Cession de droits : 30 mai 2023 Cour d’appel d’Angers RG n° 21/00540

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Cession de droits : 30 mai 2023 Cour d’appel d’Angers RG n° 21/00540
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30 mai 2023
Cour d’appel d’Angers
RG n°
21/00540

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – COMMERCIALE

CC/IM

ARRET N°

AFFAIRE N° RG 21/00540 – N° Portalis DBVP-V-B7F-EZDH

Jugement du 02 Décembre 2020

Tribunal de Commerce d’ANGERS

n° d’inscription au RG de première instance : 2019 00899

ARRET DU 30 MAI 2023

APPELANTS :

Monsieur [E] [U]

né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 5] (37)

[Adresse 8]’

[Localité 3]

S.A.R.L. DU BAUGEOIS représentée par son représentant légal

‘[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentés par Me Thierry BOISNARD de la SELARL LEXCAP, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 13701522

INTIME :

Monsieur [Z] [N]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 6]

[Adresse 9]

[Localité 4]

Représenté par Me Philippe LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, substitué par Me Audrey PAPIN, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 71210131, et Me Laurent LALOUM, avocat plaidant au barreau de BLOIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue publiquement, à l’audience du 07 Mars 2023 à 14 H 00, Mme CORBEL, présidente de chambre ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :

Mme CORBEL, présidente de chambre

Mme ROBVEILLE, conseillère

M. BENMIMOUNE, conseiller

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 30 mai 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

La société (SARL) du Baugeois, constituée suivant acte sous seing privé du 20 novembre 1999, avait pour objet la réalisation de travaux de drainage au profit d’exploitations agricoles et de toute association syndicale ou association foncière agricole. Son capital social était réparti en 408 parts pour M. [L] [U] et 392 parts pour M. [Z] [N], soit 800 parts représentant un capital de 8 000 euros. M. [N] exerçait les fonctions de gérant de cette société.

Par acte de cession, sous seing privé, du 3 janvier 2013, M. [N] a cédé à M. [E] [U], fils de M. [L] [U], les 392 parts qu’il détenait dans la SARL du Baugeois pour une valeur nominale de 10 euros par part, soit moyennant un prix de 3 920 euros, acquitté comptant le jour de la cession, par le cessionnaire au cédant, qui lui en a donné bonne et valable quittance.

Suivant procès-verbal du même 3 janvier 2013, l’assemblée générale extraordinaire a décidé suivant résolutions adoptées à l’unanimité, d’agréer la cession de parts sociales précitée, d’agréer l’entrée d’un nouvel associé à compter dudit jour en la personne de M. [E] [U], d’accepter la démission de ses fonctions de cogérant de M. [N] à compter dudit jour, de nommer M. [E] [U] gérant à compter dudit jour, d’augmenter, à effet du 10 janvier 2013, le capital de 16 000 euros pour le fixer à 24 000 euros par incorporation de réserves conventionnelles à hauteur du même montant, ce par élévation du montant nominal des parts anciennes de 20 euros par part, pour le porter de 10 euros à 30 euros, la répartition des parts sociales entre les associés demeurant inchangées ; d’étendre l’objet social de la société, à compter du 1er janvier 2013, aux activités de prestations de services agricoles et d’entreprise de travaux agricoles, au transport de marchandises et à la location de matériel agricole et de travaux publics avec chauffeur ; de modifier les statuts pour tenir compte de ces différentes résolutions.

Courant 2015, sur demande de M. [N] d’évaluer la SARL du Baugeois sur la base des comptes annuels au 31 octobre 2012, le cabinet Soreco, cabinet d’expertise comptable, au terme d’une analyse non contradictoire, précisant qu’il ne pouvait se livrer à une évaluation précise des parts de la SARL du Baugeois, à défaut de communication de certaines pièces (liste du matériel, outillage et matériel de transport, valeur vénale de ces biens, contrats de crédit-bail et de location, détail des rémunérations des co-gérants), a conclu que la méthode patrimoniale et la méthode basée sur la rentabilité utilisées ‘donnaient des valeurs de société (100% des parts) comprises entre 135 K euros et 180 K euros, soit une valeur de part comprise entre 169 euros et 225 euros la part sociale (pour une valeur nominale de 10 euros par parts sociales)’ ; ‘que les valeurs de part sociale obtenues… sont entre 16 et 22 fois supérieures à la valeur qui a été retenue lors de la cession de parts en date du 3 janvier 2013, celle-ci ayant été réalisée sur la base de la valeur nominale soit 10 euros la part sociale’.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 29 mai 2015, M. [N] a fait part à M. [E] [U] de ce que le prix des 392 parts sociales qu’il lui avait cédées n’était pas réel et sérieux au regard de l’estimation du cabinet Soreco. Il lui a réclamé la transmission des pièces sollicitées par le cabinet Soreco pour effectuer une évaluation précise des parts sociales et précisé qu’à défaut de réponse sous 10 jours, il saisirait le tribunal de grande instance d’Angers afin de déterminer le prix des parts sociales dans le cadre d’une expertise judiciaire.

La démarche amiable de M. [N] n’a pas abouti.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 juin 2015, la SARL du Baugeois et M. [E] [U] ont fait état du fait qu’au 31 décembre 2012, la poursuite de l’activité de la société était compliquée dans un contexte économique global morose, après des licenciements économiques liés à la faiblesse de l’activité, ont observé que les résultats de la société se sont maintenus au prix d’une réduction de la rémunération des gérants, ont soutenu que la cession de parts sociales à M. [E] [U] était l’unique moyen de pérenniser l’activité transport de la société non titulaire d’une licence de transport, d’où l’urgence de procéder à la cession de parts sociales à M. [E] [U] titulaire d’une telle licence. Ils ont ajouté qu’il pouvait être conçu que le prix de cession à la valeur nominale de 10 euros soit un prix plancher, fixé librement par les parties dans l’urgence, et qu’il était convenu avec M. [N] d’équilibrer cet ‘écart’ par compensation avec un ensemble de services et travaux réalisés par la SARL du Baugeois et la SCEA [U] (location de maison, travaux d’aménagement foncier et de bâtiments, épandage de fumier, travaux à façon sur 2 ans, travaux d’irrigation et de fourniture de paille) estimés à un montant global de 71 000 euros. Ils en ont déduit que la cession s’était effectuée dans des conditions plutôt favorables à M. [N].

Par acte d’huissier du 23 septembre 2015, considérant que la réalisation de prétendus travaux ne pouvaient pas avoir d’incidence sur la fixation du prix des parts sociales, la cession intervenue ne concernant que lui-même et M. [E] [U], M. [N] a fait assigner M. [E] [U] et la SARL du Baugeois devant le juge des référés du tribunal de grande instance d’Angers afin d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire pour déterminer la valorisation de ses droits sociaux à la date du 3 janvier 2013.

Par ordonnance de référé du 5 novembre 2015, le président du tribunal de grande instance d’Angers a accueilli cette demande et a désigné M. [S] [V] en qualité d’expert judiciaire.

M. [V] a déposé son rapport définitif le 20 septembre 2016, concluant ainsi :

‘En l’état de nos observations et des pièces reçues, la cession des parts de M. [N] doivent être revalorisées au-delà de leur nominal et l’approche valeur patrimoniale que nous avons faites nous paraît ‘opposable’.

‘Les capitaux propres de la SARL au 31/10/2012 sont de 159 329,39 euros auxquels s’ajoutent les plus-values sur les valeurs du matériel, que nous avons calculées soit : 75 017,90 euros. Soit des droits de chacun des associés répartis comme suit : 159 329,59 euros + 75 017,90 euros = 234 347,29 euros. Soit par part : 292,934 euros. Soit pour M. [N] (392 parts) : 114 830,17 euros. Pour M. [U] (408 parts) : 119 517,11 euros’.

Par acte d’huissier du 14 mars 2017, M. [N] a fait assigner la SARL du Baugeois et M. [E] [U] devant le tribunal de grande instance d’Angers afin de faire constater la nullité de la cession de ses parts sociales.

Le 1er octobre 2017, l’assemblée générale extraordinaire de la société a décidé une augmentation du capital d’une somme de 99 000 euros par la création de 3 300 nouvelles parts de 30 euros chacune.

Dans l’instance engagée, le tribunal de grande instance d’Angers s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce d’Angers.

En l’état de ses dernières écritures devant le tribunal de commerce d’Angers, M. [N] a demandé à la juridiction de prononcer la nullité de la cession de parts sociales intervenue le 3 janvier 2013 entre les parties, dire et juger que le capital social de la SARL du Baugeois sera donc composé de 392 parts pour lui et 408 parts pour M. [L] [U], dire et juger que tous les coûts engendrés par cette décision, notamment ceux de publicité et de rectification des statuts seront à la charge de M. [E] [U], ordonner au gérant de la SARL du Baugeois de convoquer dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement à intervenir une assemblée générale extraordinaire afin de prendre acte de la nouvelle répartition des parts sociales et modifier les statuts, dire et juger que la moins-value éventuelle des parts sociales restituées soit exclusivement imputée à M. [E] [U] lequel lui en devra remboursement.

En réplique, M. [E] [U] et la SARL du Baugeois ont sollicité du tribunal, qu’à titre principal, il déboute M. [N] ; à titre subsidiaire, qu’il ordonne une mesure d’expertise judiciaire aux fins de dire qu’elle pouvait être la valeur économique de la société en janvier 2013 au regard de son secteur d’activité et des réglementations en vigueur, notamment en matière de transport de marchandises et de sa dépendance à l’existence d’homme-clé en son sein.

Par jugement du 2 décembre 2020, le tribunal de commerce d’Angers a :

– dit recevable et fondée sur le fondement de l’article 1591 du code civil outre 1169 nouveau du même code, la demande de M. [N] tendant à voir dire nul l’acte de cession des 392 parts sociales,

– dit probante l’expertise menée par l’expert [V],

– prononcé la nullité de la cession des 392 parts sociales de M. [Z] [N] intervenue le 3 janvier 2013 au profit de M. [E] [U],

– ordonné au gérant actuel de la société de convoquer dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement, une assemblée générale extraordinaire afin qu’il puisse être acté de la nouvelle répartition des parts sociales et dès lors, que les statuts de la société puissent être modifiés afin de respecter tout formalisme imposé par la loi,

– dit que les coûts engendrés par la nouvelle répartition du capital social et de modification des statuts de la société du Baugeois seront à la charge conjointe de M. [E] [U] et de la société du Baugeois,

– dit que M. [E] [U] et la société du Baugeois devront conjointement rembourser à M. [Z] [N], toutes moins-values éventuelles qui pourraient être constatées dans le cadre d’une revente éventuelle future des parts sociales restituées,

– débouté M. [E] [U] et la société du Baugeois de leur demande à titre subsidiaire,

– condamné M. [E] [U] et la société du Baugeois à payer conjointement à M. [Z] [N] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné M. [E] [U] et la société du Baugeois conjointement aux entiers dépens de l’instance y compris les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 119,68 euros outre au paiement des frais générés par l’expertise judiciaire.

Par déclaration du 26 février 2021, M. [E] [U] et la SARL du Baugeois ont relevé appel de ce jugement en attaquant chacune de ses dispositions ; intimant M. [Z] [N].

M. [E] [U] et la SARL du Baugeois, d’une part, M. [N], d’autre part, ont conclu.

Selon ordonnance du 17 novembre 2021, le magistrat chargé de la mise en état de la cour d’appel d’Angers a ordonné une médiation, désignant le Centre Anjou Maine médiation et arbitrage à cette fin.

Par courriel du 28 avril 2022, le médiateur désigné a indiqué au président de la chambre commerciale de la cour d’appel d’Angers que sa mission était terminée, aucun accord n’ayant pu être élaboré entre les parties.

Une ordonnance du 20 février 2023 a clôturé l’instruction de l’affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [E] [U] et la SARL du Baugeois sollicitent de la cour qu’elle :

à titre principal,

– réforme le jugement du tribunal de commerce d’Angers du 2 décembre 2020,

– déboute M. [N] de ses demandes,

subsidiairement,

– dise et juge l’expertise de M. [V] non pertinente et l’écarte des débats,

– dise et juge qu’en tout état de cause, M. [N] ne peut prétendre qu’à des dommages et intérêts symboliques,

en tout état de cause,

– condamne M. [N] à verser à la SARl du Baugeois la somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamne M. [N] aux dépens.

M. [N] demande à la cour de :

– débouter M. [U] et la SARL du Baugeois de toutes leurs demandes,

– confirmer le jugement,

– condamner M. [U] au paiement à son profit d’une indemnité de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [U] aux dépens d’appel lesquels seront recouvrés par Maître Langlois conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

– le 10 février 2023 pour M. [E] [U] et la SARL du Baugeois,

– le 16 février 2023 pour M. [N].

MOTIFS DE LA DECISION

Pour conclure à la réformation du jugement, les appelants ne peuvent utilement se prévaloir de ce que dans ses conclusions devant le tribunal, M. [N] a visé l’article 1169 du code civil dont la nouvelle rédaction issue de l’ordonnance du 10 février 2016 n’est pas applicable à la cession litigieuse conclue antérieurement à son entrée en vigueur, au lieu de l’article 1591 du code civil, alors que dans le corps de ses conclusions, il invoquait les dispositions de ce dernier texte en expliquant que la jurisprudence rendue sur son fondement avait été reprise dans l’article 1169 nouveau du code civil, que le visa dans le dispositif des conclusions n’a pas de valeur spécifique, n’étant pas prévu par les dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, et qu’en appel, M. [N] fonde ses demandes sur l’article 1591 du code civil, ce qui suffit pour que puissent être examinées les prétentions de M. [N] sur le fondement de ce texte applicable au litige.

En application de ce texte, une cession pour un prix dérisoire ou vil est nulle.

Ainsi, si la cession de droits sociaux consentie moyennant un prix inférieur à la valeur des titres ne peut, en principe, pas être annulée à la demande du cédant ou donner lieu à l’attribution en sa faveur d’un complément de prix et que le prix librement consenti et accepté s’impose aux parties en application de l’ancien article 1134 du code civil, comme le rappellent les appelants, il n’en va pas de même en présence d’un prix dérisoire marquant l’absence d’un élément essentiel à la formation du contrat.

Dès lors, le moyen selon lequel le prix de cession des titres de M. [N] a été librement déterminé entre les parties, accepté par M. [N] en toute connaissance de cause en considération des nombreux services qui lui avaient été rendus, ne peut qu’être écarté.

Pour apprécier si le prix est dérisoire, il faut rechercher quel était l’ordre de grandeur de la valeur des parts sociales au jour de la vente.

L’expert judiciaire a retenu une méthode patrimoniale en ajoutant aux capitaux propres de la SARL au 31/10/2012 les plus-values sur les valeurs du matériel, pour obtenir une valeur de 292,934 euros la part.

Les appelants critiquent la méthode purement patrimoniale adoptée par l’expert en faisant valoir qu’elle ne permet pas de refléter le potentiel de la société, ce qui n’apparaît qu’à travers l’excédent brut d’exploitation (EBE), indicateur financier qui permet de déterminer la ressource qu’une entreprise tire régulièrement de son cycle d’exploitation, le plus souvent calculé sur la base du chiffre d’affaires, de la valeur ajoutée ou du résultat net comptable de l’entreprise et, ainsi, refléter le dynamisme de l’activité d’une entreprise. Ils reprochent à l’expert de ne pas avoir pris en compte la valeur de rendement, la capacité d’autofinancement et les perspectives de la société. Ils font valoir que si l’excédent brut d’exploitation avait été au moins partiellement pris en compte par l’expert, la valeur des titres de M. [N] aurait été totalement différente, dans la mesure où l’activité de la société était particulièrement moribonde à la fin de l’année 2012, ce qui aurait dû se refléter dans la valeur des titres.

Mais l’expert a justifié son choix de la méthode patrimoniale par la constatation, non contestée, de l’absence d’exhaustivité, voire de fiabilité de la comptabilité ressortant de ce que, de l’aveu même du dirigeant, des travaux étaient réalisés sans facture et sans trace écrite. De cette constatation, il découle que toute valeur calculée à partir du résultat d’exploitation aurait été faussée, raison pour laquelle l’expert a écarté la valeur de l’entreprise de 51 400 euros calculée par l’expert comptable de la SARL du baugeois sur la base des résultats comptables de la SARL de 2008 à 2012.

A la fin de l’année 2012, les résultats étaient excédentaires de 16 328,80 euros et aucun élément du dossier ne permet de supposer que les perspectives de la société étaient alors obérées.

L’évaluation proposée par l’expert sera donc retenue.

Force est de constater que le prix fixé à la valeur nominale, soit 10 euros par part sociale est dérisoire par rapport à l’évaluation qui en est faite par l’expert.

Certes, une vente à un prix très faible peut être valable lorsqu’il existe une autre contrepartie que le paiement d’une somme d’argent, notamment compte tenu des prestations réciproques des parties.

Dans le cas présent, il est établi que la SARL du Baugeois a versé à M. [N] une somme de 22 867 euros le 31 décembre 2003 pour lui permettre de s’acquitter d’une dette qui lui était personnelle mais ce versement, dix ans avant la cession litigieuse, qui ne provenait pas de M. [E] [U], le cessionnaire des parts, ne saurait être vu comme une contrepartie à la faiblesse du prix de cession des parts sociales.

Il en est de même pour les autres contreparties dont font état les appelants, sans en donner les dates et les montants précis et, surtout, sans prétendre qu’elles auraient été consenties par M. [E] [U]. Etant en outre relevé que, ainsi que le fait observer l’expert judiciaire, rien ne permet d’exclure que l’autre associé, M. [L] [U], n’aurait pas lui-même bénéficié des mêmes avantages en nature, tenant à des travaux réalisés par la SARL du baugeois, soit directement soit au travers de la SCEA qu’il exploitait.

La sanction d’un prix dérisoire est l’annulation du contrat. Il est donc vain pour les appelants de se placer sur le terrain de l’erreur sur la valeur ou du défaut d’équivalence des prestations ou, encore, de soutenir qu’au vu des circonstances de l’espèce, M. [N] ne pourrait tout au plus qu’obtenir l’indemnisation de son préjudice, lequel serait minime.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation de la cession des parts sociales et, corrélativement, a ordonné la convocation d’une assemblée générale extraordinaire afin qu’il puisse être acté de la nouvelle répartition des parts sociales et la modification des statuts de la société en ce sens.

En revanche, le chef du jugement qui a dit que M. [E] [U] et la société du Baugeois devront conjointement rembourser à M. [N] toutes moins-values éventuelles qui pourraient être constatées dans le cadre d’une revente éventuelle future des parts sociales restituées, ne repose pas sur les règles applicables en matière de restitutions qui, seules, peuvent trouver à s’appliquer. Il sera infirmé ce chef.

La cour constate qu’il ne lui est pas demandé de statuer autrement sur les restitutions auxquelles pourraient devoir donner lieu l’annulation de la cession, étant observé qu’en réponse aux appelants qui font valoir, pour s’opposer à la nullité de façon inopérante, qu’il ne pourrait réintégrer le capital de la société dès lors qu’il a été procédé à une augmentation de capital le 1er octobre 2017, ayant pour conséquence qu’il ne détiendrait tout au plus que 392 parts sur les 4100 que compte le capital, M. [N] déclare qu’il lui sera possible d’agir contre la décision d’augmentation de capital une fois rétabli dans ses droits d’associé.

Les appelants, parties perdantes sur l’essentiel du litige, seront condamnés aux dépens d’appel et à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a dit que M. [E] [U] et la société du Baugeois devront conjointement rembourser à M. [Z] [N] toutes moins-values éventuelles qui pourraient être constatées dans le cadre d’une revente éventuelle future des parts sociales restituées ;

Statuant à nouveau,

Rejette cette demande ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [E] [U] et la société du Baugeois aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Condamne in solidum M. [E] [U] et la société du Baugeois à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

S. TAILLEBOIS C. CORBEL

 


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