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5 janvier 2023
Cour d’appel de Dijon
RG n°
22/00610
FV/IC
S.A.S. LA COMPTABILITE
C/
[R], [Y] [U]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
2ème chambre civile
ARRÊT DU 05 JANVIER 2023
N° RG 22/00610 – N° Portalis DBVF-V-B7G-F6LB
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : ordonnance de référé rendue le 04 mai 2022,
par le juge des référés du tribunal de commerce de Dijon – RG : 2021 005151
APPELANTE :
S.A.S. LA COMPTABILITE agissant poursuites et diligences de son Président en exercice domicilié au siège social sis :
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Jean-Michel BROCHERIEUX, membre de la SCP BROCHERIEUX – GUERRIN-MAINGON, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 24
assisté de Me Didier MADRID, membre de la SELAS FIDAL avocat au barreau de NANCY
INTIMÉ :
Monsieur [R], [Y] [U]
né le 02 Août 1959 à [Localité 5] (21)
domicilié :
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Anne-Line CUNIN, membre de la SCP du PARC – CURTIL – HUGUENIN – DECAUX – GESLAIN – CUNIN – CUISINIER – BECHE – GARINOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 91
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 27 octobre 2022 en audience publique devant la cour composée de :
Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, Président, ayant fait le rapport,
Sophie DUMURGIER, Conseiller,
Sophie BAILLY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 05 Janvier 2023,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par acte d’huissier de justice du 10 novembre 2021, Monsieur [R] [Y] [U] assigne en référé devant le président du tribunal de commerce de Dijon la SAS La Comptabilité.
Aux terme de ses dernières conclusions reprises oralement lors de l’audience, il demande au président du tribunal de commerce de Dijon, au visa des articles 1103 du code civil, 873 alinéa 2, 850, 54 et 56, 46, 114 alinéa 2 du code de procédure civile, et L.721- 3 du code de commerce de condamner à titre provisionnel la SAS La Comptabilité à lui payer la somme de 43.506,01 euros outre intérêts au taux contractuel de 1 % l’an à compter du 1er juillet 2021, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2021, ce avec capitalisation des intérêts. Il demande également l’allocation de 6.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SAS La Comptabilité demande pour sa part :
– au visa des articles 42 et 43 du code de procédure civile, de déclarer le juge des référés du tribunal de commerce de Dijon incompétent au profit de celui du tribunal de commerce de Besançon,
– au visa de l’article 752 du même code, de déclarer l’assignation du 10 novembre 2021 nulle et de nul effet,
– au visa de l’article 873, alinéa 2 du code de procédure civile, de constater l’existence d’une contestation sérieuse, de débouter Monsieur [U] de l’intégralité de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 6.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’ aux entiers dépens.
Par ordonnance en date du 4 mai 2022, le président du tribunal de commerce :
– Au visa de l’article 74 du code de procédure civile, déclare l’exception d’incompétence soulevée par la SAS La Comptabilité irrecevable,
– Au visa de l’article 114 du code de procédure civile, déclare l’exception de nullité soulevée par la SAS La Comptabilité irrecevable.
– Condamne la SAS La Comptabilité à payer à titre provisionnel à Monsieur [R] [Y] [U] la somme de 40.000,00 euros outre intérêts au taux contractuel de 1% l’an à compter du 1er juillet 2019, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2021.
– Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière conformément à l’article 1343-2 du code civil.
– Condamne la SAS La Comptabilité à payer à Monsieur [R] [Y] [U] la somme de 1.500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamne la SAS La Comptabilité aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais de greffe.
Pour statuer ainsi, le magistrat retient :
– que l’incompétence du tribunal de commerce de Dijon n’ayant pas été soulevée avant toute défense au fond lors de l’audience, l’exception soulevée par la SAS La Comptabilité est irrecevable.
– qu’au soutien de sa demande de nullité de l’assignation pour vice de forme au motif que cette dernière n’informe pas le défendeur de l’obligation de constituer avocat dans le délai de 15 jours à compter de l’assignation, la SAS ne justifie pas d’un quelconque grief dans ses écritures et a constitué avocat par courrier envoyé au greffe le 23 novembre 2021, soit 13 jours après la signification de l’assignation ;
– que par courrier en date du 15 mai 2018 remis en main propre le même jour, Monsieur [R] [Y] [U] a proposé à la SAS Audit et Contrôle Légal le rachat de 1.438 sur les 1.441 des actions qu’il détenait dans le capital de cette société, pour la somme de 256.000,00 euros devant être réglée à hauteur de 96.000,00 euros dès l’expiration du délai d’opposition des créanciers et le solde de 160.000,00 euros étant payable en quatre annuités les 30 juin 2019, 30 juin 2020, 30 juin 2021 et 30 juin 2022 moyennant un taux d’intérêt de 1% l’an ;
– que par une première résolution adoptée à l’unanimité lors d’une assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2018 de la SAS Audit et Contrôle Légal, les termes de la proposition de Monsieur [R] [Y] [U] ont été acceptés par les actionnaires de cette société ;
– qu’à la lecture du document intitulé ‘Procès verbal du Président constatant la réalisation de la condition suspensive de la réduction du capital social décidée par l’assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2018″, il constate que la cession des actions de Monsieur [R] [Y] [U] était parfaite et que la SAS Audit et Contrôle Légal en a eu la propriété et la jouissance ;
– que la SAS Audit et Contrôle Légal a procédé au règlement de l’échéance de 96 000,00 euros due à l’expiration du délai d’opposition des créanciers, de celle de 40.000,00 euros due au 30 juin 2019 et de celle de 40.000,00 euros due au 30 juin 2020.
– qu’aucun protocole transactionnel n’ayant été conclu entre les parties, les dispositions contractuelles le liant sont définies, d’une part par le courrier du 15 mai 2018 de Monsieur [R] [Y] [U] et l’acceptation des termes de ce courrier qui apparaît à la lecture de l’assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2018, et d’autre part, par les premiers paiements effectués par la SAS Audit et Contrôle Légal ;
– que les actions vendues ont été annulées suite à la décision en première résolution de l’assemblée générale extraordinaire de la SAS Audit et Contrôle Légal en date du 2 juillet 2018, soit du fait de la défenderesse et non du fait de Monsieur [R] [Y] [U] ;
– que la SAS Audit et Contrôle Légal a fait l’objet, à l’initiative de ses nouveaux associés, d’une fusions absorption par la SAS La Comptabilité en date du 28 décembre 2020, la société absorbante se substituant ainsi de plein droit à la société absorbée ;
– que dans son courrier en date du 5 janvier 2021 adressé à Monsieur [R] [Y] [U], Monsieur [E] [F] [L], Président de la SAS La Comptabilité écrit ‘nous vous confirmons que ledit solde sera réglé aux dates prévues, soir la prochaine annuité le 30 juin 2021 et le solde le 30 juin 2022, moyennant bien évidemment un taux d’intérêt de 1% l’an.’ ;
– que Monsieur [R] [Y] [U] a procédé à la cession d’actions et non d’une clientèle ou d’un fond libéral et que, dans le cadre des liens contractuels entre Monsieur [R] [Y] [U] et la SAS Audit et Contrôle Légal, aucune clause de non concurrence n’a été prévue entre les parties ; que les griefs invoqués à l’encontre de Monsieur [R] [Y] [U] concernant la captation de clientèle ne peuvent donc pas justifier le refus du règlement de l’échéance due au 30 juin 2021;
– que si la défenderesse évoque les dispositions de l’article 1626 du code civil qui énonce que
‘ Quoique lors de la vente il n’ait été fait aucune stipulation sur la garantie, le vendeur est
obligé de droit à garantir l’acquéreur de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou partie de
l’objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente.’, le débat soulevé par ce moyen de la défense dépasse les compétences du juge des référés ;
que cependant les autres faits et moyens soulevés par la partie suffisent au juge des référés pour statuer sur les demandes des parties.
******
La SAS La Comptabilité fait appel par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel le 16 mai 2022.
Par conclusions n° 4 récapitulatives déposées le 25 octobre 2022, elle demande à la cour d’appel de :
‘Infirmer l’ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Dijon du 4 mai 2022 en ce qu’elle a :
– Vu l’article 114 du code de procédure civile,
Déclaré l’exception de nullité soulevée par la SAS La Comptabilité irrecevable,
– Vu l’article 873 alinéa 2 du même code,
Condamné la SAS La Comptabilité à payer à titre provisionnel à Monsieur [R] [Y] [U] la somme de 40 000,00 euros outre intérêts au taux contractuel de 1 % l’an à compter du 1er juillet 2019, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2021,
Ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière conformément à l’article 1343-2 du code civil,
Condamné la SAS La Comptabilité à payer à Monsieur [R] [Y] [U] la somme de 1 500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamné la SAAS La Comptabilité aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme visée en page 1 de la présente ordonnance,
Statuant à nouveau,
1.Vu les articles 115, 763, 853 et 855 du code de procédure civile,
– Déclarer l’assignation du 10 novembre 2021 nulle et de nul effet,
– Débouter, en conséquence, Monsieur [R] [U] de l’intégralité de ses demandes.
2. Subsidiairement :
Vu l’article 873, alinéa 2 du code de procédure civile,
Vu l’article 122 du code de procédure civile,
Vu l’article 567 du code de procédure civile,
Après avoir relevé l’existence d’une contestation sérieuse et par conséquent que le juge des référés était dépourvu du pouvoir de statuer,
– Déclarer Monsieur [R] [U] irrecevable en ses demandes,
– Dire n’y avoir lieu à référé et renvoyer Monsieur [R] [U] à mieux de pourvoir,
3. A titre infiniment subsidiaire,
Vu l’article 564 du code de procédure civile,
Vu les articles 64, 564 (sic) , 566 et 567 du même code
– Déclarer la société La Comptabilité recevable et bien fondée en sa demande de condamnation à titre provisionnel de Monsieur [R] [U] à la somme de 100 000 euros et de compensation de ladite somme avec celle demandée par l’intimé,
En conséquence,
– Condamner Monsieur [R] [U] à payer à titre provisionnel à la société La Comptabilité la somme de 100.000 euros et ordonner la compensation ladite somme avec celle demandée par l’intimé de sorte que l’appelante soit libérée de son obligation à paiement.
4. En tout état de cause,
– Débouter Monsieur [R] [U] de toutes ses demandes, fins et prétentions,
Vu l’article 1352-7du code civil,
Vu les articles 564 et suivants du code de procédure civile,
– Condamner Monsieur [R] [U] à restituer, avec intérêt au taux légal à compter de sa demande, soit le 28 juin 2022, les sommes de 45.377,79 euros et 40 400 euros que la société La Comptabilité lui a versées respectivement les 13 mai 2022 et 20 juillet 2022 au moyen de chèques CARPA,
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile,
– Condamner Monsieur [R] [U] à payer à la société La Comptabilité la somme de
10.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Vu l’article 699 du code de procédure civile,
– Autoriser la S.C.P. Brocherieux Guerrin-Maingon, avocat au barreau de Dijon, à recouvrer directement contre Monsieur [R] [U] ceux des dépens dont elle aura fait l’avance sans recevoir provision.’
Par conclusions n° 3 déposées le 20 octobre 2022, Monsieur [R] [Y] [U] demande à la cour de :
‘Vu l’article 1103 du code civil, les articles 4, 542, 954, 564, 565, 873 alinéa 2, 855, 54 et 56, 46, 114 alinéa 2 du code de procédure civile, l’article L. 721-3 du code de commerce,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu l’ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Dijon en date du 4 mai 2022,
– Déclarer l’appel de la SAS La Comptabilité mal fondé et l’en débouter,
Sur la prétendue incompétence du tribunal de commerce de Dijon
– Déclarer n’y avoir lieu à statuer à défaut de demande,
En toutes hypothèses,
– Confirmer l’ordonnance dont appel en toutes ses dispositions,
Sur la demande provisionnelle de dommages et intérêts à hauteur de 100 000 euros
– A titre principal, déclarer la demande de la SAS La Comptabilité irrecevable comme étant
une demande nouvelle.
– A titre subsidiaire, constater l’existence d’une contestation sérieuse et débouter la SAS La Comptabilité de sa demande,
Sur la demande en restitution, avec intérêts, de la somme de 40 400 euros,
– A titre principal, déclarer la demande de la SAS La Comptabilité irrecevable comme étant une demande nouvelle,
– A titre subsidiaire, débouter la SAS La Comptabilité de sa demande comme étant totalement infondée,
Y ajoutant,
– Condamner la SAS La Comptabilité à payer à Monsieur [R] [U] la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la même aux entiers dépens.’
En application des articles 455 et 634 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIVATION :
Sur la procédure :
la compétence du tribunal de commerce pour statuer en première instance ne fait plus l’objet de contestation devant la cour.
L’appelante réitère sa demande d’annulation de l’assignation, maintenant que la constitution d’avocat était obligatoire et que cette obligation ne lui a pas été rappelée dans l’acte qui lui a été délivré.
Or à juste titre le premier juge a relevé que si effectivement l’assignation délivrée n’informait pas le défendeur de l’obligation de constituer avocat dans le délai de 15 jours à compter de sa délivrance, la SAS ne justifiait pas du moindre grief dans ses écritures et avait constitué avocat par courrier envoyé au greffe le 23 novembre 2021, soit 13 jours après la signification de l’assignation.
C’est toutefois à tort que le premier juge en a déduit que cette demande de nullité était irrecevable alors que la SAS La Comptabilité ne pouvait qu’en être déboutée.
Sur la demande de provision de Monsieur [R] [U] :
La SAS La Comptabilité, qui ne conteste pas ne pas avoir payé au 30 juin 2021 la somme principale de 40 000 euros prévue au contrat, soutient que la demande de Monsieur [U] se heurte à une contestation sérieuse.
Elle reproche à ce dernier une exécution déloyale du contrat de vente résultant de l’assemblée générale extraordinaire du 02 juillet 2018, soutenant qu’il était tenu de la garantie d’éviction prévue à l’article 1626 du code civil, et qu’en sa qualité de cédant de droits sociaux, il était, de plein droit, tenu de garantir le cessionnaire contre l’éviction totale ou partielle résultant d’un fait personnel qui lui est imputable.
Il est incontesté que Monsieur [R] [Y] [U] a procédé à une cession d’actions et non d’une clientèle ou d’un fond libéral et que, dans le cadre des liens contractuels entre Monsieur [R] [Y] [U] et la SAS Audit et Contrôle Légal, aucune clause de non concurrence n’a été prévue entre les parties.
Il est également établi que la cession des actions a été constatée selon procès-verbal du président de la société ACL en date du 17 septembre 2018, et que les parts sociales ont fait concomitamment l’objet d’une annulation ensuite de la réduction de capital décidée par l’assemblée générale extraordinaire de la société ACL du 2 juillet 2018 et constatée selon procès-verbal de son président en date du 17 septembre 2018 ; que si les actions vendues n’existent plus puisqu’elles ont fait l’objet d’une annulation ensuite de la réduction de capital, cette disparition est imputable à la seule SAS La Comptabilité.
Pour invoquer la garantie d’éviction justifiant selon elle l’exception d’inexécution, la SAS La Comptabilité fait état d’une captation de la clientèle de la société dont les droits sociaux ont été cédés qui serait imputable à Monsieur [U]. Elle ajoute que l’analyse de Monsieur [U] selon laquelle la cession de droits sociaux ne traduit pas la cession d’une activité est erronée dès lors que le rachat d’une activité peut se faire par le rachat du fonds de commerce ou par celui des titres d’une société commerciale.
Il sera relevé concernant ce dernier point qu’en l’espèce, le rachat des parts de Monsieur [U] avait pour finalité d’annuler immédiatement ce droit dans le cadre d’une réduction de capital.
Par ailleurs, l’intimé relève à juste titre que la garantie légale d’éviction du fait personnel est extrêmement circonscrite en matière de cession d’actions par la jurisprudence de la cour de cassation qui retient que ‘la garantie légale d’éviction du fait personnel du vendeur n’entraîne pour celui-ci, s’agissant de la cession des actions d’une société, l’interdiction de se rétablir, que si ce rétablissement est de nature à empêcher les acquéreurs de ces actions de poursuivre l’activité économique de la société et de réaliser l’objet social.’ (Cass. Com. 21 janvier 1997, pourvoi n°94-15.207), et que ‘s’agissant de la cession des actions d’une société, la cour d’appel a relevé à bon droit que la mise en ‘uvre de la garantie d’éviction est subordonnée à l’existence d’actes de nature à constituer des reprises ou des tentatives de reprise du bien vendu ou d’atteintes aux activités telles qu’elles empêchent l’acquéreur de poursuivre l’activité économique de la société ainsi que de réaliser l’objet social.’ (Cass. Com. 9 juillet 2002, pourvoi n°98-22.284).
Or en l’espèce, si la SAS La Comptabilité reproche à Monsieur [U] d’avoir accepté un emploi salarié auprès de la société RGA et d’avoir agi dans le seul intérêt de cette dernière en lui apportant de la clientèle et en procédant, avant son départ de la société ACL, à de véritables voies de fait sur les données professionnelles en sa possession – voies de fait que l’intimé conteste – elle ne fait nullement état de l’impossibilité de poursuivre l’activité économique de la société ACL et de réaliser son objet social.
Il s’en déduit que l’ordonnance critiquée en ce qu’elle a fait droit à la demande de provision de Monsieur [U] ne peut qu’être confirmée, aucune contestation sérieuse n’étant opposée à cette demande par la SA La Comptabilité.
Sur la demande de provision de la SAS La Comptabilité :
A hauteur d’appel, la SA La Comptabilité demande la condamnation de Monsieur [U] à lui verser une provision de 100 000 euros à valoir – semble-t-il puisque cette précision ne figure ni dans sa motivation ni dans le dispositif de ses écritures- sur le préjudice financier qu’elle prétend subir du fait des agissements reprochés à Monsieur [U].
Contrairement à ce que Monsieur [U] soutient, cette demande n’est pas irrecevable bien que formée pour la première fois à hauteur d’appel dès lors qu’elle tend à obtenir une compensation avec la somme qui lui est allouée.
Cependant, cette prétention se heurte à une contestation sérieuse de la part de Monsieur [R] [U] qui observe à juste titre que les accusations de voies de fait ne reposent que sur une expertise informatique amiable, que les allégations concernant un détournement de clientèle allégué ne s’appuient que sur le départ de certains des clients dont il avait la charge sans aucun élément démontrant l’existence de manoeuvres de sa part, et que les résultats de la société ACL après son départ ne présentent pas de baisse significative de son chiffre d’affaires.
Il n’y a en conséquence pas lieu à référé sur ce chef de demande.
Sur les demandes de restitution présentées par la SAS La Comptabilité :
La demande de restitution portant sur la somme de 45 377,79 euros versées en exécution de l’ordonnance dont appel est sans objet dès lors que cette décision est confirmée.
La SAS La Comptabilité expose qu’elle a versé à Monsieur [U] le 20 juillet 2022 la somme de 40 400 euros correspondant à la dernière annuité prévue au contrat exigible au 30 juin 2022, et qu’elle est fondée à en demander la restitution.
Monsieur [U] reproche à tort à cette prétention de constituer une demande nouvelle irrecevable par application de l’article 564 du code de procédure civile alors qu’elle ne pouvait manifestement pas être formée devant le premier juge puisqu’elle est liée à un évènement survenu postérieurement à l’ordonnance déférée.
Au soutien de cette demande, la SAS La Comptabilité invoque les dispositions de l’article 1352-7 du code civil qui ne concernent que la restitution des intérêts et fruits.
Aux termes de l’article 1302-2 code civil ‘celui qui par erreur ou sous la contrainte a acquitté la dette d’autrui peut agir en restitution contre le créancier.’ Or en l’espèce, la SAS La Comptabilité a, sans aucune contrainte, effectué le paiement de la somme de 40 400 euros. Elle ne fait pas plus état d’une quelconque erreur.
Sa demande ne peut qu’être rejetée.
PAR CES MOTIFS
Statuant dans les limites de l’appel,
Infirme l’ordonnance de referé du 4 mai 2022 en ce qu’elle a déclaré irrecevable l’exception de nullité soulevée par la SAS La Comptabilité,
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute la SAS La Comptabilité de sa demande d’annulation de l’assignation délivrée le 10 novembre 2021,
Confirme pour le surplus l’ordonnance de référé du 4 mai 2022 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déclare recevable la demande de provision de la SAS La Comptabilité
Dit n’y avoir lieu à référé sur cette demande,
Déclare recevable la demande de restitution de la somme de 40 400 euros de la SAS La Comptabilité,
Déboute la SAS La Comptabilité de cette prétention,
Condamne la SAS La Comptabilité aux entiers dépens d’appel,
Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS La Comptabilité à verser à Monsieur [R] [U] 3 000 euros pour ses frais de procédure liés à l’appel,
Déboute la SAS La Comptabilité de sa demande de ce chef.
Le Greffier, Le Président,