group est une entreprise de conseil, marketing digital et informatique. Elle a développé un outil dénommé « Mail Metrics », aujourd’hui renommé en « Hub Score », permettant à ses clients de piloter des campagnes massives de marketing digital, de collecter et d’analyser des données de campagne.
En 2013, la société Car Data a souscrit à ce service auprès de la société Key Performance Group, suivant bon de commande accepté le 17 février 2014. L’accord visait le routage de 80 millions d’e-mails envoyés sur 7 mois, moyennant le prix de 15.000 € HT, payables par échéances mensuelles.
Invoquant le dépassement du nombre de 80 millions de mails envoyés sur une période de 7 mois, la société Key Performance Group a émis deux factures complémentaires les 20 novembre 2019 et 23 janvier 2020, pour un montant total de 90.000 € TTC.
Les 3 décembre 2019 et 23 janvier 2020, la société Car Data a mis en demeure la société Key Performance Group de lui communiquer les avoirs d’annulation correspondants.
Le 9 mars 2020, la société Key Performance Group a mis en demeure la société Car Data d’avoir à payer ces factures et le 11 mars 2020, la société Car Data a notifié la résiliation du contrat de prestation de routage.
En 2020, la société Key Performance Group a adressé à la société Car Data trois autres factures, dont deux liées aux conséquences de la résiliation anticipée, d’un montant total de 36.740,52 € TTC.
A défaut de règlement, la société Key Performance Group a saisi le président du tribunal de commerce de Versailles, qui, par ordonnance du 1er septembre 2020, a délivré une injonction de payer à l’encontre de la société Car Data d’un montant de 126.740,52 €, majorée de 90 € au titre des frais de recouvrement et de 35,21 € pour les dépens.
Le 20 octobre 2020, la société Car Data a formé opposition à ladite ordonnance.
Par jugement du 18 juin 2021, le tribunal de commerce de Versailles a :
– Reçu la société Car Data en son opposition à l’ordonnance d’injonction de payer en date du 20 octobre 2020 ;
– Dit qu’en application de l’article 1420 du code de procédure civile, le jugement se substitue à l’ordonnance susvisée ;
– Condamné la société Car Data à payer à la société Key Performance Group la somme de 126.740,52 € TTC majorée des intérêts contractuels au taux de 10% à compter de la date de mise en demeure et jusqu’à parfait paiement ;
– Condamné la société Car Data à payer à la société Key Performance Group la somme contractuelle de 15.842,57 € au titre de la majoration contractuelle en cas de défaut de paiement à l’échéance ;
– Débouté la société Key Performance Group de sa demande de condamnation pour résistance abusive ;
– Débouté la société Key Performance Group de sa demande de dommages et intérêts ;
– Condamné la société Car Data à payer à la société Key Performance Group, la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné la société Car Data aux entiers dépens.
Par déclaration du 29 juin 2021, la société Car Data a interjeté appel du jugement.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 24 septembre 2021, la société Car Data demande à la cour de :
– Infirmer le jugement du 18 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il a condamné la société Car Data à payer la somme de 126.740,52 € à la société Key Performance Group, majorée des intérêts contractuels au taux de 10% à compter de la date de mise en demeure et jusqu’à parfait paiement ;
– Infirmer le jugement du 18 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il a condamné la société Car Data à payer la somme de 15.842, 57 € au titre de la majoration contractuelle en cas de défaut de paiement à l’échéance ;
– Infirmer le jugement du 18 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il a condamné la société Car Data à payer la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Infirmer le jugement du 18 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il a condamné la société Car Data au paiement des entiers dépens ;
– Condamner la société Key Performance Group à la somme de 4.800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société Key Performance Group aux entiers dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 27 septembre 2022, la société Key Performance Group demande à la cour de :
– Confirmer le jugement dont il est fait appel en ce qu’il a condamné la société Car Data à verser à la société Key Performance Group les sommes suivantes :
– 126.740,52 € TTC majorés des intérêts contractuels au taux de 10 % à compter de la date de mise en demeure et jusqu’au parfait paiement ;
– 15.842,57 € au titre de la majoration contractuelle en cas de défaut de paiement à l’échéance ;
– 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Confirmer le jugement dont il a été fait appel en ce qu’il a condamné la société Car Data aux entiers dépens ;
– Infirmer le jugement dont il a été fait appel pour le surplus ;
Et statuant à nouveau sur les chefs incriminés,
– Débouter la société Car Data de ses demandes, fins et prétentions formulées à l’encontre de la société Key Performance Group ;
– Condamner la société Car Data à verser à la société Key Performance Group la somme de 3.000 € pour résistance abusive ;
– Condamner la société Car Data à verser à la société Key Performance Group la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi ;
– Condamner la société Car Data à verser à la société Key Performance Group la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société Car Data aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 octobre 2022.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
La société Key Performance Group fait valoir qu’aux termes du bon de commande, la facturation est effectuée sur une base de 15.000€ HT par pack de 80 millions de courriels maximum envoyés sur la période d’engagement de 7 mois.
Ce qui signifie que :
– le forfait souscrit donne droit à l’envoi de 80 millions de mails sur la période de 7 mois ;
– un dépassement donne lieu à l’ouverture d’un nouveau pack facturé 15.000 € HT ;
– ces packs sont utilisables sur la période d’engagement de 7 mois.
Elle explique que la société Car Data a multiplié par 6 son volume d’envois à partir de janvier 2019, ce dont elle était informée par l’outil Mail Metrics, renommé en Hub Score, qui permet à son utilisateur de visualiser en temps réel les campagnes d’envois de courriels réalisées. Elle soutient que l’analyse des courriels échangés par les parties et le rapport d’expertise de M. [E], expert en informatique, établissent que la société Car Data était informée de l’augmentation de la quantité d’emails envoyés. La société Key Performance Group rappelle que le bon de commande précisait le tarif de 15.000€ HT par pack de 80 millions et qu’elle avait formulé dès le mois de février 2019 une proposition de modification tarifaire des envois excédentaires, qui n’a pas été validée par la société Car Data, de sorte que les stipulations du bon de commande doivent être appliquées.
La société Key Performance Group expose que la société Car Data lui a adressé le 11 mars 2020 un courrier de résiliation immédiate, qui en application de l’article 8 du bon de commande entraîne l’exigibilité immédiate de toutes les mensualités restantes jusqu’à la période de 7 mois suivante.
Elle s’estime donc fondée à obtenir la condamnation de la société Car Data au paiement de la somme de 126.740,52 € TTC au titre des 5 factures impayées, outre les intérêts au taux contractuel de 10% depuis le 9 mars 2020, date de la première mise en demeure.
Elle réclame par ailleurs la majoration contractuelle due en application des stipulations de l’article 8 des conditions générales de vente du bon de commande. Elle fait valoir que la signature du recto d’un bon de commande qui est précédée d’une référence aux conditions générales figurant au verso suffit à établir l’acceptation de ces conditions générales même en l’absence de toute clause d’acceptation expresse.
Enfin, la société Key Performance Group réclame une somme de 3.000 € de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive, outre celle de 30.000 € au titre du préjudice financier subi en raison des frais d’expertise et de personnel exposés dans le cadre de cette affaire.
La société Car Data répond que la société Key Performance Group ne justifie d’aucun élément probant permettant de démontrer le volume de mails réellement routé et facturé. Elle explique avoir fait procéder à l’envoi de mails plus volumineux mais pas plus nombreux. Elle ajoute que la société Key Performance Group ne l’a jamais informée du dépassement du nombre de mails prévus au forfait, alors qu’elle n’utilisait son forfait de 80 millions de courriels qu’à concurrence de 40 millions, laissant ainsi une marge importante d’augmentation sans dépasser son forfait. Elle estime que la société Key Performance Group se devait de bloquer le routage dès le dépassement du forfait de 80 millions d’emails en l’absence d’accord sur le prix du dépassement, ce comportement caractérisant sa mauvaise foi dans la relation contractuelle. Elle conteste le caractère probant de l’expertise non judiciaire de M. [E] réalisée à la demande de la société Key Performance Group. Elle reproche au tribunal de commerce de s’être borné à constater l’existence d’un outil de suivi Hub Score pour juger qu’elle était informée de l’augmentation du nombre de mails sans analyser en quoi cet outil lui aurait permis d’être informée en temps réel de l’augmentation du nombre de mails envoyés. La société Car Data soutient par ailleurs que la facture émise le 20 novembre 2019 concernant une prestation dont le terme était fixé au mois de juillet 2019 est tardive et contraire aux dispositions de l’article L.441-9 du code de commerce. Elle ajoute que la facture du 23 janvier 2020, en revanche, se rapporte à une prestation de service dont le terme est fixé au mois de février 2020, soit un mois plus tard. La société Car Data souligne l’incohérence des montants des factures et leur absence totale de détail concernant le prix unitaire de l’email supplémentaire et le nombre d’emails supplémentaires envoyés. Elle insiste sur le fait qu’elle s’est toujours acquittée du forfait mensuel de 3.123,43 euros TTC alors qu’elle ne consommait pas 80 millions d’emails sur une période de 7 mois durant les premières années de la relation commerciale, sans bénéficier d’avoir. Elle conteste être redevable de la facture de résiliation anticipée, dès lors qu’elle a notifié sa résiliation du contrat le 13 mars 2020, soit avant la date anniversaire du 31 mars 2020. Enfin, elle conclut au débouté de la société Key Performance Group au titre de la majoration contractuelle en cas de défaut de paiement à l’échéance, s’interrogeant sur la force contractuelle des conditions générales de vente qui ne sont pas signées.
*****
Sur le paiement des factures correspondant à la surconsommation des 20/11/2019, 23/01/2020 et 22/06/2020
Selon l’article L.110-3 du code de commerce, à l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu’il n’en soit disposé autrement par la loi.
Il ressort du bon de commande signé le 17 février 2014 que les conditions de vente liant les parties sont les suivantes’:
– « Ouverture du second compte : 450 € HT
– Mise à disposition de la solution avec les 2 comptes : + 100 €/mois, soit 460 €/mois au lieu de 750 €/mois
– Routage inchangé soit 15.000 € / pack dans la limite de 80 millions d’e-mails envoyés sur 7 mois en cumulé sur les deux comptes
– IP : inchangé, soit + 100 € / blacklistage d’IP si > 4 par mois
– Durée d’engagement : inchangée, soit par période de 7 mois (début du précédent terme: octobre 2013)
Modalités de facturation :
– Facturation ponctuelle des frais d’ouverture (450 € HT)
– Nouvelle facturation mensuelle : 2.602,85 € HT/ mois au lieu de 2.502,85 € HT/ mois antérieurement ».
Il apparait ainsi, comme le soutient à juste titre la société Key Performance Group que’:
– le forfait souscrit donne droit à l’envoi de 80 millions de mails sur la période de 7 mois ;
– en cas de dépassement un nouveau pack est ouvert et facturé 15.000€ HT, sans limitation ;
– chaque pack est utilisable sur une période de 7 mois.
L’utilisation de l’expression 15.000 € HT par pack (‘15.000 € / pack ‘) ne laisse pas place au doute quant à l’interprétation des stipulations contractuelles en cas de dépassement du nombre d’envoi maximal, comme l’ont pertinemment retenu les premiers juges.
Il n’était donc nullement nécessaire, comme le prétend la société Car Data, de fixer le prix du dépassement.
Par ailleurs, la société Key Performance Group communique des graphiques détaillant l’évolution du volume de mails envoyés par la société Car Data au cours des mois d’avril à décembre 2018, puis au cours de la période de surconsommation facturée, soit de janvier à juillet 2019, puis d’août 2019 à février 2020. Il en ressort que de janvier à juillet 2019, 261.741.968 courriels, correspondant à 4 packs de 80 millions de mails ont été envoyés et que d’août 2019 à février 2020, 271.030.026 mails, correspondant également à 4 packs, ont été expédiés.
La société Car Data conteste toute valeur probante à ces graphiques émanant de la société Key Performance Group sans toutefois communiquer le moindre élément probant permettant de les remettre en cause. Alors même qu’elle est à l’origine de l’envoi des mails, elle ne fournit à la cour aucun élément permettant d’établir quel a été son niveau de consommation réel au cours des deux périodes concernées par les factures litigieuses.
En outre, il ressort du bon de commande, évoquant la « Mise à disposition avec les modules bases de données destinataires, messages et envois, reporting » et corroborant sur ce point l’expertise amiable réalisée par M. [E] à la demande de la société Key Performance Group que la société Car Data disposait d’un outil informatique de gestion dénommé Mail Metrics, devenu Hub Score, qui lui permettait non seulement de gérer ses campagnes marketing, mais également de disposer en temps réel des éléments volumétriques et statistiques relatifs à son activité. Aux termes de son rapport, M. [E] explique s’être connecté au compte de la société Car Data sur la plateforme Hub Score. Il confirme les niveaux de consommation facturés à la société Car Data pour les périodes courant de janvier à juillet 2019, puis d’août 2019 à février 2020.
De surcroît, contrairement à ce que soutient l’appelante, la société Key Performance Group justifie l’avoir alertée à propos de l’augmentation du nombre de mails envoyés. En effet, elle communique un mail de M. [O], chef de projet, CRM Hub Score, qui dès le 25 février 2019 écrit ceci à la société Data Car’: «” Nous avons constaté, dans la semaine écoulée, que votre usage de la plateforme Hub Score avait quelque peu évolué suite à la mise en place de campagnes via notre outil API. Nous sommes tout à fait ravis que vous nous confiiez un volume plus important de contacts à router, toutefois cela exige quelques ajustements sur le fonctionnement actuel de votre compte. Afin de procéder à ces ajustements dans les meilleures conditions, nous aurions besoin de savoir quels sont les volumes cibles sur un mois, et par campagne (une fourchette bien entendu), afin de vous faire une proposition satisfaisante à la fois sur un plan technique et tarifaire ”».
La société Car Data n’a pas contesté les termes de ce courriel, étant précisé que l’augmentation du volume de contacts, donc de destinataires, implique bien un nombre de mails envoyés plus important et non des mails plus volumineux.
M. [O] explique encore par mail du 1er avril 2019 la mise en ‘uvre d’une purge automatique afin de ne conserver «’les données contacts que sur 7 jours glissant’», ce qui démontre que la société Key Performance Group était à la recherche d’une solution technique pour palier l’augmentation importante du nombre de mails envoyés.
Aucune obligation contractuelle, comprenant l’obligation de bonne foi, n’imposait à la société Key Performance Group de prévenir la société Car Data du dépassement du forfait de 80 millions de mails ou encore de bloquer l’envoi de mails au-delà de ce seuil, alors que l’intimée démontre avoir signalé à cette dernière une augmentation de sa consommation, qu’elle pouvait de surcroît suivre en temps réel grâce à l’outil Hub Score.
L’intimée établit également avoir appelé l’attention de la société Car Data sur la facturation importante induite par les niveaux de consommation et avoir essayé, en vain, d’organiser une rencontre sur ce point, par mails notamment des 4, 18 septembre et 4 novembre 2019. Ces mails ont été utilement adressés à Mme [P], en sa qualité de responsable pôle monétisation et gestion BDD au sein de la société Car Data et, contrairement à ce que prétend l’appelante, à M. [K], signataire du bon de commande.
Enfin, si la société Key Performance Group a envisagé de nouvelles modalités de facturation au regard de l’augmentation du volume de consommation de la société Car Data, la cour relève que par mail du 6 février 2020, M. [K] a répondu qu’il n’était pas utile d’organiser une rencontre avant que la société Key Performance Group n’ait réglé le litige. En outre, il doit être rappelé que le bon de commande du 17 février 2014 liant les parties prévoyait déjà les modalités de facturation des mails au-delà du pack initial, puisque chaque pack de 80 millions de mails utilisable sur une période de 7 mois devait être facturé 15.000 € HT. A ce propos, la société Car Data évoque une «’tarification dégressive appliquée pour le volume supplémentaire d’e-mails envoyés conformément aux usages commerciaux en matière de routage (- 60 % du prix)’». Toutefois, la cour constate que l’appelante procède par voie d’affirmation, ne communiquant au soutien de ses dires aucun élément probant.
S’agissant du caractère tardif des factures invoqué par la société Car Data, il résulte effectivement de l’article L.441-9 du code de commerce que «” le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de service ”». Cependant, l’émission le 20 novembre 2019 de la facture n° K-20191100064 portant sur la consommation comptabilisée du mois de janvier au mois de juillet 2019 inclus n’apparaît pas significativement tardive. Elle ne détaille certes pas les 3 packs facturés, mais il se déduit aisément du bon de commande que c’est bien le paiement de 3 packs de 80 millions de mails qui est réclamé. En tout état de cause, cet élément n’est pas de nature à affecter son exigibilité. Par ailleurs, concernant les factures n° K-20200100062 du 23 janvier 2020 et n° K-20200600067 du 22 juin 2020 portant toutes les deux sur la consommation correspondant à la période courant du mois d’août 2019 au mois de février 2020, il apparaît manifestement que la société Key Performance Group, au vu de l’évolution de la consommation, a facturé, dans un premier temps, avant même l’expiration de la période de 7 mois, deux packs excédant le forfait, puis à l’issue de ladite période figeant le nombre d’envoi de mails, un troisième pack. Ces éléments ne mettent en lumière aucune incohérence de nature à affecter l’exigibilité des créances de la société Key Performance Group.
La société Car Data soutient que la société Key Performance Group a volontairement facturé sur de longues périodes afin de créer des créances importantes et que si les factures avaient été émises mensuellement, elle aurait réagi bien en amont. Pourtant, la cour constate que la société Car Data, bien qu’informée d’une augmentation importante de sa consommation par le courriel précité du 25 février 2019, par les échanges de mails susvisés des 4, 18 septembre et 4 novembre 2019, n’a nullement réagi à la suite de la réception de la facture du 20 novembre 2019, puisque son niveau de consommation a justifié la facturation de 3 packs supplémentaires au cours de la période suivante courant du mois d’août 2019 au mois de février 2020. Il ne peut être fait grief à la société Key Performance Group de ne pas avoir adressé de factures mensuelles, dès lors que ce type de facturation ne pouvait être mis en ‘uvre que pour le forfait de base. En effet, la facturation d’un pack supplémentaire de 80 millions de mails sur une période de 7 mois nécessitait d’attendre que ce volume de surconsommation soit comptabilisé. La cour observe qu’une facture a été émise par anticipation pour la période courant du mois d’août 2019 au mois de février 2020 à concurrence de 2 packs (facture n° K-20200100062 du 23 janvier 2020), ce que la société Car Data, non sans incohérence, ne manque pas de reprocher à la société Key Performance Group.
Enfin, s’il n’est pas contesté que durant les 6 années de relation contractuelle et avant la facture du 20 novembre 2019, la facturation de la société Car Data s’était limitée à la somme mensuelle de 3.123,42 euros TTC, elle ne démontre ni avoir dépassé le forfait de 80 millions de mails envoyés au cours de cette période, ni avoir limité sa consommation à 40 millions de mails comme elle le prétend.
En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a évalué la créance de la société Key Performance Group au titre des factures n° K-20191100064 du 20 novembre 2019 d’un montant de 54.000 € TTC, n°K-20200100062 du 23 janvier 2020 d’un montant de 36.000 € TTC et n° K 20200600067 du 22 juin 2020 d’un montant de 18.000 € TTC à la somme de 108.000 € TTC.
Sur la facture relative à la résiliation de la relation commerciale
La société Key Performance Group réclame le paiement des deux factures suivantes’:
– la facture n° K-20200100047 du 1er avril 2020 d’un montant de 3.123,42 € au titre de l’«’abonnement avril 2020 + licence + routage + échéance avril 2020’»’;
– la facture n° K 2020060068 du 22 juin 2020 d’un montant de 15.617,10 € correspondant à la «’facture de clôture abonnement + licence + routage ‘ Mensualités sur la période d’engagement en cours exigibles suite à résiliation anticipée (mai à septembre 2020)’».
L’appelante conteste le renouvellement tacite du contrat le 17 février 2014 et donc l’exigibilité des factures.
L’article 8 des conditions générales figurant au verso du bon de commande signé par la société Car Data le 17 février 2014 prévoit que «” sauf résiliation par LRAR entre trois et quatre mois avant la date anniversaire de signature du bon de commande, le bon de commande est reconduit tacitement pour une durée égale aux mêmes conditions revalorisées de l’évolution de l’indice Syntec depuis la date de signature ou le début de la période d’engagement précédente. Toute résiliation anticipée avant le terme prévu entraînera l’exigibilité immédiate des mensualités restantes ”».
Ces conditions générales, bien que non signées, revêtent un caractère contractuel, dès lors qu’elles figurent en caractères apparents au verso du bon de commande qui précise au niveau de la partie du document réservée à la signature du client’: «’la signature vaut validation des conditions générales ci-jointes’».
Il est constant que la société Data Car a procédé à la résiliation du contrat de prestation de routage par courrier du 11 mars 2020 réceptionné le 13 mars 2020.
La société Car Data invoque des périodes d’engagement se succédant tous les 7 mois. Toutefois, la cour relève que l’article 8 précité se réfère à «’la date anniversaire de signature du bon de commande’».
En outre et en tout état de cause, si la société Car Data soutient que le terme de la période contractuelle en cours doit être fixé au 31 mars 2020, il n’en demeure pas moins qu’en notifiant la résiliation du contrat le 13 mars 2020, soit en-deçà du délai de «’entre trois et quatre mois’» avant l’échéance du contrat en cours, celui-ci a effectivement été tacitement reconduit. Il doit être souligné que le jugement précise en page 7 que «’Car Data indique en audience, son accord pour payer la facture K-20200100047 (3.123.42 € TTC)’». En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a évalué la créance de la société Key Performance Group au titre des factures précitées à la somme de 18.740,52 € TTC.
*****
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Car Data doit être condamnée, par confirmation du jugement, au paiement de la somme de 126.740,52 € TTC. Les premiers juges ont à juste titre majoré cette somme des intérêts de retard au taux contractuel de 10 % (article 5 des conditions générales de vente) à compter de la mise en demeure, sauf à préciser qu’il convient de retenir la date du 30 juin 2020 correspondant au seul accusé de réception de mise en demeure versé aux débats.
Sur la majoration contractuelle en cas de défaut de paiement à l’échéance
La société Key Performance Group sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société Car Data au paiement de la somme de 15.842,57 € au titre de la majoration contractuelle de 15 % des sommes dues en cas de défaut de paiement à l’échéance.
L’article 8 des conditions générales de vente figurant sur le bon de commande prévoient effectivement que : « ‘ Le défaut de paiement à l’échéance contractuelle entraînera, après mise en demeure faite par lettre recommandée avec A.R. restée vaine sous 8 jours, l’exigibilité, à titre de dommages et intérêts, d’une indemnité égale à 15% des sommes dues ‘ ».
Si la société Car Data s’interroge à propos de la force contractuelle de conditions générales de vente non signées, pour les motifs précités, il doit être considéré qu’elles revêtent un caractère contractuel. La créance de la société Key Performance Group s’élève à la somme de 126.740,52 € TTC, soit 105.617,10 € HT. En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a condamné la société Car Data au paiement de la somme de 15.842,57 € de dommages et intérêts.
Sur la demande au titre de la résistance abusive
La société Key Performance Group sollicite la somme de 3.000 € de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive de la société Car Data, lui reprochant d’avoir refusé de mauvaise foi de régler les factures dues.
Cependant, le droit d’agir en justice ne dégénère en abus qu’en cas de faute équipollente au dol, qui n’est pas démontrée en l’espèce. En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Key Performance Group de sa demande indemnitaire.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre des préjudices subis par la société Key Performance Group
La société Key Performance Group réclame une somme de 30.000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice financier qu’elle soutient avoir subi du fait des frais d’expertise et de personnels qu’elle a dû engager dans le cadre de cette affaire.
Cependant, la cour constate que la société Key Performance Group ne communique aucune pièce justificative des préjudices invoqués, de sorte que, par confirmation du jugement, elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Au regard de la solution du litige, le jugement déféré doit être confirmé des chefs des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la société Car Data supportera les dépens d’appel. Elle sera en outre condamnée au paiement de la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles exposés par la société Key Performance Group dans le cadre de cette instance.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par arrêt contradictoire
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions’;
Y ajoutant,
Dit que les intérêts de retard au taux contractuel de 10 % courront sur la somme de 126.740,52 € TTC à compter du 30 juin 2020′;
Condamne la société Car Data aux dépens d’appel’;
Condamne la société Car Data à payer à la société Key Performance Group la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,