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Numérisation : 7 septembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01179

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Numérisation : 7 septembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01179

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 SEPTEMBRE 2023

N° RG 21/01179 –

N° Portalis DBV3-V-B7F-UOOQ

AFFAIRE :

Société HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D’ASSURANCES

C/

[C] [K]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Mars 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : 18/02193

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA

Me Richard DAUDANNE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, devant initialement être rendu le 06 juillet 2023 et prorogé au 07 septembre 2023, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

Société HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D’ASSURANCES

N° SIRET : 775 753 072

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représentants : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 et Me Guillaume BORDIER de la SELARL CAPSTAN LMS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020

APPELANTE

****************

Madame [C] [K]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Richard DAUDANNE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 23

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 mai 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Domitille GOSSELIN,

Vu le jugement rendu le 16 mars 2021 par le conseil de prud’hommes de Nanterre,

Vu la déclaration d’appel de la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances du 19 avril 2021,

Vu les conclusions de la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances du 30 mars 2023,

Vu les conclusions de Mme [C] [K] du 8 septembre 2021,

Vu l’ordonnance de clôture du 19 avril 2023.

EXPOSE DU LITIGE

La société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances, société de droit suisse, dont le siège social est [Adresse 2] à [Localité 5] en Suisse, est spécialisée dans le secteur de l’assurance.

Le groupe Helvetia en France est composé de deux entités, la société Helvetia assurances SA et la succursale française de la société de droit suisse Helvetia Compagnie Suisse d’assurances, ainsi qu’une dizaine de sites en France appelés délégations régionales.

La convention collective nationale applicable est celle des sociétés d’assurances du 27 mai 1992.

Mme [C] [K], née le 3 mars 1963, a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée, par la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances, du et à effet au 17 septembre 2003, en qualité d’analyste programmeur catégorie cadre, classe 5.

Mme [K] occupait en dernier lieu les mêmes fonctions en catégorie 6.

En 2017, les instances représentatives du personnel (comité d’entreprise et CHSCT) ont été informées et consultées sur un projet de réorganisation de la société et sur le projet de licenciement collectif pour motif économique et du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) en résultant.

La procédure d’information-consultation du comité d’entreprise a été mise en oeuvre et sept réunions ont eu lieu entre le 30 mars 2017 et le 9 juin 2017. La procédure d’information-consultation du CHSCT a été engagée au cours de la même période.

Des négociations ont été menées en parallèle avec les organisations syndicales sur le PSE et un accord majoritaire a été conclu sur le contenu et les modalités de mise en ‘uvre des éventuels licenciements économiques consécutifs au projet de réorganisation. Il a été validé par la Direccte le 26 juin 2017.

Le plan de réorganisation prévoyait notamment le regroupement au sein du site principal [Localité 9] de certaines fonctions support (Informatique, MOE [maîtrise d’oeuvre informatique], Marketing/Communication et Finances), jusqu’alors réparties entre les sites de [Localité 8] et [Localité 9].

Par courrier remis en main propre le 4 juillet 2017, Mme [K] s’est vu proposer une modification de son contrat, consistant en un déplacement de son lieu de travail du site de [Localité 8] à celui [Localité 9]. La salariée a refusé cette mobilité par courrier daté du 1er août 2017.

Par lettre en date du 1er septembre 2017, la société Helvetia compagnie suisse d’assurances a notifié à Mme [K] son licenciement pour motif économique dans les termes suivants :

‘Comme vous le savez, la société Helvetia France a initié un projet de réorganisation, impliquant notamment le regroupement de certaines fonctions Support sur le site [Localité 9].

En ce qui concerne les motifs de cette mesure, il s’agit de ceux qui ont été présentés aux représentants du personnel et qui sont rappelés ci-après :

Le groupe Helvetia a généré une croissance de 3,1% en 2016. Toutefois, cette croissance globale ne doit pas cacher une forte disparité entre la croissance enregistrée sur le marché Suisse et la baisse de son chiffre d’affaires dans les autres pays Européens, où le chiffre d’affaires a régressé de 1,2% en 2016. Cette évolution négative s’explique par la nécessité d’assainir les portefeuilles de contrats en cours (résiliation des contrats déficitaires).

Les marchés spécialisés au sein duquel Helvetia assurances intervient sont également concernés par cette disparité d’évolution, avec :

– une très forte croissance de l’activité de Réassurance Active (+40% en 2016 par rapport à 2015)

– une stagnation du volume d’activité hors réassurance en France,

– une contraction de l’activité Marchés Spécialisés en France (-1% en 2016 par rapport à 2015).

Le résultat opérationnel de l’activité Marchés Spécialisés s’inscrit en baisse de 17,4% (35,9 millions de Francs Suisses en 2016 contre 43,4 millions de Francs Suisses en 2015), cette diminution étant essentiellement due à de mauvais résultats techniques en France.

Le Groupe Helvetia et Helvetia France doivent prendre les mesures nécessaires pour sauvegarder leur compétitivité : en effet, dans ce marché de l’assurance mature, les acteurs sont confrontés à la concurrence de plus en plus importante de nouveaux entrants et au défi de la digitalisation de leurs activités, qui constituent des bouleversements majeurs et nécessitent d’adapter leurs modèles de fonctionnement.

Historiquement, la société Helvetia assurances est bien positionnée dans le secteur de l’assurance Maritime et Transports. Toutefois, ce marché est de plus en plus difficile :

– La conjoncture économique conduit à une stagnation du marché, en raison de l’absence de croissance du chiffre d’affaires des transporteurs, clients finaux des assureurs et courtiers.

– De nombreuses compagnies d’assurance sont déjà présentes sur ce marché : AXA, MMA, Allianz, Generali, et de nombreuses compagnies anglo-saxonnes (AIG, XL, RSA, Amlin, Catlin, ACE devenu Chubb…).

– Le marché est aujourd’hui en situation de surcapacité en raison de l’arrivée constante de nouveaux entrants sur le marché. Au cours des 5 dernières années, on peut citer : Tokyo Marine, Swis Ré, Sompo Japon (en 2015) et ERGO (Munich Ré en 2016).

– De plus, la tendance actuelle est de proposer aux clients grands comptes des contrats globaux couvrant plusieurs pays et plusieurs types d’assurances plutôt que de négocier des contrats d’assurance propres aux risques Maritime ou Transport.

– Le choix de l’assureur par le client est de plus en plus basé sur une logique de coût réduit plutôt que sur la fidélité résultant d’un partenariat établi ou de relations personnelles. On observe donc une volatilité accrue des clients.

Dans ce contexte de plus en plus concurrentiel, Helvetia Assurances doit donc s’imposer comme un acteur de terrain, proche de ses clients, courtiers et entreprises de transports.

En outre, face à la dégradation de ses ratios au regard des dispositions réglementaires, Helvetia France a été contrainte de mettre en place une politique de dénonciation de certains contrats particulièrement déficitaires pour tenter de retrouver une activité profitable, ce qui a entrainé une augmentation du poids des charges fixes et une baisse du résultat d’exploitation.

Dans ce contexte, Helvetia France doit impérativement retrouver une activité profitable par la mise en ‘uvre de la stratégie suivante :

– Augmentation de son chiffre d’affaires en allant à la conquête de nouveaux clients, tout en restant vigilant sur la rentabilité des nouveaux contrats conclus (diversification et maitrise des coûts).

– Adaptation de sa stratégie commerciale en se rapprochant des clients pour correspondre aux attentes du marché.

L’objectif est de répondre aux enjeux auxquels le Groupe Helvetia et la société Helvetia assurances font face par la mise en ‘uvre de ces axes stratégiques. Pour ce faire, Helvetia assurances a décidé de mettre en ‘uvre certaines réorganisations internes en 2017.

L’une de ces réorganisations consiste à regrouper les salariés de certaines fonctions support (Informatique, MOE, Marketing/Communication et Finances), actuellement répartis entre [Localité 8] et [Localité 9], au sein du site [Localité 9], dans le but de faciliter et rationaliser le fonctionnement de ces services, tout en réduisant les coûts liés à l’éclatement géographique actuel.

Dans ce cadre, nous vous avons informée par courrier remis en main propre en date du 4 juillet 2017 de votre mobilité géographique vers le site [Localité 9]. Vous disposiez d’un délai de réflexion d’un mois. Par courrier recommandé en date du 2 août 2017, vous avez expressément refusé cette mobilité géographique.

Conformément aux dispositions légales et aux dispositions de l’accord collectif majoritaire du 9 juin 2017, nous avons recherché l’ensemble des postes de reclassement disponibles au sein du groupe en France. Nous vous avons transmis des propositions de reclassement par courrier remis en main propre en date du 16 août 2017. Vous disposiez d’un délai de réflexion de 15 jours à compter de la remise de ce courrier pour nous faire part de votre décision.

Vous avez refusé les propositions de reclassement en France que nous vous avions proposées.

Concernant les possibilités de reclassement au sein du groupe Helvetia en dehors du territoire national, nous vous avons également informée le 16 août 2017 de la faculté de demander à recevoir des propositions en ce sens si vous étiez intéressée. Vous avez refusé de recevoir les offres de postes de reclassement à l’étranger.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous sommes donc au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique.

Conformément aux dispositions des articles L. 1233-71 et suivants du code du travail, nous vous proposons le bénéfice d’un congé de reclassement dans les conditions précisées dans le document qui vous est joint au présent courrier. Nous vous rappelons que vous disposez d’un délai de 6 jours à compter de la première présentation de cette lettre à votre domicile pour nous faire part de votre acceptation du congé de reclassement. L’absence de réponse de votre part au terme de ce délai sera assimilée à un refus de bénéficier du congé de reclassement.

En cas d’adhésion au congé de reclassement, ce congé débutera à l’expiration du délai de réflexion de 8 jours et inclura votre préavis de licenciement d’une durée de 3 mois.

Si vous décidez de ne pas adhérer au congé de reclassement, votre préavis sera d’une durée de 3 mois et débutera à la date de première présentation de cette lettre à votre domicile. [‘]’

Mme [K] a accepté le bénéfice du congé de reclassement.

Par requête reçue le 22 août 2018, Mme [C] [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de voir dire et juger sans cause réelle et sérieuse son licenciement et de voir condamner la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances au versement de diverses sommes indemnitaires et/ou salariales.

La société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances avait, quant à elle, sollicité sa condamnation à lui verser une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 16 mars 2021, la section encadrement du conseil de prud’hommes de Nanterre a :
– dit que le licenciement de Mme [K] par la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances est sans cause réelle et sérieuse,

– condamné la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances à verser à Mme [K] la somme de 60 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– rejeté la demande d’exécution provisoire sur la créance indemnitaire,

– débouté Mme [K] de ses autres demandes,

– condamné la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances à verser à Mme [K] la somme de 1 200 euros sur le fondement de 1’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances aux dépens.

Par déclaration du 19 avril 2021, la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions en date du 30 mars 2023, la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances demande à la cour de :

A titre principal

– constater le caractère justifié du motif économique de licenciement de Mme [K],

– constater le respect de l’obligation de reclassement,

– constater l’absence de discrimination salariale et d’inégalité de traitement subi par Mme [K],

En conséquence,

– infirmer le jugement du 16 mars 2021 du conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a :

‘ – dit que le licenciement de Mme [K] par la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances est sans cause réelle et sérieuse

– condamné la société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances à verser à Mme [K] la somme de 60 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

– condamné la société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances à verser à Mme [K] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– débouté la société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– condamné la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances aux dépens.’

– confirmer le jugement du 16 mars 2021 du conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a débouté Mme [K] de ses demandes de rappel de salaire sur le fondement de la discrimination et de l’égalité salariale, de congés payés y afférents et de dommages-intérêts pour discrimination,

Par conséquent,

– débouter Mme [K] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– condamner Mme [K] à verser à la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, incluant les frais d’exécution de l’arrêt à venir.

A titre subsidiaire

Si par extraordinaire, la cour confirmait partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre du 16 mars 2021 en ce qu’il a considéré le licenciement pour motif économique de Mme [K] sans cause réelle et sérieuse :

– infirmer le jugement du 16 mars 2021 du conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a accordé à Mme [K] une somme de 60 000 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– rapporter le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 28 407,66 euros,

– débouter Mme [K] du surplus de ses demandes, fins et prétentions.

Aux termes de ses conclusions en date du 8 septembre 2021, Mme [C] [K] demande à la cour de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé le licenciement de Mme [K] dépourvu de toute cause réelle et sérieuse et lui a octroyé un article 700 du code de procédure civile à hauteur de 1 200 euros,

– modifier le quantum en condamnant la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances à verser à Mme [K] la somme de 112 023,12 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L. 1235-3 du code du travail,

– infirmer pour le surplus et condamner la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances à verser à Mme [K] les sommes suivantes :

– 43 184,91 euros à titre de rappel de salaire sur le fondement de la discrimination et de l’égalité salariale,

– 4 318,49 euros de congés payés afférents,

– 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination,

– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– ordonner la capitalisation des intérêts (article 1343-2 du code civil),

avec intérêt au taux légal à compter de la convocation du défendeur (article 1231-6 du code civil),

– ordonner la remise à Mme [K] de bulletins de paie, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle emploi conformes à l’arrêt à intervenir,

– condamner la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances aux entiers dépens de l’instance.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l’audience et rappelées ci-dessus.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 19 avril 2023

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- sur le motif économique du licenciement

Le licenciement pour motif économique de Mme [K] a été prononcé le 1er septembre 2017, postérieurement à la réforme résultant de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable aux licenciements prononcés à compter du 1er décembre 2016 mais antérieurement à celle des ordonnances n°2017-1387 du 22 septembre 2017 et n°2017-1718 du 20 décembre 2017 applicables aux procédures de licenciement engagées à compter du 24 septembre 2017, ayant modifié la disposition relative à la définition du motif économique.

En l’espèce, selon la lettre de licenciement, la rupture du contrat de travail de Mme [K] pour motif économique est intervenue suite au refus de la salariée d’une mobilité sur le site [Localité 9] dans le cadre de la mise en oeuvre de réorganisations internes telles que le regroupement des salariés de certaines fonctions support – dont le service informatique auquel appartenait Mme [K] – répartis entre [Localité 8] et [Localité 9] au sein du site [Localité 9] pour rationaliser le fonctionnement de ces services, ces mesures de réorganisations internes étant nécessaires pour sauvegarder la compétitivité du groupe Helvetia et de Helvetia France dans le secteur des marchés spécialisés en France, marché mature confronté à la concurrence de plus en plus importante de nouveaux entrants et au défi de la digitalisation de leurs activités.

Le licenciement d’un salarié résultant de son refus d’une modification d’un élément essentiel de son contrat de travail peut constituer un motif économique lorsque la modification est consécutive à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.

En effet, l’article L. 1233-3 du code du travail dans sa version applicable au présent litige dispose que ‘constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4° A la cessation d’activité de l’entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise […]’

La charge de la preuve pèse sur l’employeur, à qui il appartient de démontrer la réalité des difficultés économiques ou du risque pesant sur la compétitivité et la nécessité de procéder à une réorganisation de l’entreprise au moment où il licencie.

Antérieurement aux réformes rappelées ci-dessus, la chambre sociale de la Cour de cassation avait déjà consacré la réorganisation comme motif autonome de licenciement quelle qu’en soit la cause (difficultés économiques/mutations technologiques/nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise), considérant notamment que la réorganisation, si elle n’est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise ou du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient.

La seule sauvegarde de la compétitivité peut ainsi légitimer une réorganisation et constituer un motif économique autonome.

Lorsque l’entreprise appartient à un groupe, doit être identifié, pour la détermination du périmètre d’appréciation de la cause justificative du licenciement économique intervenu avant les ordonnances précitées de 2017, le périmètre du groupe, puis, dans ce périmètre, les entreprises qui relèvent du même secteur d’activité que l’entreprise à l’initiative du projet de licenciement.

Ainsi, s’agissant du périmètre du groupe, la chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que ‘la cause économique d’un licenciement s’apprécie au niveau de l’entreprise ou, si celle-ci fait partie d’un groupe, au niveau du secteur d’activité du groupe dans lequel elle intervient. Le périmètre du groupe à prendre en considération à cet effet est l’ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l’influence d’une entreprise dominante dans les conditions définies à l’article L.2331-1 du code du travail, sans qu’il y ait lieu de réduire le groupe aux entreprises situées sur le territoire national’ (Soc. 16 novembre 2016 Bull. V n°216, 217, 218).

L’article L. 2331-1 du code du travail relatif au comité de groupe, vise pour déterminer un ensemble économique, des entreprises contrôlées et des entreprises sous influence dominante.

S’agissant du secteur d’activité, dès lors que l’existence d’un groupe est avérée, il convient de vérifier l’existence de la cause économique invoquée au niveau du secteur d’activité de ce groupe dans lequel intervient l’employeur et de déterminer la consistance de ce secteur d’activité puis de vérifier que le motif économique dont fait état l’entreprise est établi à ce niveau. Le contrôle se limite cependant à vérifier que les appréciations de fait suffisent à justifier la décision.

Il appartient à l’employeur de justifier de la consistance de ce groupe et de celle du secteur d’activité concerné.

Ainsi, pour l’appréciation du bien fondé du motif économique du licenciement tiré d’une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, il convient de vérifier l’existence d’une menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise ou du secteur d’activité du groupe dont elle relève, ainsi que la nécessité de prendre des mesures d’anticipation afin de préserver l’emploi.

-sur le cadre d’appréciation de la réorganisation de l’entreprise

L’appelante soutient, s’agissant du périmètre du groupe, qu’il convient de prendre en compte les résultats consolidés des deux entités du groupe Helvetia présentes en France évoluant dans le même secteur d’activité des marchés spécialisés, et plus particulièrement des assurances maritime et transport.

L’employeur de Mme [K] est la société de droit suisse Helvetia compagnie suisse d’assurances représentée en France par sa succursale située [Localité 9] (pièce n°1 appelante).

Selon les écritures et les pièces de l’appelante, le groupe Helvetia en France est composé de la succursale française située [Localité 9] et de délégations régionales d’une part et de la société Helvetia assurances SA d’autre part, laquelle a délégué en 2013 à la succursale l’ensemble des activités de distribution de gestion des portefeuilles et d’assistance, les salariés de Helvetia SA ayant été transférés au sein de la succursale (pièces n°54 et 55).

Compte tenu de la date du licenciement antérieure aux ordonnances n°2017-1387 du 22 septembre 2017 et n°2017-1718 du 20 décembre 2017 applicables aux procédures de licenciement engagées après le 23 septembre 2017, le motif économique s’apprécie au niveau du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient sans être limité aux entreprises établies sur le territoire national.

En l’espèce, les comptes des deux entités Helvetia en France sont consolidés sur le plan financier au niveau du groupe Helvetia en Suisse et non en France, les rapports des commissaires aux comptes de Helvetia SA et de la succursale de la société de droit suisse Helvetia compagnie suisse d’assurances ainsi que les rapports annuels du groupe Helvetia établissent l’existence d’un ensemble économique dont fait partie l’employeur et la dépendance des entités Helvetia en France avec le groupe en Suisse, de sorte que la situation de l’entreprise en France doit s’analyser au regard de celle du groupe, comme l’indiquait d’ailleurs l’expert [N] mandaté par le comité d’entreprise lors de la réunion extraordinaire du 22 mai 2017 de ce comité de l’unité économique et sociale de Helvetia (pièce n°17 intimée).

S’agissant du secteur d’activité, l’appelante fait valoir que le groupe Helvetia est actif dans les domaines de l’assurance ‘vie’ (retraite, santé, prévoyance) et ‘non vie’ (habitation, incendie, accident et responsabilité) et dans les domaines des risques spéciaux et de la réassurance avec un secteur d’activité distinct appelé ‘marchés spécialisés’ comprenant notamment l’assurance maritime et transport, l’assurance d’art et d’ingénierie. Le groupe est ainsi organisé en trois secteurs d’activité (activités commerciales sur le marché suisse, marchés nationaux Allemagne, Autriche, Espagne et Italie et marchés spécialisés). L’appelante affirme qu’en France, Helvetia exerce la quasi-totalité de son activité dans le domaine des risques spéciaux et plus particulièrement dans le secteur des assurances maritime et transport.

L’extrait du rapport annuel 2016 du groupe Helvetia – et non du groupe Helvetia France – démontre que le secteur ‘marchés spécialisés’ est présent en Suisse, en France et au Liechtenstein ainsi qu’en Turquie, à Miami pour l’Amérique latine, à Singapour et en Malaisie (pièce n°31).

Les autres pièces produites par l’appelante, notamment les rapports du commissaire aux comptes pour Helvetia assurances SA et pour Helvetia compagnie suisse d’assurances succursale française permettent d’établir effectivement que Helvetia groupe France exerce principalement son activité dans le secteur des marchés spécialisés sans qu’il soit démontré qu’il s’agit uniquement du secteur des assurances maritime et transport, puisqu’existent également le secteur de la réassurance ainsi que l’activité DAV (dommages aux véhicules) (pièces n° 35 à 40).

– sur la menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise

L’appelante, pour justifier de cette menace dans ce secteur des branches spécialisées, fait état de l’existence d’une dégradation de l’environnement économique du groupe (marché mature, bouleversements par la digitalisation), d’une baisse des résultats du groupe sur ce secteur d’activité, des défis spécifiques sur le marché français en raison de l’intensification de la concurrence dans le secteur de l’assurance maritime et transport, d’une situation économique fragilisée avec une baisse du chiffre d’affaires (volume de primes) du groupe Helvetia en France de 9% entre 2014 et 2017 et un résultat en baisse de près de 60% pour la même période.

L’intimée fait valoir au contraire que, s’agissant de la baisse du chiffre d’affaires de la filiale France en 2016 par rapport à 2015, elle est la conséquence technique des choix de gestion notamment une politique active de résiliation des contrats déficitaires et ne traduit pas une menace extérieure sur sa compétitivité ; que l’existence d’une cause économique s’apprécie à la date du licenciement alors que la lettre de licenciement ne fait état que des résultats de l’année 2016 sans tenir compte des résultats du premier semestre 2017 en hausse ; que la saturation du marché de l’assurance spécialisée alléguée ne caractérise pas en soi une menace sur la compétitivité ; que s’agissant de l’entrée de nouveaux concurrents et la transformation de l’activité par sa digitalisation, la prise en compte de ces bouleversements a déjà été réalisée en amont par l’externalisation et est sans lien avec la localisation géographique des salariés du service informatique.

S’agissant de la baisse du chiffre d’affaires et des résultats de la filiale France, l’appelante se fonde sur les résultats 2016 par rapport à ceux de 2015 alors que le licenciement de Mme [K] est intervenu en septembre 2017, de sorte qu’il convient de tenir compte également des résultats les plus proches de la date de la rupture.

En l’espèce, comme rappelé ci-dessus, le motif économique doit être apprécié principalement sur le secteur des risques spéciaux comme le revendique d’ailleurs l’employeur (p. 20 de ses écritures).

Le bilan de l’année 2016 du groupe Helvetia du 23 mars 2017, indique notamment ‘toutes les divisions et unités ont atteint des résultats positifs financièrement et techniquement’ avec pour les ‘speciality markets’ [marchés spécialisés] une baisse de 17,4% entre 2015 et 2016 (résultats opérationnels en millions de Francs suisses), mais pour les deux mêmes années (primes en millions de francs suisses), une hausse de 14,2% (Francs suisses) et 13,3% (devise locale) pour ce secteur, le bilan 2016 indiquant en entête ‘hausse de 2,6% du chiffre d’affaires grâce à une forte croissance en ‘Vie’ ainsi que Speciality markets’ (pièce n°28 appelante).

Ce même document à la rubrique ‘Mu FR-Business et profitabilité par LoB [Line of Business] (comptes locaux)’ dont on peut déduire qu’il s’applique à la France (FR) et aux secteurs concernés (Corps : armateur, fluvial, pêche, plaisance, portuaire ; cargo ; transporteurs ; DAV [dommages aux véhicules]) fait état d’un ‘retour d’une profitabilité sur nos marchés historiques Corps avec un fort redressement Plaisance notamment’, le ‘maintien d’une rentabilité élevée en Cargo’, une ‘stabilisation des résultats en T/L dans un contexte concurrentiel tendu’, un ‘marché DAV (en pleine refonte SI) mais de retour vers son optimum technique’.

Ce bilan 2016 mentionne également à la rubrique ‘MU FR- P&L [Profit & Loss] IFRS [International Financial Reporting Standards]’, les IFRS étant le référentiel comptable applicable aux sociétés cotées sur un marché européen, un ratio combiné S/P [sinistre/prime] de 98,70% en 2016 au lieu de 95,10%, mais avec les commentaires suivants :

– ‘premiers effets de notre stratégie : tassement du CA mais conservation des marges’, ‘maintien d’un S/P largement inférieur à la concurrence’, ‘maîtrise des coûts internes (FG) et externes (réassurances)’ […]

– le développement de ‘nouveaux business’ (Fine art et Engineering)

– la confiance des clients.

L’appréciation des données devant se faire à l’échelle du groupe et du secteur d’activité, il n’est pas pertinent de prendre en compte uniquement Helvetia assurances SA ou Helvetia compagnie suisse d’assurances (succursale). Au surplus, les comptes de ces sociétés en France sont établis selon les normes comptables françaises, alors que ceux du groupe Helvetia sont établis selon les IFRS.

L’extrait du rapport annuel 2016 (pièce n°31 appelante) mentionne un ‘combined ratio’ [ratio combiné : rapport de la somme des frais de gestion et du coût du sinistre sur le total des primes encaissées] pour les ‘speciality markets’ de 64,2 % de ‘net claims ratio 2016″ [ratio réclamations nettes] et 32,7 % de ‘net cost ratio 2016″ [ratio coût net] soit un total de 96,9 % et un pourcentage légèrement inférieur en 2015 pour un total de 95,9%, le commentaire étant ‘l’augmentation du ratio combiné en France provient d’un ratio de sinistres plus élevé en raison d’un résultat de liquidation plus important l’année précédente . Le ratio des coûts en France s’est amélioré en glissement annuel pour atteindre 29,2% (exercice 2015 : 31,1 %).’

Pour retrouver les chiffres visés par la pièce n°28 correspondant au bilan 2016, il est nécessaire de se reporter non pas à la ligne ‘speciality markets’ mais à la ligne FR, laquelle à défaut de toute autre explication correspond à l’activité France, ce que confirme le commentaire ci-dessus où effectivement pour 2016 le ‘net claims ratio” est de 69,5% et le ‘net cost ratio’ de 29,2 % soit au total 98,7% au lieu de respectivement un net claims ration de 64 % (le net cost ratio n’étant pas indiqué dans le tableau) et un total de 95,5% pour 2015.

Ce rapport annuel indique notamment que le volume de primes généré dans le secteur marchés spécialisés est passé de 675,4 millions de francs suisses pour l’exercice 2015 à 771,1 millions de francs suisses en 2016 ce qui représente 13,3% en devise locale et correspond aux chiffres du bilan 2016 rappelés ci-dessus. Il est également mentionné ‘qu’en France Helvetia a enregistré des volumes en baisse par rapport à l’année précédente en termes corrigés des effets de change’ et que’ le bénéfice sous-jacent s’est élevé à 35,9 millions de francs suisses contre 43,4 millions de francs suisses pour l’exercice 2015″, cette ‘diminution étant principalement due à la baisse du résultat technique en France’.

Or, il résulte de la lettre de licenciement comme de l’ensemble des pièces produites par les parties (proposition de modification du contrat de travail, accord collectif sur le PSE, procès-verbaux du comité d’entreprise), qu’en 2016, la société a mis en place ‘une politique de dénonciation de certains contrats particulièrement déficitaires pour tenter de retrouver une activité profitable ce qui a entraîné une augmentation du poids des charges fixes et une baisse du résultat d’exploitation.’

Selon la pièce n°14 (intimée), le directeur de la filiale France explique ces mesures relatives à ces comptes déficitaires, indiquant notamment qu’elles ‘touchent 20 comptes pour une prime brute agrégée d’environ € 8 000 000 et € 8 700 000 de sinistre dont un peu plus de € 2 000 000 ont été résiliés au 01/07/2016 pour € 2 700 000 de sinistres’. […] ‘750 comptes plus modestes génèrent de manière récurrente des résultats insuffisants […] nous avons estimé qu’entre les hausses de primes et les pertes d’affaires nous perdrons environ € 400 000 de prime brute et que nous économiserons € 1 500 000 de sinistres’.

Cette politique de dénonciation des contrats déficitaires a eu des conséquences sur les résultats de l’entreprise comme le relèvent le bilan et le rapport annuel 2016, la baisse étant cependant passagère et maîtrisée, en outre bénéfique pour l’avenir comme l’indique le directeur d’Helvetia France.

Il s’agit de la conséquence technique des choix de gestion opérés par l’entreprise.

En outre, le licenciement étant intervenu en septembre 2017, la situation doit être examinée au plus près de cette date.

Or, déjà le document ‘stratégie Helvetia 20.20″ de mars 2017 émanant du groupe indique à la rubrique ‘specialty markets : stratégie de niche’, pour la France, le développement de nouveaux produits de niche et de groupes de produits avec l’objectif fixé par le groupe Helvetia de ‘consolidation de la forte position du marché’ (pièce n°11 intimée).

L’appelant ne produit pas un rapport annuel 2017 pouvant être comparé à l’extrait du rapport annuel 2016, mais seulement un extrait (4 pages sur une centaine) intitulé ‘Financial report 2017″ (pièce n°32 appelant).

Il y est notamment indiqué qu’au cours de l’exercice 2017, le secteur des marchés spécialisés a généré des primes pour un montant de 899,8 millions de francs suisses (exercice 2016 : 771,1 millions de francs suisses) soit une augmentation de 15,9% (devise locale). Pour la branche ‘France’, il est fait mention d’une performance de 211,1 millions de francs suisses (- 4,2% en devise locale) ‘en raison de mesures d’optimisation du portefeuille visant à améliorer la rentabilité’, ce qui confirme l’analyse précédente d’un choix de gestion technique impactant temporairement les résultats.

Le ratio combiné net est certes passé à 100,1% par rapport à 96,9 % résultant :

– d’une augmentation du taux de sinistralité en raison de l’impact négatif des catastrophes naturelles sur l’activité de réassurance et de la branche ‘Speciality lines Suisse/international’, mais ‘une amélioration simultanée du ratio de sinistralité en France’

– d’un ratio de coûts plus élevés en raison notamment de ‘l’impact ponctuel d’un effet spécial de l’année précédente’ pour lequel aucune explication n’est fournie, pouvant s’agir de la politique de dénonciation des contrats déficitaires engendrant effectivement un ratio de coûts plus élevé.

L’article du journal d’information interne du groupe Helvetia ‘Allegra!’ daté du 4 septembre 2017 soit trois jours après le licenciement de Mme [K], intitulé ‘Hausse du bénéfice pour Helvetia’ indique que, pour le 1er semestre 2017, le groupe Helvetia a pu s’améliorer dans tous les principaux chiffres clés par rapport à la même période de l’exercice précédent. Les chiffres ne sont pas précis par secteur d’activité mais indiquent cependant que le résultat des activités opérationnelles après impôts du 1er semestre 2017 est de 258,4 millions de Francs suisses (1er semestre 2016 : 238,3 millions soit +8,4% ) et le ratio combiné net de 91,3 % (1er semestre 2016 : 91,9%).

En l’espèce, au regard des éléments produits, la baisse des résultats alléguée principalement fondée sur l’année 2016, laquelle n’est pas suffisamment pertinente pour apprécier la cause économique du licenciement, la situation devant s’apprécier à la date de la rupture et aux perspectives à venir, est temporaire et volontaire car elle résulte de la conséquence technique des choix de gestion de l’entreprise. Comme le souligne l’intimée dans ses écritures, cette baisse fait augmenter le poids des charges fixes sur le résultat de l’entreprise mais sans qu’il soit établi la nécessité de réduire ou de réorganiser la masse salariale.

La baisse des résultats est impropre à caractériser une menace sur la compétitivité de l’entreprise.

S’agissant de la dégradation alléguée de l’environnement économique du groupe Helvetia, il est fait mention dans la lettre de licenciement de l’entrée de nouveaux concurrents, du tassement du marché de l’assurance spécialisée, du bouleversement du marché par la digitalisation.

Il sera observé que la saturation d’un marché ou le tassement d’une des branches de l’activité de l’entreprise ne caractérise pas en soi une menace sur sa compétitivité.

L’appelant affirme que le marché européen de l’assurance au sein duquel le groupe Helvetia évolue est un marché mature dont le volume global d’activité ne croît plus. Cependant, outre que le groupe a également une activité internationale, le marché est mature également pour les autres compagnies d’assurances.

En l’espèce, sur le secteur de l’assurance maritime et transports, Helvetia occupe le deuxième rang en France par la taille après Axa et si ce marché est de plus en plus difficile comme mentionné dans l’accord collectif concernant le PSE, il l’est également pour les concurrents.

De plus, selon les termes de cet accord collectif, le groupe a mis en oeuvre en 2016 une diversification avec le développement des nouveaux marchés lancés en 2016 (marchés ‘fine art’ et ‘engineering’) en complément des activités traditionnelles d’assurance maritime et transport.

L’appelant fait également référence aux nouveaux entrants que sont les start-up ‘Insurtech’ et au défi de la digitalisation, qui révolutionnent le marché de l’assurance dans son ensemble quels que soient les risques assurés par l’utilisation de la collecte de données dans l’analyse assurantielle en plus des données actuarielles.

Or, selon les termes de l’accord collectif sur le PSE, pour faire face au défi de la digitalisation, le groupe a pris en décembre 2016 une participation majoritaire dans MoneyPark, a lancé début 2017 un fond spécifique destiné à investir 25 start-ups intervenant dans le domaine des assurances et a élargi son offre numérique essentiellement à destination des particuliers (pièce n°10 intimée).

Dans le document ‘stratégie Helvetia 20.20″ de mars 2017 cité ci-dessus, est toute autre la vision pessimiste du marché de l’assurance telle qu’énoncée dans la lettre de licenciement, puisque pour les marchés spécialisés, le groupe Helvetia prévoit une ‘croissance profitable dans certaines niches sélectives’ et l’objectif de la ‘poursuite du développement en tant qu’acteur de niches sélectif’. Il est également indiqué ‘Helvetia 20.20 s’empare des tendances les plus importantes’, ‘la numérisation comme moteur puissant : affaires en ligne, smart data, internet des objets et automatisation’.

De même, le document ‘Bilan de l’année 2016 et perspective d’avenir’ du 23 mars 2017 (pièce n°12 intimée), indique : ‘ce dont nous somme fiers : [..] plus d’outils et de synergies pour plus d’avantages clients :

– digitalisation externe : E-souscription, Extranet sinistre, web émargement, application mobile…

– digitalisation interne : GED, Miami/Gaia sans papier […]’.

Comme le relève avec pertinence l’intimée, la prise en compte des bouleversements allégués par l’entreprise a été réalisée en amont, celle-ci s’étant déjà positionnée sur les nouveaux marchés et ayant pris les mesures nécessaires pour ce faire dans l’avenir notamment par des prestataires externes.

Il n’est pas démontré dans ce contexte que la situation de l’entreprise laquelle doit s’apprécier au niveau du groupe à la date du licenciement de Mme [K] puisse induire une menace sur la compétitivité de l’entreprise.

– sur la réorganisation de la société

Conformément aux dispositions de l’article L. 1233-3 du code du travail précité, la réorganisation de l’entreprise doit être nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, ce qui suppose d’une part l’existence d’un lien entre la menace sur la compétitivité et les mesures de réorganisation et d’autre part un motif non inhérent à la personne du salarié tel le refus d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail, en lien avec la menace alléguée.

L’appelant soutient que les mesures de réorganisation consistant notamment à regrouper les salariés des fonctions ‘supports’ dont le service informatique auquel appartenait Mme [K], [Localité 9] où se trouve l’établissement principal et les responsables des services concernés, étaient cohérentes avec la situation économique d’Helvetia France.

L’intimée souligne au contraire l’inadéquation selon elle des mesures de réorganisation au regard du motif économique du licenciement ; que le plan de réorganisation adopté par Helvetia au regard des motifs invoqués par l’employeur qui seraient constitutifs d’une menace pour sa compétitivité, n’a aucun lien avec la situation économique alléguée.

Le juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, doit vérifier l’adéquation entre la situation économique de l’entreprise et les mesures affectant l’emploi ou le contrat de travail envisagées par l’employeur, mais ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu’il effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation.

Ainsi, sans arbitrer entre les différentes possibilités de réorganisation d’une entreprise, il doit vérifier que celle invoquée à l’appui des licenciements est nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.

En l’espèce, la réorganisation de l’entreprise porte sur :

– le déménagement des locaux de [Localité 8] à [Localité 10],

– le transfert des services supports dont le service informatique auquel Mme [K] appartenait de [Localité 8] [Localité 9],

– le transfert des collaborateurs du service DAV [Dommages aux véhicules] dans les délégations régionales.

Mme [K] appartenant au service informatique était concernée par le transfert de ce service de [Localité 8] [Localité 9].

Selon l’appelante, les locaux de [Localité 8] datant de 1987, propriété de l’entreprise, étaient vieillissants, nécessitaient des travaux importants de rénovation, avec une localisation inadéquate [périphérie de La Défense] et des conditions de travail dégradées. Le regroupement des salariés des fonctions supports sur [Localité 9] permettait de faciliter et rationaliser le fonctionnement de ces services tout en réduisant les coûts liés à cet éclatement géographique, entraînant une mobilité géographique pour 9 salariés.

L’intimée fait valoir que le choix opéré par l’employeur est contraire à sa volonté de réduire les frais fixes notamment par la résiliation des contrats déficitaires puisque, propriétaire d’un bâtiment en périphérie elle a pris à bail en centre ville de [Localité 10] – [Adresse 7] dans le [Adresse 4] – un immeuble avec un loyer annuel de plus de 900 000 euros, auxquels s’ajoutent le coût du déménagement de 108 000 euros et l’aménagement des locaux parisiens pour 650 000 euros (amortis sur 6 ans).

Elle indique également que l’employeur a affirmé lors des réunions du comité d’entreprise que les directeurs des services ou des directions concernés sont rattachés au site [Localité 9] comme l’ensemble de la direction d’Helvetia France (pièce n°10) alors qu’en fait la direction des services support (ressources humaines et logistique) ont été inclus dans le projet de [Localité 8] à [Localité 10], que le responsable informatique de l’infrastructure logistique n’a pas été concerné par le transfert [Localité 9] mais continue de travailler à [Localité 10], que la société de prestation informatique qui travaille pour Helvetia est basée [Localité 9] mais met à disposition deux prestataires sur [Localité 10].

Ces affirmations non sérieusement démenties par l’appelante sont reprises par les pièces produites par la salariée, notamment sa pièce 17 que constitue le procès-verbal du comité d’établissement du 22 mai 2017 où l’expert mandaté par le comité d’établissement s’interroge sur le choix qui s’est porté sur le site le plus cher et le plus vaste de [Localité 10], la direction insistant cependant ‘sur la qualité de l’immeuble retenu, tant de son standing, de sa finition, que de sa disposition et son emplacement’. L’expert souligne également que le bâtiment parisien pourrait accueillir 20 collaborateurs supplémentaires pour éviter des mobilités et d’éventuels licenciements.

En l’espèce, étant rappelé que la menace sur la compétitivité de l’entreprise n’est pas suffisamment établie, les choix de l’entreprise ne permettent pas de vérifier le lien entre le motif économique invoqué et la réorganisation consistant notamment à proposer à des salariés de déménager de [Localité 8] [Localité 9] et en cas de refus à les licencier, le critère de la sauvegarde de la compétitivité ne se confondant pas avec celui de l’intérêt de l’entreprise lequel n’est pas remis en cause.

En conséquence, en l’absence de motif économique, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur l’obligation de reclassement, le licenciement de Mme [K] est sans cause réelle et sérieuse.

S’agissant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au présent litige dispose que ‘si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.’

En l’espèce, le conseil de prud’homme a accordé une somme correspondant à plus de 12 mois de salaire, ce que contestent d’une part l’appelante qui propose à titre subsidiaire une indemnité égale à six mois de salaire et d’autre part l’intimée qui réclame une indemnité à hauteur de 24 mois de salaire.

Il appartient à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, la charge de la preuve du préjudice invoqué incombant à celui qui s’en prévaut.

Mme [K] se borne à indiquer qu’elle était âgée de 54 ans lors de son licenciement et qu’elle avait une ancienneté de près de 14 ans. Elle ne produit aucun élément à l’appui de sa demande d’indemnité au-delà des six mois prévus par la loi.

L’employeur indique que Mme [K] a bénéficié d’un congé de reclassement au cours duquel elle a perçu 100% de sa rémunération mensuelle brute moyenne des 12 derniers mois pendant la durée correspondant au préavis de licenciement, puis 84,5% de sa rémunération moyenne des douze derniers mois pendant le reste du congé de reclassement soit 100% de son salaire net hors période de neutralisation, qu’elle a bénéficié de l’assistance d’un cabinet de recrutement, BPI group, a reçu plusieurs offres d’emploi dont une proposition d’embauche en contrat à durée indéterminée à laquelle elle n’a pas donné suite.

Ces dires non contestés par l’intimée sont confirmés par les pièces produites par l’appelante telles les bulletins de salaire de septembre 2017 à novembre 2018 (pièces n°16 et 17), le relevé des décisions de la commission de suivi du 16 avril 2018 (pièce n°13) et la décision de validation de l’accord collectif majoritaire du 26 juin 2017 (pièce n°4). Il est établi par ailleurs que Mme [K] a perçu une indemnité conventionnelle de licenciement de 44 720,50 euros et une prime de recherche rapide d’emploi de 11 812,11 euros bruts conformément aux dispositions du PSE (pièces n°17, 18, 19 et 3).

L’appelante justifie également que Mme [K], au cours du congé de reclassement, a sollicité la suspension dudit congé à compter du 2 mai 2018 pour une période de quatre mois correspondant à sa période d’essai au poste d’analyste programmeur dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée au sein de la société Equad RCC, filiale du groupe Eufex, spécialiste de l’expertise d’assurance, avec un salaire mensuel brut de 4 666,67 euros en 2018 soit une somme équivalente au salaire perçu chez Helvetia [ 4 667,63 euros ] (pièces n°12 et 14).

L’appelante indique également que Mme [K] est restée pendant un an et sept mois au sein de cette société, puis a occupé à compter du mois de novembre 2019, dans le cadre d’un nouveau contrat à durée indéterminée, le poste d’analyste programmeur au sein de la société Heppner ‘spécialiste et leader indépendant des échanges internationaux au départ et à destination de la France, créateur de solutions transport et logistique’selon son site Internet, et affirme qu’elle occupe toujours ce poste.

Outre que l’intimée ne conteste pas ces affirmations, l’appelante produit le profil LinkedIn de Mme [K] les confirmant (sa pièce n°52).

La cour, appréciant souverainement l’ensemble de ces éléments, condamne la société Helvetia à payer à Mme [K] la somme de 30 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé sur le quantum alloué.

Mme [K] sera déboutée du surplus de sa demande à ce titre, ainsi que de sa demande de remise de documents sociaux.

2- sur la discrimination salariale et l’inégalité de traitement

-sur la discrimination salariale

Aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable à la présente espèce,’qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français.’

Selon l’article L. 1144-1 du même code, ‘lorsque survient un litige relatif à l’application des dispositions des articles L. 1142-1 et L. 1142-2, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe, la situation de famille ou la grossesse.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.’

Toute différence de traitement ne constitue pas une discrimination, notamment lorsque la différence de traitement est justifiée par des raisons objectives et licites, étrangères à toute forme de discrimination prohibée.

Il résulte de ce qui précède qu’il appartient au salarié qui allègue une discrimination pour l’un des motifs discriminatoires visés à l’article L. 1332-1 précité d’établir des éléments la laissant supposer, puis à l’employeur au vu de ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des motifs étrangers à toute discrimination.

En l’espèce, Mme [K] soutient avoir découvert en février 2018 que la question de l’égalité salariale homme-femme faisait l’objet de rappels du syndicat CFDT, que pour la classe 6 à laquelle elle appartenait, les salaires des 20 femmes et des 45 hommes présents au 31 décembre 2017 faisait ressortir un écart de 25,70% de rémunération entre les hommes et les femmes alors que l’ancienneté des femmes était plus élevée et s’interroge au regard de ce constat sur l’existence d’une discrimination à son égard.

A l’appui de ses dires, elle se borne à produire un tract – jugé à raison peu lisible par le conseil de prud’hommes – de la CFDT dans son Flash info du 9 février 2018 relatif à la négociation sur les rémunérations (NAO) indiquant notamment ‘nous avons analysé de façon détaillée les chiffres fournis par la direction sur la situation comparée des rémunérations des femmes et des hommes. Le constat est sans appel (voir au verso notre focus [illisible]). […] Mesures salariales 2018 […] Enveloppe de 0,3% de la masse salariale pour des mesures individuelles ciblées sur la suppression écarts de rémunération injustifiés entre les femmes et les hommes.’

Cet élément est suffisant pour présumer de l’existence d’une éventuelle discrimination salariale dont Mme [K] aurait été victime en raison de son genre.

L’employeur pour sa part affirme que suite au tract du syndicat, la direction de la société Helvetia s’est exprimée (pièces n°49 et 50) rappelant que l’inégalité salariale doit être analysée entre des salariés, femmes ou hommes, occupant un poste identique et de surcroît engagés à une date voisine dans des conditions identiques de diplômes et de qualification.

L’appelante produit également son index sur l’égalité femmes-hommes pour l’année 2020, Helvetia en France ayant obtenu la note de 81 points sur 100 soit supérieure à la note minimale de 75 en deçà de laquelle elle aurait été contrainte de mettre en oeuvre des mesures de correction et d’établir un plan de rattrapage salarial. Il sera observé que la note finale est principalement impactée (0/10) par l’absence de femmes dans les cadres de direction, catégorie à laquelle Mme [K] n’appartient pas (pièce n°57).

En l’état, il n’est pas démontré l’existence d’une discrimination salariale que Mme [K] aurait subie personnellement en raison de son genre, en comparaison de salariés masculins se trouvant dans une situation comparable à la sienne.

– sur l’inégalité de traitement

En vertu de l’article L. 3221-2 du code du travail, ‘tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.’

S’agissant du principe ‘à travail égal, salaire égal’ consacré par cette disposition, il suppose que les situations comparées soient identiques, le salarié qui invoque une telle violation, devant apporter les éléments susceptibles de caractériser l’inégalité de salaire.

En l’espèce, la salariée n’apporte aucun élément de faits précis relatifs à sa carrière et relatifs à la situation de salariés se trouvant dans une situation comparable permettant d’établir une inégalité de traitement.

Le jugement sera confirmé en ce que le conseil de prud’hommes a débouté Mme [K] de ses demandes de rappel de salaires et congés payés afférents sur le fondement de la discrimination et de l’égalité salariale et de dommages-intérêts en réparation des préjudices qu’elle aurait subis de ce fait.

3- sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

La société Helvetia sera condamnée à payer à Mme [K] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel.

L’appelante sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre en date du 16 mars 2021 sauf en ce qu’il a condamné la société Helvetia compagnie suisse d’assurances à payer à Mme [C] [K] la somme de 60 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Helvetia compagnie suisse d’assurances à payer à Mme [C] [K] la somme de 30 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute Mme [C] [K] du surplus de sa demande à ce titre,

Condamne la société Helvetia compagnie suisse d’assurances à payer à Mme [C] [K] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

Déboute la société Helvetia compagnie suisse d’assurances de sa demande à ce titre,

Condamne la société Helvetia compagnie suisse d’assurances aux dépens d’appel.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

 


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