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18 mars 2016
Cour de cassation
Pourvoi n°
15-14.773
SOC.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 mars 2016
Rejet non spécialement motivé
M. MALLARD, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Décision n° 10252 F
Pourvoi n° T 15-14.773
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Techniques agricoles Centre-Alsace, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
contre l’arrêt rendu le 15 janvier 2015 par la cour d’appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l’opposant à M. [M] [O], domicilié [Adresse 1],
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 9 février 2016, où étaient présents : M. Mallard, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Alt, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vallée, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Techniques agricoles Centre-Alsace, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. [O] ;
Sur le rapport de M. Alt, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Techniques agricoles Centre-Alsace aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. [O] ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille seize.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Techniques agricoles Centre-Alsace.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR annulé l’avertissement délivré à M. [O] le 20 octobre 2011 ;
AUX MOTIFS QU’il est essentiellement reproché en date du 20 octobre 2011 à M. [O] la vente d’un tracteur avec une marge de 6,57 % au lieu du minimum de 10 % exigé et de n’avoir pas établi de fiche de reprise détaillée du tracteur avec indication des frais de port ; qu’il ressort du compte-rendu de la réunion du 24 octobre 2011 qu’il a été décidé d’une marge de 10 % minimum sur les affaires et de la nécessité de consulter M. [P] au-dessous de celle-ci et rien ne permet de déduire de cette note qu’il s’agissait d’un rappel ; qu’il convient d’en conclure qu’il ne pouvait être reproché à M. [O] un non-respect de la marge minimale à l’occasion d’une vente intervenue nécessairement avant la réunion du 24 octobre 2011 ; que s’agissant par ailleurs du non-respect des procédures internes résultant de la note de service du 13 octobre 2011, faute de connaître la date exacte de la vente litigieuse, il n’est pas justifié du caractère fondé de l’avertissement ainsi délivré ;
ALORS QUE dans ses conclusions d’appel reprises oralement, la société TACA faisait valoir que M. [O] avait été informé des règles qu’il avait méconnues, le jugement, dont elle demandait la confirmation, rappelant à cet égard le courriel du 23 mai 2011 adressé à M. [O] lui donnant pour consigne, en cas réduction de la marge en dessous de 10%, d’obtenir l’accord de M. [P] ou de M. [T] ; qu’en affirmant qu’il n’était pas établi que cette consigne avait été énoncée avant la réunion du 24 octobre 2011 sans s’expliquer sur le document susvisé, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences légales de motivation et a ainsi violé l’article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR annulé l’avertissement délivré à M. [O] le 7 décembre 2011 ;
AUX MOTIFS QU’il est reproché à Monsieur [O] d’avoir refusé de participer à la manifestation des labours organisés par l’entreprise un samedi et un dimanche contraignant ainsi la société à annuler celle-ci ; que l’employeur se fonde notamment sur l’article 6 du contrat de travail qui prévoyait que le salarié « devra participer (…) à toutes les manifestations commerciales, salons, foires, expositions et ce quels que soient leurs dates et lieux géographiques. Aucune rémunération particulière n’étant allouée pour la participation à ces manifestations » ; que Monsieur [O] qui a contesté cet avertissement a notamment souligné qu’il n’entendait plus travailler le dimanche sans compensation financière ou en repos ; que tout salarié a droit à un repos hebdomadaire d’une durée minimale de 24 heures consécutives donnée le dimanche sauf dérogation soit légale soit conventionnelle soit négociée en entreprise moyennant contrepartie ; qu’il n’est justifié en l’espèce d’aucun accord collectif, ni de négociation dans l’entreprise qui ne fait pas partie des entreprises bénéficiant d’une dérogation de droit ; que par conséquent le refus de Monsieur [O] de travailler un dimanche sans aucune contrepartie ne peut être considéré comme fautif ;
ALORS QUE les conditions particulières dans lesquelles le VRP est appelé à travailler excluent l’application de la réglementation sur la durée du travail ;
qu’en retenant que le salarié VRP pouvait conditionner l’exercice d’une prestation de travail le dimanche à une compensation financière ou en repos, la cour d’appel a violé l’article L. 7311-3 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR jugé que le licenciement de M. [O] était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur [O] a été licencié par courrier en date du 2 février 2012 pour faute grave, les griefs retenus étant les suivants : un refus de remettre à la société les documents permettant un suivi de son activité commerciale et la remise d’un rapport d’activité falsifié ; qu’il convient de reprendre les griefs reprochés à Monsieur [O] afin d’en vérifier tant la réalité que la gravité ; que sur le grief de refus de remettre à la société les documents permettant un suivi de son activité commerciale, il est acquis aux débats que la société TACA issue de la fusion de l’ancienne entreprise DIEBOLT-HALLER avec une filiale de coopérative allemande a connu un nouveau Directeur général à compter de septembre 2011 qui a mis en place de nouvelles méthodes managériales ; qu’il est justifié d’une note de service datée du 13 octobre 2011 imposant ainsi aux commerciaux de nouvelles règles formelles à suivre telles que le tenue d’un rapport hebdomadaire de visites, l’établissement immédiat des devis simples et l’enregistrement des devis écrits dans le système d’exploitation TACA ainsi que la classification des clients par groupe et catégories de culture ; qu’il ressort de la lettre de licenciement qu’il est reproché à Monsieur [O] de n’avoir pas établi de tels rapports de visite circonstanciés de mars 2011 à décembre 2011 alors que l’employeur se fonde dans ses écritures avant tout sur la note d’octobre 2011 ; qu’il ne peut donc être formellement reproché une absence de rapport antérieure à cette date étant observé que Monsieur [O] qui avait fait l’objet d’un avertissement sur ce point en date du 14 novembre 2011, qu’il avait contesté par courrier daté du 26 novembre 2011, justifie par le témoignage de Monsieur [T], ancien directeur général de la société TACA, avoir été anciennement dispensé de l’établissement de tels rapports prévus par ailleurs au contrat en raison d’une surcharge de travail ; qu’il est par ailleurs reproché à Monsieur [O] de ne pas avoir procédé à la classification de ses clients malgré l’avertissement du 14 novembre 2011 précité ; que s’il a reconnu ne pas s’être exécuté sur ce point il invoque là aussi un manque de temps depuis le 13 octobre 2011 ; que force est d’admettre dans ces conditions que le changement de directive concernant ces rapports et cette exigence de classification des clients datant du 13 octobre 2011 étaient trop récents pour caractériser un comportement fautif de Monsieur [O] dont il n’a pas été démenti qu’il était par ailleurs un des meilleurs commerciaux ; qu’il convient d’en déduire que ce grief n’empêchait la poursuite du contrat de travail ; que sur le grief de remise d’un rapport d’activité falsifié, il est reproché à Monsieur [O] la remise d’un « pseudo rapport » de visite pour la période du 5 au 9 décembre 2011 faisant apparaître une visite à propos d’une charrue auprès du client [Z] à [Localité 1], lequel témoignera par la suite que Monsieur [O] n’est jamais passé dans son entreprise pour vendre ou établir un devis pour une charrue ; qu’il résulte de l’examen de la fiche annotée par Monsieur [O] datée du 6 décembre 2011 concernant le client [Z] mentionnant la charrue, qu’il n’est pas fait état d’une visite physique dudit client qu’il affirme toutefois avoir eu au téléphone à ce sujet ; que cette affirmation n’apparaît pas totalement contradictoire avec l’attestation de Monsieur [Z] qui s’est contenté d’affirmer qu’il n’a pas eu de contact avec ce dernier pour effectuer une transaction commerciale pour cet outil ; que la fiche précitée qui ne peut valoir rapport de visite ne peut par conséquent être considérée comme un rapport falsifié ; qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le licenciement de Monsieur [O] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
1/ ALORS, en premier lieu, QUE saisi d’une contestation relative au bien-fondé d’une mesure de licenciement, le juge est tenu d’examiner l’ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige ; que dans la lettre de licenciement, l’employeur reprochait au salarié d’avoir refusé de communiquer, en dépit de demandes réitérées, les devis établis dans le cadre de ses visites ; qu’en n’examinant pas ce grief, la cour d’appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
2/ ALORS, en deuxième lieu, QUE constitue une faute grave le refus délibéré du salarié de se conformer aux directives de l’employeur ; qu’en retenant que n’était pas constitutif d’une faute grave le refus du salarié, dont l’activité de VRP s’exerçait à l’extérieur de l’entreprise, d’établir des rapports hebdomadaires rendant compte de ses visites et une classification des clients, en dépit des consignes claires de l’employeur et d’un rappel à ses obligations de la part de ce dernier, la cour d’appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-1 du code du travail ;
3/ ALORS, en troisième lieu, QU’en affirmant péremptoirement que le salarié ne disposait pas du temps nécessaire pour procéder à la classification des clients demandée par l’employeur sans justifier son affirmation, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société TACA à payer à M. [O] la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur [O] fait valoir qu’il a fait l’objet de trois avertissements intervenus dans un contexte de reprise en mains de la société et de fixation d’objectifs irréalistes, sans fondement et de façon répétée et précipitée ce qui a eu pour conséquence de faire pression sur lui, qu’il a vécu comme des faits de harcèlement après 33 ans d’ancienneté dans l’entreprise sans aucune procédure disciplinaire antérieure et qui ont entrainé des arrêts de travail pour maladie ; qu’il établit ainsi l’existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre ; que l’employeur fait valoir en réplique que les avertissements étaient justifiés par les manquements de Monsieur [O] qui n’ont cependant pas été admis comme tels puisque ceux-ci ont été annulés ; qu’il doit en être déduit que l’employeur échoue ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par Monsieur [O] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
1/ ALORS, d’une part, QUE la cassation à venir sur le premier et/ou le deuxième moyen de cassation emportera l’annulation des dispositions critiquées par le quatrième moyen de cassation, en application de l’article 624 du code de procédure civile, dès lors que la cour d’appel s’est déterminée, pour retenir l’existence d’un harcèlement moral, en considération de l’annulation des avertissements prononcés à l’égard du salarié ;
2/ ALORS, d’autre part et en toute hypothèse, QUE l’annulation d’avertissements prononcés à l’égard d’un salarié ne caractérise pas l’existence d’un harcèlement moral ; qu’en retenant que l’annulation des avertissements invoqués par le salarié établissait que les agissements de l’employeur n’étaient pas justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.