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15 juin 2022
Cour d’appel d’Amiens
RG n°
21/01531
ARRET
N°
[W]
C/
S.A.S. [I]
copie exécutoire
le 15/06/2022
à
Seleurl PARRAS
Me DUPLAN
LDS/IL/BG
COUR D’APPEL D’AMIENS
5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE
ARRET DU 15 JUIN 2022
*************************************************************
N° RG 21/01531 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IBHD
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’AMIENS DU 14 SEPTEMBRE 2020 (référence dossier N° RG F 18/00590)
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur [M] [W]
né le 14 Août 1983 à LAXOU (54520)
de nationalité Française
161 rue du Moulin
76270 SAINT-SAIRE
comparant en personne,
assisté, concluant et plaidant par Me Laurent PARRAS de la SELEURL PARRAS AVOCAT, avocat au barreau de PARIS
ET :
INTIMEE
S.A.S. [I] prise en la personne de son représentant légal
193 rue des Bruyères
45590 SAINT CYR EN VAL
représentée, concluant et plaidant par Me Stéphane DUPLAN, avocat au barreau D’ORLEANS
représentée par Me CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d’AMIENS, avocat postulant
DEBATS :
A l’audience publique du 27 avril 2022, devant Madame Laurence de SURIREY, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :
– Madame Laurence de SURIREY en son rapport,
– les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.
Madame Laurence de SURIREY indique que l’arrêt sera prononcé le 15 juin 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame Laurence de SURIREY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :
Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,
Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,
Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,
qui en a délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :
Le 15 juin 2022, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.
*
* *
DECISION :
M. [W] a été embauché par la SAS [I] (la société ou l’employeur) à compter du 17 octobre 2011 par contrat à durée indéterminée, en qualité de délégué départemental. Par avenant du 1er août 2015, il a été promu au poste d’animateur régional.
La SAS [I] lui a notifié le 30 avril 2018 un avertissement, en raison de l’absence de mesure prise à la suite de difficultés relationnelles entre collègues de son équipe.
Le 18 juillet 2018, le salarié a fait l’objet d’une mise à pied à titre conservatoire, puis il a été convoqué par la SAS [I] à un entretien préalable fixé au 26 juillet 2018.
Par courrier du 21 août 2018, il a été licencié pour cause réelle et sérieuse.
Contestant la légitimité de son licenciement, M. [W] a saisi le conseil de prud’hommes d’Amiens le 11 décembre 2018, d’une demande en reconnaissance du caractère sans cause réelle et sérieuse de celui-ci et en paiement d’indemnités subséquentes.
Le conseil, par jugement du 14 septembre 2020, a :
– dit que le licenciement de M. [W] reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
– débouté M. [W] de l’intégralité de ses demandes ;
– condamné ce dernier à verser à la société [I] la somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [W] aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 9 juin 2021, M. [W], qui est régulièrement appelant de ce jugement, demande à la cour de :
– infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Amiens le 14 septembre 2020 ;
– dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– condamner la société [I] SA à lui verser la somme de 82 810,56 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– dire et juger que son licenciement a été effectué dans des conditions vexatoires ;
– condamner la société [I] SA à lui verser la somme de 10 351,32 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;
– condamner la société [I] SA à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dire et juger que ces sommes porteront intérêts au taux légal ;
– condamner la société [I] SA aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 28 février 2022, la société [I] demande à la cour de :
– dire et juger irrecevable sinon mal fondé M. [W] en son appel à l’encontre du jugement ;
– le débouter de l’ensemble de ses demandes ;
– confirmer purement et simplement le jugement ;
– condamner M. [W] à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– le condamner également aux entiers dépens.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
EXPOSE DES MOTIFS :
1/ Sur le licenciement :
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d’autres griefs que ceux qu’elle énonce.
Elle est ainsi rédigée : « Nous faisons suite à notre courrier remis en main propre le 18 juillet 2018 par lequel nous vous avons notifié une mise à pied à titre conservatoire et nous vous avons convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui s’est tenu le 26 juillet 2018, auquel vous vous êtes présenté seul.
En effet, nous avons eu à déplorer de votre part des agissements dont nous vous avons fait part lors de notre entretien du 26 juillet 2018 et les explications recueillies auprès de vous au cours de cet entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
En conséquence, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.
Vous avez été engagé en octobre 2011 en tant que délégué départemental et depuis le 1er août 2015, vous exercez les fonctions d’animateur régional de la région Nord.
A ce titre, vous êtes responsable d’une région composée de plusieurs délégations et vous devez gérer une équipe en menant, entre autre, les actions de management nécessaires et indispensables au développement des délégations de la région.
Ainsi, de par votre poste et responsabilités, vous êtes notamment tenu d’une exemplarité dans vos fonctions et votre comportement.
Nous avons cependant été amenés à constater différents faits qui constituent une violation de vos obligations dans le cadre de l’exercice de vos fonctions d’animateur régional, rendant impossible le maintien de votre contrat de travail et générant au surplus, un préjudice pour la société [I] SA qui se voit aujourd’hui contrainte de pallier à vos fautes et à leurs conséquences.
1) Le traitement des paies du mois de juin 2018
Conformément au calendrier commercial qui est établi en N-1 pour l’année suivante, le traitement des paies du mois de juin 2018 devait intervenir le 6 juillet 2018.
Dans le cadre de vos fonctions, vous deviez donc, à cette date et suite à l’invitation du 27 juin de votre assistante de Région de 10 h 30 à 12 h, étudier les paies avec cette dernière, notamment au regard des plaidoiries des délégués et chefs des ventes de la région Nord.
Nous vous rappelons que ces plaidoiries concernent les dossiers qui pénalisent l’équipe commerciale et qui de ce fait, doivent être étudiées pour pouvoir donner droit à une avance et/ou une prime exceptionnelle aux vendeurs concernés dont la rémunération est variable. Or, il apparaît que ce 6 juillet 2018, vous n’avez pas traité les paies et les plaidoiries du mois de juin 2018 comme cela devait pourtant être fait. Vous avez reconnu lors de l’entretien que vous n’aviez pas vu votre assistante ce jour-là. Vous avez cependant préféré vous absenter du bureau pour faire des courses afin d’organiser dans l’après-midi et dans les locaux de l’agence d’Amiens, le visionnage du match de foot de la France dans le cadre de la coupe du monde.
Lorsque nous avons abordé le fait que vous aviez été formé dans le cadre de votre fonction à l’organisation ainsi qu’à la gestion du planning, vous nous avez informés que vous aviez « laissé tomber » le planning par manque d’organisation et que vous n’arriviez pas à gérer les priorités. Vous avez alors indiqué à votre assistante régionale que vous prendriez les paies le week-end pour les analyser.
Toutefois, le lundi 9 juillet, votre assistante régionale a constaté en arrivant à l’agence, que les paies étaient toujours sur votre bureau et n’avaient pas été étudiées.
Votre assistante régionale a également constaté que les plaidoiries de la délégation de la Somme maritime n’avaient toujours pas été reçues et vous lui avez indiqué que vous ne souhaitiez pas qu’elle relance le délégué départemental.
C’est dans ces conditions, que votre assistante régionale a envoyé, en l’état, le lundi 9 juillet à 9h50, les plaidoiries incomplètes de votre région. De ce fait, les dossiers de la délégation Somme Maritime n’ont pas été étudiés donc pas traités. Le délégué n’a donc reçu aucun mail sur les décisions prises suite à ces plaidoiries et n’a donc pu informer son équipe
Votre assistante régionale a également constaté que les plaidoiries de la délégation de la Somme maritime n’avaient toujours pas été reçues et vous lui avez indiqué que vous ne souhaitiez pas qu’elle relance le délégué départemental.
C’est dans ces conditions, que votre assistante régionale a envoyé, en l’état, le lundi 9 juillet à 9h50, les plaidoiries incomplètes de votre région.
De ce fait, les dossiers de la délégation Somme Maritime n’ont pas été étudiés donc pas traités. Le délégué n’a donc reçu aucun mail sur les décisions prises suite à ces plaidoiries et n’a donc pu informer son équipe.
Ce manque de rigueur dans le traitement des paies a également eu pour conséquence de provoquer des demandes d’acomptes jusqu’au 16 juillet 2018, date des virements et d’envoi des fiches de paie, nécessitant une gestion urgente et non prévue de ces demandes. Vous avez reconnu faire preuve d’une démotivation depuis plusieurs mois.
Il s’agit là d’une violation manifeste de vos obligations au titre de vos fonctions d’animateur régional.
2) Les tests d’évolution professionnelle du 26 juin 2018
Conformément au process d’évolution de carrière et de promotion mis en place au sein de la société [I], les équipes commerciales ont été informées le 7 juin 2018, des postes disponibles pour l’exercice 2018/2019.
C’est dans ces conditions que 9 de vos collaborateurs, 2 chefs des ventes et 7 vrp, ont adressé leur candidature leur permettant de passer ensuite, les tests de connaissances qui se sont déroulés le 26 juin 2018.
Nous avons dans un premier temps, été alertés par les très bons résultats des 7 vrp de la région Nord dont la moyenne des notes obtenues est de 15,90 (notes allant de 14,20 à 17,26) contre une moyenne de 13,75 pour les 8 autres participants, toutes régions confondues et dont seuls deux collaborateurs dépassent la note de 14.
Lors de notre visite [Y] [I] et moi-même pour les entretiens d’évolution, le mercredi 11 juillet, dès notre arrivée nous vous avons fait part de nos doutes et du fait que les résultats nous semblaient faussés.
Vous nous avez répondu qu’ils avaient simplement révisé et que leur en parler engendrerait une démotivation de leur part. Nous avons alors découvert qu’à partir de votre adresse mail professionnelle, vous aviez envoyé les 22 et 23 juin 2018, aux adresses mail professionnelles des 7 collaborateurs en question, des éléments de correction d’une partie des tests qu’ils ont passés le 26 juin 2018.
C’est la raison pour laquelle, après investigation, nous avons été informés que le matin de ces entretiens, vous aviez demandé à deux collaborateurs présents, de supprimer les éléments que vous leur aviez envoyés par mail et de passer l’info à leurs collègues.
Vous nous avez indiqué que vous ne pensiez pas trahir l’entreprise mais que vous vouliez les faire évoluer. Vous avez également reconnu que lors de notre échange vous n’aviez pas mentionné que vous leur aviez envoyé les corrections puisque vous saviez que ce n’était pas acceptable.
Ce faisant, vous avez délibérément organisé une fraude aux tests permettant l’obtention de notes élevées en vue de la promotion des commerciaux.
Alors que compte tenu des résultats obtenus par les 7 collaborateurs de votre région, nous avons continué le process normal d’évolution par l’organisation des entretiens individuels prévus qui se sont tenus le 11 juillet 2018, nous sommes aujourd’hui contraints de tirer les conséquences de la fraude que vous avez mise en place en annulant les résultats de ces 7 vendeurs.
Nous les avons informés par le biais d’un mail le 27 juillet. Vos agissements sont inacceptables compte tenu de votre poste, de vos fonctions et de votre niveau de responsabilités, notamment en management et en gestion d’une équipe. De tels faits sont contraires à l’esprit de la société qui s’emploie à promouvoir les possibilités d’évolution de ses collaborateurs, sur la base du mérite et de la loyauté.
Par courrier de recadrage du 9 avril 2018, nous vous avions d’ailleurs rappelé que «la notion d’équité doit être également le mot d’ordre pour satisfaire et valoriser les collaborateurs ». Le message que vous avez ainsi véhiculé à ces collaborateurs n’est pas celui attendu d’un animateur régional en charge de la gestion d’une équipe, et encore moins celui que les collaborateurs doivent recevoir.
De même, vous n’êtes pas sans savoir que la mise en place de ces évaluations nécessite une organisation importante pour la société [I] SA dans la mesure où la réussite aux tests permet ensuite aux collaborateurs de passer un entretien individuel et des sessions de formation.
Ce process d’évolution interne est également un outil de gestion des postes disponibles au sein de la société. Ne pouvant aujourd’hui tenir compte des résultats des collaborateurs à qui vous avez envoyé des éléments de correction, la société [I] SA subit un préjudice d’ores et déjà constitué, notamment par l’organisation du test, la journée d’activité bloquée par le test, la prise en charge des frais de déplacement des collaborateurs, le temps de correction, outre les déplacements de la Direction des Ressources Humaines et du Directeur des Ventes le 11 juillet 2018 à l’agence d’Amiens pour tenir les entretiens individuels de ces collaborateurs tout au long de cette journée.
Nous sommes donc à ce jour contraints de réorganiser le passage de nouveaux tests et par conséquent de repousser les potentielles prises de poste au 1er septembre 2018 compte tenu du délai de correction de ces tests.
Il est aussi important de souligner le risque de démotivation de vos collaborateurs non seulement par le passage de nouveaux tests, du fait de les avoir poussés à ne pas dire la vérité mais également sur le fait de devoir repousser leur éventuelle évolution de votre fait.
3) L’organisation du travail avec votre assistante et la gestion des dossiers courants Le vendredi 29 juin 2018, alors que vous prépariez la réunion de la région du lundi 2 juillet 2018, vous avez demandé à votre assistante de région, de se connecter pendant le week-end avec votre clef 4G afin qu’elle puisse mettre à jour les éléments chiffrés sur le PowerPoint de votre présentation.
Il n’est pas tolérable que vous donniez des instructions à votre assistante régionale pour qu’elle travaille chez elle le week-end. De telles instructions de votre part démontrent une absence de gestion et d’anticipation des tâches devant être effectuées.
Nous avons également relevé ces dernières semaines, que le traitement et la gestion des dossiers courants des clients n’étaient pas effectués (absence de compte rendu, absence d’accord, non respect des procédures internes, dossiers incomplets ‘).
Là encore, cette situation n’est pas acceptable, elle pénalise l’activité et la bonne gestion des dossiers par les différents services de la société.
Par courrier de recadrage du 9 avril 2018, nous vous avions déjà alerté sur les dysfonctionnements relevés au sein de votre région, notamment quant à vos assistantes dont deux ont souhaité rompre leur contrat de travail et une se trouve aujourd’hui toujours en arrêt maladie, cette dernière étant actuellement remplacée
Nous vous demandions ainsi, compte tenu de votre poste, de faire preuve d’exemplarité, notamment dans l’organisation, le respect des horaires et les relations professionnelles (discours, attitudes et comportements).
Nous vous avions également alerté sur la nécessité d’avoir « une gestion des dossiers qui devrait être plus rigoureuse et davantage suivie ».
Or, un mois ¿ après sa prise de fonction, votre nouvelle assistante de région nous a fait un retour sur son intégration et sur sa prise de poste, elle nous a fait part de certains de vos agissements dans le but d’améliorer le fonctionnement de la région ainsi que votre collaboration.Elle a ressenti également pendant cette période un découragement et une résignation de la part des équipes, informations qui concordent avec le discours de vos anciennes assistantes.
A l’évidence, vous avez refusé de tenir compte de nos précédentes observations et les faits rappelés ci-dessus constituent de nouveaux manquements dans l’organisation de votre travail avec votre assistante de région et dans la gestion des dossiers.
Vous avez reconnu que vous n’aviez pas pris la mesure des différents échanges écrits et oraux et que de nombreuses tâches de votre définition de fonction n’étaient pas réalisées aujourd’hui.
Nous considérons que les faits visés ci-dessus constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement et nous vous précisons que la période de la mise à pied conservatoire qui vous a été notifiée le 18 juillet 2018, vous sera rémunérée.
Nous vous précisons que nous vous dispensons d’exécuter votre préavis d’une durée de 3 mois, votre rémunération vous étant versée aux échéances habituelles (…). »
Il résulte de l’article L.1235-1 du code du travail que la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse de licenciement n’incombe spécialement à aucune des parties, toutefois, le doute devant bénéficier au salarié, l’employeur supporte, sinon la charge du moins le risque de la preuve.
Concernant la valeur probante des témoignages produits par l’employeur, il y a lieu de rappeler qu’en matière prud’homale, la preuve est libre et dès l’instant que la partie à qui sont opposées des attestations a pu en contester la force probante, notamment en faisant valoir que les auteurs des attestations étaient soumis à un lien de subordination avec l’employeur, il appartient au juge saisi de cette contestation d’apprécier souverainement la valeur et la portée des dites attestations.
Le juge ne peut, par principe, dénier toute valeur probante à une attestation émanant d’un salarié soumis à un lien de subordination avec son employeur sans un examen préalable du contenu de l’attestation et des circonstances de l’espèce.
– Sur la régularité du licenciement :
Dans son paragraphe concernant sa demande de dommages intérêts pour licenciement vexatoire, le salarié affirme qu’il a été licencié par un coup de téléphone reçu chez lui pendant ses vacances ce qui constitue un licenciement verbal et comme tel dépourvu de cause réelle et sérieuse, ce que la société conteste.
M. [W] ne rapporte pas la preuve de ses allégations alors que le licenciement lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 21 août 2018, réceptionnée le lendemain. Ce moyen doit donc être rejeté.
– Sur la cause du licenciement :
– Sur les tests d’évolution professionnelle :
M. [W] soutient qu’il a envoyé à ses collaborateurs de simples éléments de révision à partir des « tests jeunes vendeurs » qui ne correspondent pas à ceux auxquels sont soumis les vendeurs confirmés souhaitant évoluer au poste de chef de vente ; que ces éléments étaient disponibles sur le serveur interne de la société et donc accessibles à ses collaborateurs ; que l’ensemble de son équipe ayant passé les tests originaires a évolué à l’issue de la seconde série de tests ce qui signifie que leur évolution est bien due à leurs compétences et connaissances personnelles et non à la prétendue fraude aux tests qui lui est reprochée et qu’il n’avait aucun intérêt personnel à la réussite de ses collaborateurs.
La société soutient, en substance, que M. [W] a reconnu les faits reprochés dans son courrier de contestation du licenciement du 3 septembre 2018, que les éléments de correction envoyés à sept de ses neuf collaborateurs n’étaient pas en accès libre aux délégués, que si la formation des collaborateurs pour que ces derniers réussissent aux tests fait partie des actions de management d’un animateur régional pour le développement de sa délégation, il n’en va pas de même de la seule communication de corrections de tests à une partie des collaborateurs et que le fait qu’il ait demandé aux salariés d’effacer les messages électroniques qu’il leur avaient envoyés ne s’explique que par le caractère frauduleux de ces envois.
Au titre des fonctions d’animateur de région qu’occupait M. [W], figure la gestion des ressources humaines de son équipe notamment la gestion du mérite.
La société rapporte la preuve par la production des grilles de tests et des messages électroniques adressés par le salarié à sept membres de son équipe de ce que M. [W] a adressé à ceux-ci les résultats des tests d’évolution professionnelle ce qui leur a permis d’obtenir d’excellents résultats.
L’intention frauduleuse résulte suffisamment du fait que :
– ainsi qu’en atteste M. [R], directeur informatique, dont le témoignage n’est pas utilement contredit par le salarié, ces éléments de correction n’étaient pas accessibles aux collaborateurs de M. [W], qui, dans l’hypothèse inverse, n’aurait pas eu besoin de les leur communiquer en pièces jointes d’un message électronique,
– le salarié ne conteste pas avoir demandé aux personnes concernées d’effacer les messages lorsqu’il a été découvert, ce qui ne se justifie que dans l’hypothèse d’un procédé déloyal,
– les éléments de révision n’ont pas été adressés à l’ensemble de l’équipe, deux collaborateurs ayant été exclus de ces communications, discrimination sur laquelle M. [W] ne s’explique pas.
Le comportement du salarié a eu pour conséquence de fausser les tests, entraînant une rupture d’égalité entre les candidats qui s’est manifestée par l’obtention de notes anormalement élevées de la part des VRP de la région Nord, contraignant la société à en organiser de nouveaux.
Il s’agit bien d’un manquement de M. [W] à ses obligations contractuelles.
– Sur l’organisation du travail avec l’assistante :
La société fait valoir, en substance, que l’argumentation du salarié selon laquelle c’est son assistante qui a demandé à finir le travail le week-end démontre une conception du management très particulière et qu’il a fait l’objet d’un courrier de recadrage le 20 avril 2018 à propos d’un certain nombre de dysfonctionnements au sein de sa région ayant entraîné le départ de la presque totalité des effectifs en peu de temps
M. [W] soutient que c’est son assistante, qui voulait absolument partir à l’heure ce jour là en raison de contraintes impératives, qui a souhaité finir le travail tranquillement chez elle « sur son canapé » le week-end, qu’elle n’a finalement pas travaillé en raison d’une impossibilité informatique, que, même s’il revient à un manager de ne pas soutenir l’initiative de son salarié de travailler les fins de semaine, il ne peut lui être sérieusement reproché d’avoir voulu encadrer la démarche isolée et consciencieuse de sa secrétaire dont l’attestation a été réclamée par la direction.
Le salarié n’apporte pas d’élément permettant de contredire utilement les propos mesurés tenus par son assistante, Mme [U], dans un courriel du 17 juillet 2018, selon lesquels elle a été surprise qu’il lui demande le vendredi 29 juin de préparer la présentation de la réunion prévue le lundi 2 juillet pendant le week-end, lui proposant de lui laisser sa clé 4G à cet effet, l’informaticien étant revenu vers elle pour installer le logiciel, précisant qu’elle n’avait « pas donné suite pour le moment ».
Au demeurant, il résulte de ses propres explications, que son assistante ne demandait pas à partir plus tôt mais seulement à partir à l’heure prévue le vendredi ce qui était son droit le plus strict.
Il importe peu à cet égard que l’assistante ait ou non effectivement travaillé le week-end, surtout pour des raisons d’impossibilité technique telle qu’avancé par le salarié, la demande étant en soi anormale.
Ce comportement contrevient ouvertement aux dispositions du code de travail ce que ne pouvait ignorer M. [W], de par ses fonctions, et qui avait été précédemment rappelé à l’ordre par un courrier de recadrage du 20 avril 2018, l’alertant sur sa gestion préoccupante de ses équipes, un turn over anormal et lui rappelant son obligation d’exemplarité notamment dans l’organisation et le respect des horaires.
De plus, le salarié avait été sanctionné par un avertissement le 30 avril 2018 pour ne pas avoir eu un comportement adapté vis à vis d’un membre de son équipe se plaignant de mal être au travail.
Les pièces et documents versés aux débats permettent donc de tenir pour établis les griefs ci-dessus examinés.
M. [W], qui affirme que ces faits sont sans rapport avec son licenciement, n’apporte aucun élément à l’appui de ses allégations et ne le démontre par conséquent pas.
Ainsi, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs énoncés dans la lettre de notification de la rupture, le licenciement doit être considéré comme justifié par une cause réelle et sérieuse, le jugement étant confirmé de ce chef et en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [W].
2/ Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire :
Au soutien de sa demande le salarié invoque le fait que la société a pris attache avec lui durant ses congés estivaux passés en famille pour lui annoncer son licenciement, ne l’a finalement licencié que trois semaines après cette annonce de sorte qu’il est resté dans l’expectative durant toute cette période.
Dès lors que, la preuve de ce licenciement verbal n’a pas été rapportée, cette demande ne peut qu’être rejetée.
3/ Sur les autres demandes :
M. [W], qui perd le procès, doit en supporter les dépens et sera condamné à verser à la société la somme indiquée au dispositif sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
confirme le jugement en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
condamne M. [W] à payer à la société [I] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
le condamne aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.