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14/02/2023
ARRÊT N°81
N° RG 22/01693 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OYNU
IMM – AC
Décision déférée du 14 Avril 2022 – Juge de la mise en état de TOULOUSE ( 21/03982)
Madame [R]
[M] [E]
C/
[J] [L] – [Y] épouse [Y]
[P] [B]
Confirmation
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANT
Monsieur [M] [E]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Hervé JEANJACQUES, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS
Madame [J] [L] – [Y] épouse [Y]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Christophe BORIES, avocat au barreau de TOULOUSE
Monsieur [P] [B]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Christophe BORIES, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant V.SALMERON, présidente et I. MARTIN DE LA MOUTTE, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère
F. PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,
Greffier, lors des débats : C. OULIE
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre
Exposé du litige :
Le 13 novembre 2017, Madame [J] [L] veuve [Y] (Mme [Y] ) et Monsieur [P] [B] ont conclu avec Monsieur [M] [E] et la société de droit chilien Austral natura S.A. un contrat ayant pour objet la réservation d’actions en association et participation, en vue de la création d’une structure financière devant permettre la gestion de lettres du trésor national brésilien.
Le 23 novembre 2017, Mme [Y] et M. [B] ont émis deux chèques de banque de 50.000€ chacun, au bénéfice de M.[E], qui les a encaissés. A la même date, Madame [Y], complétant un imprimé Cerfa adressé à l’administration fiscale, a déclaré avoir prêté à M.[E] la somme de 100.000 €.
La structure financière faisant l’objet du contrat n’a pas été créée et les fonds versés n’ont pas été remboursés.
Par acte d’huissier du 24 août 2021, Mme [J] [Y] et M. [P] [B] ont assigné M. [M] [E] devant le tribunal judiciaire de Toulouse aux fins d’obtenir sa condamnation à leur verser une somme de 100.000€ avec intérêts au taux légal à compter du 1 mars 2018, outre une indemnité de 30.000€ en réparation de leur préjudice de jouissance de cette somme et de leur préjudice moral.
M. [M] [E] a sollicité du juge de la mise en état qu’il se dise incompétent au profit du tribunal de commerce de Toulouse ou subsidiairement qu’il dise l’action irrecevable en ce qu’il n’a pas ‘intérêt à défendre à l’action’.
Par ordonnance du 14 avril 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Toulouse a :
– Rejeté l’exception d’incompétence soulevée par Monsieur [M] [E] au profit du Tribunal de commerce ;
– Rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [M] [E] au motif d’une irrecevabilité à défendre à l’action en son nom personnel ;
– Condamné Monsieur [M] [E] à verser une indemnité totale de 1.500,00 € à Madame [J] [Y] née [Y] et Monsieur [P] [B] au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;
– Condamné Monsieur [M] [E] aux entiers dépens de l’incident.
Par déclaration en date du 2 mai 2022, [M] [E] a relevé appel de cette ordonnance.
L’instruction de la procédure a été clôturée par ordonnance du 28 novembre 2022.
Vu les conclusions notifiées le 21 juin 2022 auxquelles il convient de se référer pour le détail de l’argumentation de [M] [E] demandant à la cour de :
-Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes ou en tout cas mal fondées ;
-Prenant droit de l’ensemble des éléments de la cause ;
– Déclarer l’appel diligenté par Monsieur [M] [E] recevable et bien fondé ;
En conséquence,
– Réformer l’ordonnance rendue par Madame le Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Toulouse en date du 14 avril 2022 en ce qu’elle a :
-Rejeté l’exception d’incompétence soulevée par M. [M] [E] au profit du tribunal de commerce ;
-Rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [M] [E] au motif d’une irrecevabilité à défendre à l’action en son nom personnel ;
– Condamné M. [M] [E] à verser une indemnité totale de 1 500€ à Mme [J] [Y] et M. [P] [B] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné M. [M] [E] aux entiers dépens de l’incident ;
– Renvoyé l’affaire à la mise en état
Et, statuant à nouveau,
A titre principal,
– Juger le Tribunal judiciaire de Toulouse incompétent en raison de la matière et désigner le Tribunal de commerce de Toulouse comme seul compétent pour connaître, en première instance, des demandes présentées par Madame [J] [Y], et Monsieur [P] [B] à l’encontre de Monsieur [M] [E] ;
A titre subsidiaire,
– Juger que Monsieur [M] [E] est dépourvu d’intérêt à se défendre sur les prétentions émises conjointement par Madame [J] [Y] et de Monsieur [P] [B] à son encontre ;
– Juger en conséquence irrecevables les prétentions de Madame [J] [Y] et de Monsieur [P] [B] à l’encontre de Monsieur [M] [E] et mettre celui- ci hors de cause, aux frais et dépens exclusifs des intimés ;
En tout état de cause,
– Condamner en outre solidairement Monsieur [P] [B] et Madame [J] [Y] à payer à Monsieur [M] [E] une indemnité de 7.200,00 € toutes taxes comprises sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner enfin solidairement Monsieur [P] [B] et Madame [J] [Y], aux entiers dépens tant de première instance que d’appel, en ce compris les frais de traduction par la société Translated, via Madame [T] [U] Expert-traductrice agréée près la Cour d’appel de Poitiers, pour les besoins de la procédure.
Vu les conclusions notifiées le 31 mai 2022 auxquelles il convient de se référer pour le détail de l’argumentation de Madame [J] [Y] et Monsieur [P] [B] demandant à la cour de confirmer l’ordonnance dont appel, de rejeter l’exception d’incompétence et de se déclarer compétent, de rejeter la demande d ‘irrecevabilité et de condamner Monsieur [E] à leur payer 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Motifs :
– Sur l’exception d’incompétence :
L’article L 721-3 du code de commerce dans sa version antérieure à l’ordonnance du 15 septembre 2021, applicable au litige eu égard à la date de l’acte introductif d’instance dispose que ‘les tribunaux de commerce connaissent
1°Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ;
2° De celles relatives aux sociétés commerciales ;
3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes’
Toutefois, les parties peuvent, au moment où elles contractent, convenir de soumettre à l’arbitrage les contestations ci-dessus énumérées.
Au soutien de sa demande tendant au constat de l’incompétence du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce, M.[E] fait valoir que M.[B] et Madame [Y] ont investi dans le cadre d’une opération commerciale si bien que la remise des fonds dont ils sollicitent le remboursement s’analyse comme un acte de commerce ou qu’en tout état de cause, par la signature de la convention d’association et de participation, les parties à l’acte ont manifesté leur intention de réaliser des actes de commerce. Il invoque en second lieu les termes d’une clause attributive de compétence.
Le premier juge a exactement rappelé que M.[B] et Madame [Y] se sont engagés envers M.[E] et la société Austral Natura SA dans le cadre d’un contrat de ‘participation et d’association’, en vue de bénéficier de ‘ la réservation d’actions en association et participation pour la mise en place d’une structure financière ayant pour objet unique la gestion de LTN’s (lettre du trésor national brésilien).’
L’article 2 de cette convention précise que ‘ Partie A (Austral Natura et M.[E]) informe et confirme à partie B(M.[B] et Madame [Y]) que le but principal de la mise en place de cette nouvelle structure étant de générer par la gestion de ces LTN’S des résultats financiers, afin de financer des projets initiés par les deux parties dans les domaines financiers, immobiliers, promotion immobilière, assurances, banque privée d’affaire et tout autre projet à venir étant susceptible d’être complémentaire au développement de leurs actions communes’.
En exécution de cette convention, M.[B] et Madame [Y] n’ont néanmoins pas pris d’autre engagement que celui ‘ d’accepter en réservation d’action future, 10 % du K actions qui sera établi lors de la mise en place de la constitution de la nouvelle structure présentée et pour un montant de 100.000 € demandé par partie A en terme d’association et de participation à l’opération précitée dans l’article 2 par Partie A’.
Il appartiendra au juge du fonds d’apprécier, malgré sa rédaction hasardeuse et sa syntaxe défaillante, le sens et la portée de cet acte. Néanmoins, statuant avec les pouvoirs du juge de la mise en état tels qu’ils sont définis à l’article 789 du code de procédure civile , la cour constate que, malgré les affirmations de M.[E], il n’y a pas lieu de déduire des termes de cet acte une quelconque intention de M.[B] et de Madame [Y] d’exercer une activité commerciale, ni de réaliser des actes de commerce et que versement de la somme de 100.000 € ne s’analyse pas non plus comme un acte de commerce.
Il est enfin inopérant pour M.[E] d’invoquer les termes de l’article 7 du contrat qui précise que toute contestation ‘ sera du ressort du tribunal compétent de Toulouse’ puisque, par cette stipulation contractuelle, les parties n’ont pas entendu accepter la compétence ratione matériae du tribunal de commerce de Toulouse mais seulement désigner la juridiction compétente ratione loci.
L’ordonnance déférée sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a rejeté l’exception d’incompétence.
– sur la fin de non recevoir tirée du défaut ‘d’intérêt à défendre’ de Monsieur [E];
Dès lors que des demandes sont formées à son encontre, [M] [E] a intérêt à défendre à l’action.
Il soutient en réalité qu’il n’a pas qualité à défendre puisqu’il est intervenu comme mandataire de la société Austral Natura et qu’ainsi, l’action aurait dû être dirigée contre cette dernière.
M.[B] et Madame [Y] estiment au contraire que les fonds ont été versés à M.[E] qui s’est personnellement engagé dans le cadre de la convention litigieuse.
Dès lors que M.[B] et Madame [Y] soutiennent que M.[E] est personnellement débiteur de la restitution du fonds, c’est en parfaite cohérence qu’ils l’ont assigné dans le cadre de la présente instance et c’est à juste titre que le premier juge a retenu que la qualité de mandataire invoquée par M.[E] s’analysait en réalité comme un moyen de défense au fond, ayant pour objet le rejet des demandes adverses, dont il appartiendra au tribunal d’apprécier la pertinence, et non comme une fin de non-recevoir justifiant, conformément aux dispositions de l’article 122 du code de procédure civile que l’action soit déclarée irrecevable sans débat au fond.
L’ordonnance déférée sera donc intégralement confirmée.
Partie perdante, M.[E] supportera les dépens et devra indemniser M.[B] et Madame [Y] des frais irrépétibles qu’ils ont été contraints d’exposer pour les besoins de leur défense en cause d’appel.
Par ces motifs :
– Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
– Condamne Monsieur [M] [E] aux dépens,
– Condamne M.[E] à payer à M.[B] et Madame [J] [L] veuve [Y] la somme de 1.500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente,
.