Rupture anticipée : 8 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01712

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Rupture anticipée : 8 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01712
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRÊT DU 8 FEVRIER 2023

(n° 18 , 35 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01712 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBLAI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Décembre 2019 -Tribunal de Commerce de RENNES – RG n° 2016F00206

APPELANTS

M. [T] [V]

Né le 7 Août 1984 à [Localité 10] (SRI LANKA)

La Couvellière

[Localité 6]

M. [C] [G]

Né le 18 Novembre 1982 à [Localité 9]

[Adresse 4]

[Localité 5]

SARL BS DISTRIBUTION agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de LAVAL sous le numéro 533 170 569

[Adresse 1]

[Localité 5]

SARL S&B SABLE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS du MANS sous le numéro 794 851 683

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentés par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque B0936, avocat postulant

Assistés de Me Philippe LE GOFF de la SELARL CRESSARD & LE GOFF AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, avocat plaidant

SAS PIZZA CENTER FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 452 455 371

[Adresse 3]

[Localité 8]

SAS DOMINO’S PIZZA FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 421 415 803

[Adresse 3]

[Localité 8]

SAS FRA-MA-PIZZ agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 384 350 393

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentées par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque L0044, avocat postulant

Assistées de Me Jean-Daniel BRETZNER du Cabinet BREDIN PRAT, avocat au barreau de PARIS, toque T12 et de Me Sandrine RICHARD, de la SELARL SIMON ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, toque P0411, avocats plaidants.

INTIMES

M. [T] [V]

Né le 7 Août 1984 à [Localité 10] (SRI LANKA)

La Couvellière

[Localité 6]

M. [C] [G]

Né le 18 Novembre 1982 à [Localité 9]

[Adresse 4]

[Localité 5]

SARL BS DISTRIBUTION agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de LAVAL sous le numéro 533 170 569

[Adresse 1]

[Localité 5]

SARL S&B SABLE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS du MANS sous le numéro 794 851 683

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentés par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque B0936, avocat postulant

Assistés de Me Philippe LE GOFF de la SELARL CRESSARD & LE GOFF AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, avocat plaidant

SAS PIZZA CENTER FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 452 455 371

[Adresse 3]

[Localité 8]

SAS DOMINO’S PIZZA FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 421 415 803

[Adresse 3]

[Localité 8]

SAS FRA-MA-PIZZ agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 384 350 393

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentées par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque L0044, avocat postulant

Assistées de Me Jean-Daniel BRETZNER du Cabinet BREDIN PRAT, avocat au barreau de PARIS, toque T12 et de Me Sandrine RICHARD, de la SELARL SIMON ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, toque P0411, avocats plaidants.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de la chambre 5.4

Madame Brigitte BRUN-LALLEMAND, Première Présidente de chambre

Madame Sophie DEPELLEY, Conseillère

qui en ont délibéré un rapport a été présenté à l’audience par Madame Sophie DEPELLEY dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile

Greffière, lors des débats : Madame Mianta ANDRIANASOLONIARY

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Le réseau de restaurants Pizza Sprint, détenu jusqu’au 25 janvier 2016 par le groupe Pizza Sprint, a pour activité la fabrication et la distribution de pizzas sur la marché de la livraison à domicile ou à emporter.

Le groupe était composé de trois filiales détenues par la société holding Food Court Finances dirigée par M. [U] [W] :

-la société Fra-Ma-Pizz (ci-après « le franchiseur ») qui a exploité des points de vente ou concédé l’exploitation de l’enseigne par la conclusion de contrats de franchise ;

-la société Pizza Center France (ci-après « le fournisseur ») qui était la centrale d’approvisionnement en produits alimentaires et non alimentaires du réseau ;

-la société Somainmag qui avait été constituée pour réaliser l’aménagement des points de vente du réseau et n’est plus en activité.

Parmi les franchisés du réseau (ci-après ‘les sociétés franchisées’) se trouvaient :

-la société BS Distribution qui a conclu le 1er juillet 2011 un contrat de franchise avec la société Fra-Ma-Pizz pour une durée de 10 ans en vue d’exploiter un point de vente à [Localité 11] ;

-la société S&B Laval – radiée – qui a conclu le 20 juin 2012 un contrat de franchise avec la société Fra-Ma-Pizz pour une durée de 10 ans en vue d’exploiter un point de vente à Laval (53000) ;

-la société S&B Sable qui a conclu le 1er septembre 2013 un contrat de franchise avec la société Fra-Ma-Pizz pour une durée de 10 ans en vue d’exploiter un point de vente à [Localité 13]).

MM. [T] [V] et [C] [G] sont ou étaient les gérants de ces sociétés.

Le 30 juillet 2014, la société S&B Laval – dont la société BS Distribution était l’unique associée – a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire et a cessé son exploitation ; elle n’est pas partie à la présente instance.

Le 26 janvier 2016, la société Domino’s Pizza France (ci-après ‘la société Domino’s Pizza’), exploitant dans le même secteur le premier réseau de franchise français en nombre de points de vente, s’est portée acquéreur auprès de la société Food Court Finance de 100% des titres composant le capital social des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France, à l’exclusion de la société Somainmag.

A la suite de cette cession de contrôle, certains franchisés ont accepté de conclure de nouveaux contrats de franchise et d’exploiter sous l’enseigne « Domino’s Pizza », d’autres ont préféré demeurer au sein du réseau « Pizza Sprint » et les relations contractuelles entre ces derniers et le franchiseur se sont rapidement dégradées.

Le 14 février 2020, le contrat de franchise de la société S&B Sable a été cédé avec son fonds de commerce, puis résilié par le franchiseur pour défaut d’agrément de cette cession.

Le contrat de franchise de la société BS Distribution a cessé le 1er octobre 2020, le fonds de commerce ayant été cédé.

Les relations entre les parties ont définitivement pris fin à compter de ces dates.

Par acte extrajudiciaire du 11 mai 2016, puis du 19 septembre 2018, la société BS Distribution, la société S&B Sablé, M. [T] [V] et M. [C] [G] ont assigné les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France, puis la société Domino’s Pizza France, devant le tribunal de commerce de Rennes pour demander la nullité des contrats de franchise ‘ initialement pour vice du consentement, puis à raison de clauses créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dont la nullité aurait pour effet de vider les contrats de leur substance ‘ et, subsidiairement, pour faire prononcer leur résiliation aux torts exclusifs du franchiseur et obtenir les restitutions et indemnisations consécutives.

Ces instances ont été jointes.

Par jugement du 03 décembre 2019, le tribunal de commerce de Rennes a :

-Déclaré irrecevables les demandes de la société BS Distribution, la société S&B Sablé, Monsieur [V] et Monsieur [G] tendant à :

‘ Déclarer recevable et bien fondée la demande du Ministre ;

‘ Y faire droit en tous points ;

‘ Déclarer recevable et bien fondée l’intervention volontaire principale des concluants ;

‘ Joindre les instances engagées par les concluants à l’instance enrôlée sous le n°2017 F 00131

‘ Annuler ou résilier le contrat de franchise aux torts de Pizza Center France.

– Déclaré irrecevables les demandes de Fra-Ma-Pizz, Domino’s Pizza France et Pizza Center France tendant à :

‘ Rejeter la demande de jonction de la présente instance avec l’instance initiée par le Ministre (RG n°2017 F 00131) ;

‘ Constater que l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l’encontre des défenderesses dans la mesure où ce texte n’observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et (ii) par le pacte civil relatif aux droits politiques ;

‘ Constater l’absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

‘ Constater que les demandes fondées non pas avec une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne saurait relever de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

‘ Constater l’absence de déséquilibre significatif au sens de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce.

Et :

-Prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France.

En conséquence :

-Condamné in solidum Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à verser :

‘ à la société S&B Sablé :

-la somme de 11.059 € au titre du remboursement des redevances de franchise, à parfaire des redevances versées depuis mai 2018 ;

-la somme de 198.000 € au titre de la perte de valeur de son fonds ;

‘ à la société BS Distribution :

-la somme de 10.496 € au titre du remboursement des redevances de franchise, à parfaire des redevances versées depuis mai 2018 ;

-la somme de 225.000 € au titre de la perte de valeur de son fonds ;

‘ à Monsieur [V] la somme de 30.000 € au titre du préjudice moral ;

‘ à Monsieur [G] la somme de 30.000 € au titre du préjudice moral.

En outre :

-Ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément à l’article 1343-2 du code civil ;

-Condamné in solidum Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France aux entiers dépens de l’instance, parmi lesquels sont compris l’ensemble des Frais d’exécution (y compris les émoluments de l’huissier en application de l’article A444-32 du code de commerce) ;

-Condamné in solidum Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à verser à la société BS Distribution, la société S&B Sablé, Monsieur [V] et Monsieur [G] la somme de 15.000 euros chacun au titre des dispositions de l’article 700 du CPC.

Enfin :

– Débouté les parties du surplus de leurs demandes, et notamment de celles relatives à l’exécution provisoire ;

– Liquidé les Frais de greffe à la somme de 177,88 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du CPC.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 16 janvier 2020, la société BS Distribution, la société S&B Sablé, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] ont interjeté appel de ce jugement.

Parallèlement, entre 2013 et 2016, la DGCCRF a mené une enquête sur les relations commerciales entre partenaires au sein du réseau « Pizza Sprint » à l’issue de laquelle plusieurs franchisés ont dénoncé des pratiques susceptibles de constituer des entraves au libre jeu de la concurrence.

La DGCCRF a considéré que les contrats de franchise du réseau « Pizza Sprint » contenaient des clauses qui, par leur objet ou par leurs effets, limitaient la liberté et l’autonomie commerciale des franchisés de manière telle qu’elles étaient porteuses d’un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens L.442-6, I, 2° du code de commerce dans sa version applicable.

Par actes des 9, 13 et 15 mars 2017, le ministre de l’économie et des finances (ci-après « le Ministre » ou « le Ministre de l’économie ») a assigné les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France, Domino’s Pizza France, Food Court Finance et Somainmag devant le tribunal de commerce de Rennes au visa des anciens articles L442-6, I, 2° et L442-6, I, 1° du code de commerce.

A cette instance sont volontairement intervenues, à titre principal, des sociétés franchisées et leur gérant et, à titre accessoire, la société BS Distribution, la société S&B Sable et leurs gérants.

Ces dernières ont sollicité en vain la jonction de l’ensemble des instances devant le tribunal de commerce de Rennes qui a donc statué séparément sur chacune d’elles.

Par jugement du 22 octobre 2019, rendu dans le cadre de l’action du Ministre, le tribunal de commerce de Rennes, s’agissant des clauses litigieuses soumises à son appréciation au visa de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce dans sa version applicable, a notamment :

‘ prononcé la nullité des clauses relatives à l’intuitu personae,

‘ prononcé la nullité des clauses relatives aux modalités de résiliation et de cessation

Par un arrêt du 5 janvier 2022, rendu sur appel du jugement susvisé, la cour d’appel de Paris,

pour les contrats de franchise versés aux débats, dont les contrats de franchise des sociétés BS Distribution et S&B Sable, a notamment décidé que :

‘ seules les clauses intuitu personae et de résiliation dans les contrats antérieurs à 2012 sont annulées ;

‘ les clauses d’approvisionnement et de stocks minimum ne sont pas annulées mais il a été enjoint aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza, au titre d’un déséquilibre significatif, de cesser la pratique consistant à insérer au contrat de franchise une clause de stock minimum couplée à une clause d’approvisionnement formellement non exclusive mais permettant par des règles de contrôle d’imposer de fait un approvisionnement exclusif ou quasi exclusif auprès d’un fournisseur appartenant au même groupe de sociétés que le franchiseur ;

‘ les clauses d’aménagement initial des points de vente, les clauses de résiliation des contrats postérieurs à 2012 n’ont pas été annulées ni sur le fondement du déséquilibre significatif ni sur le fondement de l’avantage sans contrepartie ;

‘ les pratiques relatives à la mise en oeuvre du contrôle des points de vente, à la fixation des prix de vente, à la maîtrise des actions promotionnelles, à la facturation de la formation et autres Frais accessoires, n’ont pas été jugées en elles-mêmes comme générant un déséquilibre significatif ou un avantage sans contrepartie.

Le 10 janvier 2022 un pourvoi (n°R2210314) a été formé contre cet arrêt devant la Cour de cassation.

***

Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 07 octobre 2022, les sociétés BS Distribution et S&B Sable ainsi que MM [V] et [G] demandent à la Cour de :

-Déclarer recevable et bien fondée l’appel des Sociétés S&B Sablé et BS Distribution et de MM. [V] et [G] ;

Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

-Déclaré irrecevables les demandes des Sociétés S&B Sablé et BS Distribution et de MM. [V] et [G] tendant à :

‘ Déclarer recevable et bien fondée la demande du Ministre de l’Economie ;

‘ Y faire droit en tous points ;

‘ Déclarer recevable et bien fondée l’intervention volontaire principale des concluants ;

‘ Joindre les instances engagées par les concluants à l’instance enrôlée sous le n° 2017 F 00131

-Débouté les Sociétés S&B Sablé et BS Distribution et de MM. [V] et [G] de leurs demandes ;

Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

-Déclaré irrecevables les demandes de Fra-Ma-Pizz, Domino’s Pizza France et Pizza Center France tendant à :

‘ Rejeter la demande de jonction de la présente instance avec l’instance initiée par M. le Ministre de l’Economie et des Finances (RG n° 2017 F 00131) ;

‘ Constater que l’article L 442-6 I 2° du code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l’encontre des défenderesses dans la mesure où ce texte n’observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et (ii) par le pacte civil relatif aux droits politiques ;

‘ Constater l’absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l’article

L 442-6 I 2° du code de commerce ;

‘ Constater que les demandes fondées non pas avec une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne sauraient relever de l’article L 442-6 I 2° du code de commerce ;

‘ Constater l’absence de déséquilibre significatif au sens de l’article L 442-6 I 2° du code de commerce ;

– Débouté les Sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino’s Pizza France et Pizza Center France de leurs demandes ;

– Prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France ;

Statuant à nouveau, en conséquence :

-Prononcer l’annulation de chacune des clauses affectées d’un déséquilibre significatif, au sens de l’article L442-6 I 2° du Code de commerce ;

-Constater que l’annulation de l’ensemble de ces clauses vident les contrats de leur substance et, en conséquence, annuler les contrats de franchise,

A défaut,

-Prononcer leur résiliation aux torts exclusifs de la Société Fra-Ma-Pizz ;

-Débouter les Sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz, Domino’s Pizza France de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

1°) Concernant la Société BS Distribution

a) Au titre de la restitution du droit d’entrée

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 10.000 €,

b) Au titre de la restitution des redevances

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 132.943 €,

c) Au titre de pertes de marge sur les approvisionnements

-Condamner in solidum les Sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 370.631 €,

d) Au titre des prestations de marketing

Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser les sommes de 18.000 € et 30.168 €,

e) Au titre de la perte de la valeur du fonds

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 431.242 €, ou subsidiairement, la somme de 193 333 €

f) Au titre de la perte des apports

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 49.575 €,

2°) Concernant la Société S&B Sablé

a) Au titre de la restitution du droit d’entrée

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 10.000 €,

b) Au titre de la restitution des redevances

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 76.274 €,

c) Au titre de pertes de marge sur les approvisionnements

-Condamner in solidum les Sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 167.408 €,

d) Au titre des prestations de marketing

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser les sommes de 18.000 €,

e) Au titre de la perte de la valeur du fonds

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 379.230 €, ou, subsidiairement, la somme de 63 261 €,

3° et 4°) Concernant M. [V] et M. [G]

a) Au titre de la perte des apports

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à leur verser la somme de 60.000 €,

b) Au titre des engagements de caution

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à verser à M. [V] et à M. [G], chacun, la somme de 14.648,33 €,

c) Au titre du préjudice moral

-Condamner in solidum les Sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à leur verser la somme de 90.000 € chacun,

-Ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément à l’article 1343-2 du Code civil, à dater de l’assignation ;

-Condamner in solidum les Sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à verser à chacun des concluants la somme de 50.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

-Les condamner in solidum aux dépens, parmi lesquels seront compris l’ensemble des Frais d’exécution (y compris les émoluments de l’huissier en application de l’article A444-32 du Code de commerce).

Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 24 octobre 2022, les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France demandent à la Cour de :

Vu les articles 2, 9, 30 et suivants, 122, 132 et 132 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1101, 1116, 1134, 1147, 1152, 1178, 1184, 1224, 1304 alinéa 1, 1353 alinéa 1 et 2044 du code civil,

Vu les articles L.110-4, L.511-1 et suivants du code de commerce,

Vu les articles L.442-6, I, 1° et L.442-6, I, 2° et L.442-6, III (ancien) du code de commerce,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées aux débats,

-Déclarer les sociétés Domino’s Pizza France, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France recevables et bien fondées en l’ensemble de leurs demandes, fins, et prétentions ;

-Dire et juger irrecevable et mal fondé l’appel interjeté par les sociétés S & B Sablé et BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G], et en conséquence, débouter les sociétés S & B Sablé et BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] de l’ensemble de leurs demandes, fins, et prétentions,

Ce faisant :

Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Rennes le 3 décembre 2019 en ce qu’il a :

‘ déclaré irrecevables les demandes de Fra-Ma-Pizz, Domino’s Pizza France et Pizza Center France tendant à :

-rejeter la demande de jonction de la présente instance avec l’instance initiée par Mr le Ministre de l’Economie et des Finances (RG n°2017F00131) ;

-constater que l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l’encontre des défenderesses dans la mesure où ce texte n’observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et (ii) par le pacte civil relatif aux droits politiques ;

-constater l’absence de soumission ou de tentative de soumission au sens del’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ;

-constater que les demandes fondées non pas avec une clause, mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne saurait relever de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ;

-constater l’absence de déséquilibre significatif au sens de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ;

et

‘ prononcé la résiliation des contrats de franchise aux torts exclusifs de Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France ;

en conséquence :

‘ condamné in solidum Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France :

-à S&B Sablé les sommes de 11.059 € au titre du remboursement des redevances de franchise, à parfaire des redevances versées depuis mai 2018 ; et 198.000 € au titre de la perte de valeur de son fonds ;

-à BS Distribution les sommes de 10.496 € au titre du remboursement des redevances de franchise, à parfaire des redevances versées depuis mai 2018 ; et 225.000 € au titre de la perte de valeur de son fonds ;

-à Monsieur [V] la somme de 30.000 € au titre du préjudice moral ;

-à Monsieur [G] la somme de 30.000 € au titre du préjudice moral ;

en outre :

‘ ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément à l’article 1343-2 du Code civil ;

‘ condamné in solidum Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France aux entiers dépens de l’instance, parmi lesquels seront compris l’ensemble des Frais d’exécution (y compris les émoluments de l’huissier en application de l’article A444-32 du Code de commerce) ;

‘ condamné in solidum Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à verser à Monsieur [T] [V], Monsieur [C] [G], la société S & B Sablé et la société BS Distribution la somme de 15.000 € chacun au titre des dispositions de l’article 700 du CPC ;

enfin :

‘ débouté les sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino’s Pizza France et Pizza Center France du surplus de leurs demandes, notamment de celles relatives aux fins de non-recevoir, aux incidents soulevés, aux demandes reconventionnelles, ainsi qu’au titre de l’article 700 du CPC et aux dépens.

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Rennes le 3 décembre 2019 en ce qu’il a :

‘ déclaré irrecevables les demandes des sociétés S&B Sablé et BS Distribution, de Monsieur [T] [V] et de Monsieur [C] [G] tendant à :

-déclarer recevable et bien fondée la demande du Ministre de l’Economie ;

-y faire droit en tous points ;

-déclarer recevable et bien fondée leur intervention volontaire principale ;

-joindre les instances engagées par eux à l’instance enrôlée sous le n°2017 F 00131 ;

-annuler ou résilier le contrat de franchise aux torts de Pizza Center France ;

‘ débouté les sociétés S & B Sablé et BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] du surplus de leurs demandes.

Et, statuant à nouveau :

I/ SUR LES INCIDENTS :

(i) Constater que la société Domino’s Pizza France n’a pas qualité pour défendre ;

(ii) Constater que la société Pizza Center France n’a pas qualité pour défendre ;

‘En conséquence, déclarer irrecevables les demandes formulées à l’encontre des société Domino’s Pizza France et Pizza Center France ;

(iii) Constater que Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] n’ont pas intérêt à agir, faute de préjudice direct, personnel et distinct ;

‘En conséquence, déclarer irrecevables les demandes de Monsieur [T] [V] et de Monsieur [C] [G] ;

S’agissant spécifiquement du magasin de Laval et du contrat de franchise conclu avec la sociéé S&B Laval :

(iv) Constater qu’aucun des intimés, à savoir les sociétés BS Distribution et S&B Sablé et Messieurs [T] [V] et [C] [G] n’ont qualité à agir au titre du contrat de franchise conclu par un tiers à la présente instance (la société S&B Laval) ;

‘En conséquence, déclarer irrecevables les demandes concernant le contrat de franchise conclu entre la société Fra-Ma-Pizz et la société S&B Laval ;

II/ SUR CE, AU FOND :

II. A/ SUR LES DEMANDES DES FRANCHISÉS

A titre préalable, si par extraordinaire la cour d’appel de céans considérait que les sociétés Domino’s Pizza France et Pizza Center France ont qualité pour défendre dans le cadre de la présente instance, il lui est demandé de :

(i) Constater que les conditions de mise en cause de la responsabilité de la société mère pour les faits de sa filiale ne sont pas remplies et que le principe de l’autonomie de la personnalité morale fait, en toute hypothèse, obstacle à la mise en cause de la responsabilité de la société mère et /ou d’une autre société du groupe ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de leur demande de condamnation in solidum à l’encontre des société Domino’s Pizza France et Pizza Center France ;

II. A. 1/ SUR LE REJET DES DEMANDES D’ANNULATION DES CLAUSES SUR LE FONDEMENT DE L’ARTICLE L.442-6, I, 2° DU CODE DE COMMERCE (DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF)

a/ À TITRE PRINCIPAL

(i) Constater que l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l’encontre des Concluantes dans la mesure où ce texte n’observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la Convention europénne de sauvegarde des droits de l’homme et des liberté fondamentales et par (ii) le Pacte civil relatif aux droits politiques ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de leurs demandes formulées à ce titre ;

b/ À TITRE SUBSIDIAIRE,

(i) Constater l’absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l’article L.442-6, I, 2°du code de commerce ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de leurs demandes fondées sur L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

Si la Cour d’appel de Paris venait à considérer que la démonstration de l’existence d’une soumission ou tentative de soumission exigée par l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce est caractérisée :

(i) Constater que les demandes des franchisés fondées non pas sur une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne sauraient relever de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

(ii) Constater, l’absence de déséquilibre significatif au sens de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce en ce qui concerne :

-la clause d’aménagement des points de vente ;

-la clause d’approvisionnement ;

-la clause sur le stock minimum ;

-la prétendue surfacturation des actions commerciales ;

-la prétendue facturation hors contrat du « forfait marketing », des « Frais divers » et des « Frais de port et de conditionnement » ;

-les modalités de contrôle des points de vente (contrôles qualité et hygiène,

des tests de « client-mystère » et visites des animateurs réseau) ;

-le prétendu défaut de formation continue des franchisés et la prétendue double facturation de la formation initiale ;

-la clause sur la gestion et administration du personnel ;

-la clause sur la gestion et l’administration de l’activité commerciale (outils informatiques) ;

-la clause sur le respect de l’évolution du réseau ;

-la clause sur l’information du franchiseur ;

-la clause de non-concurrence applicable pendant la durée du contrat de franchise ;

-la clause sur l’obligation d’assurances ;

-la clause sur l’obligation de confidentialité et discrétion ;

-la clause de non-concurrence post-contractuelle ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de l’ensemble de leurs demandes fondées sur L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

II. A. 2/ SUR LE REJET DE LA DEMANDE D’ANNULATION DES CONTRATS DE FRANCHISE

a/ À TITRE PRINCIPAL

(i) Constater l’impossibilité pour les franchisés de solliciter l’annulation du contrat de franchise qu’elles ont respectivement conclu avec la sociéte Fra-Ma-Pizz sur le fondement de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de leur demande d’annulation du contrat de franchise qu’elles ont respectivement conclu avec la société Fra-Ma-Pizz sur le fondement de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce ;

b/ À TITRE SUBSIDIAIRE

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d’appel de céans considérait que les franchisés ont la faculté de solliciter l’annulation du contrat de franchise qu’ils ont respectivement conclu avec la société Fra-Ma-Pizz sur le fondement de l’article L.442-6 du code de commerce :

(i) Constater que la demande d’annulation des contrats de franchise ne saurait uniquement résulter de la nullité de clauses de ces contrats, si nombreuses soient-elles, faute pour les franchisés de démontrer que ces clauses ont constitué la volonté impulsive et déterminante du consentement des parties à contracter ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de leur demande d’annulation du contrat de franchise qu’elles ont respectivement conclu avec la société Fra-Ma-Pizz ;

II. A. 3/ SUR LE REJET DE LA DEMANDE DE RÉSILIATION DES CONTRATS DE FRANCHISE

(i) Constater l’absence de manquement de la société Fra-Ma-Pizz dans le cadre de la transmission du savoir-faire et l’absence de disparition du savoir-faire Pizza Sprint ;

(ii) Constater l’absence de manquement de la société Fra-Ma-Pizz à ses obligations contractuelles ;

‘En conséquence, débouter les sociétés S&B Sablé et BS Distribution de leur demande de résiliation du contrat de franchise qu’elles ont respectivement conclu avec la société Fra-Ma-Pizz aux torts exclusifs de Fra-Ma-Pizz ;

A toutes fins utiles, s’agissant de la demande de résiliation du contrat de franchise conclu par la société S&B Laval avec la société Fra-Ma-Pizz :

(iii) Constater que le contrat de franchise liant la société S&B Laval à la société Fra-Ma-Pizz a cessé suite à la liquidation de la société S&B Laval le 30 juillet 2014 ;

(iv) Constater que les griefs fondant la demande de la société S&B Laval de résiliation dudit contrat de franchise portent sur des faits postérieurs à la cessation dudit contrat ;

‘En conséquence, rejeter la demande de la société S&B Laval de résiliation du contrat de franchise conclu avec la société Fra-Ma-Pizz aux torts exclusifs de Fra-Ma-Pizz ;

II. A. 4/ À TOUTES FINS UTILES SUR LE REJET DES DEMANDES DES FRANCHISES SUR LE FONDEMENT DE L’ARTICLE L.442-6, I, 1° DU CODE DE COMMERCE (AVANTAGE SANS CONTREPARTIE)

(i) Constater l’absence d’avantage sans contrepartie au sens de l’aticle L.442-6, I, 1° du code de commerce ;

‘En conséquence, débouter les franchisés de l’ensemble de leurs demandes fondées sur L.442-6, I, 1° du Code de commerce ;

II. A. 5/ SUR LE REJET DES DEMANDES FINANCIÈRES DES FRANCHISES

(i) A titre préalable, dire et juger que Domino’s Pizza France est totalement étrangère aux faits qui fondent les griefs formulés par les franchisés, de sorte qu’aucune demande de condamnation « in solidum » ne peut être formulée à son encontre ;

‘En conséquence, rejeter la demande de condamnation in solidum formulée à l’encontre de la société Domino’s Pizza France ;

Dans l’hypothèse extraordinaire où la cour d’appel de céans prononcerait l’annulation des contrats de franchise, il lui est demandé de :

(ii) Considérer que les sommes dues par Fra-Ma-Pizz au titre de la restitution en nature se compensent totalement avec les sommes dues par les sociétés franchisées au titre de la restitution par équivalent ;

‘En conséquence, prononcer la compensation entre les sommes que Fra-Ma-Pizz et les sociétés franchisés pourraient se devoir en exécution de l’arrêt à intervenir ;

Dans l’hypothèe extraordinaire où la cour d’appel de céans prononcerait la résiliation des contrats de franchise aux torts de Fra-Ma-Pizz, il lui est demandé de :

(iii) Considérer que la résiliation ne procède que pour l’avenir, c’est-à-dire pour la période postérieure à la date de résiliation des Contrats de franchise ;

‘En conséquence, débouter les sociétés franchisées de leur demande de remboursement des sommes versées antérieurement à la date de résiliation des contrats de franchise ;

En toutes hypothèses :

(iv) Constater que la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] ne justifient pas le fondement de leurs demandes d’indemnisation (nullité ou résiliation), ni même le contrat de franchise auquel ces demandes se rattachent ;

(v) Constater que la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] échouent dans la preuve d’une faute de Fra-Ma-Pizz, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre la faute invoqué et le préjudice allégué ;

‘En conséquence, rejeter l’ensemble des demandes financières formulées par la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] ;

II. B/ SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES DES CONCLUANTES

(i) Constater qu’en intentant la présente procédure, la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] ont commis un abus manifeste du droit d’ester en justice qui doit êre sanctionné;

‘En conséquence, condamner in solidum la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] au paiement de la somme de 300.000 euros aux sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France au titre de la procédure abusive engagée à leur encontre et de la somme de 9.000 euros au titre d’une amende civile ;

(ii) Constater la résiliation du contrat de franchise conclus entre Fra-Ma-pizz et la société S&B Sablé aux torts exclusifs de la société S&B Sablé ;

‘En conséquence, condamner la société S&B Sablé au paiement de la somme de 76.381,20 euros à la société Fra-Ma-Pizz au titre de la résiliation fautive du contrat de franchise ;

II. C/ EN TOUTE HYPOTHÈSE :

(i) Rejeter l’ensemble des prétentions et demandes des franchisés non rejetées par le jugement dont il est fait appel du Tribunal de commerce de Rennes 31 janvier 2020 (RG n°2016 F 00206)

(ii) Condamner in solidum la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] à verser à Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France la somme de 90.000 euros au titre de l’article 700 du code de procéure civile ;

(iii) Condamner in solidum la société S&B Sablé, la société BS Distribution, Monsieur [T] [V] et Monsieur [C] [G] à supporter les dépens de l’instance dont distraction au profit de la SCP AFG, aux offres de droit.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 08 novembre 2022.

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Préalablement, la Cour constate qu’aucune demande n’est faite au titre du contrat de franchise conclu avec la société S&B Laval.

I-Sur la qualité à défendre des sociétés Domino’s Pizza France et Pizza Center France

Les sociétés Pizza Center France et Domino’s Pizza, au visa des articles 32 et 122 du code de procédure civile, font valoir qu’elles n’ont pas qualité pour se défendre face aux demandes d’annulation ou de résiliation du contrat de franchise et des demandes indemnitaires subséquentes, en sorte que les prétentions formulées à leur encontre sont irrecevables. Elles soutiennent qu’elle sont totalement étrangères aux faits qui fondent les griefs des franchisés, puisqu’elles n’ont pas conçu les contrats litigieux, ni participé aux discussions qui ont précédé leur conclusion, ni apposé leur signature sur ces contrats et qu’elles n’ont accompli aucune des actions propres à permettre de leur imputer un rôle dans la violation de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce, ni même avoir eu un ‘rôle actif’ directement ou indirectement aux manquements contractuels allégués. Elles rappellent que le principe d’autonomie des personnes morales membres d’un même groupe ne cède que s’il est démontré qu’il n’existe en réalité qu’une seule personne morale et/ou une confusion des patrimoines.

Réponse de la Cour,

Selon l’article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

Les sociétés Domino’s Pizza et Pizza Center France ne soulèvent aucun moyen relatif à leur droit d’agir à l’encontre des prétentions émises par les franchisés à leur égard sur le fondement d’une part des dispositions de l’article L.442-6 du code de commerce interdisant certaines pratiques restrictives ou d’autre part d’une responsabilité dans les manquements contractuels invoqués, c’est-à- dire à leur qualité à se défendre à une telle action.

En effet les moyens invoqués par les Domino’s Pizza et Pizza Center France ne tendent en réalité qu’à critiquer le bien-fondé des prétentions des franchisés, à savoir si les éléments constitutifs des pratiques restrictives alléguées ou des manquements contractuels invoqués sont caractérisés à leur égard.

Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à défendre des sociétés Domino’s Pizza et Pizza Center France sera rejetée.

Le jugement sera confirmé sur ce point sauf en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes des sociétés franchisées et de MM. [V] et [G] en ce qu’elles tendent à annuler ou résilier leur contrat de franchise aux torts de Pizza Center France.

II-Sur la demande d’annulation du contrat de franchise

Les sociétés franchisées ont été déboutées de leur demande d’annulation du contrat de franchise par le tribunal de commerce qui, se référant à sa décision rendue dans l’instance initiée par le Ministre de l’économie, a considéré que la nullité des seules clauses relatives à l’intuitu personae et aux modalités de résiliation et cession du contrat au titre du déséquilibre significatif ne permet pas de vider de leur substance les contrats.

Au titre de leur appel incident, les sociétés franchisées et leurs gérants demandent l’infirmation du jugement sur ce point et sollicitent de la Cour aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions de :

‘ Prononcer l’annulation de chacune des clauses affectées d’un déséquilibre significatif au sens de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce

‘ Constater que l’annulation de l’ensemble de ces clauses vident les contrats de leur substance et, en conséquence, annuler les contrats de franchise,

Ils font valoir pour l’essentiel d’une part que l’impossibilité pratique pour eux de fixer librement leurs prix de vente justifie le prononcé de la nullité du contrat de franchise (point 93 des conclusions) et d’autre part qu’un grand nombre de clauses du contrat de franchise doivent être annulées sur le fondement du déséquilibre significatif ou de l’avantage sans contrepartie et que l’annulation de toutes ces clauses vidant les contrats de leur substance, ceux-ci doivent être annulés (points 200 et suivants).

A cet effet, il est soutenu que sont nulles les clauses suivantes du contrat :

‘ la clause d’intuitu personae,

‘ la clause de résiliation et la clause relative à la cessation du contrat de franchise, ‘ la clause relative à l’aménagement du point de vente des franchisés,

‘ la clause d’approvisionnement exclusif,

‘ la clause imposant de détenir un stock minimum,

‘ la mise en oeuvre du contrôle des points de vente,

‘ la fixation des prix de vente et la maîtrise des actions promotionnelles par Fra-Ma-Pizz,

‘ les facturations de frais accessoires non justifiées.

En réplique, les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza relèvent d’abord que l’article L.442-6, I , 2° sur lequel les sociétés franchisées fondent leur demande de nullité des contrats offre uniquement la possibilité pour un plaideur d’obtenir l’annulation des clauses générant un déséquilibre significatif et non l’annulation mécanique de l’intégralité du contrat.

Sur le fond, elles font essentiellement valoir que les conditions d’application de l’article L.442-6, I 2° précité ne sont pas réunies pour les clauses et pratiques litigieuses, d’une part l’élément de soumission n’est pas démontré dans le cadre du contrat de franchise et d’autre part aucun déséquilibre significatif n’est démontré dans les droits et obligations des parties pour aucune des clauses ou pratiques litigieuses. Elles soutiennent que les conditions d’application de l’article L.442-6, I, 1° ne sont pas davantage remplies. Elles ajoutent qu’en toute hypothèse, il n’est pas démontré que les clauses litigieuses aient été essentielles et déterminantes du consentement de la société cocontractante au contrat de franchise.

Réponse de la Cour

D’une part, la partie victime d’un déséquilibre significatif, au sens de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce dans sa version applicable au litige, est fondée à faire prononcer la nullité de la clause du contrat qui crée ce déséquilibre, s’agissant d’une clause illicite qui méconnaît les dispositions d’ordre public de ce texte (Com., 30 septembre 2020, pourvoi n° 18-11.644).

Il est précisé sur la légalité contestée de ce texte par les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino’s Pizza qu’ il résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme que le principe de légalité des délits et des peines consacré par les articles 7 de la CEDH et 15 du pacte de New York implique que les infractions et les peines qui les répriment doivent être clairement définies par la loi, au sens d’accessibilité et de prévisibilité (arrêts de la Cour EDH G.I.E.M. S.R.L. et autres c. Italie, § 242 ; Cantoni c.France, § 29 ; Kafkaris c. Chypre, § 140 ; Del Ri’o Prada c. Espagne, § 91 ou Perinc’ek c.Suisse, § 134). S’agissant de la prévisibilité, le justiciable doit pouvoir savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente, au besoin à l’aide de l’interprétation qui en est donnée par les tribunaux et le cas échéant après avoir recouru à des avocats, les actes et omissions qui peuvent engager sa responsabilité pénale et la peine qu’il peut encourir de ce chef (arrêts de la Cour EDH Cantoni c. France, § 29 ; Kafkaris c. Chypre, § 140 ; Del Ri’o Prada c. Espagne, § 79). Au regard de cette jurisprudence et de celle des juridictions françaises concernant les conditions d’application des dispositions de l’article L.442-6, I, 2° du code de commerce, les sociétés intimées ne démontrent pas en quoi ce texte serait contraire au principe de légalité des délits et des peines.

D’autre part, la nullité d’une clause d’un contrat n’entraîne la nullité du contrat lui-même que si la clause illicite a été dans l’intention des parties une condition essentielle de leur accord de volonté et que sa suppression aurait pour effet de bouleverser l’économie du contrat.

Dans l’instance opposant le Ministre de l’économie aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino’s Pizza, et à laquelle sont volontairement intervenus les sociétés BS Distribution et S&B Sable ainsi que MM.[V] et [G], par un arrêt du 5 janvier 2022, la cour d’appel de Paris, pour les contrats de franchise versés aux débats, dont ceux signés par les sociétés BS Distribution et S&B Sable, a notamment décidé sur le fondement des dispositions de l’article L.442-6, I, 1° et 2° que :

‘ seules les clauses intuitu personae et de résiliation dans les contrats antérieurs à 2012 sont annulées ;

‘ les clauses d’approvisionnement et de stocks minimum ne sont pas annulées mais il a été enjoint aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza, au titre d’un déséquilibre significatif, de cesser la pratique consistant à insérer au contrat de franchise une clause de stock minimum couplée à une clause d’approvisionnement formellement non exclusive mais permettant par des règles de contrôle d’imposer de fait un approvisionnement exclusif ou quasi exclusif auprès d’un fournisseur appartenant au même groupe de sociétés que le franchiseur ;

‘ les clauses d’aménagement initial des points de vente, les clauses de résiliation des contrats postérieurs à 2012 n’ont pas été annulées ni sur le fondement du déséquilibre significatif ni sur le fondement de l’avantage sans contrepartie ;

‘ les pratiques relatives à la mise en oeuvre du contrôle des points de vente, à la fixation des prix de vente, à la maîtrise des actions promotionnelles, à la facturation de la formation et autres frais accessoires, n’ont pas été jugées en elles-mêmes comme générant un déséquilibre significatif ou un avantage sans contrepartie.

Cette décision du 5 janvier 2022, à laquelle les parties font référence dans leurs écritures, fait l’objet d’un pourvoi en cassation, mais dans l’attente elle bénéficie de l’autorité de la chose jugée qui s’impose, dans la présente instance, à la validité des mêmes clauses, dans les mêmes contrats de franchise opposant les mêmes parties, autres que le Ministre, sur le fondement de pratiques restrictives de concurrence.

En toute hypothèse, ni les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino’s Pizza , ni les sociétés BS Distribution et S&B Sable, ne font état de faits ou de moyens de droit au soutien de leurs prétentions relatives à la validité des clauses ou en défense différents de ceux invoqués dans l’instance ayant donné lieu à l’arrêt du 5 janvier 2022 et sur lesquels la Cour ne pourrait porter une appréciation différente

Seules les clauses intuitu personae et de résiliation pour le contrat de franchise conclu avant 2012 ont été annulées et les sociétés BS Distribution et S&B Sable ne démontrent pas en quoi ces clauses étaient essentielles au contrat de franchise ou que leur suppression était de nature à bouleverser l’économie du contrat.

Les sociétés BS Distribution et S&B Sable seront déboutées de leur demande d’annulation du contrat de franchise.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

III-Sur les manquements au titre du contrat de franchise

Pour prononcer la résiliation des contrats de franchise aux torts de la société Fra-Ma-Pizz et la condamner in solidum avec la société Domino’s Pizza France à payer diverses indemnités, le tribunal a retenu qu’à compter de 2017, à la suite du rachat de la société Fra-Ma-Pizz par Domino’s Pizza France, le savoir-faire n’a plus été transmis, voir est devenu inexistant.

Les sociétés franchisées soutiennent que la société Fra-Ma-Pizz a été défaillante dans l’exécution de ses obligations et notamment :

‘ n’a pas respecté ni garantie l’indépendance des franchisés dans la gestion de leurs activités,

‘ n’a pas assuré son obligation d’assistance,

‘ a été défaillante dans la transmission et l’actualisation de son savoir-faire,

‘ a laissé périr l’enseigne,

‘ a surfacturé de nombreux frais injustifiés.

Elles font valoir que l’ensemble de ces manquements – et pas seulement ceux postérieurs à la cession – engage la responsabilité contractuelle de la société Fra-Ma-Pizz, et sollicitent la résiliation de leur contrat de franchise à ses torts exclusifs outre des dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par ces fautes. Soutenant que la société Domino’s Pizza France a contribué de façon indirecte à la réalisation du dommage, il est sollicité sa condamnation in solidum au paiement des sommes réclamées en réparation des préjudices invoqués.

La société Fra-Ma-Pizz conteste l’ensemble des manquements allégués. Elle fait valoir pour l’essentiel qu’elle a respecté ses obligations de franchiseur, notamment de transmission du savoir-faire, et tout particulièrement après le rachat par la société Domino’s Pizza France, la poursuite du contrat de franchise Pizza Sprint ayant été assurée jusqu’à son terme.

La société Domino’s Pizza France conteste toute faute de nature à engager sa responsabilité, et en particulier les griefs relatifs à l’opération d’acquisition. Elle fait notamment valoir qu’elle est totalement étrangère aux faits qui fondent les griefs des sociétés franchisées et de leur gérant et met en avant le principe de l’autonomie des personnes morales.

1- Sur grief tiré du respect de l’indépendance du franchisé dans la gestion de ses activités

Les sociétés franchisées et leur gérant dénoncent, en divers points de leurs dernières conclusions, des pratiques du franchiseur Fra-Ma-Pizz limitant de manière abusive leurs facultés à déterminer seuls la gestion de leur activité à savoir la fixation des prix, la maîtrise des actions promotionnelles, l’aménagement et le contrôle du point de vente.

Cependant la Cour constate que les sociétés franchisées et leur gérant n’invoquent ces pratiques qu’au soutien de leur demande d’annulation du contrat de franchise et qu’elles ne sont explicitement alléguées ni au titre de la résiliation du contrat de franchise (points 211 à 250 des conclusions), ni au titre de l’indemnisation d’un préjudice particulier (points 255 et suivants des conclusions).

Aussi l’examen de la Cour se limitera au grief tiré de l’obligation d’approvisionnement, seul celui-ci est spécifiquement invoqué au titre des demandes de résiliation des contrats et de l’indemnisation d’un préjudice particulier de pertes sur marge.

* sur l’obligation d’approvisionnement

Les sociétés franchisées et leur gérant font principalement valoir que le réseau Pizza Sprint fonctionnait avec une centrale d’achat la société Pizza Center exerçant sous l’enseigne Logis Pizza, conçue au seul profit du groupe franchiseur au détriment du franchisé. Ils expliquent que le nom et l’existence de cette centrale d’achat ne figurait ni dans le DIP ni dans le contrat de franchise dans lequel il était seulement indiqué que le franchiseur sélectionnait chaque année des listes de produits et de fournisseurs. Ils relèvent qu’en réalité, seule Logis Pizza était retenue et que le franchisé de fait était tenu de s’approvisionner auprès de cette société, au travers de divers contrôle ou menace de résiliation du contrat de la part du franchiseur. Or, ils soutiennent que cette centrale d’achat fonctionnait ‘à l’envers’, en ce que au lieu de permettre au franchisé de bénéficier d’économies d’échelle liées au groupement des achats, il était au contraire contraint de s’approvisionner à des prix 40% supérieurs au niveau du marché, remettant en cause la rentabilité du point de vente. Ils font observer que cette pratique confinait à la fraude concernant le pâton, indispensable à la fabrication des pizzas.

Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza répliquent pour l’essentiel d’une part qu’il ne pèse aucune obligation d’approvisionnement exclusif sur la société franchisés auprès des fournisseurs référencés par le franchiseur. Elles précisent que la clause d’approvisionnement du contrat de franchise offre la possibilité au franchisé, s’il le souhaite de s’approvisionner auprès de fournisseurs extérieurs sous réserve de respecter la procédure contractuellement fixée, faculté que le franchisé a fait le choix de ne pas mettre en oeuvre pendant de nombreuses années. D’autre part, elles soutiennent que les prix pratiqués par Pizza Center France étaient cohérents au regard des prix du marché sans pratique de marge excessive et qu’il n’est versé aux débats aucun élément de nature à prouver l’existence de prix supérieurs pratiqués par Pizza Center France ou Transgourmet, outre que, pour qu’une telle comparaison soit possible, il conviendrait de comparer des produits précisément identifiés et qui seraient réellement comparables. Elles précisent qu’il a bien existé une recette de pâton spécifique fourni à titre exclusif par grain d’Orgel à Fra-Ma-Pizz jusqu’à l’année 2017.

Réponse de la Cour,

Le contrat de franchise signé le 1er juillet 2011 par la société BS Distribution stipule au titre de l’approvisionnement que :

Au chapitre 6.2 Assistance technique et commerciale -communication du savoir-faire

(…)

article 6.2.4 Gestion et administration de l’activité commerciale

(…)

‘ Stock

Le Franchisé s’engage à détenir en permanence un stock minimum d’encours de fabrication disponible d’une semaine d’exploitation environ soit pour une valeur minimum comprise entre 3.000 et 5.000 HT selon l’évaluation du Franchiseur ;

‘Approvisionnement

Le franchiseur sélectionne, chaque année, des listes de produits et de fournisseurs correspondants aux normes de qualité et de traçabilité du réseau, décrites dans la bible.

Le Franchisé s’engage à respecter les critères définis.

Il est cependant libre de s’approvisionner auprès d’autres fournisseurs, dès lors que les produits intègrent l’ensemble des critères définis dans la bible et notamment :

– les caractéristiques de qualité et de traçabilité fixées,

– les caractéristiques de conservation et de stockage,

– les compositions qui doivent être strictement identiques à celles visée dans la Bible,

– le fait que les fabricants des produits qui doivent être les mêmes que ceux éventuellement visés dans la Bible, le Franchisé conservant de s’approvisionner auprès du fournisseur revendeur de son choix si l’ensemble des critères de la Bible sont respectés

Le franchisé s’interdit expressément de s’approvisionner auprès de fournisseurs n’assurant pas le transport des produits sous température dirigée.

Le Franchisé s’engage à communiquer et tenir à disposition du Franchiseur les fiches techniques des produits qu’il achète, ainsi que les conditions de vente applicables

Le contrat de franchise signé le 1er septembre 2013 par la société S&B Sable stipule au titre de l’approvisionnement que :

10 APPROVISIONNEMENT

10.1 Stock

Le Franchisé s’engage à détenir en permanence un stock minimum d’encours de fabrication correspondant à une semaine d’exploitation et à une valeur comprise entre 3.000 et 5.000 euros HT selon l’évaluation du Franchiseur.

10.2 Produits, petit matériel et matériel

Le Franchiseur sélectionne, chaque année, des listes de produits (matières premières, petit matériel et matériel) correspondant aux normes de qualité et de traçabilité du réseau, décrites dans la bible et il référence les fournisseurs correspondants. Le Franchisé s’engage a s’approvisionner conformément à cette liste de produits et de fournisseurs.

Toutefois, le Franchisé est libre de s’approvisionner auprès des fournisseurs de son choix, des lors que les produits répondent a l’ensemble des critères définis dans la bible et notamment aux critères suivants :

-les caractéristiques de qualité et de traçabilité fixées, –

-les caractéristiques de conservation et de stockage,

– les compositions qui doivent être strictement identiques à celles visées dans la Bible

– le transport des produits sous température dirigée,

– Les normes de sécurité du matériel pour les personnes utilisatrices

Avant toute commande de produits non référencés, le Franchisé s’engage à adresser au Franchiseur une fiche technique du produit ainsi que les conditions de vente applicables et à recueillir l’accord écrit du Franchiseur

La Cour relève que la clause d’approvisionnement telle que rédigée ne prévoit pas un approvisionnement exclusif. Il est organisé une sélection de produit par le franchiseur suivant des normes de qualité et de traçabilité définies dans la ‘bible’ que le franchisé

s’engage à respecter soit en s’approvisionnant chez ‘les’ fournisseurs référencés par le franchiseur, soit auprès du fournisseur choisi par le franchisé à condition de respecter les critères définis dans la bible, et de communiquer une fiche technique au franchiseur.

Outre le fait que la clause d’approvisionnement insérée aux contrats ne prévoit pas expressément un approvisionnement exclusif, il y a lieu de rappeler que le DIP ne contenait pas non plus d’information particulière sur l’organisation de l’approvisionnement, ni sur l’existence de la société Pizza Center France. Il n’apparaît pas que le candidat à la franchise disposait de la Bible avant la signature du contrat de franchise.

Or, il ressort des éléments versés aux débats par les sociétés franchisées, notamment :

– des auditions par la DGCCRF de franchisés (pièce PC n°50),

– des auditions du responsable opérationnel de la société Pizza Center France (pièce DGCCRF n°23 visée dans les conclusions point n°17 et extraits repris dans l’arrêt du 5 janvier 2022 versé aux débats pièce n°131)

– des échanges de courriels au sein du réseau entre franchisés et franchiseur (pièce PC n°3,19,20,25)

– et des rapports de visite des animateurs cités par la société Fra-Ma-Pizz dans ses conclusions (points 196 et suivants , pièces PC 3.1 à 3.7)

que contrairement à ce que laissait présager la rédaction de la clause d’approvisionnement, en pratique, la société Pizza Center France était non seulement le seul fournisseur référencé par le franchiseur mais également que les franchisés devaient s’approvisionner exclusivement ou quasi-exclusivement auprès de ce fournisseur qui était en lien direct avec le franchiseur pour appartenir au même groupe,

que l’exclusivité de l’approvisionnement n’était pas un libre choix de la part du franchisé mais le résultat d’une forte pression, voir de menace de résiliation, de la part du franchiseur, notamment M. [W], et mise en oeuvre par un contrôle étroit des animateurs de réseau chargés principalement de cette mission,

que l’approvisionnement théoriquement ‘libre’ auprès de fournisseurs autres que Logis Pizza, se heurtait en réalité à des critères dissuasifs pour les franchisés, à savoir des fiches techniques des produits achetés et conditions de vente applicables à transmettre pour validation préalable du franchiseur et quasiment jamais obtenue ainsi que des contrôles visuels des animateurs réseau et des alertes informatiques en cas d’absence de commande par Logis Pizza.

Il n’est en outre pas démontré de la part de la société Fra-Ma-Pizz que les produits sélectionnés par le fournisseur Pizza Center, notamment les produits alimentaires destinés à la confection des pizzas, avaient une spécificité au regard du savoir-faire Pizza Sprint ou répondaient à des critères de qualité ou de sécurité particuliers. Ainsi, il ressort des pièces versées aux débats par les franchisés (pièces PC n° 25,26, 27, 98,99, 101) que le pâton, indispensable pour la fabrication de pizza, ne pouvait être acheté ailleurs que chez Logis Pizza au motif d’une recette spécifique dont la réalité et l’utilité pour le savoir-faire du réseau n’ont pas été concrètement démontrés par les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France (pièces PC n°3.14).

Les sociétés franchisées établissent également (pièces PC n°22 et 23) qu’elles étaient astreintes de faire une commande minimum de 20 colis par ‘famille de produits’ secs/surgelés et que si des commandes n’étaient pas suffisantes le franchisé était relancé par Logis Pizza. Par ailleurs, il n’est pas sérieusement contesté par la société Pizza Center, qu’elle était la seule bénéficiaire des remises commerciales négociées sur la base d’engagements de volume d’achat et de mise en avant des produits.

De plus, les tableaux comparatifs de prix établis par les franchisés (pièces PC n°26, 74 à 80, 102) et de ratios de marges (pièce PC n°24- enquête DGCCRF) mettent en évidence que :

– les marges (opérationnelle, brute et nette) réalisées par la société Pizza Center sur les produits vendus au réseau Pizza Sprint étaient substantiellement supérieures à celles réalisées par d’autres entreprises intervenant dans le même secteur d’activité,

– des prix, notamment des produits alimentaires pour la confection des pizzas tel que le pâton, plus élevés sur toute la période 2015 à octobre 2017, que ceux pratiqués par d’autres acteurs équivalents sur le marché ou Transgourmet à compter de mai 2018,

Enfin, il ressort des pièces versées aux débats par les franchisés, qu’ils étaient soumis par la tête de réseau, d’une part à une très forte incitation à suivre une politique tarifaire de vente unique dans le réseau (pièces PC n°28 , n°29 à 40, 104 et 105, pièce franchisé n°7) d’autre part à l’utilisation d’un système informatique ne permettant pas d’établir eux-même leurs prix ( article 6.2.4 du contrat de franchise, pièces PC n° 41 et 50 du franchisé), contraignant davantage la gestion commerciale de leur point de vente.

Certes les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France produisent des études et relevés de prix (pièces PC n°10, 3.11 et 3.12) démontrant que les pièces produites par le franchisé ne permettent pas d’établir des prix pratiqués par Logis Pizza supérieurs de 30% à 40 % à celui du marché. Néanmoins, il ressort des éléments du débat que la stratégie d’approvisionnement exclusif ou quasi-exclusif auprès de Logis Pizza menée par la tête de réseau permettait de générer une rentabilité certaine de la société Pizza Center, filiale du groupe Pizza Sprint, sans pour autant qu’il soit sérieusement démontré que cette politique produise un avantage concurrentiel pour les franchisés en terme de prix d’achat ou soit nécessaire à la préservation de l’identité et la réputation du réseau.

L’ensemble de ces éléments, non seulement a été jugé par la Cour de céans dans son arrêt du 5 janvier 2022 comme caractérisant une pratique restrictive de concurrence créant un déséquilibre significatif entre les droits du franchiseur et les obligations des franchisés, mais en outre dans la présente situation des sociétés BS Distribution et S&B Sable constitue aussi une exécution déloyale du contrat de concert avec la société Pizza Center France de nature à engager leur responsabilité contractuelle à l’égard des sociétés franchisées.

2-sur le grief tiré du non-respect des obligations relatives à la transmission et actualisation du savoir-faire, l’assistance et le maintien de l’importance du réseau

Les sociétés franchisées et leur gérant font principalement valoir qu’à la suite de l’acquisition de l’ensemble des titres composant le capital social des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center par la société Domino’s Pizza France le 26 janvier 2016, l’intention de cette dernière était à court terme la conversion du réseau Sprint Pizza à l’enseigne Domino’s Pizza. Selon les franchisés, bien que l’annonce ait été faite de la poursuite des contrats de franchise pour ceux qui ne souhaitaient pas rejoindre le réseau concurrent Domino’s Pizza, la stratégie n’en demeurait pas moins de faire disparaître le réseau Sprint Pizza. Ils relèvent à cet effet un nombre restreint d’animateurs de réseau sans expérience suffisante, l’absence de plan marketing ou de projet de développement de la communication sur les réseaux sociaux, un savoir-faire ne faisant plus l’objet d’une actualisation, à savoir l’évolution du site internet, la diversification des modes de distribution ou la mise au point de nouvelles recettes, confinant à sa disparition. Ils observent que le franchiseur ne s’est plus employé à développer son réseau et que celui-ci est passé de janvier 2016 à juillet 2018 de 89 magasins à 9. Ils ajoutent qu’ils ont rencontré des difficultés logistiques à la suite de la reprise de la centrale d’achat par la société Transgourmet et qu’ils n’ont plus bénéficié de l’assistance du franchiseur. Ils en déduisent que le franchiseur a ainsi manqué à ses obligations contractuelles de nature à engager sa responsabilité.

Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza répliquent pour l’essentiel que le franchiseur a bien respecté ses obligations contractuelles jusqu’à la cessation des contrats de franchise, à savoir l’obligation de formation continue, l’obligation de marketing/communication par diverses campagnes de publicités, l’obligation d’assistance telle que l’organisation de comités de pilotage, la possibilité de commander en ligne et le maintien de l’usage de l’enseigne et des signes distinctifs. Elles soutiennent que le savoir-faire n’a pas disparu, qu’il a toujours été transmis et que le nombre de points de vente composant le réseau de franchise est indifférent au savoir-faire. En revanche elles prétendent que le franchiseur n’est pas tenu à une obligation d’actualisation du savoir-faire

ni de maintenir l’importance du réseau. Elles insistent sur le fait qu’aucun changement d’enseigne n’a été imposé aux franchisés, que les conversions constatées se sont toujours faites sur la base du volontariat.

Réponse de la Cour,

Comme l’expose le franchiseur lui-même dans ses conclusions (points 156 et suivants), la franchise répond à un schéma économique particulier. Elle repose sur un savoir-faire, développé par les investissements du franchiseur et dont il est proposé la réitération à des partenaires indépendants-les franchisés- avec lesquels il va collaborer pour créer un réseau de franchise. Par la conclusion du contrat de franchise permettant la transmission du savoir-faire du franchiseur, son assistance, et l’utilisation de son enseigne à laquelle est déjà attachée une clientèle, le franchisé va bénéficier d’un avantage concurrentiel.

En l’espèce, la Cour constate que dans le préambule du contrat signé par la société BS Distribution, il est expressément rappelé que le franchiseur a mis au point un savoir-faire et une méthode spécifique de fabrication, de commercialisation, de distribution et de livraison de pizzas à domicile expérimentée avec succès depuis 1992 et que le franchisé a conclu le contrat, convaincu de l’originalité et de l’intérêt de ce savoir-faire et de l’expérience du franchiseur. L’objet du contrat de franchise stipule que le franchiseur concède au franchisé, qui l’accepte, le droit d’exploiter la franchise Pizza Sprint dans le cadre de son activité de fabrication, de vente à emporter et de livraison à domicile de pizzas, le droit d’utiliser les signes distinctifs et le savoir-faire développés par le franchiseur et de bénéficier de son assistance commerciale et technique. Ainsi le franchiseur s’est engagé à assurer une formation non seulement initiale mais aussi continue (article 6.2.2.1) notamment sur les méthodes commerciales et marketing nouveaux produits en établissant chaque année civile un calendrier précisant les dates et objets des formations retenues et auxquelles doivent assister le franchisé ou ses collaborateurs. En contrepartie de l’accès au réseau, et de la mise à disposition de savoir-faire et de l’assistance apportée par le franchiseur, le franchisé doit s’acquitter d’un droit d’entrée et des redevances mensuelles (article 6.6).

Comme l’a relevé le tribunal, le franchiseur s’est en outre expressément engagé dans le contrat à faire évoluer la franchise. En effet l’article 6.3 intitulé ‘Respect de l’évolution du réseau’ du contrat BS Distribution stipule que :

‘Le franchisé sera tenu de respecter la cohésion et l’image du réseau à l’égard de la clientèle.

A cet égard, et compte tenu de l’obligation que s’impose le Franchiseur de faire évoluer la Franchise, le Franchisé s’engage à se conformer aux directives et instructions qui seront nécessaires à cette évolution, et notamment à modifier la présentation et le graphisme des signes distinctifs et /ou les conditions d’exercice de son activité’

La Cour constate également que dans le préambule du contrat signé par la société S&B Sable, il est expressément rappelé que le franchiseur a mis au point un savoir-faire et une méthode spécifique de fabrication, de commercialisation, de distribution et de livraison de pizzas à domicile expérimenté avec succès depuis 1992 et que le franchisé a conclu le contrat, convaincu de l’originalité et de l’intérêt de ce savoir-faire et de l’expérience du franchiseur. Il est précisé que le contrat a pour objet de permettre au Franchisé d’exploiter le savoir-faire Pizza Sprint, de distribuer les produits et services du savoir-faire et d’en arborer tous les signes distinctifs, dont la marque Pizza Sprint, dans le cadre d’un système de franchise. L’article 6.1 stipule que le franchiseur a mis au point un savoir-faire portant notamment sur ‘ une méthodologie d’exploitation incluant des méthodes de publicité, de promotion, de commercialisation, en vue d’un service compétitif de qualité auprès de la clientèle’. Ainsi le franchiseur s’est engagé à assurer une formation non seulement initiale mais aussi continue (article 7.2 ) par l’organisation de formations internes régulières portant sur les méthodes commerciales et marketing nouveaux produits. En contrepartie de l’accès

au réseau, et de la mise à disposition de savoir-faire et de l’assistance apportée par le franchiseur, le franchisé doit s’acquitter d’un droit d’entrée et des redevances mensuelles (article 7).

Le franchiseur s’est en outre expressément engagé à faire évoluer la franchise. En effet l’article 5.3 au titre des signes distinctifs stipule que :

‘Le Franchisé s’oblige à respecter l’image du Réseau Pizza Sprint, notamment à utiliser, à l’exclusion de tous autres, les codes couleurs du Franchiseur et les tenues du personnel.

A cet égard, et compte tenu de l’obligation que s’impose le Franchiseur de faire évoluer la Franchise, le Franchisé s’engage à se conformer aux directives et instructions qui seront nécessaires à cette évolution, et notamment à modifier la présentation et le graphisme des signes distinctifs et /ou les conditions d’exercice de son activité’.

Il s’ensuit que par la signature de ces contrats et le paiement des redevances, les franchisés entendent bien bénéficier pour leur activité d’un avantage concurrentiel tiré du savoir-faire et de l’expérience du franchiseur ainsi que de la notoriété du réseau. Aussi, tant le savoir-faire que la notoriété du réseau, sont des moyens mis au service de la constitution et de la préservation de cet avantage concurrentiel. Il appartient donc au franchiseur d’actualiser ce savoir-faire aux évolutions du secteur d’activité considéré et de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer de l’image et de la notoriété du réseau.

Or, à la suite de l’acquisition par la société Domino’s France des titres composant le capital social des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France, la Cour relève les éléments suivants :

Au moment de cette acquisition en janvier 2016, le projet à très court terme était la conversion du réseau Pizza Sprint à l’enseigne Domino’s Pizza (pièces franchisé PC n°61,63,64). Aux termes du contrat de franchise, le franchiseur Pizza Sprint n’avait aucune obligation d’information du franchisé qui n’avait effectivement pas été mis au courant de ce projet de cession et des conséquences sur le devenir du réseau, alors même que le contrat de franchise des sociétés BS Distribution et S&B Sable devaient respectivement se terminer en 2021 et 2023. Les franchisés ont été mis devant le fait accompli lors d’un séminaire du 13 octobre 2015 qui ne comportait pas cette information à l’ordre du jour ( pièce franchisé PC n° 58 – invitation au séminaire du 13 octobre 2015, pièce PC n°50). Alors que les franchisés n’avaient aucune information juridique et financières concrètes sur le devenir de leur contrat de franchise Pizza Sprint et de leur activité (pièce franchisé PC n°50), la conversion de l’enseigne était confirmée pour février 2016 par un courrier de M. [W] le 23 octobre 2015, en ces termes :

‘Il s’agit désormais de travailler ensemble à tourner la page Pizza Sprint (…) Des dates précises vont maintenant rythmer le passage à la nouvelle enseigne Domino’s (…) Enfin, au mois de février 2016, l’ensemble des points de vente en propre Pizza Sprint basculeront sous enseigne Domino’s Pizza. Ces points de vente deviendront alors vos centres de formation en support supplémentaire à l’académie Domino’s Pizza située à [Localité 12].’

Le site AC Franchise, dans son article consacré à la franchise Pizza Sprint indiquait (PC franchisé n°63) :

‘La’franchise’Pizza’Sprint,’née’en’1998,’est’une’enseigne’de’pizza’en’livraison’et’à’

emporter qui’a’connu’un’développement’conséquent.’De’3’restaurants’Pizza’Sprint’en’1998,’le’réseau’est passé’à’90’points’de’vente’Pizza’Sprint’en’2015.’

L’enseigne’a’été’rachetée’par’Domino’s’Pizza’fin’2015’et’les’points’de’vente’passeront’

sousenseigne’Domino’s’pour’la’plupart.’Le’5’février’2016,’l’enseigne’nous’a’écrit’”L’enseigne’Pizza Sprint’ne’développe’plus’son’réseau,’car’en’effet’elle’fusionne’et’est’absorbée’par’Domino’s’Pizza”. C’est’donc’auprès’de’Domino’s’Pizza’que’vous’pouvez’candidater’désormais.’

Le site Pizza Sprint renvoyait les internautes vers le site Domino’s Pizza (PC franchisé n°64).

Au motif avancé de conditions financières peu attractives au sein du réseau Domino’s Pizza, un certain nombre de franchisé Pizza Sprint, dont les sociétés BS Distribution et S&B Sable, n’ont pas souhaité la conversion de leur enseigne et exigé la poursuite de leur contrat de franchise Pizza Sprint en cours. Du fait de ce rachat, les clauses contractuelles ne permettaient pas non plus aux franchisés de résilier par anticipation leur contrat sans pénalité et ils étaient tenus à une obligation de non-concurrence post-contractuelle (pièce PC n°50).

La poursuite de la société franchiseur Fra-Ma-Pizz a finalement été confirmée en mars 2016 avec la présentation d’un nouvel organigramme et interlocuteur à la suite des inquiétudes manifestées par les franchisés n’ayant pas souhaité rejoindre le réseau Domino’s Pizza, dont MM. [V] et [G] (pièces franchiseur n°5.1, 5.6).

Certes, la société Fra-Ma-Pizz produit aux débats divers documents (pièces PC 5.1 à 5.34) attestant du maintien d’une présence opérationnelle minimum du franchiseur pour assurer :

– des examens annuels des chiffres du réseau, des audits de performance, et la communication au réseau de ces analyses (notamment PC n°5.2, 5.7, 5.8)

– des synthèses des visites des clients mystères (PC n°5.3, 5.9, 5.16, 5.31),

– la préparation et tenue régulière de comités de pilotage Copil (PC n° 5.11, 5.12, 5.18),

– de la tenue d’un site internet et de l’animation d’une page facebook (PC n°4.10, 4.11, 4.21)

En revanche, la Cour constate, notamment à la lecture des bilans annuels (notamment PC n°5.18,5.32) et des comptes-rendus de Copil, que sur la période 2016 à 2020 :

– les actions marketing se sont limitées chaque année à des campagnes nationales de Pizzas spéciales suivant le même dispositif d’action (guide campagne PC n°4.9 et suivantes) et de format publicitaire standard (affiche en magasin, e-mailing, une page facebook et site WEB)

– une newsletter en 2018,

– en quatre années, il est noté l’organisation de trois jeux et loterie, d’un menu spécial coupe du monde et d’un partenariat ‘planète sauvage’ou’spectacle Roméo et Juliette’,

– d’un programme de fidélisation de commande en ligne,

– aucune évolution de la carte, seul le bilan de 2018 faisant état de ‘l’intégration d’une nouvelle bouteille d’eau gazeuse’,

– l’animation sur les réseaux sociaux s’est limitée à un site internet et une page Facebook,

Au titre de la formation continue, il n’est présenté aucun plan annuel de formation tel que prévu au contrat de franchise. Il est justifié d’une formation ‘logiciel Talc’ en 2017 ( PC n° 5.13) et d’un courriel évoquant l’accueil au sein d’un magasin en 2018 d’une personne pour une formation ‘accueil client et prise de commande Talc’ (pièce PC n°5.27).

Les sociétés franchisées font observer, sans être sérieusement contredites, que le site internet Pizza Sprint n’a pas évolué depuis 2015, que le franchiseur n’a pas cherché à faire évoluer ses méthodes commerciales, tels que des plans de communication sur les réseaux sociaux, le développement d’une application pour passer des commandes en ligne sur un téléphone, le renouvellement des produits et des recettes, ou toute autre adaptation aux nouvelles attentes de la clientèle depuis 2016, et ce en comparaison de ce qui a été développé sous l’enseigne Domino’s Pizza (PC n°110).

A compter de 2018, les franchisés ont rencontré des difficultés pour l’assistance commerciale et technique de la part du franchiseur ( PC n°69, n°123 et suivantes). Le réseau n’était plus référencé courant 2020 (PC n°123).

Enfin, il n’est pas contesté que le réseau Pizza Sprint qui comptait 89 magasins en 2016, a été réduit à 35 magasins en 2017, puis à 11 magasins en juillet 2018, puis à 4 magasins en 2020. Si le franchiseur fait état de ce que les franchisés ont continué à exploiter, jusqu’à la cessation des contrats en 2020, leur magasin sous l’enseigne et les signes distinctifs Pizza Sprint, force est de constater que ces signes de ralliement de la clientèle ne pouvaient avoir qu’un impact commercial réduit au regard de la notoriété déclinante voire ‘moribonde’ du réseau dès l’année 2016.

Il ressort de l’ensemble de ces constatations, qu’à compter de l’année 2016, le franchiseur a manqué à ses obligations contractuelles en ne fournissant plus d’effort d’actualisation de son savoir-faire, en ne respectant pas son obligation de formation et d’assistance sur les méthodes commerciales et marketing nouveaux produits, et en contribuant à la dégradation de la notoriété du réseau.

Ces manquements caractérisant une inexécution partielle du contrat de franchise sont suffisamment graves pour justifier la résiliation des contrats de franchise conclus par les sociétés BS Distribution et S&B Sable aux torts exclusifs du franchiseur.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

3- Sur la responsabilité de la société Domino’s Pizza France :

Dans sa documentation financière semestrielle pour la période allant jusqu’au 1er janvier 2017 (pièce franchisé PC n°65), la société Domino’s Pizza annonçait que la fin de la conversion du réseau Pizza Sprint était attendue à la fin de l’année fiscale 2017, soit le 30 juin 2017. Dans le rapport de gestion au président DPF 2018 (Pièce francisé PC n°109), il est indiqué : ‘ Au titre de l’exercice en cours qui sera clos le 30 juin 2019, nous prévoyons de continuer notre progression tant en nombre de points de vente qu’en chiffre d’affaires par magasin. Nous prévoyons également de continuer la conversion des magasins sous enseigne Pizza Sprint sous l’enseigne Domino’s Pizza.’ Il ressort du rapport du commissaire aux comptes sur les comptes DPF 2018 (pièce franchisé PC n°92) que la majeure partie des activités des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France a été transférée à la société Domino’s Pizza France après leur acquisition.

Aussi, de part sa propre stratégie de développement, la société Domino’s Pizza France a contribué aux manquements contractuels de la société franchiseur Fra-Ma-Pizz et des préjudices en découlant à compter de 2016.

Ces agissements sont de nature à engager la responsabilité extra-contractuelle de la société Domino’s Pizza France qui sera condamnée in solidum avec la société Fra-Ma-Pizz à la réparation de ces préjudices.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

IV- Sur les demandes indemnitaires de la société BS Distribution

1- Sur la demande au titre de la restitution du droit d’entrée

La société franchisée réclame la somme de 10 000 euros au titre du remboursement du droit d’entrée.

L’annulation du contrat de franchise n’ayant pas été prononcée, et aucun manquement n’ayant été retenu au titre de l’accès proprement dit au réseau, la société franchisée sera déboutée de cette demande et le jugement confirmé sur ce point.

2- Sur la demande au titre des redevances

Au titre de l’article 6.6 du contrat de franchise, en contrepartie de la mise à disposition du savoir-faire et de l’assistance apportée par le franchiseur pendant toute l’exécution du contrat, le franchisé était tenu au versement d’une redevance hors taxes de 3,5% de son chiffre d’affaires HT.

La société franchisée demande la condamnation in solidum de la société Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui payer la somme de 132 943 euros au titre de la restitution des redevances versées depuis le début du contrat de franchise.

L’annulation du contrat de franchise n’a pas été prononcée, en sorte que la société franchisée ne peut demander la restitution de l’intégralité des redevances payées.

En revanche, il a été relevé des manquements contractuels de la société Fra-Ma-Pizz ayant conduit au non-respect partiel des obligations du franchiseur en contrepartie desquelles la société franchisée lui a versé des redevances à compter du 1er janvier 2016.

La Cour évalue le préjudice en résultant à 50% du montant des redevances versées depuis 2016 et jusqu’à la fin du contrat. Il résulte des pièces produites par la société BS Distribution (n°7, 14 et 18) qu’elle a versé la somme de 70 273 euros HT au titre de la redevance pour les exercices clos au 30 juin des années 2016 à 2020 (30 septembre). Le préjudice est estimé à 35 136,50 euros.

La société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à restituer la somme de 35 136,50 euros à la société BS Distribution au titre des redevances.

La société BS Distribution sera déboutée du surplus de sa demande à ce titre et de sa demande de condamnation in solidum de la société Domino’s Pizza qui n’a pas perçu ces redevances

Le jugement sera infirmé sur ces points.

3- Sur le préjudice de pertes de marge sur les approvisionnements

Au motif d’une sur-marge pratiquée de 40% du prix du marché, la société BS Distribution réclame la somme de 370 631 euros, représentant 40% du prix de ses achats (926 578 euros) auprès de la société Pizza Center depuis le début du contrat de franchise. Elle fait valoir que cette pratique de sur-marge résulte du comportement de la société Fra-Ma-Pizz et a été comptablement perçue par la société Pizza Center et Fra-Ma-Pizz, en sorte que ces sociétés doivent être condamnées in solidum à réparer son préjudice.

La société Fra-Ma-Pizz soutient pour l’essentiel que, outre le fait que les manquements allégués au titre de l’obligation d’approvisionnement ne sont pas démontrés, les pièces de la société franchisée ne permettent pas non plus d’établir que la société Pizza Center France aurait pratiqué une sur-facturation de l’ordre de 30 à 40 % par rapport aux concurrents et sur des produits substituables.

Réponse de la Cour,

Des motifs qui précédent, il ressort que de concert, la société Pizza Center France en sa qualité de société fournisseur du franchisé et la société Fra-Ma-Pizz en sa qualité de franchiseur ont engagé leur responsabilité contractuelle dans la mise en oeuvre de la clause d’approvisionnement du contrat de franchise de manière déloyale et source d’un déséquilibre significatif, et ce au préjudice de la société franchisée.

Il n’est effectivement pas démontré par la société franchisée une sur-facturation à proportion de 40% des prix du marché.

Néanmoins, au vu des éléments soumis aux débats (notamment Pièce franchisé PC n° 26), la Cour évalue le préjudice subi au titre de ces pratiques à un surcoût de 15 % des achats effectués par le franchisé auprès de la société Pizza Center France.

Il ressort du récapitulatif des achats HT réalisés par la société BS Distribution (pièce n°8) de 2012 au 30 juin 2017 (fin de l’approvisionnement auprès de la société Pizza Center France) un montant total d’achat pour cette période de 830 432 euros auprès de Logis Pizza, soit un préjudice évalué à la somme de 124 564,80 euros.

Dès lors, les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France seront condamnées in solidum à payer à la société BS Distribution la somme de 124 564,80 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la mise en oeuvre fautive de l’obligation d’approvisionnement.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

4- Sur la demande au titre des prestations marketing

La société franchisée fait valoir qu’une somme de 150 euros par mois était facturée au titre d’un pack marketing, alors que la prestation était incluse dans le contrat de franchise de base, soit l’équivalent de 18 000 euros sur la durée du contrat. Elle demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui payer cette somme.

Toutefois la société franchisée ne produit aux débats aucun élément permettant de mettre en évidence que cette facturation complémentaire ne correspondait à aucune prestation effective.

La société franchisée sera déboutée de sa demande et le jugement sera confirmé sur ce point.

5-Sur la demande au titre de la perte de la valeur du fonds

La société franchisée fait valoir qu’en l’absence de contrat de franchise, le fonds de commerce perd toute sa valeur. Elle sollicite la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à une indemnisation égale au ratio de valorisation appliqué lors de l’acquisition du réseau Pizza Sprint par Domino’s Pizza France soit 115% de son chiffre d’affaires réalisé en 2017 et, subsidiairement, égale au ratio pratiqué lors de cessions individuelles de fonds de commerce au sein du réseau Pizza Sprint soit 87% du chiffre d’affaires annuel moyen.

La société BS Distribution réclame une indemnisation à titre principal de 431 242 euros, soit l’équivalent de 115% de son chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice 2017 (374 993 x 115%).

Subsidiairement, la société BS Distribution fait valoir d’une part que les données de l’administration fiscale évaluent la valeur d’un fonds de commerce de pizzeria entre 50 et 100 % du chiffre d’affaires et que d’autre part lorsque le réseau existait les cessions de fonds étaient réalisées sur une base de 80 à 85% du chiffre d’affaires. Elle explique avoir acheté ce fonds en juillet 2011 pour la somme de 290 000 euros, soit l’équivalent de 88% du chiffre d’affaires moyen des trois derniers exercices. Or, elle relève qu’elle a difficilement cédé son fonds de commerce le 1er octobre 2020 pour la somme de 190 000 euros, alors que la valorisation espérée du fonds était de 87% du chiffre d’affaires annuel sur les derniers exercices de 2017 à septembre 2020 (440  613 euros), soit la somme de 383 333 euros. Elle demande subsidiairement l’indemnisation de la différence à hauteur de 193 333 euros.

En réplique, les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France rappellent les principes de réparation intégrale du préjudice et de répartition de la charge de la preuve, et prétendent que les sociétés franchisées ne démontrent pas l’existence d’une perte de valeur de leur fonds, ni n’apportent d’éléments probants au soutien de leur évaluation de cette perte de valeur. Elles soutiennent que leur préjudice n’est certain ni pour les sociétés qui n’ont pas cédé leur fonds – puisque la perte de valeur n’est alors pas acquise, ni pour celles qui l’ont cédé puisque le prix obtenu est alors cohérent avec leur valeur intrinsèque. En toute hypothèse, elles entendent produire un document démontrant que les praticiens considèrent que le prix de cession d’un fonds de commerce de restauration rapide dans le secteur de pizzas peut être évalué en appliquant au chiffre d’affaires de la société concernée un coefficient multiplicateur compris entre 40 et 80%.

Elles précisent qu’en toute hypothèse aucun lien de causalité ne saurait être établi entre une faute imputable au franchiseur et une hypothétique perte de valeur de ces fonds.

Réponse de la Cour,

La valorisation du fonds de commerce à hauteur de 115% du chiffre d’affaires est dépourvue de pertinence.

La Cour relève que la société BS Distribution produit aux débats :

– un acte d’acquisition du fonds de commerce par la société BS Distribution du 8 juillet 2011 et ce avec transfert du contrat de franchise Pizza Sprint conclu avec la société Fra-Ma-Pizz, pour la somme de 290 000 euros (190 000 éléments incorporels, 100 000 € éléments corporels), soit un prix correspondant à 88% du chiffre d’affaires des trois derniers exercices,

– un acte de cession du fonds de commerce par la société BS Distribution du 1er octobre 2020, sans transfert de contrat de franchise, la société BS Distribution faisant état dans l’acte de cession ( page 18) de la résiliation du contrat de franchise par jugement et de sa volonté de faire son affaire personnelle de la procédure en cours, pour un prix de 190 000 euros (166 179,41 € pour les éléments incorporels et 23 820,59 € pour le matériel), soit un prix correspondant à 46% du chiffre d’affaires des trois derniers exercices au 30 juin 2019,

– le relevé des chiffres d’affaires faisant apparaître une progression de celui-ci depuis 2017, de 374 993 € à 418 551€ en 2019 et 530 145 € du 1er juillet 2019 au 30 septembre 2020,

Si comme le font valoir les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza la vente du fonds à 46% du chiffre d’affaires peut s’expliquer par divers paramètres et notamment par l’état des locaux et du matériel, il peut néanmoins être déduit des éléments relevés une perte de la valeur du fonds par le fait que le contrat de franchise n’a pas été transféré du fait du prononcé de la résiliation du contrat de franchise.

A partir des fourchettes de valeurs de commerce de pizzeria données par les parties (pièces franchisé PC n°129 et 130, pièce n°6 du franchiseur), la Cour retient un minimum de valorisation du fonds à 65 % du chiffres d’affaires annuel moyen des trois derniers exercices 2017 à 2019 précédant la cession (410 769 € x 0,65), soit une perte de valeur de 76 999,85 euros (266 999,85 € -190 000 €).

Dès lors, les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France seront condamnées in solidum à payer à la société BS Distribution la somme de 76 999,85 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

6- Sur la demande au titre de la perte des apports dans la société S&B Laval

La société BS Distribution réclame la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui verser la somme de 49 575 euros au titre de la perte des apports faits dans la société S&B Laval ayant fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

Comme le font valoir à juste titre les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France, la société BS Distribution est irrecevable en sa demande, seul le liquidateur a qualité à faire cette demande ayant trait à une fraction du préjudice collectif des créanciers. Au surplus, les pièces versées sont manifestement insuffisantes pour démontrer l’existence d’un préjudice en lien avec les manquements retenus.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a écarté cette demande.

V- Sur les demandes indemnitaires de la société S&B Sable

1- Sur la demande au titre de la restitution du droit d’entrée

La société franchisée réclame la somme de 10 000 euros au titre du remboursement du droit d’entrée.

L’annulation du contrat de franchise n’ayant pas été prononcée, et aucun manquement n’ayant été retenu au titre de l’accès proprement dit au réseau ainsi que de l’assistance et formation initiale, la société franchisée sera déboutée de cette demande et le jugement confirmé sur ce point.

2- Sur la demande au titre des redevances

Au titre de l’article 17.2 du contrat de franchise, en contrepartie de la mise à disposition du savoir-faire et de l’assistance apportée par le franchiseur pendant toute l’exécution du contrat, le franchisé était tenu au versement d’une redevance hors taxes de 3,5% de son chiffre d’affaires HT.

La société franchisée demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui payer la somme de 76 274 euros au titre de la restitution des redevances versées depuis le début du contrat de franchise.

L’annulation du contrat de franchise n’a pas été prononcée, en sorte que la société franchisée ne peut demander la restitution de l’intégralité des redevances payées.

En revanche, il a été relevé des manquements contractuels de la société Fra-Ma-Pizz ayant conduit au non-respect partiel des obligations du franchiseur en contrepartie desquelles la société franchisée lui a versé des redevances à compter du 1er janvier 2016.

La Cour évalue le préjudice en résultant à 50% du montant des redevances versées depuis 2016 et jusqu’à la fin du contrat. Il résulte des pièces produites par la société S&B Sable (n°7 et 19) qu’elle a versé la somme de 47 339 euros HT au titre de la redevance pour les exercices clos au 30 juin des années 2016 à 2019 (l’exercice 2020 n’est pas justifié). Le préjudice est estimé à 23 669,50 euros.

La société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à restituer la somme de 23 669,5 euros à la société S&B Sable au titre des redevances.

La société S&B Sable sera déboutée du surplus de sa demande à ce titre et de sa demande de condamnation in solidum de la société Domino’s Pizza qui n’a pas perçu ces redevances

Le jugement sera infirmé sur ces points.

3- Sur le préjudice de pertes de marge sur les approvisionnements

Au motif d’une sur-marge pratiquée de 40% du prix du marché, la société S&B Sable réclame la somme de 167 408 euros, représentant 40% du prix de ses achats (418 522 euros) auprès de la société Pizza Center depuis le début du contrat de franchise jusqu’au 30 avril 2018. Elle fait valoir que cette pratique de sur-marge résulte du comportement de la société Fra-Ma-Pizz et a été comptablement perçue par la société Pizza Center et Fra-Ma-Pizz, en sorte que ces sociétés doivent être condamnées in solidum à réparer son préjudice.

La société Fra-Ma-Pizz soutient pour l’essentiel que, outre le fait que les manquements allégués au titre de l’obligation d’approvisionnement ne sont pas démontrés, les pièces de la société franchisée ne permettent pas non plus d’établir que la société Pizza Center France aurait pratiqué une sur-facturation de l’ordre de 30 à 40 % par rapport aux concurrents et sur des produits substituables.

Réponse de la Cour,

Des motifs qui précédent, il ressort que de concert, la société Pizza Center France en sa qualité de société fournisseur du franchisé et la société Fra-Ma-Pizz en sa qualité de franchiseur ont engagé leur responsabilité contractuelle dans la mise en oeuvre de la clause d’approvisionnement du contrat de franchise de manière déloyale et source d’un déséquilibre significatif, et ce au préjudice de la société franchisée.

Il n’est effectivement pas démontré par la société franchisée une sur-facturation à proportion de 40% des prix du marché.

Néanmoins, au vu des éléments soumis aux débats (notamment Pièce franchisé PC n° 26), la Cour évalue le préjudice subi au titre de ces pratiques à un surcoût de 15 % des achats effectués par le franchisé auprès de la société Pizza Center France.

Il ressort du récapitulatif des achats HT réalisés par la société S&B Sable (pièce n°8) de 2012 au 30 juin 2017 (fin de l’approvisionnement auprès de la société Pizza Center France) un montant total d’achat pour cette période de 347 546 euros auprès de Logis Pizza, soit un préjudice évalué à la somme de 52 132 euros.

Dès lors, les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France seront condamnées in solidum à payer à la société S&B Sable la somme de 52 132 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la mise en oeuvre fautive de l’obligation d’approvisionnement.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

4- Sur la demande au titre des prestations marketing

La société franchisée fait valoir qu’une somme de 150 euros par mois était facturée au titre d’un pack marketing, alors que la prestation était incluse dans le contrat de franchise de base, soit l’équivalent de 18 000 euros sur la durée du contrat. Elle demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à lui payer cette somme.

Toutefois la société franchisée ne produit aux débats aucun élément permettant de mettre en évidence que cette facturation complémentaire ne correspondait à aucune prestation effective.

La société franchisée sera déboutée de sa demande et le jugement sera confirmé sur ce point

5- Sur la demande au titre de la perte de la valeur du fonds

La société franchisée fait valoir qu’en l’absence de contrat de franchise, le fonds de commerce perd toute sa valeur. Elle sollicite la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France à une indemnisation égale au ratio de valorisation appliqué lors de l’acquisition du réseau Pizza Sprint par Domino’s Pizza France soit 115% de son chiffre d’affaires réalisé en 2017 et, subsidiairement, égale au ratio pratiqué lors de cessions individuelles de fonds de commerce au sein du réseau Pizza Sprint soit 87% du chiffre d’affaires annuel moyen.

La société S&B Sable réclame une indemnisation à titre principal de 379 230 euros, soit l’équivalent de 115% de son chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice 2017 (329 766 x 115%).

Subsidiairement, la société S&B Sable fait valoir d’une part que les données de l’administration fiscale évaluent la valeur d’un fonds de commerce de pizzeria entre 50 et 100 % du chiffre d’affaires et que d’autre part lorsque le réseau existait les cessions de fonds étaient réalisées sur une base de 80 à 85% du chiffre d’affaires. Or, elle relève qu’elle

a cédé son fonds de commerce le 14 février 2020 pour la somme de 260 000 euros, alors que la valorisation espérée du fonds était de 87% du chiffre d’affaires annuel sur les derniers exercices de 2017 à 2019 (371 565 euros), soit la somme de 323 261 euros. Elle demande subsidiairement l’indemnisation de la différence à hauteur de 63 261 euros.

En réplique, les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France rappellent les principes de réparation intégrale du préjudice et de répartition de la charge de la preuve, et prétendent que les sociétés franchisées ne démontrent pas l’existence d’une perte de valeur de leur fonds, ni n’apportent d’éléments probants au soutien de leur évaluation de cette perte de valeur. Elles soutiennent que leur préjudice n’est certain ni pour les sociétés qui n’ont pas cédé leur fonds – puisque la perte de valeur n’est alors pas acquise, ni pour celles qui l’ont cédé – puisque le prix obtenu est alors cohérent avec leur valeur intrinsèque. En toute hypothèse, elles entendent produire un document démontrant que les praticiens considèrent que le prix de cession d’un fonds de commerce de restauration rapide dans le secteur de pizzas peut être évalué en appliquant au chiffre d’affaires de la société concernée un coefficient multiplicateur compris entre 40 et 80%.

Elles précisent qu’en toute hypothèse aucun lien de causalité ne saurait être établi entre une faute imputable au franchiseur et une hypothétique perte de valeur de ces fonds.

Réponse de la Cour,

La valorisation du fonds de commerce à hauteur de 115% du chiffre d’affaires est dépourvue de pertinence.

La Cour relève que le fonds a été cédé par acte du 14 février 2020 pour un prix correspondant à 66% du chiffre d’affaires moyen des trois derniers exercices précédant la cession, soit un prix se situant dans la moyenne des fourchettes de coefficients d’évaluation produit par les parties (pièces franchisé PC n° 129 et 130, pièce n°6 du franchiseur), ce prix pouvant dès lors correspondre à celui du marché.

En l’absence d’autre élément pour étayer sa demande, la société S&B Sable ne justifie pas de l’existence d’un préjudice certain concernant la perte de valeur de son fonds de commerce en lien avec les manquements retenus.

Dès lors la société S&B Sable sera déboutée de sa demande et le jugement sera infirmé de ce chef de préjudice.

VI-Sur les demandes de MM. [V] et [G]

1- Sur la demande au titre des apports

MM. [V] et [G] réclament la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à leur verser la somme de 60 000 euros au titre de la perte de leurs apports.

Comme le relèvent à juste titre les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza, les demandeurs ne produisent aucune pièce à l’appui de leur demande ni ne précisent lequel d’entre eux aurait procédé à cet apport et pour quelle société.

MM. [V] et [G] seront déboutés de leur demande. Le jugement sera confirmé sur ce point.

2-Sur la demande au titre des engagements de caution

MM. [V] et [G] réclament la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à leur verser chacun la somme de 14 648,33 euros au titre des sommes payées en raison de leurs engagements de caution bancaire.

Comme le relèvent à juste titre les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza :

– M. [G] ne justifie ni avoir souscrit un engagement de caution, ni avoir été appelé en qualité de caution dans le cadre d’une défaillance d’une société,

– M. [V], ne justifie d’aucun lien de causalité entre la défaillance de la société S&B Sable envers laquelle il s’est engagé et les manquements reprochés aux sociétés intimées;

MM. [V] et [G] seront déboutés de leur demande. Le jugement sera confirmé sur ces points.

3- Sur la demande au titre d’un préjudice moral

MM. [V] et [G], en leur qualité de gérant de trois sociétés, exposent que les multiples difficultés rencontrées au cours de l’exécution du contrat, l’orientation autoritaire de M. [W], son absence de loyauté à l’égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d’obtenir des réponses sur l’évolution de leur activité, l’importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, leur ont causé à chacun à titre personnel un préjudice moral à hauteur de 90 000 euros chacun.

Les difficultés récurrentes auxquelles ont été confrontés MM. [V] et [G] tout au long du contrat de franchise (notamment pièces PC n°38, 86,123 et 124) et telles que constatées au titre des manquements des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza, ont été de nature à leur causer un préjudice moral évalué par la Cour à la somme de 15 000 chacun.

Les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza seront condamnées in solidum à verser à MM. [V] et [G] à chacun la somme de 15 000 euros au titre de leur préjudice moral.

Le jugement sera infirmé sur le montant du préjudice moral.

VII-Sur les demandes des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza

1- Sur la demande d’indemnité pour résiliation anticipée du contrat de franchise

La société Fra-Ma-Pizz fait valoir que la société S&B Sable a informé le franchiseur a posteriori de la cession de son fonds de commerce, et que le franchiseur par courrier du 11 mars 2020 a pris acte de cette cession et indiqué à la société S&B Sable de la résiliation anticipée du contrat de franchise afférent au fonds avant son terme (31 août 2023) à ses torts exclusifs. En conséquence, la société Fra-Ma-Pizz demande la condamnation de la société S&B Sable à lui verser la somme de 76 381,20 euros à titre d’indemnisation.

Toutefois, le jugement ayant été confirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de franchise aux torts du franchiseur à la date de son prononcé, soit le 3 décembre 2019, la société Fra-Ma-Pizz sera déboutée de sa demande pour une cession ayant eu lieu postérieurement le 14 février 2020.

2- Sur les demandes au titre d’une procédure abusive

Compte tenu du sens de la décision rendue, les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France seront déboutées de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et de voir prononcer une amende civile au titre d’un abus d’ester en justice.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

VIII- Sur la demande de capitalisation des intérêts

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil.

IX- Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza France aux dépens de première instance, et à payer aux sociétés BS Distribution et S&B Sable ainsi qu’à MM. [V] et [G] la somme de 15 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France, succombant partiellement en appel, seront condamnées aux dépens.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France seront déboutées de leurs demandes et condamnées in solidum à payer aux sociétés BS Distribution et S&B Sable ainsi qu’à MM. [V] et [G] la somme de 5 000 euros chacun.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu’il a :

-déclaré irrecevables les demandes des sociétés BS Distribution et S&B Sable et de MM.[V] et [G] en ce qu’elles tendent à annuler ou résilier le contrat de franchise aux torts de Pizza Center France,

-débouté les sociétés BS Distribution et S&B Sable de leur demande au titre des pertes de marge sur les approvisionnements,

-condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à rembourser à la société BS Distribution la somme de 11 059 euros au titre des redevances de franchise, à parfaire des redevances versées depuis mai 2018 ;

-condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à rembourser à la société S&B sable la somme de 10 496 euros au titre des redevances de franchise, à parfaire des redevances versées depuis mai 2018 ;

-condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à verser à la société BS Distribution la somme de 225 000 euros au titre de la perte de valeur de son fonds,

– condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à verser à la société S&B sable la somme de 198 000 euros au titre de la perte de valeur de son fonds,

-condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à verser à MM. [V] et [G] chacun la somme de 30 000 euros au titre de leur préjudice moral,

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur ces chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare recevables les prétentions formulées par les sociétés BS Distribution et S&B Sable et MM.[V] et [G] à l’encontre des sociétés Domino’s Pizza France et Pizza Center France;

Condamne in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France à verser à la société BS Distribution la somme de 124 564,80 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la mise en oeuvre fautive de l’obligation d’approvisionnement ;

Condamne in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France à verser à la société S&B Sable la somme de 52 132 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la mise en oeuvre fautive de l’obligation d’approvisionnement ;

Condamne la société Fra-Ma-Pizz à restituer à la société BS Distribution la somme de 35 136,50 euros au titre des redevances pour les années 2016 à 2020 ;

Condamne la sociétés Fra-Ma-Pizz à restituer à la société S&B sable la somme de 23 669,5 euros au titre des redevances pour les exercices des années 2016 à 2019 ;

Condamne in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à verser à la société BS Distribution la somme de 76 999,85 euros au titre de la perte de valeur de son fonds ;

Déboute la société S&B Sable de sa demande au titre de la perte de valeur de son fonds ;

Déboute la société Fra-Ma-Pizz de sa demande d’indemnité de résiliation anticipée du contrat de franchise conclu avec la société S&B Sable ;

Condamne in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino’s Pizza à verser à MM. [V] et [G] chacun la somme de 15 000 euros au titre de leur préjudice moral ;

Condamne in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France aux dépens d’appel ;

Condamne in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino’s Pizza France à payer aux sociétés BS Distribution et S&B Sable ainsi qu’à MM. [V] et [G] la somme de 5 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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