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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 19 OCTOBRE 2023
N° 2023/311
Rôle N° RG 22/10319 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJYSZ
[R] [M]
S.C. [R] [M] INVESTISSEMENTS HOLDING
C/
[S] [X]
LE PROCUREUR GENERALE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Rachel COURT-MENIGOZ
Me Valérie CARDONA
PG
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 05 Juillet 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2021/00134.
APPELANTS
Monsieur [R] [M]
né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 5], de nationalité Française,
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SCP FRANCOIS – DUFLOT – COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assisté de Me François CREPEAUX, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
et assisté de Me Victor RANIERI, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, plaidant
S.C. [R] [M] INVESTISSEMENTS HOLDING
représentée par son gérant,
dont le siège social est sis [Adresse 8]
représenté par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SCP FRANCOIS – DUFLOT – COURT-MENIGOZ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assisté de Me François CREPEAUX, avocat au barreau de GRASSE, plaidant
et assisté de Me Victor RANIERI, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, plaidant
INTIMES
Maître [S] [X]
es qualités de liquidateur judiciaire de la SAS SUMMER TIME,
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Valérie CARDONA, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Axelle TESTINI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Madame LA PROCUREURE GENERALE,
[Adresse 6]
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 14 Juin 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Gwenael KEROMES, Présidente a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre, magistrat rapporteur
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Madame Agnès VADROT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 19 Octobre 2023.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2023,
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Gotha Club qui deviendra, à l’issue d’une assemblée générale du 30 août 2017, la SAS Summer Time a été constituée en avril 2009. Elle a bénéficié d’une procédure de sauvegarde ouverte par jugement du tribunal de commerce de Cannes du 24 septembre 2012, donnant lieu à l’adoption d’un plan de sauvegarde le 11 février 2014.
La société Summer Time (anciennement Gotha Club) exploitait une activité de loisirs, création d’événements, exploitation de produits dérivés, et plus particulièrement, deux boîtes de nuit à [Localité 5], celle du Palais des Festivals et celle du Palm Beach.
Elle a eu pour dirigeants de droit successifs la société civile [R] [M] Investissement Holding (ci-après la SC [M] IH), représentée par M. [R] [M] jusqu’au 30 août 2017, puis M. [Z] [L].
Les premières échéances du plan de sauvegarde ont été honorées jusqu’à la survenance de l’attentat de [Localité 7] le 14 juillet 2016 ayant entraîné une baisse de la fréquentation de l’établissement par la clientèle touristique.
Ainsi, lors du jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire de la SAS Summer Time du 6 mars 2018, l’état du passif déclaré par la société lors de la déclaration de cessation des paiements s’élevait à 2 439 268 euros, dont principalement :
– 903 966 euros au titre du plan de sauvegarde,
– 668 737 euros de TVA à régler,
– 217 069 euros d’impôts et taxes,
– 109,850 euros de redressement fiscal,
– 32 672 euros de cotisations sociales,
– 470 896 euros de fournisseurs et créanciers divers.
Le tribunal relevait également que le bail saisonnier de la SAS Summer Time avait pris fin, que l’activité avait cessé et que la société n’était plus en mesure d’envisager une relance de son activité en 2018.
Par jugement rendu 6 mars 2018, sur déclaration de cessation des paiements déposée par M. [Z] [L], le tribunal de commerce de Cannes a prononcé la liquidation judiciaire de la société SAS Summer Time, ayant siège [Adresse 4] à [Localité 5]. Me [S] [X], a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.
Au terme des opérations de liquidation , il est apparu que le passif antérieur s’élevait à 2 522 520,05 euros, dont 14 786,96 euros à titre chirographaire et le reste, à titre privilégié. L’actif réalisé s’élevait à 120 827,28 euros (par réalisation des actifs mobiliers corporels). L’insuffisance d’actif pouvait être estimée à 2 401 692,77 euros.
Le liquidateur judiciaire a fait assigner par exploits du 4 février 2021 M [Z] [L], la SC [R] [M] Investissements Holding et M. [R] [M] aux fins :
– que soit retenue la responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif à hauteur de 2 401 692,77 euros des dirigeants de droit successifs ([Z] [L] et la SC [R] [M] Investissements Holding) et du dirigeant de fait, [R] [M] au titre des fautes de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif ;
– de les voir condamnés solidairement à supporter l’insuffisance d’actif à hauteur de cette somme qu’ils devront verser entre les mains du liquidateur judiciaire et, à titre subsidiaire, à la somme que le tribunal fixera, somme qui devra être versée au liquidateur judiciaire.
– A titre infiniment subsidiaire, afin de les voir condamnés, chacun, à supporter la quote part d’insuffisance d’actif que le tribunal mettra à leur charge selon le quantum et la proportion que le tribunal estimera ;
– dans tous les cas, condamner MM. [L] et [M] et la SC [R] [M] Investissement Holding à verser à la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A l’audience le conseil de Me [X] a demandé au tribunal de faire injonction à MM. [M] et [L] de lui transmettre leur adresse actuelle et en justifier en cours de délibéré ; de retenir l’insuffisance d’actif à hauteur de 2 725 301,70 euros et de les condamner solidairement à supporter l’insuffisance d’actif à hauteur de cette somme, assortir le jugement de l’exécution provisoire, le reste des conclusions restant inchangées si ce n’est que la demande d’article l’article 700 du code de procédure civile a été portée à 6 000 euros.
Par jugement rendu le 05 juillet 2022, le tribunal de commerce de Cannes a :
– fait injonction à M. [R] [M] et à M. [Z] [L] de communiquer leur adresse actuelle au liquidateur judiciaire ;
– mis hors de cause M. [Z] [L] ;
– retenu la responsabilité de M. [R] [M] et de la SC [M] IH au titre de l’insuffisance d’actif en raison des fautes de gestion commises ayant contribué à l’insuffisance d’actif de la SAS Summer Time à hauteur de 1 700 000 euros ;
– condamné solidairement M. [R] [M] et la SC [M] IH à supporter l’insuffisance d’actif à hauteur de 1 700 000 euros et à verser cette somme entre les mains du liquidateur judiciaire ainsi que celle de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec exécution provisoire.
M. [R] [M] et la SC [M] IH ont fait appel de ce jugement, suivant déclaration du 18 juillet 2022.
Ils ont par ailleurs saisi par acte d’huissier du 10 août 2022 le premier président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence au visa des articles L 651-2 et R 661-1 du code de commerce aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire de la décision déférée et versement à leur profit d’une indemnité de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. Ces demandes ont été rejetées par ordonnance de référé en date du 12 décembre 2022.
**
Aux termes de leurs dernières écritures d’appelants déposées et notifiées par RPVA le 15 mai 2023, auxquelles la cour entend se référer expressément, pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, M. [R] [M] et la SC [M] IH demandent à la cour de :
– recevoir les concluants en leur appel,
– annuler le jugement entrepris faute de motivation suffisante et en raison de l’intervention tardive du juge commissaire au terme des débats.
– réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à l’exception de celles ayant mis hors de cause M. [Z] [L] ;
– juger que M. [R] [M] n’a été cité avant l’acquisition de la prescription, qu’en qualité de dirigeant de fait de la société Summer Time et que sa responsabilité éventuelle ne pouvait être regardée qu’en considération de cette seule qualité pour la période y afférent ;
– juger que M. [R] [M] n’a commis aucune faute de gestion en sa qualité de dirigeant de fait de la société Summer Time ;
– juger toute demande de condamnation visant M. [R] [M] en sa qualité de représentant légal de la SC [R] [M] Investissements Holding irrecevable comme prescrite,
Au fond, juger que ni M. [R] [M] en quelque qualité que ce soit, ni la SC [M] IH n’ont commis de faute de gestion,
– juger n’y avoir lieu à condamnation à l’encontre de M. [R] [M] en quelque qualité que ce soit et de la SC [M] IH,
– débouter en conséquence Me [X], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Summer Time de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
A titre subsidiaire,
– juger que dans l’hypothèse où une ou plusieurs fautes de gestion seraient caractérisées, le lien d’insuffisance entre ces fautes et l’insuffisance d’actif n’est pas démontré ;
– débouter en conséquence, Me [X] ès qualités de liquidateur de la société SummerTime de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions
A titre plus subsidiaire,
– juger n’y avoir lieu à condamnation à l’encontre de M. [R] [M] et de la SC [M] IH au titre de l’article L 651-2 du code de commerce (faculté de condamnation) ;
A titre infiniment subsidiaire,
– ramener substantiellement toute condamnation à un montant qui ne pourrait être que symbolique
En tout état de cause,
– débouter Me [X] ès qualités de son appel incident et de toutes ses demandes, fins et conclusions à l’encontre des concluants.
– condamner Me [X] ès qualités à payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dire les dépens frais privilégiés de la liquidation judiciaire.
**
Par conclusions responsives et d’appel incident, déposées et notifiées par RPVA le 16 mai 2023, auxquelles la cour entend se référer pour plus ample exposé des prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Me [S] [X] demande à la cour de :
– rejeter la demande de rabat de l’ordonnance de clôture et déclarer irrecevables toutes écritures adverses produites après clôture ;
A titre principal,
– écarter les moyens de nullité soutenus par M. [R] [M] et la SC [M] IH pour défaut de motivation du jugement ;
– débouter M. [R] [M] et la SC [M] IH de leur demandes tendant à voir prononcer la nullité du jugement rendu par le tribunal de commerce de Cannes le 5 juillet 2022 ;
– débouter M. [R] [M] et la SC [M] IH de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions, tendant à voir déclarer irrecevables pour être prescrites les demandes formées à l’encontre de M. [R] [M] en qualité de dirigeant de la SC [M] IH précédente dirigeante de droit de la société Summer Time, ces demandes étant irrecevables pour être nouvelles en cause d’appel et dans tous les cas inondées ;
– confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a :
* écarté le moyen adverse tiré de la prescription des fautes comme étant injustifié, infondé et dans tous les cas inopérant ;
* écarté le moyen adverse tiré du moment de la faute de gestion, dès lors qu’il suffit que la faute ait été commise avant ouverture de la Liquidation Judiciaire ;
* retenu l’existence de fautes de gestion caractérisées au titre de l’absence de dépôt de bilan dans un délai raisonnable, la poursuite d’une activité déficitaire en toute connaissance de cause, le non-respect des obligations fiscales, le non-paiement des charges sociales, une gestion dans l’intérêt du dirigeant ou des sociétés qu’il dirige du fait notamment de paiements préférentiels, la cession illicite des marques détenues par la société Gotha Club ;
* prononcé la responsabilité afférente et solidaire de M. [R] [M] et de la SC [M] IH au titre de l’insuffisance d’actif et en ce qu’il a retenu le principe d’une condamnation de ce chef ;
* condamné solidairement de la SC [M] IH et M. [R] [M] à verser au liquidateur judiciaire ès qualités, la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de 1ère instance ;
– réformer le jugement de 1ère instance pour le surplus et,
et statuant à nouveau sur appel incident :
– retenir la faute de gestion au titre de la conduite d’une mauvaise stratégie dans le mandat social s’agissant de mauvais choix d’investissement et du non-paiement frauduleux de droits artistiques ayant aggravé le passif ;
– condamner solidairement M. [R] [M] et la SC [M] IH à verser au titre de leur responsabilité pour insuffisance d’actif la somme de 2 725 301,70 euros entre les mains du liquidateur judiciaire, ou de toute somme qu’il plaira à la cour au titre de son appréciation souveraine ;
– condamner solidairement M. [R] [M] et la SC [M] IH à verser au liquidateur judiciaire ès qualités, la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d’appel ;
– débouter la SC [M] IH et M. [R] [M] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions tendant à voir déclarer irrecevables les demandes formées à leur encontre en leur qualité de dirigeant de droit et de dirigeant de fait de la société Summer Time, ces demandes étant nouvelles en cause d’appel et en tout cas, infondées ;
– retenir l’existence de fautes de gestion caractérisées au titre de l’absence de dépôt de bilan dans un délai raisonnable, la poursuite d’une activité déficitaire en toute connaissance de cause, le non respect des obligations fiscales, le non paiement des charges sociales, une gestion dans l’intérêt du dirigeant ou des sociétés qu’il dirige du fait notamment de paiements préférentiels, la cession illicite de marques détenues par la société Gotha Club et de la conduite d’une mauvaise stratégie dans le mandat social, s’agissant de mauvais choix d’investissement et du non paiement frauduleux de droits artistiques ;
– prononcer la responsabilité afférentes et solidaire de M. [R] [M] et de la SC [M] IH au titre de l’insuffisance d’actif ;
– condamner solidairement M. [R] [M] et la SC [M] IH à verser au titre de leur responsabilité dans l’insuffisance d’actif entre les mains du liquidateur judiciaire ès qualités, la somme de 2 725 301,70 euros ou toute somme fixée par la cour, ainsi que celles de 6 000 et 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile de 1ère instance et d’appel ainsi qu’aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel ;
– débouter la SC [M] IH et M. [R] [M] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires comme étant injustifiées et inondées.
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Par un avis en date du 3 avril 2023, le ministère public se référant à l’avis formulé dans la procédure n° RG 22-470 (procédure en référé arrêt exécution provisoire), entend s’en rapporter à la sagesse de la cour.
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Un avis de fixation a été adressé aux parties le 06 septembre 2022 pour une audience du 14 juin 2023, la date prévisible de la clôture étant annoncée pour le 17 mai 2023.
La clôture a été prononcée le 17 mai 2023.
De nouvelles conclusions dans l’intérêts de la SC [M] IH et de M. [R] [M] ont été notifiées et déposés par RPVA le 19 mai 2023 demandant, notamment le rabat de la clôture, auxquelles il a été répondu par la partie intimée, par conclusions notifiées le 6 juin 2023, demandant le rejet de la demande de rabat de la clôture.
MOTIFS
1) sur la demande de rabat de la clôture :
L’affaire a fait l’objet d’un avis de fixation adressé le 06 septembre 2022 aux parties, pour une audience fixée le 14 juin 2023 avec annonce de la clôture prévisible le 17 mai 2023.
Les appelants ont déposé des conclusions le 15 mai 2023 auxquelles les intimés ont répliqué le 16 mai 2023 ; la clôture a été prononcée le 17 mai 2023.
Le conseil de la SC [M] IH et de M. [M] ont déposé des conclusions récapitulatives n°3 le 19 mai 2023 demandant, notamment le rabat de la clôture, auxquelles les intimées ont répondu par des conclusions déposées le 06 juin 2023, aux termes desquelles elles s’opposent notamment au rabat de la clôture. Un bordereau de communication de pièces et une nouvelle pièce numérotée 53 ont été communiqués la veille de l’audience,13 juin 2023, par le conseil des appelants.
La cour relève que par un avis du 06 septembre 2022 adressé aux conseils des parties, l’affaire a été fixée pour être examinée à l’audience du 14 juin 2023 avec annonce de la clôture le 17 mai 2023. Les parties disposaient d’un délai de 8 mois pour déposer des écritures et y répliquer préalablement à la clôture, ce qu’elles ont au demeurant fait ; de même, il leur étaient loisible, si ce délai leur apparaissait insuffisant de solliciter avant le prononcé de la clôture, un report celle-ci, ce que manifestement les appelants se sont abstenus de faire.
Les appelants ne justifient au demeurant pas de la survenance d’une cause grave qui serait intervenue depuis la clôture, la constitution d’un nouvel avocat n’étant pas en soi une cause de révocation de l’ordonnance de clôture.
Il y a lieu par conséquent de rejeter la demande de révocation de la clôture et de déclarer irrecevables les conclusions et les pièces déposées postérieurement à la clôture des débats, à savoir :
– les conclusions de M. [R] [M] et de la SC [M] IH déposées le 19 mai 2023,
– les conclusions Me [X] déposées le 06 juin 2023,
– le bordereau et les pièces communiqués le 13 juin 2023 par M. [R] [M] et la SC [M] IH.
2) sur la nullité du jugement
Selon l’article 455 du code de procédure civile, tout jugement doit être motivé et le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motif.
Il ressort de la lecture du jugement du tribunal de commerce de Cannes du 5 juillet 2022 que les premiers juges ont répondu directement ou indirectement aux moyens péremptoires soulevés par les parties au soutien de leurs prétentions respectives, telles qu’elles ressortent de leurs écritures et ce, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
Les conclusions déposées au soutien des intérêts de M. [R] [M] et de la SC [M] IH devant le tribunal de commerce (pièce n°32 de la partie intimée), dont les prétentions ont été rappelées par le jugement critiqué, ne comportaient aucune demande tendant à voir déclarer irrecevables les demandes du liquidateur judiciaire de sorte que le tribunal n’en étant pas saisi, n’avait pas à y répondre.
Quant aux autres griefs tirés de l’existence de motifs contradictoires, de dénaturation des faits, ou de reprise à l’identique de l’argumentaire du liquidateur judiciaire, tels invoqués par les appelants, ces derniers relèvent de la critique du jugement en appel et ne sauraient fonder une demande en nullité du jugement.
Le grief tiré du défaut de motivation soulevé et développé par les appelants dans le dernier état de leurs écritures déposées et notifiées par RPVA le 15 mai 2023 n’est pas fondé et ne pourra donc prospérer.
Concernant le grief invoqué selon lequel le juge commissaire désigné dans la procédure collective ouverte à l’égard de la société Summer Time aurait été entendu en son rapport après que les parties et le ministère public se soient exprimés, il ne résulte ni de l’article R 662-12 du code de commerce, ni d’aucune disposition particulière, que le juge commissaire doive être entendu avant que les parties et le ministère public aient pris la parole, et ce à peine de nullité du jugement.
Il ne résulte eu outre pas des mentions du jugement que le juge commissaire désigné dans la procédure collective ouverte à l’égard de la société Summer Time ait participé à la formation de jugement, contrairement à ce que sous-entend la partie appelante, laquelle n’en rapporte aucunement la preuve contraire.
Les appelants qui procèdent par affirmation n’établissent d’ aucune manière en quoi le tribunal de commerce aurait pu, d’une quelque manière que ce soit, encourir la critique de partialité.
Ces grief non fondés seront purement et simplement écartés et les appelants seront par conséquent déboutés en leur demande tendant à la nullité du jugement déféré.
3) Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif engagée par Me [X] :
Conformément à l’article 122 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être soulevées à tout moment de la procédure, sans que celui qui la présente justifie d’un grief, sauf à la juridiction de prononcer à l’encontre de la partie qui l’invoque une condamnation à des dommages et intérêts en cas de man’uvres dilatoires.
Il résulte de l’article L 651-2 alinéa 4 du code de commerce, que l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif se prescrit par trois ans à compter du jugement qui prononce l’ouverture de la liquidation judiciaire.
Le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire est intervenu le 6 mars 2018 et l’action en responsabilité pour l’insuffisance d’actif visant M. [R] [M] et la SC [M] IH a été engagée par voie d’assignation à l’initiative de Me [X], suivant exploits d’huissier du 4 février 2021, soit avant l’expiration du délai triennal fixé à l’article L 651-2.
Contrairement à ce qu’affirment les appelants, il ressort de l’assignation délivrée le 4 février 2017 à la requête de Me [X] ès qualités, que M. [R] [M] a bien été cité en sa double qualité de dirigeant de fait de la société Summer Time, M. [L] en étant alors le dirigeant de droit, mais également en tant que dirigeant de droit de la SC [M] IH, elle-même dirigeante de droit de la société Summer Time, comme cela ressort des termes de l’assignation qui lui a été délivrée et dont le dispositif ainsi rédigé :
‘ Retenir la responsabilité pour insuffisance d’actif des dirigeants de droit successifs à savoir Monsieur [Z] [L] et la SC [R] [M] INVESTISSEMENTS HOLDING ainsi que du dirigeant de fait Monsieur [R] [M] au titre des fautes de gestion commises ayant contribué à l’insuffisance d’actif’ est dépourvu de toute ambiguïté.
Le fait que le tribunal de commerce ait prononcé la mise hors de cause M. [L], en retenant que du fait de l’arrêt d’activité de la société depuis le 1er septembre 2017, aucune faute de gestion n’avait été commise ni aucune augmentation de passif n’avait été relevée pour cette période et d’autre part, que les fautes de gestion relevées étaient de la responsabilité de M. [R] [M] et de la SC [M] IH et antérieures à la nomination de M. [L] en qualité de gérant de la SAS SummerTime, est sans incidence sur la recevabilité de l’action en responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif exercée à l’encontre de M. [R] [M] tant en sa qualité de dirigeant de fait de la société Summer Time et que celle de représentant de la SC [M] IH, elle-même dirigeante de droit de Summer Time.
Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les appelants, toute faute, dès lors qu’elle est antérieure au jugement de liquidation judiciaire, peut être retenue au titre d’une faute de gestion, sans que puisse être opposée une quelconque prescription tenant à l’antériorité de cette faute.
En conséquence, la fin de non recevoir soulevée sera rejetée.
4) sur l’action en responsabilité pécuniaire des dirigeants de la SAS Summer Time au titre de l’insuffisance d’actif :
Aux termes des dispositions de l’article L651-2 du code de commerce tel qu’issu de la loi de sauvegarde des entreprises n°2005-845 du 26 juillet 2005, modifié par l’ordonnance n°2010-1512 du 9 décembre 2010, lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables.
En application du texte susvisé, pour que l’action initiée par Me [X] ès qualités, puisse prospérer il est nécessaire que soient établis par le liquidateur judiciaire :
– une insuffisance d’actif,
– une ou plusieurs fautes de gestion imputables à chacun des gérants mis en cause,
– un lien de causalité entre la ou les fautes commises et l’insuffisance d’actif.
Concernant l’insuffisance d’actif, il n’est pas nécessaire à la recevabilité de l’action en responsabilité pécuniaire des dirigeants d’une société que le passif soit définitivement arrêté et vérifié, dès lors qu’il apparaît de manière manifeste que l’actif sera insuffisant pour payer le passif.
En revanche, seules les dettes nées antérieurement au jugement d’ouverture sont prises en considération au titre de l’insuffisance d’actif à l’exclusion de celles nées de la poursuite de l’activité qui doivent être exclues du passif à prendre en compte pour la détermination de l’insuffisance d’actif.
Par ailleurs, contrairement à ce qu’avance M. [R] [M] et la SC [M] IH, les dettes issues du plan de redressement sont également prises en compte, dès lors qu’elles sont automatiquement admises au passif de la liquidation judiciaire, au titre du passif social à prendre en considération pour la détermination de l’insuffisance d’actif.
En l’espèce :
– l’actif réalisé s’élève à la somme de 120 827,28 euros.
– le passif tel qu’il ressort de l’état des créances déposé au Bodacc le 16 mars 2019 (pièce n° 21 de l’intimé) s’élève à 2 968 088,85 euros, dont 2 507 733,09 euros de passif privilégié (dont 27 353 euros admis à titre provisionnel) et 399 514,76 euros de passif chirographaire.
Me [X] dans ses dernières écritures retient un passif définitivement admis au jour de l’assignation ( soit au 4 février 2021) de 2 522 520,05 euros.
La contestation du passif privilégié porte sur la créance fiscale CVAE à hauteur de 27 353 euros, les impôts et taxes 2018 au titre du CFE 20148 à hauteur de 8600 euros et 790 euros.
Quant au passif chirographaire, il est, selon les appelants issu pour l’essentiel de la liste fournie par la débitrice et n’a pas fait l’objet d’une vérification par le liquidateur judiciaire, qui le justifie par la carence de M. [L], lequel ne s’est pas présenté aux convocations du mandataire judiciaire.
Celui-ci s’élevant à 399 514,76 euros est contesté à hauteur de 206 509, 17 euros (créance d’Heavy Rotation) et de 26 987,26 euros, montant ramené selon l’appelant à 6739,84 euros (Moët Hennessy)
Si l’on retire du passif déclaré au jour de l’assignation de 2 522 520,05 euros les montants contestés par les appelants (soit au total 263 496,54 euros), il en ressort un passif de 2 259 023,46 euros.
– en l’absence de vérification des créances, l’insuffisance d’actif peut être fixée a minima à hauteur de la somme de 2 138 196,18 euros (2 259 023,46 – 120 827,28).
4 – Les fautes de gestion reprochées à la SC [M] IH et M. [R] [M]
Aux termes de ses écritures, M. [R] [M] a reconnu sans équivoque ‘et en toute responsabilité’, avoir été le dirigeant de fait de la société Summer Time durant la période du 30 août 2017 à la liquidation judiciaire, indiquant que la désignation de M. [L] était ‘purement technique’.
A cet égard, et en l’état de l’appel incident de Me [X], M. [R] [M] ne saurait prétendre qu’aucune faute ne peut lui être reprochée durant cette période de direction de fait de la SAS Summer Time, au seul motif que le tribunal de commerce a mis M. [L] hors de cause en raison de l’absence de faute de gestion commise depuis sa nomination en qualité de représentant légal de la SAS Summer Time ou d’aggravation du passif.
C’est donc à juste raison que le tribunal de commerce de Cannes a estimé que les fautes de gestion relevées par Me [X] ès qualités remontaient à la présidence de la SC [M] IH et donc de M. [R] [M], lequel est resté très impliqué dans la gestion de la SAS Summer Time.
– l’absence de dépôt de déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours de la constatation de l’état de cessation des paiements :
Aux termes de l’article L. 631-8 du Code de commerce, le tribunal fixe la date de cessation des paiements, laquelle peut être reportée une ou plusieurs fois sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d’ouverture de la procédure.
Il ressort du jugement d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire du 6 mars 2018, que la date de cessation des paiements a été fixée provisoirement au 2 février 2018, date du dépôt de la déclaration de cessation des paiements et non le 6 mars 2018 comme mentionné par erreur dans le jugement critiqué.
Le tribunal de commerce a toutefois relevé que la date de cessation des paiements, telle qu’elle apparaissait dans l’annexe à la déclaration de cessation des paiements était rétroactivement fixée au 24 septembre 2017 et a retenu cette date en relevant que le commissaire aux comptes de la SAS Summer Time avait refusé de certifier les comptes de l’exercice 2016/2017 au regard des règles et principes comptables et précisait notamment que le chiffre d’affaires atteint au 31 août 2017 ne permettrait pas de couvrir les charges d’exploitation financières de l’exercice, raison pour laquelle il a ouvert une procédure d’alerte à l’encontre de la SAS Summer Time.
Le report de la date de cessation des paiements à une date antérieure était donc parfaitement possible, au vu des éléments d’appréciation en la possession du tribunal, dès lors que cette date n’était pas antérieure de plus de 18 mois à la date du jugement d’ouverture de la procédure. Pour ce faire, il a estimé que la société Summer Time se trouvait bien en situation de cessation des paiements au 24 septembre 2017, caractérisée par l’inscription par l’Urssaf PACA le 1er juin 2017 d’un privilège de 59 703 euros, le non paiement des cotisations de retraite Arrco depuis le mois de février 2017 pour un montant déclaré et admis de 9 209 euros et un reliquat de dettes fiscales couvrant les années 2012 à 2017 pour un montant de 920 100 euros au regard des liquidités insuffisantes de la société.
Dès lors, à la date de la déclaration de cessation des paiements effectuée le 2 février 2018, plus de 45 jours s’étaient écoulés, et M. [R] [M], parfaitement informé dès l’automne 2017 que la situation financière de la société ne lui permettait plus de couvrir ses charges d’exploitation, s’est abstenu en connaissance de cause de déclarer la cessation des paiements et en a retardé le dépôt.
Le jugement sera sur ce point confirmé.
– la poursuite d’une activité déficitaire en connaissance de cause :
Il ressort des comptes de la SC [M] IH, que sur la période du 1er mai 2016 au 30 avril 2017, la société a enregistré une perte de 1 028 354,40 euros et que la situation antérieure était déjà négative sur les deux exercices précédents (résultats 2015/2016 : – 3 321 euros et résultats 2014/2015: – 267 344, 97 euros).
Le fait de poursuivre à compter de l’automne 2017, une activité déficitaire depuis trois années consécutives est constitutif d’une faute de gestion imputable à la SC [M] IH et à M. [R] [M], cette exploitation déficitaire étant à l’origine d’une partie importante de l’aggravation du passif social.
Par ailleurs il n’est pas contestable ni au demeurant contesté, que la décision de poursuivre l’activité et la société malgré un actif net inférieur à la moitié du capital social, remonte au 30 décembre 2014, et que l’activité est restée déficitaire au cours des exercices 2015-1016 et 2016-2017, tels que cela résulte des éléments comptables produits, décision qui incombe aux appelants et qui a contribué à l’aggravation du passif social.
– le détournement d’éléments de l’actif et l’aggravation du passif par le non paiement des charges sociales et fiscales qui génère un passif augmenté des majorations et pénalités
Le non paiement des charges sociales (Arrco et Urssaf pour des montants respectifs de 9 209 euros et 32 672 euros) et des impositions auxquelles la société était tenue (CFE : 9 390 euros ; TVA 2012 : 49 492 euros ; prélèvements libératoires retenus à la source 2013/2014 : 50 548 euros ; CFE 2016/2017 : 9 608 euros ; CVAE 2015/2016/2017/2018 : 129 500 euros et TVA 206/2017 : 671 572,10 euros) a généré une augmentation du passif, en raison des pénalités et majorations appliquées.
A cet égard, le non paiement des charges et impositions a généré par ce biais, une trésorerie artificielle et participé de l’insincérité des comptes annuels de la société, ce qui a été relevé par le commissaire aux comptes dans son rapport sur l’exercice 2016/2017 et a provoqué la non certification des comptes de l’exercice et l’ouverture d’une procédure d’alerte.
Le non respect des obligations fiscales et sociales, comme l’irrégularité des comptes sociaux constituent une faute de gestion.
– le détournement de l’actif et une gestion contraire à l’intérêt social au profit du dirigeant et des sociétés dans lesquelles il est directement ou indirectement intéressé, en procédant à des règlements préférentiels.
Il ressort clairement, comme le démontre Me [X] ès qualités à partir de l’analyse des éléments sociaux et comptables dans leur chronologie, qu’à partir de l’assemblée générale du 30 août 2017 au cours de la quelle M. [R] [M] s’est officiellement retiré de la direction de la société, tout en restant ‘aux commandes’, qu’a été orchestré le paiement préférentiel des créances détenues par M. [R] [M] et par ses sociétés, ceci manifestement en anticipation d’un dépôt de bilan devenu inévitable.
Ainsi, la société lui a remboursé des dépenses à titre personnel au titre de l’année 2017 pour un total de 337 704,92 euros, de même qu’elle a réglé à la société Pada Evants, titulaire des droits de sous-occupation du ‘Palm Beach’ une partie des loyers dûs au titre de l’année 2017, soit une somme de 360 600 euros. De même, des versements sont intervenus au profit de la société [R] [M] Investissements (en remboursement d’une avance de trésorerie de 150 000 euros du 10 mai 2016 sur laquelle il reste dû 12 507,65 euros) et de la Sarl Sporting Beach le 21 août 2017 (en remboursement d’une avance de 56 000 euros intégralement remboursée), comme le reconnaissent les appelant, et ainsi qu’il ressort du grand livre général.
Ces règlements ont été réalisés de manière préférentielle au détriment des autres créanciers, quand bien même certains règlements ont été effectués en contrepartie de l’abandon par le créancier d’une partie de sa créance.
Concernant les dépenses personnelles remboursées à M. [R] [M], c’est à juste titre que le tribunal de commerce a relevé à l’examen des justificatifs versés aux débats par M. [R] [M], que les avances de trésorerie effectuées par M. [R] [M] via les sociétés à sa main, à hauteur de 337 704,92 euros constituaient en réalité des prêts à comptabiliser en compte courant et qui ne pouvaient, dès lors, donner lieu à un paiement préférentiel au détriment des autres créanciers.
C’est donc au total plus de 800 000 euros qui, à travers ces règlement préférentiels, ont ainsi été soustraits de l’actif social, alors que la société Summer Time était sous le coup d’un plan de redressement et que la SC [M] IH et M. [R] [M] ne pouvaient ignorer la situation financière irrémédiablement obérée de la société Summer Time, dont l’activité était à l’arrêt, et ce au détriment des autres créanciers, et particulièrement les créanciers privilégiés, ce qui traduit incontestablement une gestion contraire aux intérêts de la société et dans l’intérêt immédiat de M. [R] [M] et des sociétés dans lesquelles il était directement ou indirectement intéressé.
Le fait que ces mouvements de fonds constituaient des remboursements d’avances en trésorerie et non un enrichissement personnel, est inopérant dès lors que le dirigeant a favorisé ses propres intérêts ou ceux des sociétés dans lesquels il est intéressé au détriment de l’ensemble des créanciers.
Par ailleurs, il n’est pas contesté par les appelants que la marque ‘Gotha Club’, marque déposée à l’INPI a été cédée moyennant le prix de 400 000 euros à la société International Night Entertainment, dont la dénomination laisse à penser qu’elle exerce dans un domaine d’activité comparable à celui de la société Summer Time, à l’insu des organes de la procédure et alors que le plan de redressement en cours comportait une clause d’inaliénabilité des actifs corporels et incorporels.
Il n’est par ailleurs pas démontré par les appelants que la marque Gotha Club avait perdu de sa valeur et n’était plus attractive vis à vis de la clientèle, alors même qu’elle a été cédée pour la valeur de 400 000 euros, eu égard à la notoriété et le prestige de l’établissement historique portant ce nom. Cette cession opérée à l’insu des organes de la procédure et en violation du plan de redressement a nécessairement préjudicié à l’activité de la société Summer Time qui, s’est retrouvée privé de la possibilité de l’exploiter, s’agissant d’un enseigne connue de la clientèle habituelle.
Ces agissements sont constitutifs d’une faute de gestion caractérisée, imputable à M. [R] [M] et à la SC [M] IH.
– sur la faute de gestion alléguée par le liquidateur judiciaire pour conduite d’une mauvaise stratégie caractérisée par des choix d’investissements inadaptés ou excessifs, des erreurs d’appréciation quant aux investissement et le manque d’efficacité pour assurer la conservation des actifs et le financement par la seule trésorerie d’investissements importants et hors de propos au regard de la situation de la société.
Il est reproché à cet égard des investissements à hauteur de 800 000 euros par apports de fonds propres, alors que la société avait enregistré au cours de l’exercice précédent des pertes de plus de 680 000 euros, fondés sur une hypothétique situation de monopole sur ce secteur et la croyance d’une absence de concurrence la saison suivantes.
Sur le choix d’investissements importants et hors de proportion avec les ressources et l’existence d’un plan de redressement de la société, Me [X] ès qualités n’apporte pas de démonstration de ce que ces investissements, engagés pour faire repartir l’activité de la société Summer Time, n’auraient pas pu porter leurs fruits, même en l’absence de l’attentat de [Localité 7] survenu le 14 juillet 2016 et de l’importante baisse de fréquentation de la clientèle des Etats du Golfe arabo-persique des établissements de divertissements sur la côte d’azur en 2017.
A l’inverse, les appelants justifient qu’ils étaient en pourparlers avec le groupe Partouche pour renégocier la sous-location du ‘Palm Beach’ en 2017, qui auraient pu entraîner une diminution des charges d’exploitation. A défaut d’être suffisamment caractérisé, ce grief ne sera pas retenu.
Par ailleurs, il est reproché aux appelants de ne pas avoir réglé les droits artistiques à la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) et avoir tenté de s’y soustraire, notamment en tentant de modifier rétroactivement la nature de son activité de discothèque en activité en concerts et spectacles, ce qu’a relevé le tribunal judiciaire de Marseille qui a statué par jugement du 10 janvier 2019 en fixant la créance de la SPRE au passif de la société Summer Time à la somme de 558 293,79 euros outre intérêts au passif de la société Summer Time et en condamnant M. [R] [M] in solidum avec la holding qu’il dirige au paiement d’une somme de 464 192,43 euros au titre de la faute de gestion commune.
Ce dernier moyen est invoqué pour la première fois en cause d’appel.
Sur ce point, il ne peut être déduit de la seule méconnaissance ou de l’erreur commise par la société Summer Time, qui exploitait une discothèque mais également organisait des spectacles avec des artistes sur scène, quant à l’étendue des droits dont elle était redevable à la SPRE, qui a donné lieu à un contentieux devant le tribunal judiciaire de Marseille ayant abouti au jugement du 10 janvier 2019 précité, l’existence d’une faute de gestion caractérisée à l’égard du dirigeant de la société. Dès lors, le grief invoqué étant insuffisamment caractérisé, ne sera pas retenu.
4) Le lien de causalité :
Il est incontestable que les fautes de gestions sus-visées, retenues à l’encontre de M. [R] [M], en qualité de dirigeant de fait de la société Summer Time et de la SC [M] IH, dirigeante de droit de la société Summer Time représentée par M. [R] [M], ont contribué pour une large part à l’aggravation du passif et à l’insuffisance d’actif de la SAS Summer Time.
Au vu des éléments ci-dessus, la limitation de la participation des appelants à l’insuffisance d’actif de la société à hauteur de la somme de 1 700 000 euros, est fondée et proportionnée aux fautes de gestion retenues à leur encontre et leur incidence dans l’aggravation de l’insuffisance d’actif, en prenant en compte l’incidence des facteurs externes à la société et à ses dirigeants, qui ont impacté l’activité économique ce celle-ci à partir de 2016.
5) Sur les demandes accessoires
M. [R] [M] et la SC [M] IH succombant en leur appel, sont infondés en leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils seront condamnés aux dépens d’appel conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
Au vu des circonstances de l’espèce, M. [R] [M] et la SC [M] IH seront condamnés in solidum à payer à Me [X] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Summer Time, la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
Déclare irrecvables et rejette les conclusions et les pièces déposées par les parties postérieurement à la clôture prononcée le 17 mai 2023 :
– les conclusions de M. [R] [M] et de la SC [M] IH déposées le 19 mai 2023,
– les conclusions Me [X] déposées le 06 juin 2023,
– le bordereau et les pièces communiqués le 13 juin 2023 par M. [R] [M] et la SC [M] IH ;
Déboute M. [R] [M] et la SC [M] IH de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
Déboute Me [X] ès qualités de sa demande tendant à voir retenir au titre de la faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif d’une part, le fait pour M. [R] [M] de s’abstenir de régler les droits artistiques auprès de la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) et d’autre part, le fait d’avoir conduit une mauvaise stratégie caractérisée par des choix d’investissements inadaptés ou excessifs, des erreurs d’appréciation quant aux investissements et le manque d’efficacité pour assurer la conservation des actifs et le financement par la seule trésorerie d’investissements importants et hors de propos au regard de la situation de la société.
Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Cannes le 5 juillet 2022 en toutes ses dispositions, en celles comprises relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
Y ajoutant,
Condamne SC [M] IH et M. [R] [M] à payer in solidum à Me [X] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Summer Time, la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [R] [M] et la SC [M] IH aux entiers dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT