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PS/DD
Numéro 23/3262
COUR D’APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 05/10/2023
Dossier : N° RG 21/03572 – N°Portalis DBVV-V-B7F-IAZJ
Nature affaire :
Contestation du motif économique de la rupture du contrat de travail
Affaire :
S.N.C. LA SOCIETE MARSAN,
S.A.S. LA SOCIETE S.F.N. – FRANCHISE NOZ,
SAS LES MANDATAIRES
C/
[G] [U] épouse [W],
UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 14]
Grosse délivrée le
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 05 Octobre 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 22 Mars 2023, devant :
Madame CAUTRES, Présidente
Madame SORONDO, Conseiller
Madame PACTEAU, Conseiller
assistées de Madame LAUBIE, Greffière.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTES :
S.N.C. LA SOCIETE MARSAN
Prise en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 15]
S.A.S. LA SOCIETE S.F.N. – FRANCHISE NOZ
Prise en la personne de son dirigeant domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 7]
SAS LES MANDATAIRES
Représentée par Maître [R] [O] es-qualité de liquidateur de la société SFN CONCEPT CORNER OUEST,
[Adresse 8]
[Localité 2]
Représentées par Maître CREPIN de la SELARL LEXAVOUE PAU-TOULOUSE, avocat au barreau de PAU, et Maître BREGER, avocat au barreau de LAVAL
INTIMÉES :
Madame [G] [U] épouse [W]
[Adresse 5]
[Localité 23]
Représentée par Maître GIRAUD de la SCP GIRAUD-NURY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 14]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Maître GOTTE de la SELARL MAGELLAN AVOCATS, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN
sur appel de la décision
en date du 06 OCTOBRE 2021
rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONT-DE-MARSAN
RG numéro : 19/00051
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [G] [W] née [U] a été engagée le 13 novembre 2006 par la Sarl Marsan en qualité de chef de magasin, suivant contrat à durée indéterminée relevant de la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires. Son lieu de travail était à [Localité 15].
La société Marsan exploite un commerce de produits de déstockage ou invendus à [Localité 15] sous l’enseigne Noz. Elle a postérieurement changé de forme juridique, devenant une société en nom collectif.
Le 22 février 2012, Mme [W] a été engagée par la Sarl SFN Consulting Sud en qualité d’animatrice d’équipe magasin, suivant contrat à durée indéterminée relevant de la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires. Le contrat indiquait qu’elle était rattachée au siège social de la société à [Localité 18].
Par avenant du 29 février 2012, elle a été affectée à compter du 1er mars 2012 à un poste de chargée de mission itinérante.
Le 1er mai 2013, elle a été engagée par la Sarl SFN Concept Corner, dont la dénomination a ensuite été modifiée pour SFN Concept Corner Ouest, en qualité de chargée de mission concept, suivant contrat à durée indéterminée régi par les dispositions de la convention collective des commerces de détail non alimentaires. Le contrat indiquait qu’elle était rattachée au siège social de la société alors à [Localité 18]. Cette société a pour objet la gestion et l’animation de corners dans des magasins.
Par courrier du 30 mars 2018, elle a été informée par la Sarl SFN Concept Corner Ouest que les relations contractuelles de cette société avec le réseau de franchise Noz prenaient fin le 31 mars 2018 et il lui a été demandé de ne plus exercer de prestations pour le compte de ce réseau à compter du 1er avril 2018.
Par jugement du 9 mai 2018, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé la liquidation judiciaire de la Sarl SFN Concept Corner Ouest et a désigné Maître [R] [O] en qualité de liquidateur.
Le 14 mai 2018, Mme [W] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 22 mai 2018. Le 23 mai 2018, elle a été licenciée pour motif économique. Le 31 mai 2018, elle a accepté un contrat de sécurisation professionnelle.
Le 22 mai 2019, elle a saisi le conseil de prud’hommes de Mont de Marsan de demandes contre la Sarl Marsan et la Sas Les Mandataires ès qualités de liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest aux fins notamment d’indemnisation d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La Sas SFN Société de Franchise Noz a été appelée en la cause par avis du 9 octobre 2019.
Le 10 septembre 2019, la Sas Les Mandataires, mission conduite par Maître [R] [O], a été désignée comme liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest.
Par jugement du 6 octobre 2021, le conseil de prud’hommes de Mont de Marsan a :
– dit qu’il n’est pas caractérisé les délits de marchandage et de prêt de main d”uvre illicite,
– débouté Mme [W] de sa demande d’indemnité au titre du délit de marchandage et du délit de prêt de main d”uvre illicite
– dit que Mme [W] a été placée en situation de co-emploi à l’égard de la Sarl Marsan et SFN Concept Corner Ouest,
– dit que le licenciement pour motif économique prononcé le 23 mai 2018 est dénué de cause réelle et sérieuse faute de respect de l’obligation de reclassement,
– condamné la Sarl Marsan et Maître [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest à verser à Mme [W] la somme de 8.034 € au titre du préavis outre 803,40 € pour les congés payés afférents,
– condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et Maître [O] ès qualités de liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] les sommes de :
. 7.215,72 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
. 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– débouté Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– constaté que les sociétés Marsan et SFN sont in boni, elles devront contribuer solidairement au règlement de l’entièreté de la dette,
– condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et la Sas Les Mandataires ès qualités de liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest au versement de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le 04 novembre 2021, les sociétés Marsan, SFN Société de Franchise Noz et Les Mandataires prise en sa qualité de liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest, ont interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.
Par acte d’huissier du 25 avril 2022, Mme [W] a appelé en intervention forcée l’Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 14].
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 17 février 2023, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, la Sas Les Mandataires prise en sa qualité de liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest demande à la cour de :
– Confirmer le jugement en ce qu’il a :
. dit qu’il n’est pas caractérise les délits de marchandage et de prêt de main d’oeuvre illicite,
. débouté Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre du licenciement,
– Infirmer le jugement en ce qu’il a :
. dit que Mme [W] a été placée dans une situation de co-emploi de la Sarl Marsan et SFN Corner Ouest,
. dit que le licenciement prononcé pour motif économique le 23 mai 2018 est dénué de cause réelle et sérieuse faute de respect de l’obligation de reclassement,
. condamné la Sarl Marsan et M° [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest à verser à Mme [W] 8.034 € au titre du préavis outre 803,40 € pour les congés payés afférents,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] la somme de 7.215,72 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. constaté que les sociétés Marsan et SFN sont in boni, elles devront contribuer solidairement au règlement de l’entièreté de la dette,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest au versement de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest aux entiers dépens,
Statuant à nouveau,
– A titre principal, dire et juger irrecevables et en tout cas non fondées toutes les demandes de Mme [W], l’en débouter,
– A titre subsidiaire, limiter à 3 mois la créance à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société SFN Concept Corner Ouest, représentée par Maître [O], liquidateur, au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– En toute hypothèse,
. Condamner Mme [W] à lui verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
. La condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel et faire application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Sophie Crepin et de la Selarl Lexavoué Pau-Toulouse.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 17 février 2023, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, la Sas SFN Société de Franchise Noz demande à la cour de :
– Confirmer le jugement en ce qu’il a :
. dit qu’il n’est pas caractérise les délits de marchandage et de prêt de main d’oeuvre illicite,
. débouté Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre du licenciement,
– Infirmer le jugement en ce qu’il a :
. dit que le licenciement prononcé pour motif économique le 23 mai 2018 est dénué de cause réelle et sérieuse faute de respect de l’obligation de reclassement,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] la somme de 7.215,72 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. constaté que les sociétés Marsan et SFN sont in boni, elles devront contribuer solidairement au règlement de l’entièreté de la dette,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest au versement de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest aux entiers dépens,
Statuant à nouveau,
– Dire et juger prescrites à son égard les demandes de Mme [W] en contestation de la rupture du contrat,
– Dire et juger infondées les demandes de Mme [W] contre elle, la débouter de toutes ses demandes,
– La mettre hors de cause.
– Condamner Mme [W] à lui verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner Mme [W] aux entiers dépens de première instance et d’appel et faire application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Sophie Crepin et de la Selarl Lexavoué Pau-Toulouse.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 11 octobre 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, la SNC Marsan demande à la cour de :
– Confirmer le jugement en ce qu’il a :
. dit qu’il n’est pas caractérise les délits de marchandage et de prêt de main d’oeuvre illicite,
. débouté Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre du licenciement,
– Infirmer le jugement en ce qu’il a :
. dit que Mme [W] a été placée dans une situation de co-emploi de la Sarl Marsan et SFN Corner Ouest,
. dit que le licenciement prononcé pour motif économique le 23 mai 2018 est dénué de cause réelle et sérieuse faute de respect de l’obligation de reclassement,
. condamné la Sarl Marsan et M° [O] ès qualités de mandataire liquidateur de SFN Concept Corner Ouest à verser à Mme [W] 8.034 € au titre du préavis outre 803,40 € pour les congés payés afférents,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] la somme de 7.215,72 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
. condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest à payer à Mme [W] la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. constaté que les sociétés Marsan et SFN sont in boni, elles devront contribuer solidairement au règlement de l’entièreté de la dette,
– condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest au versement de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la Sarl Marsan, la Sas SFN et M° [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de l’Eurl SFN Concept Corner Ouest aux entiers dépens.
Statuant à nouveau,
– Dire et juger irrecevables et en tout cas non fondées toutes les demandes de Mme [W] à son encontre, l’en débouter,
– Condamner Mme [W] à lui verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– En toute hypothèse, débouter les AGS de leurs demandes formulées à titre subsidiaire contre la société Marsan,
– Condamner Mme [W] aux entiers dépens de première instance et d’appel et faire application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Sophie Crepin et de la Selarl Lexavoué Pau-Toulouse.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 9 mars 2023, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, Mme [W] demande à la cour de :
– déclarer irrecevable la demande de la société SFN tendant à voir déclarée prescrite l’action de Mme [W] à son égard au niveau du licenciement,
– déclarer la société Marsan, la Sas SFN, la Sas Les Mandataires mal fondées en leur appel,
– débouter la société Marsan, la Sas SFN, la Sas Les Mandataires et l’Unedic AGS CGEA de toutes demandes, fins aux conclusions contraires aux présentes,
– confirmer le jugement en ce qu’il :
. a reconnu la situation de co-emploi dans laquelle elle s’est trouvée,
. a déclaré son licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. lui a alloué la somme de 8.034 € au titre de l’indemnité de préavis outre congés payés y afférents,
. lui a alloué la somme de 7.215,72 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
. lui a alloué la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
. a condamné les sociétés Marsan, SFN et Maître [O] ès qualités aux dépens,
– la déclarer bien fondée en son appel incident,
Infirmant,
Première demande : sur la situation de co-emploi avec prêt de main d’oeuvre et marchandage,
Juger qu’elle a fait l’objet d’un prêt de main d’oeuvre illicite et de marchandage commis par la Sarl Marsan et la Sarl SFN Concept Corner Ouest,
Condamner solidairement la société Marsan et la Sas SFN à lui verser et Maître [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé de créances à son bénéfice la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite, marchandage et co-emploi,
Subsidiairement sur ce point, faire application de l’article 203 du code de procédure civile et procéder par voie d’enquête à l’audition de M. [H],
Seconde demande : sur le licenciement,
Condamner solidairement la société Marsan à lui verser et Maître [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé de créances à son bénéfice les sommes de :
. 28.119 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 8.000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral,
Ordonner à Maître [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest d’établir un relevé de créances à son bénéfice pour les sommes sus visées,
Mettre les dépens à la charge solidaire de la société Marsan, la Sas SFN et de la liquidation judiciaire de la Sarl SFN Concept Corner Ouest.
A titre subsidiaire, si par impossible il n’était pas retenu la notion de co-emploi,
Juger que Maître [O] ès qualités a manqué à son obligation de reclassement,
Déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse et particulièrement abusif,
Condamner Maître [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé de créances à son bénéfice les sommes suivantes :
. la somme de 8.034 € à titre d’indemnité de préavis,
. la somme de 803,40 € au titre des congés payés sur le préavis,
. la somme de 7.215,72 € au titre de l’indemnité de licenciement,
. la somme de 28.119 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
Ordonner à Maître [O] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sarl SFN Concept Corner Ouest d’établir un relevé de créances à son bénéfice pour les sommes sus visées,
Mettre les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la Sarl SFN Concept Corner Ouest,
Dans tous les cas,
Ordonner la remise à sa personne des documents administratifs conformes à l’arrêt à intervenir sous astreinte de 10 € par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la notification de la décision,
Y ajoutant,
Condamner solidairement la société Marsan, la Sas SFN et la Sas Les Mandataires ès qualités à lui payer et porter la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
Déclarer l’arrêt à intervenir commun et opposable à l’UNEDIC AGS CGEA de [Localité 14],
Condamner solidairement la société Marsan, la Sas SFN et la Sas Les Mandataires ès qualités aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 11 juillet 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, l’UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 14] demande à la cour de :
– Infirmer le jugement déféré,
– Constater que Mme [W] ne rapporte aucun commencement de preuve de la moindre de ses demandes,
– L’en débouter,
– Subsidiairement et pour le cas,
. condamner la société Marsan à garantir l’AGS pour les éventuels montants qui seront fixés au passif de la société Concept Corner Ouest, en qualité de co-employeur,
. condamner la société Marsan à rembourser les éventuelles avances auxquelles il a été contraint de procéder au bénéfice de Mme [W],
. Dire et juger que, dans les rapports entre l’AGS et la société Marsan qui est in bonis, la contribution à la dette solidaire incombera le cas échéant entièrement à celle-ci,
– A titre infiniment subsidiaire,
. dire qu’à défaut de paiement par le liquidateur, et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à ce paiement, l’AGS devra garantir le paiement de ces sommes dans la limite de ses obligation légales et réglementaires,
. dire et juger que le jugement à intervenir ne sera opposable à l’AGS que dans la limite de sa garantie légale,
. débouter Mme [W] de l’ensemble de ses demandes,
. condamner la partie succombant à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
. statuer ce que de droit sur les dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le prêt de main d’oeuvre illicite, le marchandage et le co-emploi
L’article L.8231-1 du code du travail prohibe le marchandage, défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d”uvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail.
L’article L.8241-1 du code du travail prohibe toute opération à but lucratif ayant pour objet le prêt illicite de main d’oeuvre, sous réserve :
– des dispositions du code du travail relatives au travail temporaire, aux entreprises de travail à temps partagé et à l’exploitation d’une agence de mannequin lorsque celle-ci est exercée par une personne titulaire de la licence d’agence de mannequin,
– des dispositions de l’article L.222-3 du code du sport relatives aux associations ou sociétés sportives,
– des dispositions des articles L.2135-7 et L.2135-8 du code du travail relatives à la mise à disposition des salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L.2231-1 du même code.
Une opération de prêt de main-d”uvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition.
Mme [W] soutient qu’avant comme après son transfert à la société SFN Consulting Sud puis à la société SFN Concept Corner Ouest, elle a continué à travailler exactement dans les mêmes conditions au sein de la société Marsan.
Elle invoque diverses décisions de justice concernant des salariés qui travaillaient pour un magasin franchisé Noz et dont le contrat a été transféré à la Sarl SFN Concept Corner Ouest alors que leurs fonctions sont demeurées inchangées au sein du magasin franchisé Noz. Elle ne produit cependant aucun élément de nature à établir qu’elle a continué à exercer au magasin de [Localité 15], étant observé que la délivrance d’un certificat de travail pour la période du 13 novembre 2006 au 13 juin 2018 n’est pas significative puisqu’il ressort des bulletins de paie produits par Mme [W] pour la période de novembre 2017 à avril 2018 qu’ils mentionnent une entrée au service de la Sarl SFN Concept Corner Ouest le 1er mai 2013 et une reprise d’ancienneté au 13 novembre 2006. De même, le 18 avril 2018 Mme [W] s’est rendue à la gendarmerie de [Localité 23] car elle n’avait pas été payée du salaire de mars 2018 et ne parvenait pas à contacter la Sarl SFN Concept Corner Ouest, et lors de son audition, elle a déclaré que suite au rachat de cette société en septembre 2016 par M. [I] [Y] à la Sas SFN Société de Franchise Noz, elle avait continué à travailler « au sein des magasins Noz en tant que chargée de mission concept ». Par ailleurs, il résulte de l’attestation versée aux débats par la salariée de M. [P] [H], directeur adjoint des ventes de la Sarl SFN Concept Corner Ouest du 1er mars 2011 au 13 octobre 2018, que Mme [W] était chargée de la gestion des corners des magasins de [Localité 13], [Localité 9], [Localité 11], [Localité 21] et [Localité 16], et qu’à plusieurs reprises à compter de 2016, elle a travaillé « pour le concept TDM » [espaces textiles de marque] des magasins de [Localité 10], [Localité 19], [Localité 20], [Localité 12], [Localité 17], [Localité 22]. Dès lors, à défaut d’éléments de preuve d’une situation de prêt de main d”uvre illicite et/ou de marchandage avec pour société utilisatrice la société Marsan, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a dit ces délits non caractérisés.
Une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l’égard du personnel employé par une autre, hors l’existence d’un lien de subordination, que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière.
Le premier juge a retenu l’existence d’une situation de co-emploi par la Sarl Marsan et la Sarl Concept Corner Ouest, Mme [W] demande la confirmation du jugement sur ce point, ne demande pas de reconnaître l’existence d’une situation de co-emploi par la Sas SFN Société Franchise Noz tout en demandant de condamner cette dernière à l’indemniser du préjudice résultant du co-emploi et en invoquant dans ses conclusions «l’ingérence de la Sas SFN tant au niveau des Sarl qu’au niveau de la SFN Concept Corner Ouest » et que « les différentes entités du groupe étaient gérées par le même service des ressources humaines ». Il a été retenu ci-dessus que Mme [W] ne caractérisait strictement aucun lien avec la Sarl Marsan depuis son entrée au service de la Sarl SFN Concept Corner Ouest de sorte que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a été retenu une situation de co-emploi par cette dernière. Outre que Mme [W] ne demande pas la reconnaissance d’une situation de co-emploi par la société SFN Société de Franchise Noz, elle ne fournit pas d’éléments de nature à caractériser une immixtion permanente de cette société dans la gestion de la Sarl SFN Concept Corner Ouest. Sa demande de dommages et intérêts doit donc également rejetée en ce qu’elle vise la Sas SFN Société de Franchise Noz.
Sur la rupture du contrat de travail
Sur la prescription à l’égard de la Sas Société de Franchise Noz
Il est constant que le premier juge a omis de statuer sur cette fin de non-recevoir. Mme [W] est mal fondée à faire valoir qu’elle serait désormais irrecevable au motif que la déclaration d’appel ne mentionne pas cette omission de statuer alors que celle-ci doit mentionner tous les chefs de jugement critiqués, ce qui est le cas.
En application de l’article L.1233-67 du code du travail, l’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail. Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle. Ce délai n’est opposable au salarié que s’il en a été fait mention dans la proposition de contrat de sécurisation professionnelle.
En l’espèce, le courrier de Maître [O] en date du 23 mai 2018 proposant à Mme [W] l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle mentionne le délai pour agir ci-dessus et Mme [W] a adhéré au contrat précité le 31 mai 2018. La Sas SFN Société de Franchise Noz n’a été appelée en la cause que le 9 octobre 2019, soit plus d’un an après l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.
En application de l’article 2245 du code civil, l’interpellation faite à l’un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d’exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers. Cependant, l’interruption de la prescription à l’encontre de la société SFN Concept Corner Ouest et de la Sarl Marsan résultant de la requête du 22 mai 2019 ne peut s’étendre à la société SFN société de franchise NOZ dès lors que la salariée tire la solidarité d’une situation de co-emploi qui n’a pas été reconnue.
En conséquence, les demandes présentées à l’encontre de la Sas SFN Société de Franchise Noz au titre de la contestation de la rupture du contrat de travail seront déclarées prescrites.
Sur l’obligation de reclassement
Mme [W] invoque une obligation de reclassement par la Sarl Marsan au motif d’une situation de co-emploi mais celle-ci n’a pas été retenue.
Elle invoque par ailleurs une obligation de reclassement par le liquidateur au sein du groupe Noz.
En application de l’article L.1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. Pour l’application de ce texte, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L.233-3 et à l’article L.233-16 du code de commerce. Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. L’employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.
Il ressort du procès-verbal de l’assemblée générale de la Sarl SFN Concept Corner Ouest du 20 septembre 2016 que la Sas SFN Société Franchise Noz et la société RA Expansion ont cédé l’intégralité des parts sociales qu’elles détenaient dans cette société et il n’est produit aucun élément caractérisant que la Sarl SFN Concept Corner Ouest faisait partie, postérieurement à cette cession, d’un groupe Noz répondant aux conditions de l’article L.1233-4 ci-dessus.
En l’état de la cessation complète d’activité d’une entreprise qui n’appartenait pas à un groupe de sociétés, il n’existait pas de possibilités de reclassement. Enfin, il est établi que par courrier du 16 mai 2018, le liquidateur a interrogé la Sas SFN Société de Franchise Noz, laquelle a répondu négativement le 24 mai 2018, sur les possibilités de reclassement au sein de cette société ou de toutes sociétés de son groupe.
En conséquence, le licenciement est justifié par un motif économique et le jugement doit être infirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
Compte tenu de la situation économique respective des parties, chacune aura la charge des dépens qu’elle a exposés en première instance et en appel et les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Mont de Marsan du 6 octobre 2021 hormis en ce qu’il a dit les délits de prêt illicite de main d’oeuvre et de marchandage non caractérisés et débouté Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral lié au licenciement,
Statuant de nouveau et y ajoutant,
Déclare prescrites les demandes présentées à l’encontre de la Sas SFN Société de Franchise Noz au titre de la contestation de la rupture du contrat de travail,
Dit qu’il n’est pas caractérisé de co-emploi,
Dit le licenciement de Mme [G] [W] fondé sur un motif économique,
Rejette toutes demandes de paiement de Mme [G] [W],
Dit que chaque partie a la charge des dépens qu’elle a exposés en première instance et en appel,
Rejette toutes les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,