Non-respect des procédures internes : 18 janvier 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00023
Non-respect des procédures internes : 18 janvier 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00023
Ce point juridique est utile ?

18 janvier 2023
Cour d’appel de Limoges
RG n°
22/00023

ARRET N° .

N° RG 22/00023 – N° Portalis DBV6-V-B7G-BIJGN

AFFAIRE :

M. [E] [S]

C/

S.A.S. [T] MATERIAUX

PLP/MS

Demande d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Grosse délivrée à Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, Me Frédérique FROIDEFOND, avocats,

COUR D’APPEL DE LIMOGES

Chambre économique et sociale

—==oOo==—

ARRET DU 18 JANVIER 2023

—===oOo===—

Le DIX HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Monsieur [E] [S]

né le 22 Mars 1968 à [Localité 4], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Frédérique FROIDEFOND de la SELARL LABONNE ET ACDP, avocat au barreau de BRIVE

APPELANT d’une décision rendue le 16 DECEMBRE 2021 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION DE DEPARTAGE DE TULLE

ET :

S.A.S. [T] MATERIAUX, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES, Me Florence MILAN de la SCP CAPSTAN, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

—==oO§Oo==—

Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 21 Novembre 2022. L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2022.

La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER et de Madame Géraldine VOISIN, Conseillers, assistés de Madame Line MALLEVERGNE, Greffier. A cette audience, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 18 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

—==oO§Oo==—

LA COUR

—==oO§Oo==—

EXPOSE DU LITIGE :

M. [S] a été engagé le 1er mars 2018 par la société [T] MATERIAUX dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée en qualité de responsable des ventes export et des achats.

Préalablement à la cession de la totalité des parts de la société GROUPE [E] [S] à la société [T] MATERIAUX, M. [S] était le directeur de la première société.

Par une lettre remise en main propre le 14 décembre 2018, M. [S] s’est vu convoquer à un entretien préalable fixé le 21 décembre suivant, convocation assortie d’une mise à pied à titre conservatoire.

Par un courrier recommandé du 10 janvier 2019, M. [S] a été licencié pour faute grave aux motifs d’un non-respect réitéré des procédures internes dans l’exécution de ses fonctions, d’un comportement irrespectueux et d’un manquement à son obligation de loyauté.

***

Contestant son licenciement ainsi que la mise à pied conservatoire dont il avait fait l’objet, M. [S] a saisi le conseil de prud’hommes de Tulle d’une demande reçue le 9 janvier 2020.

Par jugement de départage du 16 décembre 2021, le conseil de prud’hommes de Tulle a :

– dit le licenciement de M. [S] fondé sur une faute grave ;

– débouté M. [S] de ses demandes de paiement d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts au titre du préjudice moral, de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et de la période de préavis ;

– débouté la société [T] MATERIAUX de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [S] au paiement des dépens ;

– rejeté le surplus des demandes.

Cette juridiction a considéré que M. [S] avait commis une faute en dépassant l’encours autorisé d’un client dans l’irrespect des procédures commerciales de la société et en ayant commis des erreurs dans le suivi de ses dossiers, comme il l’avait en partie reconnu.

M. [S] a interjeté appel de la décision le 12 janvier 2022, son recours portant sur l’ensemble des chefs de jugement le déboutant de ses demandes.

***

Aux termes de ses écritures du 6 avril 2022, M. [S] demande à la cour de :

– réformer le jugement dans l’ensemble de ses chefs critiqués ;

Statuant à nouveau :

– juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;

– ordonner l’annulation de la mise à pied à titre conservatoire ;

– condamner la société [T] MATERIAUX à lui payer les sommes de :

* 76 523,74 € d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

* 118 946,68 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 16,5 mois de salaire ;

* 43 253,34 € au titre du préjudice moral distinct correspondant à 6 mois de salaire ;

* 21 939,99 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 2 193,99 € au titre des congés payés y afférents ;

* 6 825,77 € de rappel de salaire pour la période du 14 décembre 2018 au 10 janvier 2019 correspondant à la mise à pied à titre conservatoire, outre la somme de 682,58 € de congés payés y afférents ;

* 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonner que toutes les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation en conciliation par la société [T] MATERIAUX pour les créances salariales et de la décision à intervenir pour les créances indemnitaires ;

– condamner la société [T] MATERIAUX aux entiers frais et dépens.

M. [S] conteste son licenciement pour faute grave dont il indique qu’il n’est motivé que par la volonté de l’employeur de se séparer de lui, indiquant qu’aucun des griefs formulés ne constituent une faute, a fortiori grave. En effet, concernant le non-respect des procédures commerciales, et le dépassement des encours autorisés, il explique qu’il n’avait pas la charge de les suivre, ceux-ci pouvant être revus à la hausse et à la baisse en très peu de temps selon la conjoncture et M. [S] étant en tout état de cause un commercial, un service spécialisé étant en charge de ces problématiques. En outre la société [T] MATERIAUX ne justifie d’aucun préjudice en lien de causalité avec les faits incriminés. Il conteste avoir expédié des marchandises sans les avoir facturées puisque cela n’est pas dans ses attributions. S’agissant du suivi d’activité ou de l’absence d’utilisation régulière du logiciel AS 400, il affirme que cela relevait des attributions de sa secrétaire. M. [S] nie également avoir eu un comportement déplacé à l’égard de sa hiérarchie ou avoir mené une activité concurrentielle, précisant que son activité portait sur la vente de grumes et la trituration, activités qui ne font pas partie de celles de la société [T] MATERIAUX qui n’a, en tout état de cause, jamais cessé de lui verser la contrepartie à la clause de concurrence, ni engagé de procédure à son encontre.

Dès lors, il estime être fondé à obtenir l’annulation de la mise à pied conservatoire, ainsi que la réparation des préjudices subis, notamment son préjudice moral distinct issu de l’éviction pure et simple ainsi que son caractère brutal.

Aux termes de ses écritures du 14 juin 2022, la société [T] MATERIAUX demande à la cour de :

– confirmer le jugement dont appel ;

– débouter M. [S] de l’intégralité de ses demandes ;

– condamner le même à lui verser la somme de 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance en disant qu’ils seront recouvrés par Maître DEBERNAD-DAURIAC en application de l’article 699 du code de procédure civil.

La société [T] MATERIAUX soutient que le licenciement pour faute grave de M. [S] est parfaitement justifié au regard de la gravité des manquements commis par celui-ci, manquements susceptibles d’avoir des conséquences financières néfastes pour la société. Elle affirme que le salarié n’a pas respecté les procédures internes applicables en dépassant les encours autorisés, alors qu’il avait bien été formé aux dites procédures contrairement à ce qu’il affirme, en ne faisant pas le suivi financier de la facturation au paiement dans le respect des procédures qu’il lui appartenait de réaliser, ne faisant pas non plus de suivi de l’activité, expédiant des marchandises sans établir un bon de facturation ou s’assurer qu’il l’avait été et commettant diverses erreurs préjudiciables à l’entreprise. Par ailleurs, la société employeur précise que M. [S] avait un comportement irrespectueux à l’égard de son responsable direct et manquait clairement à l’obligation de loyauté qui était la sienne en développant une activité concurrente à celle de la société, violant par là même son engagement de non concurrence conformément au protocole d’accord du 1er mars 2020 relatif aux engagements de non concurrence et de non débauchage des cédants.

Enfin, concernant l’indemnité de licenciement, la société fait valoir que celle-ci ne peut être fictivement gonflée en raison de l’ancienneté résultant de son mandat de président, précisant qu’aucune reprise d’ancienneté n’était contractuellement prévue, les autres demandes notamment au titre de prétendus préjudices, étant infondées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

Faits retenus par CPH en tant que faute grave :

Le non-respect des procédures commerciales, et le dépassement des encours autorisés :

L’absence de suivi de son activité :

Faits au sujet desquels le CPH ne s’est pas prononcé :

Le fait d’avoir expédié des marchandises à la société SODICOM sans les avoir facturées :

Le fait de ne pas avoir utiliser régulièrement le logiciel AS 400 :

Le comportement déplacé de Monsieur [S] à l’égard de sa hiérarchie :

MOTIFS DE LA DECISION

1/ Sur la rupture du contrat de trvail :

Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse (article L 1232-1 du code du travail).

La faute grave, selon une jurisprudence constante, est celle qui autorise le licenciement pour motif disciplinaire en raison d’un fait ou d’un ensemble de faits, imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations du travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien d’un salarié dans l’entreprise.

C’est à l’employeur, qui invoque l’existence d’une faute grave, d’en rapporter la preuve.

C’est au regard des motifs énoncés dans la lettre de licenciement que s’apprécie son bien fondé.

En l’occurrence M. M. [E] [S] a été licencié pour faute grave en raison d’une violation des procédures en vigueur, expédition de marchandises non facturées, manquement à son obligation de loyauté, absence de suivi de son activité et comportement déplacé à l’égard de sa hiérarchie.

1/1 Sur la violation des procédures en cours au sein de la société :

1/1/1 Sur le dépassement de l’encours autorisé :

M. [S] avait été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 1er mars 2018 en qualité de responsable des ventes exports et des achats, moyennant une rémunération mensuelle brute de 7.000 €. Dans le cadre de ses fonctions il avait pour mission essentielle de développer l’activité bois au sein de la Société. Selon sa fiche de fonctions, il était responsable de l’atteinte des objectifs de chiffres d’affaires et de marge de son activité ou de son portefeuille dans le respect de la politique commerciale de l’entreprise.

Il devait, notamment, maîtriser la réglementation, les techniques et procédures relatives à son service et suivre leurs évolutions. Il lui appartenait également d’informer et d’alerter la direction sur les risques, enjeux et dysfonctionnement qu’il pouvait être amenés à rencontrer dans l’exercice de ses fonctions.

L’entreprise attribuait à chaque client, au regard de sa situation financière, un encours autorisé, qui correspondait au montant total des crédits en cours, ce montant pouvant varier en fonction des conditions de paiement accordées aux clients et du niveau d’activité. Cet encours dépendait de l’agrément qui était accordé par l’assureur crédit pour couvrir les factures, en fonction de la qualité des clients. La bonne gestion de cet encours clients était essentielle pour se prémunir à l’encontre des clients insolvables ou qui rencontrent des difficultés de paiement, afin d’éviter à l’entreprise de rencontrer de graves difficultés financières.

C’est ainsi que l’encours autorisé pour le client SODICOM, était, jusqu’au 5 décembre 2018

de 100.000 €, date à partir de laquelle tout encours a été supprimé dans la mesure où l’assurance-crédit a refusé de continuer à donner un agrément au regard de la situation financière de ce client.

Malgré cet absence d’agrément et l’existence d’un encours M. [S] a accepté une nouvelle commande le 11 décembre 2018 portant le montant total des commandes en cours à 427.004,06 €.

En agissant de la sorte M. [S] a exposé la société [T] Matériaux à un très important risque de factures impayées et de futures factures pouvant revenir impayées, d’un montant de 427.004 € sans aucune possibilité d’assurer cette éventuelle perte. Il l’a fait en totale méconnaissance de la procédure applicable au sein de la société s’agissant des crédits clients, laquelle interdisait l’acceptation de toute commande directe sur un compte en dépassement d’encours et lui imposait de s’assurer, avant chaque commande, de l’agrément dont disposait le client et de son montant.

M. [S] ne peut méconnaître avoir eu connaissance de la procédure à suivre en la matière, notamment pour avoir suivi une formation spécifique le 27 mars 2018, comme l’attestent M. [F], contrôleur de gestion au sein de la société, qui a dispensé cette formation à M. [S] et à une de ses collègues, Mme [L]/[P] [W] laquelle précise: ‘ En mars 2018, nous avons été formés, [E] [S] et moi-même, aux procédures [T] MATERIAUX et notamment sur l’utilisation de l’option 1 de l’AS400 sur les règles du crédit client, sur la gestion de l’encours et sur l’édition obligatoire d’un bon de livraison avant d’expédier de la marchandise. Lors de cette formation dispensée par Monsieur [F] [C], nous avons pratiqué l’utilisation de l’option pendant plusieurs heures. La formation était très claire et toutes les questions en suspens ont été levées. » ‘.

L’information relative à l’encours ressort du ‘mémo’ client accessible sur le logiciel de la société, mis à jour par les différents services internes.

Dans un courriel qu’il a adressé à son employeur, M. [A] [T], le 21 décembre 2018, M. [S] n’a d’ailleurs pas contesté expressément ce fait mais s’est attaché à démontrer que sa grande expérience ‘lui avait appris à connaître les dirigeants des entreprises et à juger leur capacité à honorer leurs engagements’ ce qui l’avait amené à gérer personnellement la situation du client SODICOM. Il a ainsi reconnu s’être délibérément affranchi des procédures en cours au sein de l’entreprise, qu’il connaissait et qui lui imposaient de tenir compte de la limite d’encours fixé par le service crédit client du fait de l’agrément de l’assureur SFAC, ou d’avertir sa hiérarchie de la situation.

En violant cette règle M. [S] a commis un grave manquement qui était susceptible de générer d’importantes difficultés financières pour l’entreprise.

La diminution de l’encours à compter du 5 décembre 2018 ou le fait que les 13 commandes en cours ne devaient pas partir en même temps, ne saurait justifier le non-respect de la procédure par M. [S].

Ce dernier prétend également que la gestion de l’encours devait s’apprécier au moment de l’envoi de la commande et non avant. Cette affirmation est cependant contredite par Mme [B] [V], responsable crédit client, au sein de la Société qui précise que « Le suivi quotidien et le contrôle de l’encours incombent aux opérationnels (ce qui était le cas de M. [S]), lors de la validation des commandes afin de respecter les encours fixés par le service client. »

M. [S] ne peut efficacement prétendre qu’il était uniquement chargé de trouver des vendeurs et des acheteurs et de leur proposer les produits de la société, à l’instar d’un commercial. Selon sa fiche de poste il était ‘responsable des ventes export et des achats’, ayant pour objectif ‘l’amélioration de toutes les conditions d’achat relatives à l’activité industrielle bois’, chargé de ‘définir et animer la politique achat’ de ‘mener les négociations avec les fournisseurs dans un objectif d’amélioration des conditions d’achat’ , chargé ‘d’informer et alerter la direction sur les risques, enjeux ou dysfonctionnement’. Il était ‘responsable de l’atteinte des objectifs de chiffres d’affaires et de marge de son activité, dans le respect de la politique commerciale de l’entreprise.’.

Il était également expressément chargé de réaliser ‘le suivi financier, de la facturation au paiement du client en passant par les relances des impayés.’

Il appartenait donc à M. [S] de surveiller les encours de ses clients, ou de veiller à ce qu’une personne de son équipe le fasse, avant de traiter chaque contrat, à tout le moins d’alerter la direction si la situation d’un client vis à vis de son encours lui paraissait incohérente ou inadaptée.

Pour avoir négliger de respecter la procédure qui s’imposait et avoir fait courir à son entreprise un risque financier d’envergure, compte tenu de l’importance du dépassement de l’encours, c’est de manière justifiée que les premiers juges ont considéré que M. [S] avait commis une faute d’une particulière gravité.

1/1/2 Sur le suivi de son activité par M. [S] :

Certaines commandes expédiées pour le client SEDICOM n’ont pas été facturées par M. [S] pour un montant total de 65.720 € dans l’irrespect de la procédure interne qui prévoyait expressément que toute livraison de marchandises devait préalablement donner lieu à l’établissement d’un bon de facturation.

Cette tâche incombait personnellement à M. [S], comme cela a été précédemment indiqué, sauf à pouvoir la déléguer à un autre salarié mais dans ce cas, en s’assurant de sa exécution, ce qui n’est nullement démontré en l’occurrence.

Il s’agit d’une nouvelle violation des les procédures internes ayant eu pour effet de créer un risque financier à l’entreprise.

Si cette faute est d’une gravité moindre que la précédente, elle s’y ajoute.

Par ailleurs M. [S] a signé un contrat avec le fournisseur AILINTERNATOINAL d’un montant de 25 000 € prévoyant la livraison de deux containers de pièces en pin alors que le client avait passé une commande de deux containers de pièces en sapin. M. [S] a fait peser un risque financier non négligeable pour l’entreprise le client ayant été en droit de refuser cette commande. En outre il s’agissait d’un fournisseur qui n’était pas référencé au sein de la société et dont le choix n’avait pas été validé par le directeur de l’activité bois, M. [M] [K], contrairement à la procédure qui devait être suivie et dont M. [H] avait été informé, notamment par un courriel du 24 août 2018 qui précisait qu’elle serait effective à compter du 3 septembre 2018.

D’autre part, le 10 décembre 2018, lors d’un contrôle des marges dégagées sur l’activité export, il a été constaté que M. [H] avait accepté une commande de 6 989 € pour le compte du client MATERIAUX BOIX EXPORT, dégageant une marge très faible de 9,29% dont il a ultérieurement reconnu qu’il s’agissait d’une erreur de facturation.

Par ailleurs, alors qu’il incombait à M. [S] de mettre en place une politique d’achat pertinente pour l’activité industrielle bois, qui se traduisait nécessairement par une optimisation des stocks et par la résolution des problèmes d’approvisionnement, il est apparu qu’il avait mal géré les stocks de l’usine d'[Localité 2] dont la valeur est passée de plus de 5,7 millions d’euros à fin août 2018 à 6,7 millions d’euros à fin novembre 2018.

Cette situation a été, notamment, générée par l’absence d’utilisation suffisante de la part de M. [H] du logiciel AS400, lequel permettait d’avoir une vision globale de l’activité commerciale du site, à l’utilisation duquel il avait été formé en mars 2018.

Les attestations de M. [F] et Mme [L] confirment qu’il avait été sensibilisé à l’importance que revêtait ce logiciel et il ne peut efficacement considérer que cela ne relevait pas de ses attributions personnelles en invoquant l’intervention d’une autre salariée, Mme [U] laquelle occupait un poste «d’interlocuteur commercial » et avait repris la main sur le dossier SODICOM afin d’épurer l’encours client qui n’avait pas été géré par M. [S].

Les fautes reprochées par son employeur à M. [S] en matière de suivi de l’activité sont avérées et diversifiées. Elles relèvent d’un non-respect des procédures internes et ont fait courir à l’entreprise un risque financier très conséquent.

1/2 Sur le comportement de M. [S] à l’égard de sa hiérarchie :

M. [S] a commenté en russe, sur le réseau professionnel, une publication LinkedIn de M. [K], le directeur des activités bois, qui postait ses v’ux pour la nouvelle année, dont la signification, selon la propre traduction de M. [S], était la suivante: ‘Celui qui sème l’injustice moissonnera le malheur’.

Dans un courriel du 21 décembre 2018 qu’il a adressé à M. [A] [T], le président directeur général de la société, il disqualifie M. [K] en lui reprochant de se présenter en tant que ‘sauveur de l’humanité’, écrivant qu’il s’agit d’ ‘un bon ingénieur mais il lui manque quelque chose entre les jambes pour devenir un leader’, et en le traitant de ‘mickey qui vient me mettre en rouge alors qu’il ne sait pas faire la différence entre un douglas et un meleze…’ .

Ce ton moqueur et sarcastique envers un collègue et son supérieur hiérarchique, est, pour le moins, irrespectueux et constitue un manquement de la part de M. [S] à ses obligations professionnelle.

1/3 Synthèse

Il résulte de l’ensemble de ces faits, avérés, reprochés par son employeur à M. [S], et sans qu’il soit nécessaire d’examiner celui relatif au non-respect de son obligation de loyauté découlant de son contrat de travail, qu’ils constituent une violation par M. [S] des obligations découlant de son contrat de travail et des relations du travail, d’une importance telle qu’ils rendaient impossible son maintien dans l’entreprise.

Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

2/ Sur les demandes annexes :

M. [S], qui n’obtient pas gain de cause en appel prendra en charge les dépens de cette instance et l’équité commande de le condamner à verser à la SAS CHAUSSONS MATERIAUX, contrainte d’engager des frais pour faire valoir ses justes droits, une indemnité de 1 500 €.

—==oO§Oo==—

PAR CES MOTIFS

—==oO§Oo==—

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Y ajoutant,

CONDAMNE M.[E] [S] aux dépens d’appel ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [S] à verser à la société [T] MATERIAUX une indemnité de 1 500 €.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x