C O U R D ‘ A P P E L D ‘ O R L É A N S
CHAMBRE SOCIALE – A –
Section 1
PRUD’HOMMES
Exp +GROSSES le 13 DECEMBRE 2022 à
la SCP HOUSSARD ET TERRAZZONI
la SELARL CM&B ‘COTTEREAU-MEUNIER-BARDON-SONNET- ET ASSOCIES
AD
ARRÊT du : 13 DECEMBRE 2022
MINUTE N° : – 22
N° RG 20/02211 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GHL7
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE TOURS en date du 29 Septembre 2020 – Section : COMMERCE
APPELANT :
Monsieur [Z] [F]
né le 11 Juin 1972 à [Localité 3] (GUINEE) (99)
Chez M.[C] [G]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Eugène HOUSSARD de la SCP HOUSSARD ET TERRAZZONI, avocat au barreau de TOURS
ET
INTIMÉE :
E.U.R.L. TRI 37 prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social,
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Nicolas SONNET de la SELARL CM&B ‘COTTEREAU-MEUNIER-BARDON-SONNET- ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS
Ordonnance de clôture : 20 septembre 2022
Audience publique du 11 Octobre 2022 tenue par M. Alexandre DAVID, Président de chambre, et ce, en l’absence d’opposition des parties, assisté lors des débats de Mme Karine DUPONT, Greffier.
Après délibéré au cours duquel M. Alexandre DAVID, Président de chambre a rendu compte des débats à la Cour composée de :
Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,
Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,
Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller
Puis le 13 Décembre 2022, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Karine DUPONT, Greffier a rendu l’arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
L’EURL TRI 37 est une entreprise d’insertion conventionnée par la Direction départementale du travail et de l’emploi. Elle a pour activité la collecte et de tri de déchets. Elle est implantée dans la [Adresse 5], de [Localité 4], en Indre-et-Loire.
Elle a engagé M. [Z] [F] en qualité de manutentionnaire valoriste au niveau 1, échelon A de la convention collective nationale des industries et du commerce de la récupération du 6 décembre 1971, selon contrat à durée déterminée d’insertion du 17 août 2015 au 16 février 2016. Par avenant, ce contrat a été prolongé jusqu’au 16 août 2016.
Le salarié a été mis à disposition de la société de déchetteries COVED, spécialisée dans la collecte et le traitement de déchets, par convention de sous-traitance du 22 décembre 2015.
Comme des travaux devaient avoir lieu au sein de la société COVED en avril et mai 2016, l’employeur a demandé au salarié d’effectuer des heures supplémentaires de janvier à avril 2016, afin de compenser les coupures d’horaires à venir.
Cependant l’interruption prévue n’a finalement pas eu lieu, en sorte que M. [F] a continué, normalement, son activité en avril et mai 2016. Selon lui, les heures supplémentaires réalisées en amont ne lui auraient pas été payées.
À la suite d’une altercation sur les lieux de l’entreprise, qualifiée d’accident du travail, le salarié a été placé en arrêt de travail à compter du 13 mai 2016 et jusqu’au terme de son contrat de travail.
Le 3 juin 2016, il a fait l’objet d’un avertissement à la suite d’une altercation avec son chef d’équipe au sujet du non-respect d’une mesure de sécurité, le non port de chaussures de sécurité dans une zone où il est obligatoire.
Le 26 mai 2016, il a formé une action devant le conseil de prud’hommes de Tours, en sa section du commerce, afin de solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur.
Après plusieurs renvois, la procédure a fait l’objet d’une radiation le 19 décembre 2017, avant d’être réinscrite, le 19 décembre 2019, au rôle du conseil de prud’hommes.
M. [F] a formé les demandes suivantes devant le conseil de prud’hommes :
-à titre principal, un rappel d’heures supplémentaires pour 462,80 € et 46,28 € de congés payés afférents,
-à titre subsidiaire, un rappel d’heures supplémentaires de 115,75 € et de 11,57 € de congés payés afférents,
-10’879,14 € de dommages-intérêts pour travail dissimulé,
-3000 € de dommages-intérêts pour non-respect des seuils d’amplitude maximale de travail,
-5000 € de dommages-intérêts pour prêt de main-d »uvre illicite, toutes ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts,
-1800 € sur le fondement de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle, avec remise des documents de rupture habituels, sous astreinte de 50 € par jour de retard.
De son côté, l’EURL TRI 37 a conclu au rejet de toutes les demandes adverses et à la condamnation de M. [F] à lui payer la somme de 3000 € pour procédure abusive d’une part, et pour les frais non compris dans les dépens, d’autre part.
Par jugement du 29 septembre 2020, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé du litige, le conseil de prud’hommes de Tours a :
– débouté M. [F] de l’ensemble de ses demandes,
-débouté l’EURL TRI 37 de ses demandes reconventionnelles,
-condamné M. [F] aux entiers dépens de l’instance.
M. [F] a interjeté appel, par voie électronique, au greffe de cette cour, le 30 octobre 2020.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 1er février 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du Code de procédure civile et aux termes desquelles M. [Z] [F] demande à la cour de :
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [F] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné aux dépens de l’instance ;
– condamner l’EURL TRI 37 à payer à M. [Z] [F] les sommes de :
– à titre principal, 462,80 € à titre de rappel d’heures supplémentaires et 46,28 € au titre des congés payés y afférents ;
-subsidiairement, 115,70 € à titre de rappel d’heures supplémentaires et 11,57 € au titre des congés payés y afférents ;
– dire que conformément aux articles 1231-6 et 1343-2 du Code civil, ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la convocation de la société TRI 37 devant la juridiction prud’homale, avec capitalisation annale des intérêts à compter de ces mêmes dates ;
– condamner l’EURL TRI 37 à payer à M. [F] les sommes de :
– 10.879,14 € à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;
– 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des seuils et amplitudes maximaux de travail ;
– 5.000 € pour prêt de main d »uvre illicite ;
– condamner l’EURL TRI 37 à payer à M. [F] la somme de 2.000 € H.T. soit 2.400 € T.T.C au titre des frais irrépétibles ;
– dire que conformément aux articles L.1231-7 et 1343-2 du Code civil, ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir, avec capitalisation annale des intérêts à compter de la même date ;
– ordonner à l’EURL TRI 37 de remettre à M. [F] un bulletin de paie, un solde de tout compte et une attestation PÔLE EMPLOI conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document passé un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision ;
– condamner l’EURL TRI 37 aux dépens de l’instance.
Sur les heures supplémentaires, M. [F] fait valoir que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés, selon les dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail.
Il suffit qu’il produise des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur d’y répondre et la Cour de Cassation a précisé que la règle selon laquelle nul ne peut se forger de preuve à soi-même n’est pas applicable à l’étaiement d’une demande au titre des heures supplémentaires.
Si l’EURL se prévaut de l’accord collectif du 6 avril 1999 relatif à la réduction et l’aménagement du temps travail, il n’est cependant applicable que pour autant qu’il est conforme aux dispositions de l’article L. 212-8 du code du travail, dans sa version en vigueur du 21 décembre 1993 au 1er février 2000.
M. [F] admet avoir travaillé, antérieurement au 4 janvier 2016, sur la base d’une moyenne de 35 heures par semaine. Cependant pour la période postérieure, du 4 janvier au 6 avril 2016, il a effectué des heures supplémentaires au-delà de la 44e heure hebdomadaire en sorte que le nombre total d’heures excédait 1589 heures pour l’année.
Il critique les fiches récapitulatives fournies par l’employeur qui ne comportent pas l’heure de nettoyage qu’il effectuait quotidiennement, mais confirme avoir effectué moins d’heures fin avril et au début mai 2016 puisque son dernier jour de travail était le 13 mai.
Ces heures supplémentaires doivent être rémunérées sur la base de 11,57 € de l’heure
avec les majorations de 25 % pour les huit premières heures et de 50 % pour les heures suivantes qui doivent être décomptées par semaine civile.
Au cours de cette période du 4 janvier au 6 avril 2016, il assure avoir effectué 32 heures supplémentaires non rémunérées, devant donner lieu à un rappel de salaire de 462,80 € et 46,28 € de congés payés afférents.
À tout le moins, il ressort du décompte fourni par la société qu’il aurait accompli huit heures pour cette même période, pour 75,70 € et 7,57 € de congés payés afférents.
Il estime que l’employeur s’est rendu coupable de travail dissimulé, ce qui lui donne droit à une indemnité forfaitaire correspondant à six mois de salaires.
Invoquant avoir effectué 52 heures par semaine pendant la période relevée, il sollicite des dommages-intérêts en raison du préjudice subi du fait de la violation de l’article L. 3129-20 du code du travail imposant une durée maximale de travail de 48 heures par semaine.
Enfin, il stigmatise le prêt de main-d »uvre à but lucratif dont il a été l’objet sans son accord, qui est proscrit par les dispositions de l’article L. 8241-2 du code du travail. Selon lui, il est établi par la facturation de l’EURL TRI 37 à COVED une somme bien supérieure au coût de son salaire et de ses charges, ce qui justifie les dommages et intérêts sollicités à hauteur de 5000 €.
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 26 mars 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du Code de procédure civile et aux termes desquelles l’E.U.R.L. TRI 37 demande à la cour de :
– recevoir l’EURL TRI 37 en ses écritures et, la disant bien fondée, lui en adjuger l’entier bénéfice ;
-confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Tours le 29 septembre 2020 en ce qu’il a :
– débouté M. [F] de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné M. [F] aux entiers dépens de l’instance ;
– débouter M. [Z] [F] de l’ensemble de ses demandes ;
– condamner M. [Z] [F] à verser à l’EURL TRI 37 la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [Z] [F] aux entiers dépens.
Sur les heures supplémentaires, l’EURL TRI 37 soutient que le salarié ne verse aux débats aucun élément pour étayer sa demande, se contentant d’un tableau unilatéralement établi.
Subsidiairement, l’employeur invoque les dispositions de la convention collective de la récupération et plus précisément l’accord sur la réduction et l’aménagement du temps de travail du 6 avril 1999, portant sur la modulation du temps de travail, ce qui permet un lissage de la rémunération mensuelle.
Elle se fonde, à cet égard, sur le récapitulatif des horaires de travail que M. [F] a lui-même signé d’où il ressort qu’il a accompli :
-172 heures de travail en janvier 2016,
-175 heures de travail en février 2016,
-190 heures de travail en mars 2016.
En compensation, il n’a effectué que 31 heures en avril 2016 et 77 heures en mai 2016 tout en ayant perçu ses salaires normaux de 1479,77 € en sorte qu’aucune heure supplémentaire ne peut être due.
Il en résulte qu’en l’absence d’heures supplémentaires, le travail dissimulé n’a pu exister alors que, de surcroît l’élément intentionnel, subsidiairement, n’est pas démontré.
D’autre part, comme le salarié n’a jamais effectué plus de 48 heures par semaine, la demande de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives à la durée hebdomadaire maximale de travail ne peut qu’être rejetée.
Sur le prêt de main-d »uvre illicite allégué, la société fait valoir qu’un accord de sous-traitance a été conclu entre la COVED et elle-même le 22 décembre 2015 et qu’elle justifie une facturation à cette entreprise inférieure aux salaires versés à M. [F] en sorte que le jugement devra être confirmé sur ce point également. Subsidiairement, le salarié ne justifie d’aucun préjudice financier ou d’une perte d’avantages pouvant générer des dommages-intérêts.
Une ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2022, renvoyant la cause et les parties à l’audience des plaidoiries du 11 octobre suivant.
MOTIFS DE LA DECISION
La notification du jugement est intervenue le 30 septembre 2020, en sorte que l’appel de M. [F], régularisé le 30 octobre suivant, aux termes du délai légal d’un mois, s’avère recevable en la forme.
Sur la demande de rappel d’heures supplémentaires
Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant (Soc., 18 mars 2020, pourvoi n° 18-10.919, FP, P + B + R + I).
M. [F] soutient avoir effectué 32 heures supplémentaires pendant la période du 4 janvier au 6 avril 2016 et sollicite un rappel de salaire de 462,80 € à ce titre, outre les congés payés afférents. A titre subsidiaire, il soutient avoir accompli 8 heures supplémentaires devant donner lieu à un rappel de salaire de 115,70 €, outre les congés payés afférents.
Il produit aux débats deux décomptes mentionnant sur la période considérée les horaires accomplis ainsi que le nombre d’heures supplémentaires revendiquées.
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre en produisant ses propres éléments.
De son côté, l’EURL TRI 37 verse aux débats :
-25 feuilles de travail journaliers à la cabine de tri sur lesquelles ont été relevées les heures de travail de M. [F] avec sa signature à chaque fois pour 8h45 de travail quotidien (pièce 9). Ces feuilles ne couvrent pas l’intégralité des journées entre le 4 janvier et le 6 avril 2016 ;
– les fiches récapitulatives de la société COVED, en pièce 8 qui rapportent, elles, quotidiennement les heures supplémentaires pendant ce laps de temps et enregistrées par elle. Ces fiches emportent la conviction de la cour. Il convient de s’y référer afin de déterminer si M. [F] a ou non accompli des heures supplémentaires.
L’accord collectif du 6 avril 1999 relatif à la réduction et à l’aménagement du temps de travail, texte attaché à la convention collective nationale des industries et du commerce de la récupération du 6 décembre 1971, pris en l’article 1er du chapitre 4 relatif à l’annualisation, prévoit : « L’horaire hebdomadaire maximal de travail effectif peut varier sur l’année civile autour d’une moyenne hebdomadaire de 35 heures ou moins de telle sorte que pour chaque salarié les heures effectuées au-delà et en deçà de cette moyenne hebdomadaire se compensent arithmétiquement dans le cadre de la période annuelle adaptée. Cette moyenne hebdomadaire annuelle est respectée lorsque le nombre annuel d’heures de travail effectif est égal à l’horaire hebdomadaire réduit multiplié par le nombre de semaines travaillées sur une année (1589 heures).»
L’annualisation du temps de travail a été mise en place au sein de l’EURL TRI 37 conformément à ce texte, qui autorise l’employeur à faire varier l’horaire hebdomadaire sur l’année civile.
Cependant, en application des articles 3 et 6 de cet accord, les heures effectuées au-delà de la 44ème heure hebdomadaire doivent être considérées comme des heures supplémentaires.
Il résulte des éléments versés aux débats par l’employeur que les heures effectuées entre janvier et mars 2016 par M. [F] ont été compensées en avril et en mai 2016. Ainsi que le souligne l’EURL TRI 37, M. [F] a effectué 31 heures de travail en avril 2016 tout en étant réglé de l’intégralité de son salaire de 1470,77 €.
Seules doivent être considérées comme des heures supplémentaires les heures effectuées au-delà de la 44ème heure, telles qu’elles apparaissent dans les pièces versées aux débats par l’EURL TRI 37 et dans le décompte de M. [F] (pièce n° 11).
Dans ces conditions, au regard des éléments produits par l’une et l’autre des parties, il convient de fixer la créance de rappel d’heures supplémentaires à 115,70 € brut, outre 11,57 € brut de congés payés afférents et de condamner l’EURL TRI 37 au paiement de cette somme. Le jugement est infirmé de ce chef.
Il y a lieu d’assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2016, date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation.
Il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil.
Sur le travail dissimulé
L’article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié.
Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.
Il a été retenu que M. [F] avait effectué des heures supplémentaires n’ayant pas donné lieu à rémunération. Pour autant, il ne résulte pas des éléments du dossier que l’employeur se soit volontairement soustrait à ses obligations déclaratives ou ait sciemment omis de rémunérer des heures de travail dont il avait connaissance qu’elles avaient été accomplies. L’élément intentionnel de la dissimulation d’activité n’est pas caractérisé.
M. [F] est débouté de sa demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé. Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur le respect des durées maximales de travail
L’article L. 3121-20 du code du travail dispose qu’au cours d’une même semaine, la durée maximale hebdomadaire de travail est de 48 heures.
M. [F] affirme avoir accompli 52 heures par semaine du 4 janvier au 6 avril 2016.
Il convient de se référer aux fiches récapitulatives individuelles délivrées par la société COVED qui ne mentionnent aucun dépassement d’horaire à 48 heures hebdomadaires ni au-delà, mais seulement quatre semaines à 47 heures 30.
L’EURL TRI 37 rapporte la preuve d’avoir respecté les durées maximales de travail sur la période considérée. M. [F] devra être débouté de sa demande de dommages-intérêts. Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur le prêt de main-d »uvre illicite entre l’EURL TRI 37 et la société COVED
L’article L.8241-1 du code du travail dispose que « toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’oeuvre est interdite » et énumère des dérogations à ce principe.
L’article L.8241-2 du code du travail autorise, en les encadrant, les opérations de prêt de main-d’oeuvre à but non lucratif, en imposant l’accord du salarié concerné, une convention de mise à disposition entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice et un avenant au contrat de travail. Il organise également les conditions de la mise à disposition du salarié.
Le fait de procéder à une opération de prêt illicite de main-d’oeuvre en méconnaissance des dispositions de l’article L. 8241-1 du travail, est constitutif du délit visé à l’article L. 8243-1 du même code.
L’EURL TRI 37 produit la convention de sous-traitance la liant à la société COVED.
Aux termes du préambule de cette convention, la société COVED est spécialisée dans la collecte et le traitement des déchets. L’EURL TRI 37 a pour activité principale l’achat, la vente, la collecte et le triage de matériaux recyclables et non recyclables. La convention vise à permettre à la société COVED de remplir ses obligations en matière d’insertion sociale de personnes en difficulté ou en recherche d’emploi, l’EURL TRI 37 étant une entreprise d’insertion.
Il ressort des bulletins de paie de M. [F], de la facturation à la société COVED des prestations de l’EURL TRI 37 et de la synthèse versée aux débats (pièces 10 ,13 et 14 du dossier de l’employeur) que sur la période de janvier à août 2016 le montant de la rémunération versée par M. [F] à l’EURL TRI 37 a été inférieure aux sommes facturées à la société COVED pour sa mise à disposition.
Il en résulte que la mise à disposition de M. [F] ne constituait pas une opération illicite de prêt de main-d »uvre à titre lucratif. M. [F] sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts. Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur la demande de remise des documents de fin de contrat
Il convient d’ordonner à l’EURL TRI 37 de remettre à M. [F] une attestation Pôle emploi et un bulletin de paie conformes aux dispositions du présent arrêt, et ce dans un délai d’un mois à compter de sa signification.
Aucune circonstance ne justifie d’assortir ce chef de décision d’une mesure d’astreinte pour en garantir l’exécution.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Il y a lieu de condamner l’EURL TRI 37 aux dépens de première instance et d’appel.
Il paraît inéquitable de laisser à la charge du salarié l’intégralité des sommes avancées par lui et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 500 euros au titre l’article 700 du code de procédure civile. L’employeur est débouté de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :
Infirme le jugement déféré mais seulement en ce qu’il a débouté M. [Z] [F] de ses demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires et congés payés afférents et en ce qu’il l’a condamné aux dépens ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Condamne l’EURL TRI 37 à payer à M. [Z] [F] les sommes de 115,70 € brut à titre de rappel d’heures supplémentaires et de 11,57 € brut au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2016 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil ;
Ordonne à l’EURL TRI 37 de remettre à M. [Z] [F] une attestation Pôle emploi et un bulletin de paie conformes aux dispositions du présent arrêt, et ce dans un délai d’un mois à compter de sa signification ;
Dit n’y avoir lieu à assortir la remise des documents de fin de contrat d’une astreinte ;
Condamne l’EURL TRI 37 à payer à M. [Z] [F] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande à ce titre ;
Condamne l’EURL TRI 37 aux dépens de première instance et d’appel.
Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier
Karine DUPONT Alexandre DAVID