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ARRÊT DU
29 Septembre 2023
N° 1125/23
N° RG 21/01088 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TV6U
PL/VM
Jugement du
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LILLE
en date du
26 Mai 2021
(RG 19/00578 -section 4)
GROSSE :
aux avocats
le 29 Septembre 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
– Prud’Hommes-
APPELANTE :
Mme [P] [R]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Marion LEMERLE, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
S.A.S. DESMAZIERES
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Alice MONROSTY, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS : à l’audience publique du 27 Juin 2023
Tenue par Philippe LABREGERE
magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Angelique AZZOLINI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Philippe LABREGERE
: MAGISTRAT HONORAIRE
Pierre NOUBEL
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Muriel LE BELLEC
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Angelique AZZOLINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 07 Mars 2023
EXPOSE DES FAITS
[P] [R] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 août 1981 par la société DESMAZIERES
Par jugement du 5 février 2018, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ordonné l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société DESMAZIERES, et a fixé la date de cessation des paiements au 1er février 2018. La poursuite de l’activité de la société et la mise en place d’un plan de redressement ont été autorisées par jugement du 25 juillet 2018.
Dans le cadre du plan de redressement de la société, il a été élaboré et adopté un plan de sauvegarde de l’emploi conduisant à un licenciement collectif consécutif à la suppression de 116 emplois sur 985. Par courrier du 26 novembre 2018 remis en main propre, dans le cadre de son obligation de recherche de reclassement, la société a proposé à [P] [R], qui était employée en qualité de directeur du marketing, quatre postes de cadre et un poste d’agent de maîtrise. La salariée a refusé ces différentes offres.
Par ordonnance du 5 décembre 2018, le juge-commissaire a autorisé la société DESMAZIERES à procéder à des licenciements.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 décembre 2018, l’administrateur judiciaire a notifié à [P] [R] son licenciement reposant sur des difficultés économiques persistantes rencontrées par l’entreprise ayant nécessité une réorganisation entraînant la suppression de son poste de travail et l’impossibilité de procéder à son reclassement.
Par requête reçue le 13 juin 2019, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Lille afin de faire constater l’illégitimité de son licenciement et d’obtenir un rappel de prime qualitative et le versement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts.
Par jugement en date du 26 mai 2021, le conseil de prud’hommes a débouté la salariée de sa demande et l’a condamnée au versement de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Le 23 juin 2021, [P] [R] a interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance en date du 7 mars 2023, la procédure a été clôturée et l’audience des plaidoiries a été fixée au 28 mars 2023.
Selon ses conclusions récapitulatives et en réplique reçues au greffe de la cour le 14 octobre 2022, [P] [R] appelante, sollicite de la cour l’infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société à lui verser :
-346002,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-25950,19 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis
-2595,02 euros au titre des congés payés afférents
-21000 euros à titre de rappel de prime qualitative
-2100 euros au titre des congés payés afférents
-5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’appelante expose qu’elle conteste non l’autorisation donnée par le juge-commissaire de supprimer le poste de directeur marketing mais l’effectivité de cette suppression par la société DESMAZIERES, que le poste de directeur marketing a reçu une nouvelle dénomination, à savoir directeur de l’offre, mais a récupéré l’ensemble des missions qui lui étaient confiées, que [K] [B], recrutée en août 2019 afin de pourvoir le poste de directeur de l’offre, indique dans son profil Linkedin avoir travaillé durant sa période d’emploi au sein de la société en étroite collaboration avec la direction marketing, que la société DESMAZIERES ne l’a jamais informée de l’existence du poste de directeur de l’offre avant son licenciement, qu’alors qu’elle était membre du comité de direction, bénéficiait du statut de cadre et percevait une rémunération annuelle de l’ordre de 9000 euros bruts hors prime, la société ne lui a proposé aucun emploi relevant de la même catégorie ou un emploi équivalent assorti d’une rémunération similaire, que tous les postes proposés correspondaient à des emplois de catégorie inférieure, que le poste de directeur de l’offre ne faisait pas partie des propositions de reclassement, que le parcours professionnel de [K] [B] était celui d’un directeur junior, que celle-ci avait précédemment occupé des fonctions de responsable marketing, alors que l’appelante pouvait se prévaloir de trente-sept années d’ancienneté aux fonctions de directeur marketing et disposait de toutes les compétences pour exercer les fonctions de directeur de l’offre telles que présentées dans le cadre du redressement judiciaire, qu’en outre, son employeur était tenu de la former durant toute sa carrière afin d’assurer son employabilité, que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, que le barème Macron ne peut être appliqué pour l’appréciation du préjudice du fait de sa non-conformité à l’article 10 de la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail et à l’article 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, qu’étant âgée de 58 ans au moment de son licenciement, elle appartient à une tranche d’âge pour laquelle la recherche d’un nouvel emploi est particulièrement problématique, qu’il ne lui manquait que quatre années pour bénéficier d’une retraite à taux plein, qu’elle n’est pas parvenue à retrouver un emploi et s’est trouvée au chômage, que l’ensemble des membres du personnel de la société DESMAZIERES bénéficiait d’une prime qualitative, calculée en fonction des objectifs atteints ou non, versée en juin et décembre de l’année, que les membres du comité de direction, dont elle faisait partie, percevaient, au même titre que l’ensemble du personnel, depuis 2010, une prime qualitative versée en juin et une seconde, du même montant, versée en toute fin d’année ou en début d’année suivante, qu’à compter de juin 2017, son employeur est revenu unilatéralement sur cet usage en n’accordant plus que la moitié de ces primes qualitatives, qu’il n’a pas respecté les modalités de dénonciation de cet usage, que la dénonciation lui est inopposable, qu’elle rapporte la preuve d’un usage constant et fixe, qu’il lui est dû un rappel de prime qualitative pour les mois de juin 2017, janvier, juin et décembre 2018, que cette prime étant liée à la qualité du travail fourni, elle doit être assimilée à un salaire.
Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 26 octobre 2021, la société DESMAZIERES sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris, à titre subsidiaire, l’évaluation du montant des dommages et intérêts à la somme de 25950 euros, soit l’équivalent de trois mois de rémunération, et du rappel de primes à la somme de 15750 euros brut et, en tout état de cause, la condamnation de l’appelante au paiement de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’intimée soutient, sur le rappel de prime, qu’il appartient à l’appelante d’apporter la preuve de l’existence d’un usage concernant le versement d’une prime qualitative, et qui n’aurait pas été régulièrement dénoncé par l’entreprise, alors que le montant de la prime a été réduit de moitié à compter de l’année 2017, qu’elle n’apporte, en cause d’appel, aucun élément complémentaire susceptible de combler sa carence qui a pourtant été relevée par le conseil de prud’hommes, que jusqu’en 2004, il existait un usage concernant une prime qualitative basée sur les performances des collaborateurs, qu’en 2004, il a été régulièrement dénoncé, que si certains membres du comité de direction se sont vu attribuer des primes, tant le principe que leur montant reposent sur une décision discrétionnaire du directeur général, que le montant de cette prime discrétionnaire a été évoqué individuellement avec chacun des membres du comité de direction qui en étaient bénéficiaires, qu’en toute hypothèse, l’appelante sollicite le versement de la prime relative au deuxième semestre 2018 alors qu’elle n’était plus présente au sein des effectifs, que la cour ne pourrait que limiter le montant dû à la somme de 15750 euros brut, outre les congés payés afférents, soit l’équivalent d’un rappel de rémunération au titre des mois de juin 2017, décembre 2017 et juin 2018, sur la rupture du contrat de travail, que le licenciement de l’appelante est intervenu conformément à l’ordonnance rendue par le juge commissaire le 5 décembre 2018, que la salariée n’est pas fondée à contester ou à remettre en cause la suppression de son poste devant le juge prud’homal, que le poste de directeur marketing qu’elle occupait a bien été supprimé, qu’il est visé dans le cadre de la note d’information remise aux instances représentatives du personnel comme faisant partie des suppressions de postes envisagées par la direction, que personne n’a été recruté pour occuper le poste de directeur marketing postérieurement au licenciement, que dans le cadre de la réorganisation de l’entreprise, le poste de directeur des achats a été supprimé et « remplacé » par un poste de directeur de l’offre, que le poste de directeur marketing bien a été supprimé, que ses missions ont été réparties entre un responsable CRM/communication, un responsable e-commerce et le directeur général, que la création d’un poste de directeur de l’offre n’a jamais eu pour objectif de compenser la suppression de celui de directeur marketing, que le fait que [K] [B], directrice de l’offre, indique dans son profil Linkedin qu’elle travaillait en collaboration avec le marketing démontre qu’il s’agissait bien de deux services distincts, que la société a respecté son obligation de recherche de solutions de reclassement, qu’elle a adressé à l’appelante, par courrier du 26 novembre 2018, quatre propositions de reclassement relatives à des postes relevant du même niveau de qualification que son précédent emploi, à savoir le statut cadre et plus particulièrement cadre en forfait jours, qu’elle lui a proposé également des postes relevant d’une catégorie inférieure, que l’appelante ne disposait pas des compétences nécessaires pour occuper le poste de directeur de l’offre, que la société produit la fiche de poste établie par l’entreprise concernant ce poste, que l’appelante ne démontre pas qu’elle disposait des compétences et de l’expérience nécessaires aux missions principales du directeur de l’offre, à savoir la définition et la mise en ‘uvre de la stratégie de l’offre de l’entreprise, que [K] [B] présentait un profil très différent de celui de l’appelante, comprenant plusieurs expériences dans le domaine des achats et deux expériences en tant que directeur de l’offre/de collection, que l’appelante n’avait pas postulé pour ce poste alors que la liste de ceux créés dans le cadre de la réorganisation avait été communiquée à l’ensemble du personnel le 8 novembre 2018, qu’il est en outre établi qu’elle avait nécessairement eu connaissance de l’existence d’un poste de directeur de l’offre le 16 novembre 2018, à titre subsidiaire, qu’elle sollicite le versement d’une somme représentant quarante mois de rémunération, excédant largement le barème prévu par le code du travail dont elle conteste la validité, que ces contestations sont sans fondement, qu’elle ne peut prétendre qu’à des dommages et intérêts compris entre trois et vingt mois de rémunération, que la cour doit faire application du barème minimum en l’absence de démonstration de tout préjudice.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Attendu en application de l’article L1233-3 du code du travail que la suppression d’un poste, même si elle s’accompagne de la répartition des tâches accomplies par le salarié licencié entre ceux demeurés dans l’entreprise, est une suppression d’emploi ; qu’il résulte de la note d’information en vue de la consultation du comité central d’entreprise élaborée le 19 septembre 2018 que la direction marketing devait subir de profondes modifications ; qu’elle devait être scindée en deux pôles d’activité rattachés à la direction générale, le pôle Customer Relationship Management /Communication et le pôle e-commerce ; que cette réorganisation conduisait à la suppression de cinq postes dont celui de directeur marketing et à la création des postes de responsables des deux pôles et d’un chargé de marketing opérationnel relevant du premier pôle ; que par ailleurs, l’organigramme de l’entreprise était refondu et composé désormais de quatre directions, à savoir la direction de l’offre, la direction commerciale, la direction des ressources humaines et la direction logistique ; que l’accord collectif majoritaire validé le 28 novembre 2018 par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation du travail et de l’emploi a notamment entériné la suppression du poste de directeur marketing et la transformation de la direction achats en direction de l’offre, sept postes étant supprimés et cinq créés dont celui de directeur de l’offre ; qu’il résulte des ces pièces que les compétences du directeur marketing avaient été réparties entre les deux nouveaux pôles relevant du directeur général dont les missions étaient distinctes de celles attribuées au directeur de l’offre ; qu’il s’ensuit que l’emploi de directeur marketing a bien été supprimé ;
Attendu en application de l’article L1233-4 du code du travail qu’en sa qualité de directeur du marketing, selon ses missions permanentes rappelées régulièrement dans la note d’entretien annuel d’appréciation, l’appelante était chargée d’élaborer, mettre en ‘uvre et animer la politique commerciale afin de garantir l’atteinte des objectifs de chiffre d’affaires et de développement au meilleur coût ; qu’elle devait également assurer le suivi du merchandising et du marketing avec la direction commerciale et de la gamme produits ; qu’il résulte de la fiche de poste définissant les missions du directeur de l’offre que celui-ci était principalement chargé de définir et mettre en ‘uvre la stratégie d’offre produit de l’enseigne Chaussexpo, sur la base des enseignements de l’analyse IRM et de l’enquête clients ; que ce poste supposait en premier lieu un parcours professionnel démontrant une réelle capacité à négocier avec des marques et des fournisseurs internationaux ainsi qu’une expérience réussie dans la structuration de l’offre ou la construction de collection ; que ces premières conditions apparaissaient déterminantes ; que l’appelante ne démontre pas que ses fonctions de directeur de marketing conduisaient à des contacts réguliers avec des fournisseurs, à sa participation à des salons ou des foires ; qu’elle ne produit aucune pièce susceptible de conforter ses affirmations contenues dans ses écritures selon lesquelles elle avait été amenée à assumer la charge de la construction et de la cohérence de la collection Femme, Homme, Enfant, Confort, Sport et Accessoires de 2004 à 2011 ; que dans le guide d’analyse du service marketing dont elle a rempli les rubriques à la demande de la société de consultants Ernst et Young et qu’elle verse aux débats, elle avait mentionné par ordre d’importance décroissant ses principales activités ; que sur les sept qu’elle avait énumérées, l’élaboration d’un plan d’action commerciale Chaussuresexpo figurait en avant dernière position, les activités d’analyse étant les principales missions relevant de son service ; que si [K] [B], qui a été employée entre août 2019 et novembre 2020 en qualité de directeur de l’offre par la société, avait bien occupé le poste de responsable du développement et du marketing de la marque Nocibé entre septembre 2015 et octobre 2016, qui pouvait correspondre à celui occupé par l’appelante, elle pouvait également se prévaloir d’une expérience ultérieure, entre juin 2017 et mars 2018, en qualité de directrice de l’offre France des quatre enseignes du groupe Histoire d’Or et de directrice de collections de la marque Maison Lejaby d’avril 2018 à août 2019, avant son embauche, comme le fait apparaître son profil Linkedin ; que si des liens existaient entre les postes relatifs à l’offre et au marketing comme le soutient l’appelante, ils n’étaient pas suffisants à eux seuls pour conduire la société à lui proposer au titre de l’obligation de reclassement celui qui a été momentanément occupé par [K] [B] ; qu’enfin si l’intimée avait l’obligation d’assurer l’adaptation de l’appelante à l’évolution de son emploi, au besoin en lui assurant une formation complémentaire, il ne pouvait lui être imposé d’assurer une formation initiale qui lui faisait défaut, compte tenu de la diversité des missions du directeur de l’offre par rapport aux fonctions occupées par l’appelante ; que la société a bien respecté son obligation de recherche de reclassement en proposant à l’appelante par courrier du 26 novembre 2018 des postes de chef de produit, de responsable merchandising, de responsable Web/e-commerce et de responsable CRM/communication, qui tous relevaient du statut de cadre ainsi qu’un poste d’assistante achat ; que l’appelante ayant refusé ces offres et aucune autre possibilité de reclassement interne ne pouvant lui être proposée, son licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Attendu sur le rappel de prime qualitative, qu’il résulte des pièces versés aux débats que, depuis 2004 au moins, la société versait à ses proches collaborateurs une prime qui, selon le courrier du 16 février 2004 remis en main propre à l’appelante, était versée en juin et décembre ; que ce courrier précisait les nouvelles modalités de calcul de cette prime qui prenaient désormais en compte les performances de son bénéficiaire ; qu’aucune autre disposition n’est venue modifier les conditions de son versement ; que, comme le fait apparaître l’attestation de [G] [E], elle était attribuée aux membres du comité de direction dont faisait partie l’appelante ; qu’il résulte des bulletins de paye produits que, de juin 2013 à janvier 2017, l’appelante a perçu régulièrement tous les six mois au titre de cette prime la somme fixe de 10500 euros ; que celle-ci a été réduite de moitié de façon unilatérale par la société sans la moindre dénonciation de cet usage à compter de juin 2017; que cette décision, consécutive aux mauvais résultats financiers de la société selon l’attestation de [G] [E], affectait l’ensemble des membres du comité de direction percevant des primes semestrielles ; que du fait de l’irrégularité de la modification de l’usage qui présentait les caractères de généralité, constance et fixité, l’appelante est en droit de solliciter un rappel de prime ; que cette prime était versée à la salariée en contrepartie de son activité, puisque selon le courrier du 16 février 2004 précité, son versement était déterminé par les performances de cette dernière, évaluées lors des entretiens annuels d’appréciation organisés au mois d’avril ; que pour l’année 2018, l’appelante pouvait prétendre à une prime au prorata de son temps de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ; qu’il s’ensuit que la société est redevable, à titre de rappel de prime pour la période de juin 2017 à novembre 2018, de la somme de 20125 euros et de 2012 euros au titre des congés payés y afférents ;
Attendu qu’il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l’appelante les frais qu’elle a dû exposer tant devant le conseil de prud’hommes qu’en cause d’appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu’il convient de lui allouer une somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement déféré
ET STATUANT A NOUVEAU,
CONDAMNE la société DESMAZIERES à verser à [P] [R] :
– 20125 euros à titre de rappel de prime qualitative
– 2012 euros au titre des congés payés afférents,
DÉBOUTE [P] [R] du surplus de sa demande,
CONDAMNE la société DESMAZIERES à verser à [P] [R] 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société DESMAZIERES aux dépens.
LE GREFFIER
A. AZZOLINI
LE PRÉSIDENT
P. LABREGERE