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15/11/2023
ARRÊT N°622/2023
N° RG 22/04162 – N° Portalis DBVI-V-B7G-PD4S
CBB/ES
Décision déférée du 22 Septembre 2022 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE ( 2022R317)
M. DE CHEFDEBIEN
S.A.S.U. APRC
C/
S.A.S. CASTEL ET FROMAGET
S.A. COMPAGNIE FRANCAISE D’ASSURANCE POUR LE COMMERCE E XTERIEUR
INFIRMATION
RENVOI DEVANT COUR D’APPEL DE LYON
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU QUINZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
S.A.S.U. APRC
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Erick BOYADJIAN, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me Guillaume BELLUC de la SELAS CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS, avocat plaidant au barreau de LYON
INTIMEES
S.A.S. CASTEL ET FROMAGET prise en la personne de son représentant légal domicilié en
cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Gregory VEIGA de la SELARL ARCANTHE, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A. COMPAGNIE FRANCAISE D’ASSURANCE POUR LE COMMERCE E XTERIEUR prise en la personne de Directeur Général
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Emmanuelle CASELLAS, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me Denis GANTELME de l’ASSOCIATION OLTRAMARE GANTELME MAHL, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BENEIX-BACHER, Présidente, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BENEIX-BACHER, président
E.VET, conseiller
P. BALISTA, conseiller
Greffier, lors des débats : I. ANGER
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par I. ANGER, greffier de chambre
FAITS
La SCI Les Noyers a confié à la Sasu APRC la construction de bâtiments industriels sur la commune de Colomiers. Le lot charpente métallique a été attribué à la Sas Castel et Fromaget pour le prix de 1 574 128,30 € TTC.
Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 8 janvier 2018.
Par courrier recommandé du 19 décembre 2018, la Sas Castel et Fromaget a adressé son décompte définitif ainsi que le solde de son marché d’un montant de 221 805,66 € TTC.
Un litige est né entre les intervenants à la construction sur le paiement du solde.
M. [L] a été désigné en qualité d’expert suivant ordonnance du juge des référés du Tribunal Judiciaire de Toulouse en date du 6 août 2020 lequel a également rejeté la demande en paiement provisionnel formé par la Sas Castel et Fromaget et parallèlement, a exigé de la Sasu APRC la fourniture d’une garantie de paiement de 159 907,61€. Le 30 septembre 2020 la Sasu APRC remettait le justificatif de cette garantie souscrite auprès de la SA Coface.
L’expert a déposé son rapport le 23 février 2022. Et la société APRC a attrait devant le tribunal de commerce de Lyon, la société Les Noyers ainsi que l’ensemble des intervenants, au titre du solde du chantier retenu pour retard par le maître d’ouvrage, à hauteur de 492 000 €.
PROCEDURE
Par acte en date du 31 mars 2022 la Sas Castel et Fromaget a assigné devant le juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse, la SAS APRC en paiement d’une provision de 159 907.61€ à valoir sur le solde de son marché, avec intérêt au taux contractuel de 18% depuis la mise en demeure du 19 décembre 2018,.
Puis par assignation du 28 juin 2022 la Sas Castel et Fromaget a assigné la SA Coface devant la même juridiction en condamnation solidaire avec la Sasu APRC.
Par ordonnance contradictoire en date du 22 septembre 2022 le juge a:
– Joint les deux instances,
– S’est déclaré compétent et a’:
– Condamné la Sasu APRC à payer à la Sas Castel et Fromaget une provision de 155 092,58 € TTC, augmentée des intérêts à compter du 31 mars 2022 au taux de 3 fois le taux légal et jusqu’à parfait paiement.
– Débouté pour le surplus de leurs demandes les parties.
– Condamné, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la Sasu APRC à verser à la Sas Castel et Fromaget la somme de 2 300 €.
– Condamné au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la Sas Castel et Fromaget à verser à la SA Compagnie francaise d’assurance pour lecommerce exterieur (COFACE) la somme de 800 €.
– Condamné la Sasu APRC aux entiers dépens de l’instance.
Suivant déclaration date du 2 décembre 2022 la Sasu APCR a relevé appel de la décision en contestant l’ensemble des chefs de la décision critiquée.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
La Sasu APCR dans ses dernières conclusions en date du 5 octobre 2023 demande à la cour de’:
– Réformer l’ordonnance du 22 septembre 2022 en ce que le juge’:
*s’est déclaré compétent,
*l’a condamnée à payer par provision la somme de 150’092,58 € TTC avec intérêt depuis le 31 mars 22 au taux de trois fois le taux légal jusqu’à parfait paiement, ainsi qu’une somme de 2300 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Et, statuant à nouveau, A titre liminaire
– Se déclarer incompétent au profit de la Cour d’appel de Lyon,
Subsidiairement et au fond,
– Rejeter les demandes de la Sas Castel et Fromaget en ce qu’elles se heurtent à des contestations sérieuses,
A titre infiniment subsidiaire,
– Juger que la provision allouée à la Sas Castel et Fromaget ne saurait excéder 129.243,82 € HT, outre intérêts au taux de trois fois le taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
En tout état de cause,
– Rejeter toutes demandes dirigées contre la société APRC,
– Condamner la Sas Castel et Fromaget ou qui mieux le devra, à payer à la société APRC la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamner la Sas Castel et Fromaget ou qui mieux le devra, aux dépens.
Elle soutient que’:
– L’expert n’a pas pris en compte certaines observations qui auraient dû le conduire à opérer des retenues plus conséquentes’; il a écarté l’application des pénalités de retard dues par les entreprises malgré les engagements contractuels’; pourtant il a estimé que la société APRC devrait être tenue, dans ses rapports avec le maître de l’ouvrage, du montant maximal des pénalités prévues par le contrat de promotion immobilière,
– Elle a saisi le juge du fond du tribunal de commerce de Lyon contre la société Les Noyers et contre tous les constructeurs,
– Dès lors le juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse n’est pas compétent non seulement parce que le juge du fond est saisi mais aussi parce qu’il faut appliquer la clause attributive de compétence’; elle est opposable dans les instances en référé provision’;
– La demande se heurte à des contestations sérieuses’:
* en vertu de l’article 488 du code de procédure civile, l’ordonnance ne peut être rapportée qu’en cas de circonstance nouvelle’; or le juge des référés avait déjà été saisi et avait déjà rejeté une précédente demande de provision suivant ordonnance du 6 août 2020 qui a acquis l’autorité de chose jugée et le rapport [L] n’est pas une circonstance nouvelle’; le compte entre les parties devra être fixé par le juge du fond saisi’;
*la créance de la Sas Castel et Fromaget doit être réduite du montant des pénalités et frais contractuels (articles 7 et 8 du marché)’; l’expert les a rejetés à défaut de justificatif probant’; or la Sas Castel et Fromaget n’a pas levé les réserves dans le délai expirant le 26 janvier 2018′; elle ne les a levées que le 11 décembre 2020 ce qui représente 1054 jours de retard soit 65 588,68€, peu important qu’il s’agisse ou non de réserves mineures’; et elle ne s’explique pas sur le retard dans la remise des DOE (dossier des ouvrages exécutés)’; dès lors, la retenue qu’elle a pratiquée sur le chantier de la Sas Castel et Fromaget était justifiée aux termes de l’article 4.2 du marché d’autant que la caution de substitution fournie par la Sas Castel et Fromaget était incomplète’;,
– Dans ces conditions le solde du marché de 1.130.058,82 € est réduit à 63.655,14 €,
– Le tribunal de Lyon a jugé le 23 février 2023 que le litige entre la Sasu APRC et le maître de l’ouvrage était indissociable de celui entre la Sasu APRC et les entrepreneurs’; ainsi la détermination des sommes restant éventuellement dues à la Sas Castel et Fromaget ne peut s’entendre que dans le cadre, plus vaste, de l’appréciation de la responsabilité de la Sasu APRC et des entreprises intervenues à la réalisation des travaux pour le compte de la société Les Noyers, ce qui fait obstacle à la condamnation d’une provision en référé,
– Subsidiairement, le taux de l’intérêt ne peut être de 18’% en application de l’article 2.2 du marché qui prévoit un taux de 3 fois le taux légal.
La société Castel et Fromaget dans ses dernières conclusions en date du 28 septembre 2023 demande à la cour de’:
– Confirmer l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a :
*rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la SAS APRC et la SA Coface,
*condamné la SAS APRC à verser à la Sas Castel et Fromaget une somme de 2.300 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
La réformant partiellement,
– Condamner solidairement ou sinon in solidum la SAS APRC et la Coface à verser à la Sas Castel et Fromaget une provision de 159.907,61 € TTC au titre de son solde de marché, avec intérêts au taux de 14,5 % l’an depuis le 19 décembre 2018 jusqu’à complet règlement,
Subsidiairement, confirmer l’ordonnance attaquée,
– Débouter la SAS APRC et la Coface et l’ensemble de leurs demandes,
En toute hypothèse,
– Condamner solidairement ou sinon in solidum la SAS APRC et la SA Coface à verser à la Sas Castel et Fromaget une somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Les condamner solidairement ou sinon in solidum aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Arcanthe en application de l’article 699 du Code de procédure civile.
Elle réplique que’:
– Les réserves ont été levées en mars 2018 et elle a dressé ses DOE complets au même moment mais la Sasu APRC refuse de régulariser un procès verbal de levée de réserves,
– Et elle a retenu des frais de caution en violation de l’article 1799-1 du code civil et par courrier du 3 septembre 2019 elle a refusé de payer le solde’; puis par courrier du 24 septembre 2019 elle lui a notifié un Décompte définitif visant la retenue de la somme de 65 588,68€ pour retard dans la levée des réserves; ce décompte a été rejeté dans le délai légal, en ce qu’elle n’est pas responsable des retards,
– Dans son rapport du 23 février 2022 M. [L] indique que les retenue sont injustifiées,
– Le tribunal de commerce de Lyon est saisi au fond depuis l’assignation de la Sasu APRC contre elle du 11 mai 2022 en paiement des sommes de 65 588,68€ au titre des pénalités contractuelles et 52 470,94€ au titre des frais contractuels du marché’; et la SA Coface est également assignée,
– La clause attributive de compétence territoriale est inopposable à la partie qui saisit le juge des référés, même pour une demande de provision’; et la juridiction toulousaine est celle de l’exécution du contrat conformément à l’article 46 du code de procédure civile,
– La demande en paiement solidaire se justifie dès lors que la caution de la SA Coface est une caution solidaire,
– La créance ne se heurte pas à des contestations sérieuses en ce que’:
*la retenue de garantie ne s’applique pas en vertu de l’article 71 de la loi de 1971 d’ordre public puisque la Sas Castel et Fromaget a fourni une caution de substitution et la Sasu APRC n’a pas fourni de consignation ni souscrit de cautionnement,
*la Sasu APRC a retenu le paiement de la somme de 159 907,61€ au titre de 3 réserves parfaitement mineures, de sorte que l’expert a conclu que des pénalités à hauteur de 65 588,68€ étaient injustifiées au regard de la disproportion entre le caractère mineur des réserves et le montant réclamé,
*d’autant que selon l’expert ces réserves ne la concernent pas ou étaient levées (n°8, 107, 116)’; et devant le juge du fond la Sasu APRC demande d’entériner les conclusions de l’expert s’agissant des déductions opérées de sorte qu’elle reconnaît donc que les réserves ne justifient plus ces retenues,
*la Sasu APRC ne s’est jamais plainte du caractère incomplet des DOE et d’ailleurs elle n’en a plus fait état devant l’expert,
*le maître de l’ouvrage ne formule aucune demande contre elle,
*le rapport d’expertise [L] constitue une circonstance nouvelle par rapport à l’ordonnance du 6 août 2020 qui a rejeté la demande provisionnelle,
*elle a déjà déduit les 4’% de frais contractuels de toutes les situations,
*la Sasu APRC a déjà appliqué des pénalités au titre de la réserve «’nettoyage des traces de colle’»alors que l’expert comme le maître de l’ouvrage y ont renoncé,
*les pénalités réclamées par le maître de l’ouvrage à hauteur de 492 000€ lui sont inopposables dès lors qu’il n’est pas justifié qu’elles lui sont imputables,
*les intérêts réclamés sont ceux de la convention,
*la Sas Castel et Fromaget n’est pas intervenue dans le cadre d’une convention de groupement d’entreprise de sorte qu’il ne peut lui être opposé l’interdépendance des relations entre d’une part, la Sasu APRC et le maître de l’ouvrage et d’autre part la convention de sous-traitance entre la Sasu APRC et elle même,
*et même si l’on déduit les pénalités de retard de 58 327,88€ sur la somme réclamée de 159 907,61€ il lui reste dû 94 318,93€ de sorte que la créance est fondée et ce d’autant que la créance d’intérêt est de 65 346,20€ du 18 décembre 2018 au 27 septembre 2023 de sorte qu’au total il lui est dû 159 655,13€,
– La réformation de l’ordonnance concerne le montant des intérêts, le taux applicable qui ne peut être que celui d’ordre public de l’article L 441-10 du code de commerce soit 14,5’% et le point de départ qui ne peut être que la date de la mise en demeure du 19 décembre 2018′;
– La réformation concerne également la SA Coface’: le Juge des référés a retenu que le cautionnement de la SA Coface ne pourrait être actionné que si la SAS APRC était défaillante dans l’exécution de son ordonnance’; or, en application des articles 1311 et 1799-1 du code civil et de l’article 1er du décret d’application n° 2014-1314 du 3 novembre 2014, la défaillance de la SAS APRC suffit à justifier l’actionnement de la caution consentie par la SA Coface à titre de garantie de paiement’; la Sas Castel et Fromaget justifie d’une créance certaine non sérieusement contestable, liquide et exigible, de l’impayé malgré mise en demeure, la SA Coface est engagée solidairement auprès de la Sasu APRC et elle a été assignée en intervention forcée dans une instance déjà en cours devant le juge des référés suivant acte du 28 juin 2022.
La SA Coface dans ses dernières conclusions en date du 3 octobre 2023 demande à la cour de’:
– Constater que la demande de la société Castel et Fromaget se heurte à une contestation sérieuse en ce qu’elle a été formée devant la juridiction des référés du Tribunal de commerce de Toulouse alors que le Tribunal de commerce de Lyon est saisi au fond de la même demande et en ce que la créance revendiquée à l’encontre de la société APRC, contestée par cette dernière, n’est ni certaine, ni liquide, ni exigible et que la défaillance de la société APRC n’est pas plus établie,
– Confirmer purement et simplement l’ordonnance entreprise qui a rejeté la demande de la société Castel et Fromaget dirigée contre la Coface,
A titre subsidiaire
– Constater que Coface n’a jamais été mise en demeure de payer avant l’introduction de la présente instance et que sa garantie exclut le paiement des pénalités ;
en conséquence
– Rejeter les demandes de la société Castel et Fromaget, à son encontre, fondées sur l’article L441-10 du code de commerce.
A titre infiniment subsidiaire,
– Condamner la société APRC à garantir et relever indemne Coface de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre au profit de la société Castel et Fromaget,
– Condamner la société Castel et Fromaget et/ou la société APRC à payer à Coface une somme de 4000 € au titre de frais de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.
Elle s’en remet sur l’exception d’incompétence soulevée.
Quant à la créance demandée elle soutient qu’elle se heurte à des contestations sérieuses en ce que’:
– Le juge du fond est saisi et qu’elle a été attraite en la cause le 28 juin 2022 le même jour qu’elle a été attraite devant le juge des référés de Toulouse. Or les 2 demandes sont strictement identiques si ce n’est qu’il est demandé une provision devant le juge des référés. Dans ces conditions la demande doit être présentée devant le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon,
– La demande de provision ne répond pas aux exigences de l’article 2 de la convention de caution’ soit l’existence d’une créance certaine et exigible et la défaillance du promoteur’;
*or dès lors que devant le juge du fond la Sasu APRC lui oppose une créance de pénalités et frais contractuels (65 588,68€ et 52 470,94€) et qu’elle est en droit d’opposer la créance réclamée par le maître de l’ouvrage de 492 000€, la créance de la Sas Castel et Fromaget sera compensée’; donc cette créance est incertaine’; elle ne sera certaine que lorsqu’elle sera définitivement tranchée par le juge du fond’;
*d’autant qu’il n’est pas produit les arrêtés de compte et qu’elle ne garantit pas les paiements de pénalités ou indemnités pouvant être dues à l’entrepreneur’; sachant que les intérêts sont des pénalités aux termes de l’article L 441-10 du code de commerce’; et les intérêts ne sauraient courir contre elle à compter de la mise en demeure du 19 décembre 2018 qui ne lui était pas destinée’;
*et tant que la Sasu APRC n’est pas condamnée elle n’est pas défaillante.
L’ordonnance de clôture a été reportée au 6 octobre 2023.
MOTIVATION
Sur la compétence territoriale
L’article 42 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur.
L’article 48 du même code prévoit que toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.
Le marché du 14 février 2017 conclu entre la société APRC et la Sas Castel et Fromaget toutes deux commerçantes, prévoit en son article 15 une clause attributive de compétence spécifiée en termes clairs et apparents: « Les litiges relatifs à l’interprétation ou à l’exécution du contrat seront de la compétence du Tribunal de Commerce du ressort du siège social D’APRC. »
Le juge des référés compétent est celui de la juridiction territorialement compétente au fond.
La Sas Castel et Fromaget soutient qu’en jurisprudence, la clause attributive de compétence territoriale est inopposable à la partie qui saisit le juge des référés, même pour une demande de provision’; et la juridiction toulousaine est compétente puisque c’est celle de l’exécution du contrat conformément à l’article 46 du code de procédure civile.
Or, s’il est admis que la clause attributive de compétence territoriale peut ne pas s’appliquer en matière de référé c’est exclusivement dans le cadre d’une demande de mesures d’instruction in futurum. Dans ce cas, en effet, le juge territorialement compétent pour statuer peut être le juge du tribunal dans le ressort duquel les mesures d’instruction in futurum sollicitées doivent, même partiellement, être exécutées, sans qu’une clause attributive de compétence territoriale puisse être opposée à la partie requérante. L’objectif d’efficacité dans la recherche de la preuve de faits dont dépend la solution du litige conduisent à une telle solution.
Ainsi, s’agissant du référé in futurum des articles 145 ou 873 alinea 1 du code de procédure civile, la clause attributive de compétence territoriale est inopposable à la partie qui saisit le juge des référés.
Mais, en matière de référé provision de l’article 873 al2 du code de commerce, une telle solution n’est pas acquise. Les objectifs ne sont pas identiques puisqu’il s’agit de statuer sur une demande en paiement qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse. Juger l’inopposabilité de la clause attributive de compétence, librement adoptée par les parties, devant le juge des référés quel que soit le fondement adopté, aurait pour effet de vider considérablement d’effet la dite clause sans justification légitime. D’autant qu’en l’espèce, le juge du fond saisi le 11 mai 2022, postérieurement à la saisine du juge des référés de Toulouse le 31 mars 2022, est le tribunal de commerce de Lyon.
Et si le juge des référés statuant sur la demande d’expertise a retenu sa compétence dans son ordonnance du 6 août 2020, cette décision ne peut profiter à l’action en référé provision poursuivie ensuite, au résultat du rapport d’expertise.
Dans ces conditions, il sera fait droit à l’exception de compétence soutenue par la Sasu APRC.
L’article 90 du code de procédure civile dispose que, lorsque le juge s’est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en premier ressort, et que la cour infirme du chef de la compétence, elle renvoie l’affaire devant la cour qui est juridiction d’appel relativement à la juridiction qui eût été compétente en première instance. Dans ces conditions il convient de renvoyer l’affaire devant la cour d’appel de Lyon juridiction d’appel du juge des référés du tribunal de commerce de Lyon dans le ressort duquel la Sasu APRCest domicilée.
PAR CES MOTIFS
La cour
– Infirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse en date du 22 septembre 2022.
Statuant à nouveau
– Dit que le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon est compétent
– Renvoie la cause et les parties devant de la cour d’appel de Lyon.
– Vu l’article 700 du code de procédure civile, déboute les parties de leur demande.
– Condamne la Sas Castel et Fromaget aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
I.ANGER C. BENEIX-BACHER