Péremption d’instance : 7 septembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 20/03019

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Péremption d’instance : 7 septembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 20/03019
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MINUTE N° 23/557

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

– avocats

– parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION SB

ARRET DU 07 Septembre 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/03019 – N° Portalis DBVW-V-B7E-HNG7

Décision déférée à la Cour : 24 Septembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE :

URSSAF ALSACE

[Adresse 9]

[Localité 2]

Comparante en vertu d’un pouvoir général

INTIMEES :

S.A.R.L. [4]

[Adresse 1]

[Localité 3]

SELARL [K] ET ASSOCIES

Commissaire à l’exécution du plan de la SARL [4]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentées par Me Didier MADRID, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Juin 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme HERBO, Président de chambre, et Mme GREWEY, Conseiller, chargées d’instruire l’affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme HERBO, Président de chambre

Mme GREWEY, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme HERBO, Président de chambre, 

– signé par Mme HERBO, Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

– 2 –

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme HERBO, Président de chambre, 

– signé par Mme HERBO, Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE

Des inspecteurs du travail ont effectué trois contrôles inopinés sur le chantier de la « [Adresse 8] » à [Localité 5] (Haut-Rhin) entre le 8 décembre 2009 et le 7 avril 2010, au cours desquels ils ont constaté la présence de travailleurs polonais exécutant une prestation de travail sous la subordination de la société [W] et fils, devenue la SARL [4], alors que celle-ci les faisait passer pour des sous-traitants.

A la suite de ces contrôles, un procès-verbal n° 30/210 pour dissimulation d’emplois salariés a été dressé par les agents de la DIRECCTE d’Alsace le 21 juin 2010.

Ce procès-verbal a été transmis à l’Urssaf du Bas-Rhin, aux droits de laquelle vient l’Urssaf d’Alsace, aux fins de procéder à la mise en recouvrement des cotisations et contributions sociales dues sur la base des informations qu’il contient.

Par lettre d’observations du 28 août 2010, l’Urssaf a notifié à la SARL [W] et fils un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale et d’assurance chômage et de cotisations AGS d’un montant total de 291.457 euros.

La société a fait valoir ses observations le 24 septembre 2010 et par courrier du 27 septembre 2010, l’inspecteur du recouvrement a informé la SARL [W] et fils du maintien des redressements envisagés.

Une mise en demeure a été notifiée à la SARL [W] et fils le 8 avril 2011 pour un montant total de 351.055 euros dont 59.583 euros de majorations de retard.

Ce redressement de cotisations a été contesté par la SARL [W] et fils devant la commission de recours amiable de l’Urssaf, laquelle a cependant confirmé le bien-fondé du redressement et du rappel opérés lors de sa séance du 30 septembre 2011.

Par acte introductif d’instance du 17 novembre 2011, la société [W] et fils a contesté cette décision.

– 3 –

Par jugement du 8 avril 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin a ordonné le sursis à statuer dans l’attente de la décision du Ministère public dans l’enquête pénale en cours.

Suite à l’appel interjeté contre la décision du tribunal correctionnel de Mulhouse du 12 novembre 2015 déclarant M. [I] [W] coupable des faits d’exécution d’un travail dissimulé en sa qualité de gérant de la SARL [W] et fils, la présente cour a rendu un arrêt le 9 novembre 2016 confirmant le jugement de première instance en ce qui concerne la culpabilité et les peines prononcées.

Cette décision a fait l’objet d’un pourvoi en cassation et par arrêt du 6 mars 2018, la chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel « en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées, (‘) toutes autres dispositions étant expressément maintenues ».

En parallèle, par jugement du 26 octobre 2016, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Mulhouse a ouvert une procédure de sauvegarde avec administrateur et a désigné la SELAS [D] & [U], en la personne de Me [B] [U], ès qualité d’administrateur judiciaire avec mission de surveillance, et la SELARL MJM [K] & associés, en la personne de Me [E] [K], ès qualité de mandataire judiciaire au redressement et à la liquidation des entreprises.

Par jugement du 6 septembre 2017, le tribunal de grande instance de Mulhouse a arrêté le plan de continuation pour une durée de dix ans et a désigné la SELARL MJM [K] & associés, ès qualité de commissaire à l’exécution du plan.

Par acte de reprise d’instance du 5 décembre 2018, l’Urssaf a sollicité la reprise de l’instance devant la juridiction de sécurité sociale et la mise en cause de Me [K], commissaire à l’exécution du plan.

Par jugement du 24 septembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse, devenu compétent pour trancher le litige, a :

dit que l’instance n’est pas éteinte par la péremption,

déclaré le recours de la société [W] et fils, devenue la SARL [4], contre la décision de la commission de recours amiable du 30 septembre 2011 recevable,

annulé le redressement notifié à la société [W] et fils, devenue la SARL [4], selon lettre d’observations du 28 août 2010 et mise en demeure du 8 avril 2011 d’un montant de 351.055 euros,

débouté les parties pour le surplus de leurs demandes,

dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens,

condamné l’Urssaf d’Alsace à payer la somme de 3.000 euros à la SARL [4] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’Urssaf d’Alsace a interjeté appel du jugement entrepris par lettre recommandée réceptionnée au greffe de la cour le 21 octobre 2020.

Par ordonnance du 1er septembre 2022, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 8 juin 2023.

– 4 –

La cour a autorisé une note en délibéré relative à la production du pouvoir spécial de l’agent signataire de la déclaration d’appel. L’organisme a produit ladite note en date du 8 juin 2023. L’intimé y a répliqué le 27 juin 2023. L’URSSAF a répondu le 7 juillet 2023.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions réceptionnées au greffe de la cour le 18 mai 2021, reprises oralement à l’audience, l’Urssaf d’Alsace demande à la cour de :

à titre liminaire, constater que Mme [T] [G] disposait d’un pouvoir spécial de signature de l’acte d’appel, le rendant parfaitement régulier ;

ordonner la mise en cause du Commissaire à l’exécution du plan,

déclarer son appel recevable, l’accueillir tant sur la forme que sur le fond,

A titre principal, sur la forme,

confirmer le jugement rendu le 24 septembre 2020 par le pôle social de [Localité 7] uniquement sur la non-péremption de l’instance,

in’rmer le jugement entrepris en ce qu’il a annulé le redressement notifié à la société [W] et fils, devenue la SARL [4], par lettre d’observations du 28 août 2010 et mise en demeure du 8 avril 2011 pour un montant de 351.055 euros au motif que le principe du contradictoire n’a pas été respecté,

A titre subsidiaire, sur le fond,

in’rmer le jugement en ce qu’il a annulé le redressement notifié à la société [W] et fils, devenue la SARL [4] par lettre d’observations du 28 août 2010 et mise en demeure du 8 avril 2011 d’un montant de 351.055 euros,

fixer la créance de l’Urssaf d’Alsace pour un montant de 351.055 euros,

in’rmer le jugement rendu le 24 septembre 2020 en ce qu’il a condamné l’Urssaf d’Alsace à payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamner la société [4] à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamner la société [4] aux dépens.

L’appelante fait grief au jugement entrepris d’avoir considéré que le principe du contradictoire n’était pas respecté.

Elle considère que le redressement, basé sur le procès-verbal d’infraction pour travail dissimulé dressé par l’inspection du travail le 21 juin 2010 est fondé en application de l’article L.8271-8-1 du code du travail.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que, eu égard aux éléments de faits relevés par les inspecteurs du travail, la société [W] et fils ne pouvait pas bénéficier de la présomption de non salariat édictée par l’article L.8221-6 du code du travail, ni se prévaloir du recours aux contrats de sous-traitance en raison de l’existence d’un lien de subordination juridique avec les travailleurs polonais concernés.

– 5 –

Enfin elle souligne que l’acte d’appel est tout à fait régulier.

Par conclusions visées le 24 mai 2023, auxquelles s’associe Me [K], commissaire à l’exécution du plan, reprises oralement à l’audience, la SARL [4] demande à la cour de :

Sur l’appel principal de l’Urssaf d’Alsace,

constater que l’acte d’appel n’a pas été signé par le directeur de l’Urssaf et que la signataire doit disposer d’un pouvoir spécial pour ce faire, juger qu’à défaut, l’acte d’appel est irrégulier,

déclarer irrecevable et, subsidiairement, mal fondé l’appel interjeté par l’Urssaf d’Alsace,

débouter l’Urssaf d’Alsace de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

Sur l’appel incident de la société [4],

déclarer l’appel incident recevable et bien fondé,

infirmer le jugement du 24 septembre 2020 en ce qu’il y est jugé que l’instance n’est pas éteinte par la péremption.

Et statuant à nouveau,

dire et juger que l’instance inscrite au rôle du tribunal judiciaire de Mulhouse sous le numéro RG 16/01785 était périmée,

débouter, en conséquence, l’Urssaf d’Alsace de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires.

Subsidiairement,

confirmer le jugement du 24 septembre 2020 en ce qu’il annule le redressement notifié à la société [W] et fils, devenue la SARL [4], selon lettre d’observations du 28 août 2010 et mise en demeure du 8 avril 2011 d’un montant de 351.055 euros,

débouter, en conséquence, l’Urssaf d’Alsace de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires,

condamner l’Urssaf d’Alsace à lui payer une indemnité de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais de défense exposés à hauteur de première instance puis d’appel et à supporter les dépens de première instance et d’appel.

L’intimée soulève tout d’abord la question de l’irrégularité de l’acte d’appel lors des débats, compte tenu de ce que le directeur de l’organisme n’a pas signé celui-ci. Elle forme appel incident s’agissant de la péremption d’instance, considérant qu’à la suite de la déclaration de créance de l’Urssaf le 16 décembre 2016, l’organisme n’a pas accompli toutes les diligences nécessaires à la reprise régulière de l’instance en cours durant un délai de deux ans.

Elle sollicite, à titre subsidiaire, la confirmation du jugement entrepris ayant retenu le non-respect du principe du contradictoire au motif qu’un procès-verbal de délit de travail dissimulé a été établi et transmis au ministère public antérieurement à la date de la lettre d’observations.

– 6 –

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l’appel et la question du pouvoir spécial du signataire de l’acte de l’appel :

Interjeté dans les forme et délai légaux, l’appel est recevable.

La cour constate, à titre liminaire, que la recevabilité du recours formé le 17 novembre 2011 par la SARL [W] et Fils devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale du Haut-Rhin n’est pas contestée.

Par ailleurs, si l’intimée a soulevé, lors des débats, l’irrégularité de l’acte d’appel remettant en cause la qualité de signataire de Mme [T] [G], il ressort de la note en délibéré de l’Urssaf du 8 juin 2023, autorisée par la cour, que l’intéressée avait obtenu délégation de signature de la part de M. [R] [L], directeur de l’organisme, non révoquée au jour de l’acte d’appel et qu’elle était, par conséquent, dûment habilitée à signer l’acte d’appel.

L’acte est donc parfaitement régulier.

Sur la mise en cause du commissaire à l’exécution du plan :

L’Urssaf sollicite la mise en cause du commissaire à l’exécution du plan. La cour constate que les formalités habituelles ont bien été diligentées, dans le cadre des premières conclusions du 19 octobre 2020, copie des accusés de réception ayant été transmis à la cour le 7 janvier 2022.

Sur la péremption d’instance

L’article 386 du code de procédure civile dispose que l’instance est périmée lorsqu’aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans.

Selon l’article 369 du même code, dans sa version antérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, l’instance est interrompue par la majorité d’une partie, la cessation de fonctions de l’avocat lorsque la représentation est obligatoire ou l’effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur.

En application de l’article L.622-22, alinéa premier, du code du commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, sous réserve des dispositions de l’article L.625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur ou le commissaire à l’exécution du plan nommé en application de l’article L.626-25 dûment appelés, mais tendant uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

– 7 –

L’article L.622-1, I., 1°, du code précité prévoit que le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L.622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent.

Selon l’article R.142-22 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, l’instance est périmée lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.

En l’espèce, les premiers juges ont relevé avec pertinence que la péremption de l’instance ne peut pas être prononcée sur le fondement du jugement de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Mulhouse du 26 octobre 2016 prononçant l’ouverture de la sauvegarde judiciaire à l’égard de la SARL [4] dès lors que ce jugement n’a pas confié à l’administrateur judiciaire une mission d’assistance mais une mission de surveillance des actes de gestion.

De plus, si l’article L.622-21 du code de commerce prévoit que le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers lorsque le débiteur est défendeur, la société [4] n’a pas disposé de cette qualité puisqu’elle était demanderesse dans la procédure en contestation du redressement Urssaf, de sorte que c’est encore à bon droit que le pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse a jugé que la péremption de l’instance ne pouvait pas non plus être prononcée sur ce fondement.

Enfin, les dispositions de l’article R.142-22, dernier alinéa, du code de la sécurité sociale, selon lequel l’instance est périmée lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction, n’ont pas été méconnues par l’Urssaf. En effet, par jugement du 23 novembre 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin a prononcé un sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt qui devait être rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation et a « Dit que l’affaire sera réinscrite au rôle du Tribunal à la demande de la partie la plus diligente dès l’arrêt de la Cour de Cassation ». La réinscription au rôle des affaires en cours au tribunal a bien été sollicitée par la défenderesse en date du 5 décembre 2018, quand bien même l’Urssaf n’aurait pas justifié de sa déclaration de créance dans la procédure de sauvegarde et sans appeler dans la cause le mandataire judiciaire.

Le jugement sera, dès lors, confirmé en ce qu’il a dit que l’instance n’était pas éteinte par la péremption.

Sur le respect du principe du contradictoire

La SARL [W] et Fils a fait l’objet d’un redressement de cotisations par l’Urssaf au titre des années 2006 à 2010 fondé sur un procès-verbal de constat de travail dissimulé établi par les agents de l’unité territoriale du Haut-Rhin relevant de la DIRECCTE Alsace.

– 8 –

Le tribunal judiciaire de Mulhouse a procédé à l’annulation du redressement litigieux en raison du non-respect du principe du contradictoire qui résulterait, selon les premiers juges, de l’établissement et de la transmission au ministère public d’un procès-verbal de délit de travail dissimulé antérieurement à la date de la lettre d’observations.

La société [4] se contente d’indiquer que les moyens opposés par l’Urssaf à la critique du jugement entrepris ne permettent pas de remettre en cause le bien-fondé de cette décision sur ce point.

Or, l’argument développé par la SARL [4] est inopérant dans la mesure où, contrairement à ce qu’allègue la société intimée, et par infirmation du jugement entrepris, la cour constate que l’Urssaf a bien respecté le principe du contradictoire.

En effet, il résulte de l’article L.8271-1 du code du travail, dans sa version en vigueur jusqu’au 30 septembre 2011, que les infractions constitutives de travail illégal mentionnées à l’article L.8211-1, notamment l’infraction de travail dissimulé, sont recherchées et constatées par les agents de contrôle mentionnés à l’article L.8271-7 dans la limite de leurs compétences respectives en matière de travail illégal.

Parmi eux figurent, à l’article L.8271-7, 1°, du code du travail, les inspecteurs et les contrôleurs du travail.

Lorsque ces agents constatent l’existence d’infractions constitutives de travail dissimulé, ils dressent un procès-verbal qu’ils transmettent au procureur de la République en application des dispositions de l’article L.8271-8 du code du travail.

Alors que le parquet dispose de la maîtrise de l’action publique, l’Urssaf est fondée à engager une procédure de recouvrement forcé en notifiant un redressement sur la base des informations contenues dans un procès-verbal de travail dissimulé dressé par les corps de contrôle dûment habilités.

La procédure de recouvrement des cotisations sociales résultant du constat de l’infraction de travail illégal dressé notamment par procès-verbal des agents habilités de la DIRECCTE qui en constitue un préalable, son établissement et sa transmission au ministère public antérieurement à la date de la lettre d’observations ne saurait conduire à une violation du principe du contradictoire.

En effet, il n’y a pas de disposition légale ou réglementaire interdisant à l’inspecteur du recouvrement d’envoyer ce document avant sa transmission au ministère public.

Par ailleurs, l’article R.243-59, cinquième alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007 applicable au litige, prévoit seulement qu’à l’issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l’employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle.

– 9 –

Ce document mentionne, s’il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l’indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés. Le cas échéant, il mentionne les motifs qui conduisent à ne pas retenir la bonne foi de l’employeur ou du travailleur indépendant. Ce constat d’absence de bonne foi est contresigné par le directeur de l’organisme chargé du recouvrement. Il indique également au cotisant qu’il dispose d’un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu’il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix.

Il est jugé de manière constante que le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé à l’origine du redressement opéré par l’Urssaf n’a pas à figurer dans les documents communiqués à l’employeur par l’organisme de recouvrement à l’issue du contrôle, aucune disposition ne faisant obligation à cet organisme de le lui transmettre.

De plus, les dispositions réglementaires ne prévoient pas l’indication dans la lettre d’observations de la référence, soit du numéro de procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé.

Au présent cas, il avait été pertinemment constaté par le tribunal que la lettre d’observations du 28 août 2010 contient une partie intitulée préambule qui indique « Vous avez fait l’objet d’un procès-verbal de travail dissimulé relevé à votre encontre qui a été transmis à Monsieur le Procureur de la République. Ce procès-verbal porte le numéro 30/2010 et il a été rédigé par les services de la DIRECCTE ALSACE Unité territoriale du Haut-Rhin. Il est daté du 21 juin 2010 ».

Il résulte de ce préambule ainsi que de l’ensemble des éléments débattus par les parties que l’objet initial du contrôle de l’Urssaf ne consistait pas à déterminer l’existence d’une infraction de travail illégal, mais de recouvrer les cotisations sociales afférents au constat réalisé par procès-verbal transmis par un autre corps de contrôle.

En outre, il convient de rappeler que l’Urssaf, à laquelle il n’a pas été demandé de produire devant la présente juridiction de sécurité sociale le procès-verbal de constat de travail dissimulé, n’est pas tenue de communiquer au cotisant ce procès-verbal dès lors qu’il n’en conteste pas l’existence.

Par ailleurs, la cour constate que la lettre d’observations mentionne l’objet du contrôle («Recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé mentionnées aux articles L. 8221-1 et L. 8221-2 du Code du travail»), les documents consultés (bulletins de salaire, comptabilité, factures et contrats de prestations des sous-traitants, relevé des heures des ouvriers polonais), la période vérifiée (du 1er octobre 2005 au 30 juin 2010), la date de fin de contrôle (27 juillet 2010) ainsi que les motifs du redressement ‘ la réintégration des rémunérations des faux travailleurs sous-traitants dans l’assiette des cotisations et contributions sociales, ainsi que dans celle des cotisations chômage et l’annulation des réductions Fillon ‘ et, au titre de chaque année, les bases, calculs et montants de redressement.

– 10 –

Au demeurant, par courrier du 24 septembre 2010, la société a fait part de ses observations ‘ dont la faculté lui avait été expressément indiquée dans la lettre d’observations ‘ auxquelles l’Urssaf a répondu par courrier daté du 27 septembre 2010.

Compte-tenu des développements qui précèdent, la cour considère que l’obligation d’information de l’Urssaf, ainsi que le principe de la contradiction, eu égard au redressement opéré, n’ont pas été méconnus par l’organisme et que la lettre d’observations du 28 août 2010 a permis à la société contrôlée de connaître la nature, les causes et les montants des redressements envisagés.

Sur le bien-fondé du redressement

Le redressement n’étant pas contesté sur le fond, celui-ci sera validé pour son entier montant.

Si, en application de l’article L.243-5 du code de la sécurité sociale, en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement ou de liquidation judiciaires, les pénalités, majorations de retard et frais de poursuites dus par le redevable à la date du jugement d’ouverture sont remis, cette même disposition prévoit l’absence de cette remise lorsque le passif déclaré résulte en tout ou partie du constat de l’infraction mentionnée à l’article L.8221-1 du code du travail.

Le redressement litigieux procédant du constat de l’infraction de travail dissimulé et la créance ayant été déclarée par l’Urssaf d’Alsace pour le montant de 351.055 euros le 1er juin 2017, il y a lieu de fixer au passif de la SARL [4] la totalité de la créance de l’Urssaf.

Sur les frais du procès :

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la SARL [4] qui succombe en son recours sera condamnée aux entiers frais et dépens des procédures de première instance et d’appel, le jugement devant être infirmé en ce qu’il a laissé chaque partie supporter ses dépens.

Enfin, il n’apparaît pas inéquitable de condamner la SARL [4] à verser à l’Urssaf d’Alsace une indemnité 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, sa propre demande devant être rejetée sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DÉCLARE l’appel interjeté recevable et l’acte d’appel régulier,

CONSTATE la mise en cause de la SELARL MJM [K] & associés, en qualité de commissaire à l’exécution du plan,

– 11 –

CONFIRME le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse du 24 septembre 2020 en ce qu’il a dit que l’instance n’est pas éteinte par la péremption et déclaré le recours de la société [W] et fils, devenue la SARL [4], contre la décision de la commission de recours amiable du 30 septembre 2011 recevable,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions,

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

VALIDE le redressement notifié à la société [W] et fils, devenue la SARL [4] par lettre d’observations du 28 août 2010 et réclamé par la mise en demeure du 8 avril 2011, pour son entier montant de 351.055 euros (trois-cent cinquante-et-un mille cinquante-cinq euros),

FIXE la créance de l’Urssaf d’Alsace au montant de 351.055 euros (trois-cent cinquante-et-un mille cinquante-cinq euros) s’agissant du redressement réclamé par la mise en demeure du 8 avril 2011,

CONDAMNE la SARL [4] à verser à l’Urssaf d’Alsace la somme de 1.000 € (mille euros) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la SARL [4] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL [4] aux dépens.

Le Greffier, Le Président,

 


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