Mannequin / Mannequinat : 30 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/13981

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Mannequin / Mannequinat : 30 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/13981
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 30 JUIN 2023

(n°111, 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 21/13981 – n° Portalis 35L7-V-B7F-CEEHW

Décision déférée à la Cour : jugement du 17 juin 2021 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 1ère section – RG n°19/07286

APPELANT

M. [I] [G]

Né le 2 septembre 1992 à [Localité 9] (49)

De nationalité française

Exerçant la profession de graphiste

Demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Charlotte GAIST de la SELARL GAIST & RENARD, avocate au barreau de PARIS, toque A 0850

INTIMEES

S.N.C. IKKS PRESTATIONS, prise en la personne de son gérant, M. [H] [C], domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 4]

[Localité 3]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 483 598 603

S.A.S. IKKS GROUP, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 5]

[Localité 13]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs d’Angers sous le numéro 339 899 940

S.A.S.U. IKKS WOMEN, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 5]

[Localité 13]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs d’Angers sous le numéro 479 960 783

S.A.S.U. IKKS MEN, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 5]

[Localité 13]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs d’Angers sous le numéro 479 942 567

S.A.S.U. IKKS JUNIOR, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 5]

[Localité 13]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs d’Angers sous le numéro 479 940 512

S.A.S. IKKS RETAIL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 4]

[Localité 3]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 479 960 965

Représentées par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477

Assistées de Me Vanessa BOUCHARA plaidant pour la SARL CABINET BOUCHARA AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, toque C 594

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 5 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique RENARD, Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport, en présence de Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mmes [K] [M] et [W] [P] ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Véronique RENARD, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 17 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a :

– déclaré M. [I] [G] irrecevable en ses demandes formées au titre des shootings des 17 au 22 décembre 2016 à [Localité 11], 20 février 2017 à [Localité 3], 17 mai 2018 à [Localité 10], 17 au 20 avril 2017 à [Localité 12], 14 au 16 juin 2017 à [Localité 3], 4 au 6 octobre 2017 à [Localité 7], 21 au 28 novembre 2017 à [Localité 14] et 24 au 25 mai 2018 à [Localité 8],

– débouté M. [I] [G] de ses demandes formées au titre des photographies prises lors du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017,

– condamné M. [I] [G] aux dépens,

– condamné M. [I] [G] à payer aux sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Women, IKKS Men, IKKS Junior et IKKS Retail 3 000 euros chacune en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement,

Vu l’appel interjeté le 19 juillet 2021, par M. [I] [G],

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 10 février 2023 par M. [G], qui demande à la cour de :

– infirmer le jugement du 17 juin 2021 rendu par le tribunal judiciaire de [Localité 3] en toutes ses dispositions,

Et statuant de nouveau,

– déclarer M. [I] [G] recevable en ses demandes et l’y déclarer bien fondé,

– constater que les sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Retail, IKKS Women, IKKS Men et IKKS Junior ont violé les droits d’auteurs de M. [I] [G] par la divulgation et la reproduction, a’ des fins commerciales et de publicité, de 144 ‘uvres photographiques dont il est l’auteur,

En conséquence,

– condamner solidairement les sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Retail, IKKS Women, IKKS Men et IKKS Junior a’ verser a’ M. [I] [G] la somme de 1 136 750 euros au titre de dommages et intérêts euros en réparation de ses préjudices patrimonial et moral,

– débouter les sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Retail, IKKS Women, IKKS Men et IKKS Junior de leur demandes, fins et conclusions,

– condamner solidairement les sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Retail, IKKS Women, IKKS Men et IKKS Junior les sociétés IKKS Group et IKKS Prestations au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement les sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Retail, IKKS Women, IKKS Men et IKKS Junior aux entiers dépens,

En tout état de cause,

– infirmer le jugement du 17 juin 2021 en ce qu’il a condamné M. [I] [G] a’ payer aux sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Retail, IKKS Women, IKKS Men et IKKS Junior la somme de 2 000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile, soit 18 000 euros,

– juger que l’équité et la situation des parties commandent de ramener le montant des frais exposés a’ de plus justes proportions,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique 26 janvier 2023 par les sociétés, SNC IKKS Prestations, SAS IKKS Group, SAS IKKS Women, SAS IKKS Men, SAS IKKS Junior et SAS IKKS Retail, qui demandent à la cour de :

A titre principal,

– confirmer le jugement du tribunal judiciaire du 17 juin 2021 en ce qu’il a déclaré M. [I] [G] irrecevable en ses demandes formées au titre des shootings des 17 au 22 décembre 2016 à [Localité 11], 20 février 2017 à [Localité 3], 17 mai 2018 à [Localité 10], 17 au 20 avril 2017 à [Localité 12], 14 au 16 juin 2017 à [Localité 3], 4 au 6 octobre 2017 à [Localité 7], 21 au 28 novembre 2017 à [Localité 14] et 24 au 25 mai 2018 à [Localité 8],

– infirmer le jugement du tribunal judiciaire du 17 juin 2021 en ce qu’il a déclaré M. [I] [G] recevable en ses demandes formées au titre des photographies prises lors du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017 à [Localité 3],

En conséquence, statuant à nouveau,

– déclarer M. [I] [G] irrecevable en ses demandes formées au titre des photographies prises lors du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017 à [Localité 3],

A titre subsidiaire,

– confirmer le jugement du tribunal judiciaire du 17 juin 2021 en ce qu’il a débouté M. [I] [G] de ses demandes formées au titre des photographies prises lors du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017, au motif que celles-ci ne sont pas éligibles à la protection par le droit d’auteur,

Et statuant à nouveau,

-débouter M. [I] [G] de ses demandes formées au titre des photographies prises lors des shootings des 17 au 22 décembre 2016 à [Localité 11], 20 février 2017 à [Localité 3], 17 mai 2018 à [Localité 10], 17 au 20 avril 2017 à [Localité 12], 14 au 16 juin 2017 à [Localité 3], 4 au 6 octobre 2017 à [Localité 7], 21 au 28 novembre 2017 à [Localité 14] et 24 au 25 mai 2018 à [Localité 8], au motif que celles-ci ne sont pas éligibles à la protection par le droit d’auteur,

– débouter M. [I] [G] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

A titre infiniment subsidiaire,

– déclarer que les demandes indemnitaires formulées par M. [I] [G] ne sont absolument pas justifiées et en tout état de cause sont particulièrement disproportionnées,

En conséquence,

– débouter M. [I] [G] de ses demandes indemnitaires, ou à tout le moins les ramener à de plus justes proportions,

En tout état de cause,

– condamner M. [I] [G] à payer aux sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Women, IKKS Men, IKKS Junior et IKKS Retail la somme de 10 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [I] [G] aux entiers dépens de l’instance,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 23 février 2023 ;

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que M. [G] a été salarié de la société IKKS Prestations en qualité de graphiste textile à plusieurs périodes :

– du 4 septembre 2014 au 13 mars 2015, selon contrat de travail à durée déterminée du 4 septembre 2014, prolongé jusqu’au 30 septembre 2015 par avenant,

– du 1er octobre 2015 au 29 février 2016, en contrat de mission,

– à compter du 1er mars 2016, selon contrat de travail à durée indéterminée.

M. [G] fait valoir que, jusqu’au 24 décembre 2018, il était en charge de la création et de la conception graphique d’imprimés sur étoffes et fibres textiles pour le bureau de style détaché à la collection IKKS Men, mais que dans les faits, ses missions ont évolué et qu’il a travaillé auprès de la direction artistique de la société IKKS Prestations, en étroite collaboration avec les services de communication.

Il expose à cet égard que :

– en décembre 2016, il a accompagné M. [F], directeur de l’offre du groupe IKKS Men, lors d’un shooting qui s’est déroulé à [Localité 11], avec la présence du photographe [J] [X], pour la collection printemps-été 2017 IKKS Women & Men et qu’il a personnellement réalisé à cette occasion 32 photographies,

– la direction du groupe IKKS lui a confié seul la réalisation de shootings qui se déroulaient à [Localité 3], les 20 février et 18 mai 2017 et à [Localité 10], le 17 mai 2018, à l’occasion desquels il a réalisé 25 photographies,

– il a été missionné pour un shooting à [Localité 12] du 17 au 20 avril 2017, aux côtés du photographe [D] [E] et qu’il a réalisé à cette occasion 24 photographies,

– il est intervenu, du 14 au 16 juin 2017, aux côtés de la photographe [N] [L] [B] lors d’un shooting à [Localité 3] pour la collection automne-hiver 2017-2018 et qu’il a réalisé à cette occasion 14 photographies,

– il a été missionné à nouveau avec Mme [L] [B] pour un shooting à [Localité 7] du 4 au 6 octobre 2017 pour la collection automne-hiver 2017-2018 et qu’il a réalisé à cette occasion 12 photographies,

– du 21 au 28 novembre 2017, il a participé à un nouveau shooting à [Localité 14] dans le cadre duquel intervenait encore Mme [L] [B] pour les photographies des modèles masculins et féminins, outre M. [Z] pour les photographies des modèles enfants et qu’il a réalisé à cette occasion 12 photographies,

– il a été missionné pour participer à un shooting à [Localité 8] les 24 et 25 mai 2018, sous la direction de M. [U], directeur artistique communication de la marque IKKS Junior, pour la collection automne-hiver 2018-2019 et qu’il a réalisé à cette occasion 24 photographies.

Il fait valoir que les photographies qu’il a réalisées ont été divulguées et exploitées par les sociétés du groupe IKKS pour les besoins de leur communication.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 1er août 2018, M. [G] a, par l’intermédiaire de son avocat, invité la société IKKS Group à entrer en négociation concernant la cession des droits d’auteur pour les photographies réalisées à [Localité 11], [Localité 3], [Localité 12], [Localité 7], [Localité 14] et [Localité 10] réalisées en dehors de ses fonctions salariées pour le compte des sociétés IKKS.

Par courrier du 20 septembre 2018, la société IKKS Prestations a procédé au licenciement de M. [G] pour cause réelle et sérieuse.

Par actes d’huissier de justice des 31 mai 2019, M. [G] a fait assigner les sociétés IKKS Prestations, IKKS Group, IKKS Women, IKKS Men, IKKS Junior, et IKKS Retail devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Paris, en contrefaçon de droits d’auteur.

C’est dans ce contexte qu’a été rendu le jugement dont appel.

Sur la titularité des droits d’auteur sur les photographies revendiquées

M. [G] conclut à l’infirmation du jugement qui l’a déclaré irrecevable en ses demandes formées sur le fondement des droits d’auteur aux motifs, s’agissant des shootings des 17 au 22 décembre 2016 à [Localité 11], 20 février 2017 à [Localité 3], 17 au 20 avril 2017 à [Localité 12], 14 au 16 juin 2017 à [Localité 3], 4 au 6 octobre 2017 à [Localité 7], 21 au 28 novembre 2017 à [Localité 14], que sa contribution auxdites photographies relevait d’un travail collectif dirigé par la société IKKS Prestations, son employeur, qui dès lors est seule titulaire des droits d’auteur, et s’agissant des shootings du 17 mai 2018 à [Localité 10] et des 24 au 25 mai 2018 à [Localité 8], qu’il ne rapportait pas la preuve des droits revendiqués.

L’appelant revendique ainsi la paternité de 143 photographies qu’il énumère dans ses écritures (et non pas 144 comme indiqué par erreur) indiquant les avoir personnellement prises lors des shootings susvisés. Il ne conteste pas que ces shootings étaient organisés, « dans leurs grandes lignes », par le groupe IKKS mais fait valoir qu’il disposait néanmoins d’un espace de liberté suffisant pour exprimer, au travers de ses photographies, son empreinte personnelle, qu’il rapporte la preuve qu’il est l’auteur des clichés visés à la procédure par la production des pellicules originales, s’agissant des clichés pris avec des appareils de type argentique, et précisément d’une photographie de chacune des 36 planches contact des pellicules comprenant les 65 clichés argentiques exploités par IKKS, des fichiers sources s’agissant des clichés pris avec un appareil numérique, de courriels et d’attestations.

Les sociétés intimées contestent la paternité revendiquée par M. [G] sur l’ensemble des photographies en cause, y compris sur celles prises lors du shooting de [Localité 3] le 18 mai 2017 que le tribunal lui a attribuées. Elles font valoir que M. [G] n’était pas présent lors des shootings en qualité de photographe mais en qualité de « communication assistant », qu’il n’apporte aucune preuve certaine qu’il est à l’origine des clichés en cause, alors qu’ils ont toujours été divulgués et exploités sous le nom de la société IKKS Prestations, laquelle est à l’initiative des shootings et avait le contrôle et la direction artistique et technique des prises de vue, enfin que les éléments dont M. [G] prétend avoir été l’auteur sont fondus dans un ensemble indissociable et ne sont donc que le résultat des exigences, de la direction et des choix arbitraires opérés par la société IKKS Prestations.

Selon article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle, la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l”uvre est divulguée.

Par ailleurs, aux termes de l’article L.113-2 3° du même code, est dite collective l”uvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé.

L’article L.113-5 du code de la propriété intellectuelle ajoute que l”uvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. Cette personne est investie des droits de l’auteur.

Il est constant que doivent être quali’ées d”uvres collectives les ‘uvres procédant d’un travail collectif associant différentes personnes, lorsque la personne morale avait le pouvoir d’initiative sur les créations et en contrôlait le processus jusqu’au produit ‘nalisé en fournissant des directives et des instructions a’n d’harmoniser les différentes contributions, celles-ci se fondant dans l’ensemble en vue duquel elles étaient conçues, sans qu’il soit possible d’attribuer à chaque intervenant un droit distinct sur les ‘uvres réalisées.

Il n’est pas contesté que l’ensemble des photographies litigieuses a été divulgué par la société IKKS Prestations sous son nom et exploitées par elle et les sociétés IKKS Group, IKKS Women, IKKS Men, IKKS Junior et IKKS Retail pour les besoins de la promotion de leurs produits, notamment sur leurs sites internet et les réseaux sociaux.

Il n’est pas plus contesté que la société IKKS Prestations a pris 1’initiative des différents shootings à l’occasion desquels M. [G] aurait réalisé les photographies sur lesquelles il réclame des droits d’auteur.

L’appelant verse aux débats une attestation de M. [F] du 13 décembre 2018 de laquelle il résulte que, durant la période où M. [F] était directeur de l’offre au sein de la société IKKS du 1er septembre 2015 au 31 mars 2018, M. [G] était présent en qualité de photographe, sur les lieux de shootings IKKS suivants :

[Localité 11] du 17 décembre au 22 décembre 2016,

[Localité 3] le 20 février 2017,

[Localité 12] du 17 au 20 avril 2017,

[Localité 3] le 18 mai 2017,

[Localité 3] du 14 au 16 juin 2017,

[Localité 7] du 4 au 6 octobre 2017,

[Localité 14] du 21 au 28 novembre 2017.

Mme [A], responsable visuel merchandiser IKKS de décembre 2016 à septembre 2019, atteste quant à elle que « Plusieurs photos utilisées pour les vitrines et la décoration des boutiques (‘) étaient celles prises par [I] [G] et je peux affirmer que la société avait connaissance de la provenance de celles-ci » ».

Ces témoignages attestent tout au plus, pour le premier, que M. [G] était présent sur les shootings indiqués, et pour le second que M. [G] a pris plusieurs photographies, qui ont été utilisées par IKKS sans autre précision permettant d’identifier les dites photographies.

Ainsi et contrairement à ce qu’indique M. [G], ces attestations n’établissent nullement la qualité d’auteur des photographies dont il revendique la paternité dans le cadre de la présente procédure et il lui appartient de démontrer pour chacune de ces photographies qu’il a maîtrisé le processus de création sans être assujetti à la direction et au contrôle de la société IKKS Prestations qui était son employeur.

S’agissant du shooting effectué à [Localité 11] du 17 décembre au 22 décembre 2016, M. [G] indique lui-même dans ses écritures que M. [F] lui a demandé de l’accompagner lors de ce shooting se déroulant en présence du photographe [J] [X] pour la collection printemps-été 2017 de IKKS Women & Men. Cela est corroboré par le communiqué de presse IKKS relatif à la présentation de la campagne publicitaire Printemps- Eté 2017 qui indique

« Derrière l’objectif, le photographe [J] [X] s’imprègne de l’atmosphère chaude de la ville pour capter avec une grande justesse les mouvements et les couleurs. [I] [G] l’accompagne pour saisir des moments uniques qui prolongent l’histoire ».

Par ailleurs, par mail du 3 février 2017, la société IKKS, a demandé à M. [G] d’envoyer les fichiers à [V] ([R]) pour qu’il ajuste la chromie pour qu’il y ait une homogénéité entre les visuels couleur et entre les visuels N&B et lancer l’impression, les visuels étant changés dans un

deuxième temps.

Ainsi et contrairement à ce que soutient l’appelant, il n’est nullement établi qu’il a maîtrisé le processus de création de ces photographies sans être assujetti à la direction ou au contrôle d’IKSS.

Si par mail du 30 janvier 2017, la société IKKS, lui a demandé d’envoyer des photos « LA » « dans les tiennes et les sélections de [J] », il s’agissait manifestement de sélectionner des photographies. Enfin le fait de différencier les photographies par une absence de flash est inopérant pour établir la qualité d’auteur de M. [G] tout comme l’est la différence de traitement invoquée avec le photographe M. [X] dès lors que la cour n’est saisie que de la contestation de paternité concernant M. [G].

S’agissant du shooting effectué à [Localité 3] le 20 février 2017, les échanges de courriels versés aux débats entre Mme [S], Community Manager, et M. [G], permettent tout au plus d’établir que ce dernier était présent sur le tournage, qu’il était en charge de la sélection des photographies et qu’on lui a demandé d’en retoucher deux, le message du 15 mars 2017 se terminant par « Merci pour ton aide ».

Il n’est donc pas plus établi que M. [G] a maîtrisé le processus de création de ces photographies sans être assujetti à la direction ou au contrôle d’IKSS.

S’agissant du shooting effectué à [Localité 12] du 17 au 20 avril 2017, le photographe en charge était M. [E], la synthèse figurant dans un courriel du 28 mars 2017 fait état d’instructions précises de la société IKKS sur les deux shootings à réaliser, dont les contenus à photographier, les budgets alloués et les personnes présentes, et non pas seulement d’instructions générales comme le soutient l’appelant, et en tout état de cause, aucun élément ne permet de déterminer quelles photographies ont été prises par M. [E] ou par M. [G] et là encore ce dernier ne saurait bénéficier de la situation du photographe en charge du tournage sans apporter la preuve de la titularité des droits d’auteur qu’il revendique lui-même.

S’agissant du shooting effectué à [Localité 3] du 14 au 16 juin 2017, il n’est pas contesté que M. [G] accompagnait la photographe en titre Mme [L] [B]. Il résulte des échanges de courriels versés aux débats que la société IKKS devait donner son aval par l’intermédiaire de son directeur artistique, sélectionner les photographies et faire effectuer des retouches, de sorte qu’elle a maîtrisé le processus de création, le fait qu’il existe plusieurs photographes dans la sélection finale n’étant pas de nature à modifier ce processus.

S’agissant du shooting effectué à [Localité 7] du 4 au 6 octobre 2017, M. [G] assistait à nouveau la photographe Mme [L] [B] et aucun élément ne permet de déterminer quelles photographies ont été prises par Mme [L] [B] ou par M. [G] ; en outre l’appelant produit à l’appui de ses prétentions un seul courriel faisant état « d’une photo [Adresse 6] (cité [Localité 7]) » tout en revendiquant la titularité de douze photographies de mannequins.

S’agissant du shooting effectué à [Localité 14] du 21 au 28 novembre 2017, M. [G] assistait encore les photographes Mme [L] [B] et M. [T] [Z] et la société IKKS justifie par la production de sa pièce 6-1 avoir donné toutes les instructions tant matérielles qu’artistiques du shooting concernant notamment les lieux des prises de vues et les rendus précités.

Il résulte de ces énonciations que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a considéré que, pour l’ensemble de ces shootings, M. [G] recevait des instructions et était soumis au contrôle de la direction artistique de la société IKKS Prestations, que sa contribution procédait d’un travail collectif dont son employeur avait l’initiative et le contrôle, qu’en conséquence seule la société IKKS Prestations est titulaire des droits d’auteur et que M. [G] était irrecevable en ses demandes formées au titre des photographies prises à l’occasion des shootings précités.

Par ailleurs, s’agissant des shootings de [Localité 10] du 17 mai 2018 et de [Localité 8] des 24 et 25 mai 2018, l’appelant fait grief au tribunal d’avoir considéré qu’il ne produisait pas d’éléments de nature à établir une quelconque remise de clichés photographiques à la société IKKS Prestations. Si celui-ci justifie de l’éventualité de « l’envoyer 1 jour à [Localité 10] », d’une demande de réservation de billets de train pour [Localité 10] et de billets pour [Localité 8] aux jours des shootings, la simple production de négatifs de photographies argentiques effectivement difficilement exploitables, ne suffit pas à établir sa qualité d’auteur des photographies en cause ni même de leur remise à la société IKKS.

Le jugement qui a été déclaré M. [G] irrecevable à agir à ce titre sur le fondement des droits d’auteur sera également confirmé.

Enfin s’agissant du shooting effectué à [Localité 3] le 18 mai 2017, M. [G] produit un courriel du directeur artistique de la société IKKS du 18 mai 2017 selon lequel ‘Parallèlement à ça, [I] a photographié [Y] (mannequin [Localité 12]) aujourd’hui pour avoir une vision portée » ainsi que d’un courriel du 19 mai 2017 de la société IKKS selon lequel « [O] nous a montré les visuels de [Y] avec les lunettes Zeiss. Bravo. Peux-tu nous les transmettre ‘ Besoin pour communiqué de presse, puis réseaux sociaux. »

Pour autant les photographies concernées ne sont ni identifiées ni identifiables au vu de ces courriels. En conséquence M. [G] ne justifie pas de la titularité des droits d’auteur qu’il revendique sur cinq photographies du mannequin [Y] portant des lunettes de soleil.

En conséquence le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit que M. [G] justifiait être l’auteur des photographies revendiquées au titre du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017.

En définitive l’appelant sera déclaré irrecevable à agir sur le fondement des droits d’auteur pour l’ensemble des photographies revendiquées. L’action en contrefaçon ne donc prospérer.

Sur les autres demandes

L’issue du litige commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

M. [G] qui succombe sera en outre condamné aux dépens d’appel.

Enfin les sociétés intimées ont dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à leur charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement rendu le 17 juin 2021 par le tribunal judiciaire de [Localité 3] sauf en ce qu’il a débouté M. [G] de ses demandes formées au titre des photographies prises lors du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017.

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Déclare M. [G] irrecevable à agir sur le fondement des droits d’auteur au titre des photographies prises lors du shooting de [Localité 3] du 18 mai 2017.

Condamne M. [G] à payer à chacune des sociétés IKKS Group, IKKS Prestations, IKKS Women, IKKS Men, IKKS Junior et IKKS Retail la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [G] aux dépens d’appel.

La Greffière La Présidente

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