Non-respect des procédures internes : 21 octobre 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-14.754
Non-respect des procédures internes : 21 octobre 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-14.754
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21 octobre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-14.754

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Rejet non spécialement motivé

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10879 F

Pourvois n°
E 19-14.754
J 19-15.218 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 OCTOBRE 2020

I – M. U… P…, domicilié […] , a formé le pourvoi n° E 19-14.754,

II – La société L’Indépendant du Midi, société anonyme, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° J 19-15.218,

contre les arrêts rendus les 19 septembre 2018 et 13 février 2019 par la cour d’appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige les opposant.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. P…, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société L’Indépendant du Midi, après débats en l’audience publique du 9 septembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° E 19-14.754 et J 19-15.218 sont joints.

2. Les moyens de cassation du pourvoi n° E 19-14.754 et celui du pourvoi n° J 19-15.218, annexés, qui sont invoqués à l’encontre des décisions attaquées, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

3. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits, au pourvoi n° E 19-14.754, par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. P…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué (du 19 décembre 2018) d’AVOIR dit que M. U… P… était cadre dirigeant, débouté ce salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs, de contrepartie obligatoire en repos et d’indemnité compensatrice de congés payés, de ses demandes au titre du travail dissimulé et de résiliation judiciaire du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE ” L’employeur affirme que M. P… avait le statut de cadre dirigeant, ce qui exclurait en application de l’article L.3111-2 du code du travail, l’application des dispositions relatives à la durée du travail, aux repos et aux jours fériés.
Selon les dispositions de cet article, sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.
Ces critères sont cumulatifs et impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l’entreprise.
La qualité de cadre dirigeant ne requiert pas l’existence d’un accord particulier entre l’employeur et le salarié.

QUE L’employeur fait valoir que M. P… a participé à la présentation du projet de réorganisation auprès du comité d’entreprise du Midi libre. Du compte rendu de la réunion ordinaire du comité d’entreprise du 20 septembre 2012, il ressort que M. P… a présenté le pôle logistique et transport disant « Le pôle communication met en avant nos marques, le pôle ventes commercialise nos produits et le pôle logistique et transports va distribuer. Avec S… H…, nous allons prendre la direction de ce pôle…».
Lors de la réunion du comité d’entreprise de l’Indépendant du 28 septembre 2012, pour l’organisation des services commerciaux, M. P… était présenté comme « le relais, le référent » et il indiquait qu’il aurait une « vision globale de la direction commerciale groupe ».
Il indiquait qu’il allait garder de deux à quatre grands partenariats.
Il y était dit qu’il « sera le mieux placé pour porter la bonne parole et être la courroie de transmission entre ce que l’on pourra ressentir ici à Perpignan et être le référent à Montpellier », qu’il allait « améliorer fortement le fait que l’on va pouvoir partager les décisions que l’on va prendre ».
Il ressort du compte-rendu qu’il avait la responsabilité du pôle logistique et transports.
Il établissait le budget des frais de personnel de ce pôle dont il ressort des pièces produites (n° 6 à 11 employeur) qu’il en assurait « la direction et l’animation » et pour lequel il donnait des directives.
Le mail qu’il adresse le 4 janvier 2013 montre qu’il disposait d’une totale autonomie dans l’organisation de ses congés.
En contrepartie de sa prise de fonction de « Directeur Logistique et Transport des JDM », il lui était octroyé une prime mensuelle de fonction de 450 € à partir de janvier 2013. M. J…, ancien président du directoire des Journaux du Midi et ancien PDG de l’Indépendant atteste qu’à compter de 2006, M. P… accomplissait sa mission avec une totale autonomie dans la maîtrise de son temps de travail et faisait partie avec deux autres cadres supérieurs de la direction de l’Indépendant, qu’il disposait d’une autonomie dans ses relations avec tous les partenaires du quotidien dans le cadre des opérations de promotion, qu’il avait été promu directeur de la logistique et des transports.
Il ajoute qu’en prenant ses fonctions au niveau régional, M. P… a lui-même établi son mode de fonctionnement afin de limiter son séjour à Montpellier à deux nuits par semaine.
Du mail du 28 janvier 2013, il ressort qu’il choisissait lui-même les partenariats qu’il voulait suivre.

De l’accord sur l’aménagement, l’organisation et la réduction du temps de travail pour le personnel cadre du 14 mars 2000 conclu par la SA l’indépendant du midi, dont il n’est pas établi qu’il y ait eu dénonciation suite à l’opération de rachat par le groupe Midi libre, il ressort qu’étaient considérés comme cadres dirigeants le directeur général, le secrétaire général et le directeur des ventes.
Suivant les dispositions conventionnelles, le salaire conventionnel du niveau le plus élevé des cadres supérieurs était de 2 833,11 € par mois, soit 36 830,43 € par an : la rémunération annuelle de M. P… était de 85 649 €.
Il avait en 2012 la seconde rémunération la plus élevée, derrière le rédacteur en chef.
M. P… convient qu’il était autonome et qu’il avait une rémunération supérieure aux prévisions de la convention collective
Il participait aux réunions du comité de direction de l’Indépendant, ainsi que l’établissent des comptes-rendus de décembre 2011 et novembre 2012, et il était membre du comité de direction du groupe des journaux du midi en 2011, 2012 et 2013.
La mention « cadre supérieur » sur le bulletin de paie n’est pas exclusive de l’exercice d’une fonction de cadre dirigeant. S’il était mentionné un taux horaire, par contre, les bulletins de paie ne mentionnaient aucun nombre d’heures.

La détention d’un mandat social n’est pas une condition de l’application du statut de cadre dirigeant et la détention d’une délégation de pouvoir émanant du dirigeant de l’entreprise ne constitue qu’un indice de ce statut.

QUE De ces éléments, il résulte que M. P… alors directeur des ventes s’était vu confier des responsabilités importantes dans la gestion du pôle Logistique et transport, qu’il disposait d’une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps, qu’il percevait une rémunération se situant au second rang de l’entreprise largement au-dessus de celle des autres cadres supérieurs.
Pour la direction de ce pôle, il prenait des décisions de manière largement autonome, à partir d’une vision globale de la direction commerciale et choisissait les partenariats.

QUE Certes, M. P… ne participait pas au conseil d’administration, ni au conseil de surveillance, mais il participait au comité de direction de l’Indépendant et aux comités de direction du groupe des Journaux du Midi, ce dont il résultait une participation aux instances définissant la politique stratégique de l’entreprise.

QU’Il en résulte que M. P… était cadre dirigeant au sens de l’article L.3111-2 du Code du travail.

QUE Des dispositions de cet article et de l’article 5 de l’accord cadre du 9 décembre 1999 de la convention collective applicable, il résulte que les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée du travail, répartition et aménagement des horaires, repos et jours fériés.
Dès lors, M. P… est infondé à se prévaloir de la réalisation d’heures supplémentaires, et par suite de droits à repos compensateurs et contreparties obligatoires en repos.

QUE Par voie de conséquence, il doit être également débouté de sa demande au titre du travail dissimulé fondée sur la non-déclaration d’heures supplémentaires” (arrêt p.4 à 6, p.7 alinéa 1er).

ALORS QU’aux termes de l’article L.3111-2 du code du travail, les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions du code du travail relatives à la durée du travail, aux repos et aux congés ; que sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ; que cette qualité s’apprécie au regard des fonctions réellement exercées ; que, pour débouter un salarié de sa demande tendant à bénéficier des dispositions légales relatives à la durée du travail, l’employeur doit faire la démonstration de ce qu’il a eu la qualité de cadre dirigeant pendant toute la période de sa réclamation ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de l’arrêt attaqué que M. P… demandait le bénéfice de la législation sur la durée du travail, le paiement d’heures supplémentaires et de repos compensateurs pour la période du 1er avril 2008 au 20 mars 2013 (arrêt p.3) ; qu’en le déboutant de sa demande aux termes de motifs pris de ce qu’il ”
s’était vu confier des responsabilités importantes dans la gestion du pôle Logistique et transport, qu’il disposait d’une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps, qu’il percevait une rémunération se situant au second rang de l’entreprise largement au-dessus de celle des autres cadres supérieurs. Pour la direction de ce pôle, il prenait des décisions de manière largement autonome, à partir d’une vision globale de la direction commerciale et choisissait les partenariats”, quand il ressortait de ses propres constatations que la direction de ce pôle n’avait été confiée à M. P… qu’à l’automne 2012, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué (du 13 février 2019), d’AVOIR jugé fondé sur une faute grave le licenciement de M. U… P… et débouté ce salarié de sa demande de condamnation de la SA L’Indépendant du Midi au paiement de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE ” -sur la facturation de faux repas professionnels L’employeur produit les factures de restaurant litigieuses avec les annotations manuscrites figurant au verso précisant les noms des convives.
Le salarié invoque le caractère illisible des factures, ce qui est loin d’être le cas pour l’essentiel des factures produites. De même, la cour doit constater que M. P… ne remet pas en cause le fait d’être l’auteur des mentions manuscrites indiquant le nom des convives.
Ainsi, lors de son audition du 21 janvier 2016 par les services de police, M. P… loin de contester avoir produit ces notes de frais, expliquait ce qu’il qualifiait d’ « anomalies » par le fait qu’il n’avait « pas le temps de faire mes notes de frais suffisamment régulièrement et qu’en les établissant tous les deux ou trois mois, je ne me souvenais pas toujours des personnes invitées ». Il reprend cette explication dans sa note en délibéré.
Ainsi sont identifiées une facture « Crêperie Plein soleil » du 26 janvier 2013 pour 55,10 € et une facture Divil du 6 novembre 2012 pour 134 € où M. P… a mentionné comme convive M. E…. Celui-ci par mail du 19 avril 2013 indiquait ne pas avoir participé à ces repas et n’avoir ni déjeuné ni dîné avec un représentant de l’Indépendant depuis plus de trois ans.
La date de la facture Crêperie Bretonne pour 103,40 € n’est effectivement pas identifiable.

L’assistante du service développement atteste que Mme I… lui a indiqué ne pas avoir déjeuné avec M. P… le 26 octobre 2012 et le 28 janvier 2013 au restaurant le Divil à Perpignan : les pièces produites par l’employeur ne permettent pas d’identifier cette personne comme ayant été indiquée comme convive lors de ces repas.
Par contre, M. M… atteste qu’étant cité sur des notes de frais de restauration, il n’a pas déjeuné avec M. P… les 21 février, 13 et 23 mars, 18 avril, 31 août, 6 et 28 novembre 2012. L’employeur produit les factures correspondant à ces repas aux restaurants Divil ou le Domaine de Rombeau (factures qui ne sont pas illisibles contrairement à ce qui est soutenu), et les annotations manuscrites mentionnant M. M… comme convive.
M. L…, s’agissant d’un repas en date du 6 septembre 2012, affirme par mail n’avoir jamais déjeuné avec M. P…, mais le ticket restaurant correspondant n’est pas produit.
Si M. T… atteste que M. P… lui a demandé de dire qu’il avait été invité à déjeuner au restaurant le Divil le 4 janvier 2013, il n’indique pas qu’il lui a été demandé de mentir et qu’il n’était pas invité à cette date.
Concernant le rajout d’huîtres « Papin G2 » sur des notes de restaurant, l’employeur produit des duplicatas de tickets de caisse montrant de tels achats pour 104€ le 28 septembre 2011, 82.50€ le 12 décembre 2011 et 27.50€ le 9 mars 2012 et le 12 mars 2012.
Questionné lors de l’enquête de police sur ces rajouts, M. P… se limitait à contester la consommation personnelle des huîtres, mais ne contestait pas le caractère anormal de ces rajouts, expliquant qu’il s’agissait pour lui de « diminuer certaines notes d’invitation et de les rapporter sur une note ultérieure, en quelque sorte d’étaler les frais », explication qui ne peut justifier ces facturations.
L’explication d’erreurs commises sur le nom des convives ne peut à l’évidence valoir pour des personnes que M. P… n’a jamais invitées, tel M. E…, ni justifier qu’il se serait trompé à sept reprises concernant M. M….
Le fait que le responsable du développement de l’Indépendant indique que M. P… « recevait tous les organisateurs d’événements soit 250 manifestations par an », ne peut expliquer des remboursements de frais de restaurant ne correspondant pas à des frais professionnels ou le rajout de commandes d’huitres. De même, il n’est pas établi que l’employeur aurait toléré de fausses demandes de remboursement de frais de restauration et le fait qu’antérieurement au départ de M. P…, il n’y avait pas de limitation de ces frais ne peut justifier les manquements constatés.
Il en résulte qu’il est bien établi que de manière réitérée sur une période partant de février 2012 et perdurant jusqu’au 26 janvier 2013, M. P… s’est fait rembourser par son employeur des notes de frais de restauration en y portant le nom de personnes qui n’y avaient pas participé, trompant ainsi son employeur et l’amenant à prendre en charge des frais de bouche non justifiés. De même, il a fait prendre en charge par son employeur à plusieurs reprises des achats d’huîtres qui ne correspondaient manifestement pas à des repas de nature professionnelle” (arrêt p.7 et 8) ;

ET AUX MOTIFS QUE “sur les facturations de matériel et l’irrespect des procédures internes :
(
) si ces faits ne peuvent être considérés comme prescrits au regard de la date de la dernière facture invoquée, la cour ne peut que constater que l’employeur, sur qui pèse la charge de la preuve, ne fournit aucune pièce ou élément probant venant caractériser ces faits, de telle sorte que ceux-ci ne peuvent être considérés comme établis ;

QUE M. P… prétend que le véritable motif de licenciement était la suppression de son poste. S’il n’est pas contesté que M. P… n’a pas été remplacé, suite à son licenciement, il apparaît par contre que le projet de restructuration invoqué par M. P… est ancien, datant d’octobre 2011. Il résulte des déclarations de M. K…, responsable développement, que c’est dans le cadre de cette restructuration que M. P… avait été placé sur le poste qu’il occupait. M. K… ne fait que supputer un règlement de comptes contre M. P… sans l’étayer par des faits précis. Au regard des faits imputés à M. P…, il est cohérent que la société ait rompu ses relations avec l’Imprimerie du Mas et JMG, mis en cause dans les agissements de M. P… ;

QU’il n’est ainsi pas établi que le licenciement de M. P… reposait sur un motif autre que ceux visés dans la lettre de licenciement” ;

ALORS QUE lorsqu’un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée ; que c’est seulement s’il ne l’estime pas fondée qu’il doit statuer sur le licenciement ; que la cassation, intervenant sur le premier moyen du pourvoi, du chef de dispositif déboutant M. P… de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail emportera, en application de l’article 624 du code de procédure civile, celle des dispositions indivisibles visées par le moyen. Moyens produits, au pourvoi n° J 19-15.218, par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société L’Indépendant du Midi

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que la faute lourde imputée à M. P… n’est pas établie, dit que le licenciement de M. P… était justifié par une faute grave, et D’AVOIR en conséquence condamné la société Indépendant du Midi à payer à M. P… les sommes de 21 637,13 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 2 163,71 € bruts au titre des congés payés afférents et 176.703, 32 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement

AUX MOTIFS QUE « La lettre de licenciement du 23 avril 2013, motivée par la faute lourde, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :
« Comme pour les autres salariés de l’Indépendant, cette dernière prend en charge vos dépenses de restaurants engagées dans le cadre de repas professionnels. Fin février 2013, M. A… a appris que contrairement aux indications que vous avez portées sur une facture de restaurant M. E… n’avait pas déjeuné avec vous, le samedi 26 janvier 2013, au restaurant la « Crêperie Plein Soleil » aux Angles.
Des vérifications complémentaires ont alors été réalisées sur certaines factures de restaurants des quelques mois précédents : Il apparaît que dans treize autres cas, des personnes de l’entreprise ou extérieure à celle-ci que vous avez désignées comme ayant déjeuné avec vous n’étaient pas présentes au repas.
Vous n’avez donné aucune explication sur ces faits, vous contentant d’indiquer que vous n’aviez aucun souvenir et que vous n’étiez pas en état de réfléchir. Cette position n’est pas acceptable car certains de vos soi-disant convives disent n’avoir jamais mangé avec vous ou d’autres ne pas l’avoir fait depuis plusieurs années.
Par ailleurs, bien que nous n’ayons pas eu la possibilité de vérifier toutes les factures de restaurants, le nombre de fausses déclarations est tel, qu’un souvenir ou une réflexion sur l’un ou l’autre cas ne changeront malheureusement l’étendue de cette pratique manifestement familière pour vous.
Par ailleurs, il a été constaté que lors d’invitations au restaurant « Le Vienne », au moment de signer la facture en caisse, vous avez à plusieurs reprises fait rajouter des huitres « Papin G2 » pour votre consommation personnelle. Ces dépenses à caractère privé sont restées à la charge de la société.
Ces éléments nous ont amené à poursuivre des investigations plus larges sur vos pratiques au sein de L’lndépendant. Il ressort les faits suivants :
Vous avez fait réaliser par « L’imprimerie du Mas » des plaquettes destinées au « Comité XV du Roussillon » et vous avez validé et fait payer la facture correspondante du 21 décembre 2012 qui s’élève à 3.528,20 €. Pour ce même partenariat, vous avez également commandé diverses fournitures (40 coupes vent, 40 sweats et 40 polos), auprès de la société JMG distribution. Vous avez validé et fait payer la facture correspondante de 2.631,20 € du 10 janvier 2013.
ll apparaît que ce partenariat n’existe pas et que ni le Comité XV du Roussillon, ni L’Indépendant n’ont jamais reçu de plaquettes, ni de fournitures.
Lors de l’entretien vous avez indiqué qu’en réalité ces deux prestations étaient destinées à une autre opération « Le XV de L’Indépendant » réalisée chaque année fin mai début juin. Cette explication n’est absolument pas recevable car d’une part aucune raison ne peut justifier que l’on commande, mais surtout que l’on paie, ce genre de prestation avec plusieurs mois d’anticipation sur sa réalisation et d’autre part il ressort après vérification que l’opération « Le XV de L’lndépendant ne nécessite aucune impression de plaquettes et que les personnes invitées reçoivent comme dotation un polo Eden Park et non des coupes vent ou des sweats.
Vous avez fait réaliser par « L’imprimerie du Mas », sans devis, préalable, des affiches et des plaquettes destinées à l’association « Courses hors stade » et vous avez validé et fait payer la facture correspondante du 31 décembre 2012 qui s’établie à 6.530,16 €. Il ressort que ces impressions n’ont jamais été réalisées, ni livrées.
Vous avez indiqué pendant l’entretien que cette facture devait être une erreur et que vous n’étiez pas en état de réfléchir. Cette explication n’est pas du tout satisfaisante car une autre facture, elle aussi du 31 décembre 2012, d’un montant de 5 657.08 €, portant sur les mêmes prestations (plaquettes) et destinée à la même manifestation « Courses hors stade», a été également validée par vous et payée. Contrairement à la première facture, la prestation de la deuxième a bien été réalisée.
Vous avez fait une commande de 24 bouteilles de vin auprès d’un caviste, « Le comptoir des crus » pour faire des cadeaux de fin d’année à des partenaires de l’entreprise. Ces achats ont été facturés à la société le 9 janvier 2013 pour un montant de 762,00 €. Parmi les 24 destinataires que vous avez-vous-même désignés pour justifier la dépense, aucun de ceux qui ont été contactés n’ont reçu de bouteille de vin offerte par l’Indépendant.
Vous nous avez indiqué n’avoir pas eu le temps de faire la distribution prévue et que les bouteilles correspondantes étaient dans la pièce des stocks de L’Indépendant. Cette information a été vérifiée. Il ressort qu’aucune bouteille n’est en stock, mais surtout qu’aucune bouteille correspondant à la commande n’a été livrée à L’lndépendant.
Par ailleurs, compte tenu de la raison que vous avez avancée pour justifier la non réception des bouteilles comme cadeaux fin 2012, nous avons interrogé quelques personnes également désignées par vous comme bénéficiaires de bouteilles fin 2011 et fin 2010, Ils confirment de la même façon n’avoir reçu aucune bouteille de vin offerte par L’Indépendant.
– Dans le cadre du partenariat « Challenge grandes attaques », vous avez acheté 20 polos auprès du magasin Eden Park et vous avez validé la facture correspondante du 20 novembre 2012 d’un montant 992,68€. Il apparaît que ce partenariat n’existe plus depuis plusieurs années.
Par ailleurs, dans le cadre du partenariat « Challenge comité XV » vous avez acheté 25 polos auprès du magasin Eden Park et vous avez validé la facture correspondante du 9 janvier 2013 qui s’établie à 1.240,85 €. Il apparaît également que ce partenariat n’existe plus depuis plusieurs années.
Cette même opacité dans les achats, les livraisons, le suivi des stocks et la distribution d’objets, apparaît pour des commandes de marchandises diverses (chemises, parka, vestes gilets, sacoches d’ordinateur ..) réalisées auprès du fournisseur « JMG distribution ». il s’agit notamment d’une facture de 553,15 € du 22 janvier 2013 concernant des produits destinés à la « logistique abonnement », et d’une facture de 1.843,22 € du 4 janvier 2013 relative à des produits destinés à une « opération de proximité »
Vous avez précisé lors de l’entretien que ces polos floqués avec la marque de l’entreprise étaient destinés à être distribués, sous votre contrôle, à des partenaires de L’Indépendant. A ce titre, un stock de vêtements était en permanence disponible dans votre bureau. Vous avez également indiqué que vous en faisiez bénéficier quelques salariés de la société, que vous en aviez donné un à A. J… en 2012, ainsi qu’à P. A… lors de son arrivée.
Après vérification, il apparaît que sur une année, de janvier 2012 à janvier 2013, 210 polos Eden Park ont été achetés, dont 34 pour l’opération « Le XV de L’Indépendant ». Le solde représente donc 176 polos, pour lequel il n’existe aucun bordereau de livraison, ceci en total irrespect des procédures internes.
Par ailleurs, si l’on soustrait les 18 polos qui ont été retrouvés dans votre bureau, c’est 158 polos qui ont été distribués au cours de cette année. Ce nombre est extrêmement élevé et un tel niveau de distribution au fil des jours est difficilement compréhensible. Ceci l’est d’autant moins, que 45 d’entre eux ont été achetés, en dehors de tout respect des procédures en vigueur dans l’entreprise, sous le couvert d’opérations inexistantes. Vous n’avez donné aucune justification sur ces points.
– Cette même opacité dans les achats, les livraisons, le suivi des stocks et la distribution d’objets, apparait pour des commandes de marchandises diverses (chemises, parka, vestes gilets, sacoches d’ordinateur, …) réalisées auprès du fournisseur JMG distribution».
Il s’agit notamment d’une facture de 553,15 € du 22 janvier 2013 concernant des produits destinés à la « logistique abonnement», et d’une facture de 1 843,22 € du 4 janvier 2013 relative à des produits destinés à une « opération de proximité ».
Dans ces deux cas également, aucun bordereau de livraison n’a été établi, et aucune livraison, ni bénéficiaires correspondant aux libellés de la destination de ces achats n’ont pu être identifiés. ».
La preuve de la faute lourde privative des indemnités de congés payés, incombe à l’employeur qui l’invoque.
Le salarié invoque le classement sans suite intervenu suite à la plainte de l’employeur contre lui. Or, le classement sans suite est une décision du ministère public qui, saisi d’une plainte, décide de ne pas poursuivre. Cette décision ne revêt aucunement l’autorité de la chose jugée. Il appartient au juge prud’homal d’apprécier souverainement la réalité et la gravité de la faute reprochée, au vu des pièces produites, peu important que ces pièces aient été jointes à la plainte classée sans suite.
-sur la facturation de faux repas professionnels
L’employeur produit les factures de restaurant litigieuses avec les annotations manuscrites figurant au verso précisant les noms des convives.
Le salarié invoque le caractère illisible des factures, ce qui est loin d’être le cas pour l’essentiel des factures produites. De même, la cour doit constater que M. P… ne remet pas en cause le fait d’être l’auteur des mentions manuscrites indiquant le nom des convives.
Ainsi, lors de son audition du 21 janvier 2016 par les services de police, M. P… loin de contester avoir produit ces notes de frais, expliquait ce qu’il qualifiait d’ « anomalies » par le fait qu’il n’avait « pas le temps de faire mes notes de frais suffisamment régulièrement et qu’en les établissant tous les deux ou trois mois, je ne me souvenais pas toujours des personnes invitées ». Il reprend cette explication dans sa note en délibéré.
Ainsi sont identifiées une facture « Crêperie Plein soleil » du 26 janvier 2013 pour 55,10 € et une facture DIVIL du 6 novembre 2012 pour 134 € où M. P… a mentionné comme convive M. E…. Celui-ci par mail du 19 avril 2013 indiquait ne pas avoir participé à ces repas et n’avoir ni déjeuné ni diné avec un représentant de l’Indépendant depuis plus de trois ans.
La date de la facture Crêperie Bretonne pour 103,40 € n’est effectivement pas identifiable.
L’assistante du service développement atteste que Mme I…. lui a indiqué ne pas avoir déjeuné avec M. P… le 26 octobre 2012 et le 28 janvier 2013 au restaurant le Divil à Perpignan : les pièces produites par l’employeur ne permettent pas d’identifier cette personne comme ayant été indiquée comme convive lors de ces repas.
Par contre, M. M… atteste qu’étant cité sur des notes de frais de restauration, il n’a pas déjeuné avec M. P… les 21 février, 13 et 23 mars, 18 avril, 31 août, 6 et 28 novembre 2012. L’employeur produit les factures correspondant à ces repas aux restaurants DIVIL ou le Domaine de ROMBEAU, (factures qui ne sont pas illisibles contrairement à ce qui est soutenu) et les annotations manuscrites mentionnant M. M… comme convive.
M. L… s’agissant d’un repas en date du 6 septembre 2012, affirme par mail n’avoir jamais mangé avec M. P…, mais le ticket restaurant correspondant n’est pas produit.
Si M.T… atteste que M. P… lui a demandé de dire qu’il avait été invité à déjeuner au restaurant le Divil le 4 janvier 2013, il n’indique pas qu’il lui a été demandé de mentir et qu’il n’était pas invité à cette date.
Concernant le rajout d’huitres « Papin G2 » sur des notes de restaurant, l’employeur produit des duplicatas de tickets de caisse montrant de tels achats pour 104€ le 28 septembre 2011, 82.50€ le 12 décembre 2011 et 27.50€ le 9 mars 2012 et le 12 mars 2012.
Questionné lors de l’enquête de police sur ces rajouts, M. P… se limitait à contester la consommation personnelle des huitres, mais ne contestait pas le caractère anormal de ces rajouts, expliquant qu’il s’agissait pour lui de « diminuer certaines notes d’invitation et de les rapporter sur une note ultérieure, en quelque sorte d’étaler les frais », explication qui ne peut justifier ces facturations.
L’explication d’erreurs commises sur le nom des convives ne peut à l’évidence valoir pour des personnes que M. P… n’a jamais invitées, tel M. E…, ni justifier qu’il se serait trompé à sept reprises concernant M. M….
Le fait que le responsable du développement de l’Indépendant indique que M. P… recevait tous les organisateurs d’événement soit 250 manifestations par an, ne peut expliquer des remboursements de frais de restaurant ne correspondant pas à des frais professionnels ou le rajout de commandes d’huitres. De même, il n’est pas établi que l’employeur aurait toléré de fausses demandes de remboursement de frais de restauration et le fait qu’antérieurement au départ de M. P…, il n’y avait pas de limitation de ces frais ne peut justifier les manquements constatés.
Il en résulte qu’il est bien établi que de manière réitérée sur une période partant de février 2012 et perdurant jusqu’au 26 janvier 2013, M. P… s’est fait rembourser par son employeur des notes de frais de restauration en y portant le nom de personnes qui n’y avaient pas participé, trompant ainsi son employeur et l’amenant à prendre en charge des frais de bouche non justifiés.
De même, il a fait prendre en charge par son employeur à plusieurs reprises des achats d’huîtres qui ne correspondaient manifestement pas à des repas de nature professionnelle.
– Sur les facturations de matériel et l’irrespect des procédures internes
M. P… invoque la prescription pour les griefs afférents à l’usage des budgets décidés par la direction à Montpellier et contrôlés par cette dernière, indiquant que l’employeur ne peut prétendre ne pas en avoir eu connaissance avant le 18 janvier 2013, alors que la lettre de convocation à l’entretien préalable date du 18 mars 2013.
L’employeur ne répond pas.
L’article L1332-4 du Code du travail qui prévoit qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
Dès lors que les faits sanctionnés ont été commis plus de deux mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l’employeur d’apporter la preuve qu’il n’en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l’engagement des poursuites.
Toutefois, ces dispositions ne s’opposent pas à la prise en compte de faits antérieurs à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s’est poursuivi dans ce délai.
Les griefs relatifs aux facturations de matériel sont fondés sur des facturations de décembre 2012 et pour la plus récente, du 9 janvier 2013.
Aucun élément ne vient établir que l’employeur n’aurait eu connaissance de ces facturations que postérieurement au 18 janvier 2013. Ces griefs doivent en conséquence être considérés comme prescrits.
Par contre, le grief de l’irrespect des procédures internes est certes fondé sur des facturations du 20 novembre 2012 et du 9 janvier 2013, mais également sur une facture du 22 janvier 2013, soit un comportement qui aurait perduré dans le délai de deux mois précédant l’engagement des poursuites disciplinaires.
L’employeur reprochait au salarié d’avoir dans le cadre du partenariat « Challenge grandes attaques », acheté 20 polos auprès du magasin Eden Park, validé la facture correspondante du 20 novembre 2012 d’un montant de 992,68€, alors que ce partenariat n’existait plus depuis plusieurs années. Il y ajoutait le fait d’avoir dans le cadre du partenariat « Challenge comité XV » acheté 25 polos auprès du magasin Eden Park, validé la facture correspondante du 9 janvier 2013 pour 1.240,85 € alors que ce partenariat n’existait plus depuis plusieurs années. »
La société fait valoir qu’entre janvier 2012 et janvier 2013, 210 polos Eden Park ont été achetés, dont 34 étaient destinés à l’opération « Le XV de l’Indépendant » et que pour les 176 autres polos, aucun bordereau de livraison n’existe, ce qui est en total irrespect avec les procédures internes à l’entreprise. Elle ajoute que 18 polos ont été retrouvés dans le bureau de M. P…, soit 158 polos distribués au cours de l’année, soit un nombre extrêmement élevé difficilement justifiable. Elle ajoute que 45 de ces polos ont été achetés en dehors de tout respect des procédures en vigueur dans l’entreprise, sous le couvert d’opérations inexistantes.
La société ajoute : « Cette même opacité dans les achats, les livraisons, le suivi des stocks et la distribution d’objets, apparaît pour des commandes de marchandises diverses (chemises, parka, vestes gilets, sacoches d’ordinateur ..) réalisées auprès du fournisseur « JMG distribution ». il s’agit notamment d’une facture de 553,15 € du 22 janvier 2013 concernant des produits destinés à la « logistique abonnement », et d’une facture de 1.843,22 € du 4 janvier 2013 relative à des produits destinés à une « opération de proximité ».
Elle ajoute que pour ces factures, aucun bordereau de livraison n’a été établi, et aucune livraison ni bénéficiaires n’ont pu être identifiés.
Si ces faits ne peuvent être considérés comme prescrits au regard de la date de la dernière facture invoquée, la cour ne peut que constater que l’employeur sur qui pèse la charge de la preuve, ne fournit aucune pièce ou élément probant venant caractériser ces faits, de telle sorte que ceux-ci ne peuvent être considérés comme établis.
M. P… prétend que le véritable motif de son licenciement était la suppression de son poste. S’il n’est pas contesté que M. P… n’a pas été remplacé suite à son licenciement, il apparait par contre que le projet de restructuration invoqué par M. P… est ancien datant d’octobre 2011. Il résulte des déclarations de M. K…, responsable développement que c’est dans le cadre de cette restructuration que M. P… avait été placé sur le poste qu’il occupait. M. K… ne fait que supputer un règlement de comptes contre M. P… sans l’étayer par des faits précis. Au regard des faits imputés à M. P…, il est cohérent que la société ait rompu ses relations avec l’imprimerie du Mas et JMG mis en cause dans les agissements de M. P….
Il n’est ainsi pas établi que le licenciement de M. P… reposait sur un motif autre que ceux visés dans la lettre de licenciement.
De ce qui précède, il résulte que de février 2012 jusqu’à janvier 2013, M. P… s’est fait indûment rembourser des frais de restauration et des achats d’huîtres qui ne correspondaient manifestement pas à des repas de nature professionnelle. Ces faits réitérés commis par un cadre dirigeant mettant à profit la confiance qui lui était accordée caractérise, nonobstant l’absence d’antécédent disciplinaire et l’ancienneté, une faute d’une gravité telle qu’elle rendait impossible la poursuite du contrat de travail.
Si les faits montrent de la part du salarié, un esprit de lucre consistant en la volonté de faire prendre en charge par son employeur des frais qui lui étaient personnels, il n’en résulte pas par contre une intention de nuire à l’employeur, seul élément susceptible de caractériser une faute lourde.
En conséquence, il sera dit que le licenciement était fondé par une faute grave imputable à M. P…, mais non sur une faute lourde.
La mise à pied conservatoire était justifiée par la faute grave imputable au salarié.
L’article 16 de la convention collective nationale du 1er octobre 1974 applicables aux cadres administratifs de la presse quotidienne départementale, relatif au congédiement prévoit : « Le préavis général et réciproque est de trois mois pour tous les cadres. Dans le cas d’inobservation du préavis par l’une ou l’autre des parties, la partie qui n’observe pas le préavis devra à l’autre une indemnité égale aux appointements correspondant à la durée du préavis restant à courir
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Licenciement pour faute grave, fautes légères répétées, incapacité professionnelle notoire ne découlant pas de la transformation des techniques :
– dans ce cas, le préavis de renvoi sera donné au cadre. Avant l’expiration de ce préavis, la commission paritaire indiquée plus haut pourra être saisie. Elle pourra envisager, suivant la gravité des fautes, la diminution de l’indemnité de licenciement ;
– son avis sera notifié au collaborateur congédié, celui-ci réservant tous ses droits dans le cas où la direction maintiendrait la mesure de renvoi ;
– les parties seront, par ailleurs, toujours libres d’accepter par avance la décision de la commission paritaire. »
L’article 18 relatif à l’indemnité de congédiement, prévoit : « Il est alloué aux cadres licenciés une indemnité de congédiement distincte du préavis et tenant compte de leur présence dans l’entreprise. Elle s’établira comme suit:
– deux mois après un an de présence ;
– un mois supplémentaire par année de présence de la 2 e année à la 15e année ;
– un demi-mois supplémentaire par année au-delà de quinze ans.
Le salaire mensuel servant de base au calcul de l’indemnité de congédiement sera constitué par les appointements fixes du cadre, prime d’ancienneté comprise, et augmenté des primes et avantages divers servis avec un caractère de régularité et de continuité. Ce salaire sera majoré d’un douzième pour tenir compte du treizième mois. »
Ainsi, en application de dispositions conventionnelles plus favorables que les dispositions légales, en cas de licenciement pour faute grave, M. P… est fondé à demander paiement de l’indemnité de préavis, ainsi que de l’indemnité conventionnelle de licenciement, faute de saisine de la commission paritaire.
Au regard d’un salaire moyen de 7234 € et d’une ancienneté de 34 ans, l’indemnité conventionnelle de licenciement s’élève à la somme de 176.703,32 € et l’indemnité de préavis à la somme de 21 637, 13 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 2163, 71 € bruts au titre des congés payés afférents.
Il sera ordonné la remise d’une attestation pôle emploi, d’un certificat de travail, d’un reçu pour solde de tout compte et de bulletins de paie conformes aux dispositions de l’arrêt sans qu’il y ait lieu d’ordonner une astreinte »

1/ ALORS QUE si aux termes de l’article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s’est poursuivi ou réitéré dans ce délai par la commission de manquements de même nature ; qu’il était reproché à M. P… d’avoir fait établir au nom de la société des factures correspondant à des commandes de vêtements, accessoires et bouteilles de vins non livrés à la société et destinés à son usage personnel ; qu’en jugeant ces faits prescrits parce que la dernière facture était datée du 9 janvier 2013, lorsqu’il résultait de ses constatations qu’il était également reproché au salarié d’avoir entre février 2012 jusqu’au 26 janvier 2013 fait prendre en charge par la société des factures de restaurants et des achats d’huitres ne correspondant pas à des repas de nature professionnelle, soit des faits de même nature qu’elle a jugé non prescrits et établis, la cour d’appel a violé l’article L 1332-4 du code du travail ;

2/ ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions des parties ; que le salarié n’a jamais contesté que les marchandises commandées n’avaient pas donné lieu à l’établissement de bons de livraisons ni à des livraisons effectives à la société, ni que les partenariats « challenge grandes attaques » et « challenge comité XV » dans le cadre desquels ces commandes étaient réputées s’inscrire, n’existaient plus ; qu’en reprochant à la société de ne pas rapporter la preuve de ces faits négatifs pour en déduire que le grief reprochant au salarié le non-respect des procédures internes n’était pas établi, la cour d’appel a violé l’article 4 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE caractérise l’intention de nuire à son employeur le fait pour un cadre dirigeant de volontairement détourner les fonds de la société à des fins personnelles en ayant recours à des manoeuvres pour dissimuler ses actes ; qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt qu’entre février 2012 jusqu’à janvier 2013, M. P…, animé de « la volonté de faire prendre en charge par son employeur des frais qui lui étaient personnels », s’était fait indûment rembourser des frais de restauration et des achats d’huîtres qui ne correspondaient pas à des repas de nature professionnelle, en mentionnant faussement sur les factures correspondantes avoir déjeuné avec des partenaires de la société; qu’en jugeant que de tels faits ne caractérisaient pas l’intention de nuire de M. P…, la cour d’appel a violé l’article L 3141-26 du code du travail ;

4/ ALORS en tout état de cause QUE l’article 16 de la convention collective des cadres administratifs de la presse quotidienne départementale du 1er octobre 1974 prévoit que la faute lourde constituée en cas d’indélicatesse entraine la suppression de l’indemnité de licenciement ; qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt qu’entre février 2012 et janvier 2013, M. P…, animé de la volonté de faire prendre en charge par son employeur des frais qui lui étaient personnels, s’était fait indûment rembourser des frais de restauration et des achats d’huîtres qui ne correspondaient pas à des repas de nature professionnelle, en mentionnant faussement sur les factures correspondantes avoir déjeuné avec des partenaires de la société, ce qui caractérisait une indélicatesse ; qu’en excluant la qualification de faute lourde au motif inopérant que ces faits avaient été commis sans intention de nuire et en condamnant la société à lui verser l’indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d’appel a violé l’article 16 de la convention collective précitée.

 


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