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7 septembre 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/00392
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 16
N° RG 23/00392 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG4GM
Nature de l’acte de saisine : Autres saisines de la juridiction à la diligence des parties
Date de l’acte de saisine : 16 Décembre 2022
Date de saisine : 09 Janvier 2023
Nature de l’affaire : Demande en exécution d’un accord de conciliation, d’un accord sur une recommandation de médiateur, d’une sentence arbitrale, ou tendant à sanctionner leur inexécution
Décision attaquée : sentence arbitrale rectificative rendue à [Localité 1] le 05 décembre 2022 sous l’égide du Centre de Médiation et d’Arbitrage de [Localité 1] (arbitrage n° 221097 AN)
DEMANDEURS A L’INCIDENT ET AU RECOURS :
– Monsieur [I] [T],
– Monsieur [VA] [T],
– Madame [G] [Z],
– Société HHDU HOLDING représentée par son gérant,
– S.C. THDU HOLDING représentée par son gérant,
– S.C. MCBA HOLDING représentée par sa gérante,
Ayant pour avocat postulant : Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 – N° du dossier 2269822
Ayant pour avocat plaidant : Me Frédéric JEANNIN de la SELAS CHARLES RUSSELL SPEECHLYS FRANCE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0180
DEFENDEURS A L’INCIDENT ET AU RECOURS :
– Monsieur [J] [T],
– Madame [L] [T] épouse [S],
– S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, prise en la personne de maître [V] [U] es-qualité d’administrateur judiciare de la société HD HOLDING avec une mission d’assistance,
– S.E.L.A.R.L. SLEMJ & ASSOCIES Agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, prise en la personne de maître [M] [F] ès-qualité de mandataire judiciare de la société HD HOLDING,
– S.A. HD HOLDING agissant poursuites et diligences en la personne de son directeur général,
Ayant pour avocat postulant : Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 – N° du dossier 41796
Ayant pour avocat plaidant : Me Jean-Luc LASCAR de la SELAS S.OPEJ, avocat au barreau de PARIS, toque : K0029
et :
– Monsieur [W] [T],
Ayant pour avocat postulant : Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 – N° du dossier 2269822
Ayant pour avocat plaidant : Me Sébastien PITOUN de la SELARL SEBASTIEN PITOUN AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1592
ORDONNANCE SUR INCIDENT
DEVANT LE MAGISTRAT CHARGÉ DE LA MISE EN ÉTAT
(non numérotée , 8 pages)
Nous, Fabienne SCHALLER, magistrat en charge de la mise en état,
Assistée de Najma EL FARISSI, greffière,
I/ Rappel de la procédure
La cour est saisie par [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding d’une part (RG n°22/17738 et n°23/00392) et par Monsieur [W] [Y] [O] d’autre part (RG n°22/17813 et RG n°23/00813), de recours en annulation contre une sentence arbitrale au fond (n°221097/AN) rendue à Paris le 30 septembre 2022 sous l’égide du Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris (ci-après « le CMAP »), par le tribunal arbitral composé de M. [C] [H], Mme [P] [D] et M. [B] [BJ], et de recours en annulation contre une sentence arbitrale rectificative en date du 5 décembre 2022 qui annule et remplace la sentence arbitrale du 30 septembre 2022 (même référence n°221097/AN).
Le différend à l’origine de ces sentences porte sur un protocole d’accord signé le 15 janvier 2009 (ci-après « le protocole ») entre les associés d’un groupe familial de sociétés, le groupe Etablissements Moncassin, constitué à l’origine par les époux [N] et [E] [Y] [O], tous deux décédés depuis, et leurs six enfants, les membres de la famille ne s’entendant plus et ne souhaitant pas demeurer associés ni rester dans l’indivision, les parties ayant par ce protocole décidé de prévoir les termes d’une séparation définitive et irrévocable entre elles, et mettre fin à leurs rapports.
Les parties ont été réparties dans le protocole en trois groupes :
– Le premier, dénommé groupe A, composé de [J] [Y] [O], [W] [Y] [O] et [L] [S] ;
– Le second, dénommé groupe B, composé de [VA] [Y] [O] et [I] [Y] [O] ;
– Le troisième, dénommé groupe C, composé de [G] [Z].
Le protocole prévoyait en son article 1er un certain nombre de cessions qui devaient intervenir à effet au 15 janvier 2009 et en son article 2 des promesses de cessions sous condition suspensive de l’obtention d’un ou plusieurs prêts. L’article 3 du protocole prévoyait que faute d’obtention d’un financement, des échanges de biens interviendraient, moyennant paiement d’une soulte correspondant à la différence de valeur des biens échangés, dont les modalités étaient précisées dans le protocole.
Ce protocole contenait une clause compromissoire désignant le CMAP.
L’application du protocole a engendré des difficultés qui ont conduit à la saisine du CMAP.
Une procédure arbitrale a été engagée. Une première sentence arbitrale a été rendue par le tribunal arbitral le 16 octobre 2014, qui a retenu la valeur du prix de cession des titres sur la base du rapport des tiers évaluateurs et dit que les cessions devaient être réalisées conformément aux stipulations de l’article 2 du protocole. Cette sentence a fait l’objet d’un recours en annulation qui a été rejeté par la cour d’appel de Paris le 22 novembre 2016, qui a conféré l’exequatur à la sentence. La Cour de cassation saisie d’un pourvoi contre cette décision, a rejeté ledit pourvoi par un arrêt en date du 28 février 2018.
Estimant que les cessions ordonnées par la sentence du 16 octobre 2014 n’avaient pas été exécutées et étaient résolues pour inexécution, [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding, ont introduit une nouvelle demande en arbitrage devant le CMAP le 13 mars 2017 sollicitant la résolution des cessions. Ils ont refusé de participer à une réunion le 3 mai 2017 au cours de laquelle a été versée sur le compte CARPA une somme de 13.039.942,17 € correspondant, selon M. [J] [Y] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding, à 80% du prix de cession des actions détenues par les cédants.
Cette deuxième procédure arbitrale a donné lieu à une sentence arbitrale partielle du 10 septembre 2018 et une sentence arbitrale finale du 6 septembre 2019 par laquelle le tribunal arbitral a en substance constaté que la cession des titres n’était pas intervenue, rejeté la demande de résolution des cessions et a ordonné la cession des titres conformément aux articles 2.1 et 2.3 du protocole au profit de l’intégralité des membres du groupe A, et ce moyennant le paiement de la somme de 13.873.147,87 € correspondant à 80% du prix, complété par un crédit vendeur. Un recours en annulation a été formé contre ces sentences, ce recours étant toujours pendant devant la cour d’appel de Versailles, après cassation le 1er février 2023 de l’arrêt d’annulation rendu par la cour d’appel de Paris le 23 novembre 2021.
Parallèlement, en l’absence d’accord entre les parties et compte tenu de l’échec d’une médiation, M. [J] [Y] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding et ses mandataires ont notifié à [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding avoir consigné diverses sommes en paiement des cessions. Ces consignations et leur valeur d’offre réelle sont contestées tant par ces derniers que par [W] [Y] [O].
Une troisième procédure arbitrale a été initiée devant le CMAP le 30 avril 2021 par M. [J] [Y] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding et ses mandataires, qui a donné lieu au prononcé des deux sentences dont la cour est aujourd’hui saisie des recours en annulation, celle du 30 septembre 2022 et celle du 5 décembre 2022 annulant et remplaçant celle du 30 septembre 2022.
Par ces sentences, le tribunal arbitral a rejeté la demande de sursis à statuer en attendant la décision de la cour de cassation et a jugé que la cession des titres était parfaite à la date de notification de la sentence du 16 octobre 2014, jugeant que la condition suspensive avait été levée dans le délai prévu, rejeté la demande d’entrée en jouissance de la cession des titres au 1er janvier 2009 et jugé que M. [A] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding et ses mandataires (demandeurs 1 à la sentence) et [W] [Y] [O] (défendeur 2 à la sentence) sont devenus propriétaires des titres et a constaté que la consignation effectuée de 80% du prix des cessions soit un montant de 13.873.147,87 € auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations était valable et valait paiement, outre que pour les 20% restant dus sur le prix des cessions, soit un montant de 3.466.287 €, le bénéfice d’un crédit vendeur était ordonné.
C’est dans le cadre de la mise en état de ces instances en annulation de ces sentences, que le conseiller de la mise en état a été saisi de demandes de jonction des instances et de suspension de l’exécution provisoire de ces sentences.
II/ Prétentions des parties
Vu les dernières conclusions d’incident devant le CME notifiées le 5 juin 2023 par Mme [G] [X], M. [I] [Y] [O], M. [VA] [Y] [O], la société MCBA Holding, la société HHDU Holding et la société THDU Holding, demandeurs aux incidents et demandeurs aux recours, dans le cadre des instances introduites sous les numéros de RG 22/17738 et RG 23/00392 par lesquelles ils demandent au conseiller de la mise en état, au visa de l’article 1497 du code de procédure civile, de bien vouloir :
Sur la jonction, d’une part
– Prononcer la jonction des quatre instances introduites aux fins de recours en annulation des sentences arbitrales rendues les 30 septembre 2022 et 5 décembre 2022, à savoir :
‘ l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence du 30 septembre 2022 initiée par les Demandeurs (RG 22/17738)
‘ l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence du 30 septembre 2022 initiée par [W] [Y] [O] (RG 22/17813)
‘ l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence rectificative du 5 décembre 2022 initiée par les Demandeurs (RG 23/00392)
‘ l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence rectificative du 5 décembre 2022 initiée par [W] [Y] [O] (RG 23/00813)
Sur l’arrêt de l’exécution provisoire, d’autre part
– Arrêter l’exécution provisoire de la sentence arbitrale du 5 décembre 2022 annulant et remplaçant la sentence arbitrale du 30 septembre 2022 ;
– Arrêter en tant que de besoin l’exécution provisoire de la sentence arbitrale du 30 septembre 2022 annulée et remplacée par la sentence arbitrale du 5 décembre 2022 ;
Réserver les dépens.
Vu les conclusions en réponse à l’incident, notifiées dans le cadre de l’instance introduite sous le numéro de RG 23/00392 par voie électronique le 16 mai 2023, par lesquelles Monsieur [W] [Y] [O] demande au conseiller de la mise en état, de :
– RECEVOIR le Concluant en ses moyens et prétentions et les déclarer bien fondés ;
– PRENDRE ACTE de ce que [W] [T] s’en rapporte à justice concernant les arguments développés par Monsieur [I] [T], Monsieur [VA] [T], Madame [G] [Z], la SC HHDU HOLDING, la SC THDU HOLDING et la SC MCBA HOLDING tendant à l’arrêt de l’exécution provisoire attachée à la sentence finale du Tribunal arbitral du 5 décembre 2022, annulant et remplaçant celle du 30 septembre 2022 rendue par le Tribunal Arbitral composé de Monsieur [C] [H], président, Madame [P] [D] et Monsieur [BJ], co-arbitres ;
– CONSTATER les conséquences manifestement excessives qu’engendrerait l’exécution de la sentence finale du Tribunal arbitral du 5 décembre 2022, annulant et remplaçant celle du 30 septembre 2022 en raison de la violation de l’autorité de la chose jugée attachée à la sentence du 6 septembre 2019 ;
– CONSTATER les conséquences manifestement excessives qu’engendrerait l’exécution de la sentence finale du Tribunal arbitral du 5 décembre 2022, annulant et remplaçant celle du 30 septembre 2022 en raison de la violation des droits d’actionnaires de [W] [T], qu’il s’agisse de ses droits de votes ou de ses droits aux dividendes ;
– ORDONNER l’arrêt de l’exécution provisoire attachée à la sentence finale du Tribunal arbitral du 5 décembre 2022, annulant et remplaçant celle du 30 septembre 2022 rendue par le Tribunal Arbitral composé de Monsieur [C] [H], président, Madame [P] [D] et Monsieur [BJ], co-arbitres ;
– DEBOUTER les intimés [J] [T], [L] [S] et la SA HD HOLDING de toutes demandes plus amples ou contraires ;
– CONDAMNER Monsieur [J] [T], Madame [L] [S] et la Société HD HOLDING à la somme de 40 000 € chacun au titre des frais de l’article 700 du code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions de M. [J] [Y] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associé et la SELARL SLEMJ & Associés, défendeurs sur incident notifiées par voie électronique le 9 juin 2023 dans les instances RG 22/17738 et 23/00392, par lesquelles ils demandent au conseiller de la mise en état, au visa des articles 31, 1497, 696 et 700 du code de procédure civile, de bien vouloir :
– DECLARER les Demandeurs à l’incident irrecevables en leur demande en arrêt de l’exécution provisoire de la sentence
Subsidiairement, à défaut,
– REJETER la demande d’arrêt de l’exécution provisoire attachée à la sentence;
– DEBOUTER Messieurs [VA], [I] et [W] [Y] [O], Madame [G] [Z] et les sociétés HHDU Holding, THDU Holding et MCBA Holding de leurs demandes, fins et conclusions;
– REJETER la demande de jonction des recours formés par [W] [Y] ‘[O] avec ceux formés par Madame [G] [Z] et les sociétés HHDU Holding, THDU Holding et MCBA Holding;
Vu les articles 696, 700 du code de procédure civile,
– CONDAMNER solidairement Messieurs [VA], [I] et [W] [Y] [O], Madame [G] [Z] et les sociétés HHDU Holding, THDU Holding et MCBA Holding à verser les sommes de10.000 € à [J] [Y] [O], de 10.000 € à [L] [S] et de 10.000 € à HD Holding en application de l’article 700 du CPC et aux dépens de l’incident.
III/ Motifs de la décision
1) Sur la demande de jonction
Selon l’article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.
Il résulte de l’article 368 du même code qu’une telle décision est une mesure d’administration judiciaire.
Il apparait en l’espèce que la cour est saisie de plusieurs instances entre les mêmes parties portant sur le même différend à l’origine du litige :
(i) (RG 22/17738) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence du 30 septembre 2022, à la demande de [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et mettant en cause [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés ainsi que [W] [Y] [O],
(ii) (RG 22/17813) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence du 30 septembre 2022, à la demande de [W] [Y] [O] et mettant en cause [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés
(iii) (RG 23/00813) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence rectificative du 5 décembre 2022 à la demande de [W] [Y] [O] et mettant en cause [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés, et
(iv) (RG 23/00392) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence rectificative du 5 décembre 2022, à la demande de [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et mettant en cause [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés ainsi que [W] [Y] [O].
La sentence du 5 décembre 2022 attaquée, ayant annulé et remplacé la sentence du 30 septembre 2022, et toutes deux étant soumises à recours par les mêmes parties, il apparaît d’une bonne administration de la justice d’instruire ces instances ensemble.
Il apparaît en outre que les demandes des recourants dans les quatre instances aux fins de suspension de l’exécution provisoire concernent à la fois la sentence du 30 septembre 2022 et celle du 5 décembre 2022. Le fait qu’il y ait plusieurs parties au recours en annulation ne partageant pas les mêmes intérêts et que les moyens soulevés diffèrent selon les recourants est sans effet sur la demande de jonction.
En conséquence, il y a lieu de prononcer la jonction des quatre instances dans les termes du dispositif ci-après.
2) Sur la demande de suspension de l’exécution provisoire
[G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding, demandeurs à la suspension de l’exécution provisoire soutiennent que :
– Ils ont un intérêt à agir aux fins de suspension de l’exécution provisoire dès lors qu’ils contestent les cessions ordonnées par la sentence dont ils poursuivent l’annulation, peu important qu’ils demandent au fond la réalisation des cessions sur d’autres bases,
– Les conséquences manifestement excessives sont établies dès lors qu’un préjudice irréparable ou une situation irréversible interviendrait en cas d’infirmation,
– La sentence objet du recours en annulation, assortie de l’exécution provisoire est manifestement contraire à une précédente sentence rendue le 6 septembre 2019 entre les mêmes parties, et portant sur les mêmes prétentions,
– Il en résulte une contrariété de jugements contraire à l’ordre public qui entrainera l’annulation de la sentence par la Cour d’appel de Paris.
Monsieur [W] [Y] [O], recourant contre les sentences et agissant individuellement comme demandeur à la suspension de l’exécution provisoire, soutient que :
– l’exécution de la sentence violerait l’autorité de la chose jugée attachée à la sentence précédente du 6 septembre 2019, que
– l’exécution de la sentence violerait ses droits d’actionnaire, qu’il s’agisse de ses droits de vote ou de ses droits aux dividendes, et
– qu’il serait privé de la somme de 2.522.081,88 €, qui profiterait directement à HD Holding puisqu’elle s’en est servi pour consigner les 80 % du prix de cession exigible à la date de réalisation des cessions. Cela l’obligerait en outre à refinancer l’intégralité des 4.624.382,60 € dus par chacun des membres du groupe A au titre des 80 % du prix de cession alors que 2.522.081,88 € lui appartenant sont consignés à la Caisse des dépôts et onsignations (« CDC »).
M. [A] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés, défendeurs au recours et défendeurs à la demande de suspension de l’exécution provisoire, soutiennent que les demandeurs sont irrecevables faute de justifier d’un intérêt légitime à agir, et font valoir que les conséquences manifestement excessives invoquées sont en réalité des griefs d’annulation.
Ils s’opposent à la demande de suspension de l’exécution provisoire au motif que les demandeurs à l’incident ne justifient d’aucune conséquence manifestement excessive qui serait rattachée aux cessions, et qu’en ce qui concerne le prix, ils ont consigné le montant exact du prix payable au comptant dans l’acte de cession, en 2020, auprès de la Caisse des dépôts et consignations dans son intégralité ‘ 13.873.147,87 euros – sur un compte ouvert au profit des demandeurs qui se refusent à le réclamer, alors que cela vaut paiement, ce qui garantit en tout état de cause tout risque de non restitution.
Sur ce,
– Sur la recevabilité de la demande de suspension de l’exécution provisoire
Il résulte de l’article 31 du code de procédure civile que :
« L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »
Il est constant que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action.
S’agissant en l’espèce d’une demande de suspension de l’exécution provisoire d’une sentence ayant jugé parfaite une cession de titres et considéré comme valable et valant paiement une somme consignée à la CDC, l’intérêt à agir des cessionnaires, même si la cession et le paiement sont intervenus par l’effet de la sentence et sont contestés, est suffisamment établi dès lors que la sentence attaquée place les recourants en situation d’exécution immédiate de la sentence alors qu’ils ont formé un recours en annulation, ce qui justifie de leur intérêt à agir.
– Sur le bien-fondé de la demande de suspension de l’exécution provisoire
L’article 1497 du code de procédure civile dispose en matière d’arbitrage interne que :
« Le premier président statuant en référé ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut :
1° Lorsque la sentence est assortie de l’exécution provisoire, arrêter ou aménager son exécution lorsqu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives (‘) »
En application de l’article 1497 susrappelé, le bénéfice de l’arrêt ou de l’aménagement de l’exécution de la sentence – qui ne peut dépendre du caractère sérieux du recours en annulation – est subordonné à une appréciation in concreto d’un risque de conséquences manifestement excessives que l’exécution de la sentence est susceptible de générer, de sorte que ce risque doit être, au jour où le juge statue, suffisamment caractérisé.
En l’espèce, le fait que [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding, et Monsieur [W] [Y] [O] invoquent l’autorité de chose jugée et une contrariété des sentences au fond est inopérant pour fonder la demande de suspension formulée, seule la justification de conséquences manifestement excessives de l’exécution provisoire permettant d’en ordonner la suspension, et non le caractère justifié ou non du recours en annulation.
S’agissant des conséquences manifestement excessives liées au risque de dépossession et de non-restitution, il n’est pas établi par les demandeurs à la suspension en quoi consisterait ce risque, alors que les sommes valant paiement ont été consignées à la Caisse des dépôts et consignations et que les cessions de titres entrainant cession de droits relèvent de la décision au fond et n’ont aucun caractère irréversible justifié, et que le seul risque de non-reversement de dividendes, dont le quantum n’est pas établi, n’est pas suffisant pour constituer des conséquences manifestement excessives au sens du texte susvisé.
Selon l’article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.
Il résulte de l’article 368 du même code qu’une telle décision est une mesure d’administration judiciaire.
Il apparait en l’espèce que la cour est saisie de plusieurs instances entre les mêmes parties portant sur le même différend à l’origine du litige :
(i) (RG 22/17738) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence du 30 septembre 2022, à la demande de [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et mettant en cause [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés ainsi que [W] [Y] [O],
(ii) (RG 22/17813) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence du 30 septembre 2022, à la demande de [W] [Y] [O] et mettant en cause [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés
(iii) (RG 23/00813) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence rectificative du 5 décembre 2022 à la demande de [W] [Y] [O] et mettant en cause [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés, et
(iv) (RG 23/00392) l’instance aux fins de recours en annulation de la sentence rectificative du 5 décembre 2022, à la demande de [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding et mettant en cause [J] [Y] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés ainsi que [W] [Y] [O].
La sentence du 5 décembre 2022 attaquée, ayant annulé et remplacé la sentence du 30 septembre 2022, et toutes deux étant soumises à recours par les mêmes parties, il apparaît d’une bonne administration de la justice d’instruire ces instances ensemble.
Il apparaît en outre que les demandes des recourants dans les quatre instances aux fins de suspension de l’exécution provisoire concernent à la fois la sentence du 30 septembre 2022 et celle du 5 décembre 2022. Le fait qu’il y ait plusieurs parties au recours en annulation ne partageant pas les mêmes intérêts et que les moyens soulevés diffèrent selon les recourants est sans effet sur la demande de jonction.
En conséquence, il y a lieu de prononcer la jonction des quatre instances dans les termes du dispositif ci-après.
2) Sur la demande de suspension de l’exécution provisoire
[G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding, demandeurs à la suspension de l’exécution provisoire soutiennent que :
– Ils ont un intérêt à agir aux fins de suspension de l’exécution provisoire dès lors qu’ils contestent les cessions ordonnées par la sentence dont ils poursuivent l’annulation, peu important qu’ils demandent au fond la réalisation des cessions sur d’autres bases,
– Les conséquences manifestement excessives sont établies dès lors qu’un préjudice irréparable ou une situation irréversible interviendrait en cas d’infirmation,
– La sentence objet du recours en annulation, assortie de l’exécution provisoire est manifestement contraire à une précédente sentence rendue le 6 septembre 2019 entre les mêmes parties, et portant sur les mêmes prétentions,
– Il en résulte une contrariété de jugements contraire à l’ordre public qui entrainera l’annulation de la sentence par la Cour d’appel de Paris.
Monsieur [W] [Y] [O], recourant contre les sentences et agissant individuellement comme demandeur à la suspension de l’exécution provisoire, soutient que :
– l’exécution de la sentence violerait l’autorité de la chose jugée attachée à la sentence précédente du 6 septembre 2019, que
– l’exécution de la sentence violerait ses droits d’actionnaire, qu’il s’agisse de ses droits de vote ou de ses droits aux dividendes, et
– qu’il serait privé de la somme de 2.522.081,88 €, qui profiterait directement à HD Holding puisqu’elle s’en est servi pour consigner les 80 % du prix de cession exigible à la date de réalisation des cessions. Cela l’obligerait en outre à refinancer l’intégralité des 4.624.382,60 € dus par chacun des membres du groupe A au titre des 80 % du prix de cession alors que 2.522.081,88 € lui appartenant sont consignés à la Caisse des dépôts et onsignations (« CDC »).
M. [A] [O], Mme [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés, défendeurs au recours et défendeurs à la demande de suspension de l’exécution provisoire, soutiennent que les demandeurs sont irrecevables faute de justifier d’un intérêt légitime à agir, et font valoir que les conséquences manifestement excessives invoquées sont en réalité des griefs d’annulation.
Ils s’opposent à la demande de suspension de l’exécution provisoire au motif que les demandeurs à l’incident ne justifient d’aucune conséquence manifestement excessive qui serait rattachée aux cessions, et qu’en ce qui concerne le prix, ils ont consigné le montant exact du prix payable au comptant dans l’acte de cession, en 2020, auprès de la Caisse des dépôts et consignations dans son intégralité ‘ 13.873.147,87 euros – sur un compte ouvert au profit des demandeurs qui se refusent à le réclamer, alors que cela vaut paiement, ce qui garantit en tout état de cause tout risque de non restitution.
Sur ce,
– Sur la recevabilité de la demande de suspension de l’exécution provisoire
Il résulte de l’article 31 du code de procédure civile que :
« L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »
Il est constant que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action.
S’agissant en l’espèce d’une demande de suspension de l’exécution provisoire d’une sentence ayant jugé parfaite une cession de titres et considéré comme valable et valant paiement une somme consignée à la CDC, l’intérêt à agir des cessionnaires, même si la cession et le paiement sont intervenus par l’effet de la sentence et sont contestés, est suffisamment établi dès lors que la sentence attaquée place les recourants en situation d’exécution immédiate de la sentence alors qu’ils ont formé un recours en annulation, ce qui justifie de leur intérêt à agir.
– Sur le bien-fondé de la demande de suspension de l’exécution provisoire
L’article 1497 du code de procédure civile dispose en matière d’arbitrage interne que :
« Le premier président statuant en référé ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut :
1° Lorsque la sentence est assortie de l’exécution provisoire, arrêter ou aménager son exécution lorsqu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives (‘) »
En application de l’article 1497 susrappelé, le bénéfice de l’arrêt ou de l’aménagement de l’exécution de la sentence – qui ne peut dépendre du caractère sérieux du recours en annulation – est subordonné à une appréciation in concreto d’un risque de conséquences manifestement excessives que l’exécution de la sentence est susceptible de générer, de sorte que ce risque doit être, au jour où le juge statue, suffisamment caractérisé.
En l’espèce, le fait que [G] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding, et Monsieur [W] [Y] [O] invoquent l’autorité de chose jugée et une contrariété des sentences au fond est inopérant pour fonder la demande de suspension formulée, seule la justification de conséquences manifestement excessives de l’exécution provisoire permettant d’en ordonner la suspension, et non le caractère justifié ou non du recours en annulation.
S’agissant des conséquences manifestement excessives liées au risque de dépossession et de non-restitution, il n’est pas établi par les demandeurs à la suspension en quoi consisterait ce risque, alors que les sommes valant paiement ont été consignées à la Caisse des dépôts et consignations et que les cessions de titres entrainant cession de droits relèvent de la décision au fond et n’ont aucun caractère irréversible justifié, et que le seul risque de non-reversement de dividendes, dont le quantum n’est pas établi, n’est pas suffisant pour constituer des conséquences manifestement excessives au sens du texte susvisé.
Le fait que la société HD Holding ait été placée sous sauvegarde de justice est également inopérant au regard de la demande de suspension formulée, les sommes consignées à la caisse des dépôts et consignations valant paiement aux bénéficiaires, selon la sentence, et n’étant dès lors soumises à aucun risque rattaché à la société HD Holding.
Enfin, il n’est pas établi que les conséquences sociales ou fiscales invoquées soient excessives, ni qu’elles soient directement rattachées à l’exécution des sentences litigieuses, alors qu’elles résultent d’un litige très ancien, dont la première décision mise à exécution date de 2014, ce qui ne peut justifier une demande de suspension dans la présente instance.
Il y a lieu par conséquent de rejeter les demandes de suspension de l’exécution provisoire formulées par les différents demandeurs à l’incident.
Il y a lieu de les condamner in solidum aux dépens de la présente instance ainsi qu’au versement aux défendeurs à l’incident d’une somme totale de 10.000 euros, soit 2.500 euros par instance.
PAR CES MOTIFS
Ordonnons la jonction des instances enregistrées sous les n° RG 23/00392, RG n° 22/17813 et RG n° 23/00813 avec l’instance ayant le numéro le plus ancien, à savoir avec l’instance n° RG 22/17738,
Déclarons les demandes de suspension de l’exécution provisoire recevables,
Les rejetons,
Condamnons les demandeurs à l’incident, d’une part (i) [K] [R] [O] [Z], [I] [Y] [O], [VA] [Y] [O], MCBA Holding, HHDU Holding et THDU Holding, d’autre part (ii) [W] [Y] [O], in solidum, aux dépens de la présente instance ainsi qu’à payer aux défendeurs ([A] [O], [L] [O], la société HD Holding, la SELARL AJ Associés et la SELARL SLEMJ & Associés), une somme totale de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, soit 2.500 euros par instance.
Ordonnance rendue par Mme Fabienne SCHALLER, magistrat en charge de la mise en état assistée de Mme Najma EL FARISSI, greffière présente lors du prononcé de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Paris, le 07 Septembre 2023
La greffière, Le magistrat en charge de la mise en état,
Copie au dossier
Copie aux avocats