Non-respect des procédures internes : 24 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05175
Non-respect des procédures internes : 24 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05175
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24 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/05175

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRET DU 24 JANVIER 2023

(n° , 13 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05175 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCGZN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Février 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LONGJUMEAU – RG n° 18/00410

APPELANT

Monsieur [S] [M]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Delphine RICARD, avocat au barreau de PARIS, toque : R280

INTIMEE

S.A.S. CARREFOUR MARCHANDISES INTERNATIONALES

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Catherine VALANTIN, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, et par Madame Victoria RENARD, Greffière présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DU LITIGE

M. [S] [M], né en 1967, a été engagé par la société SAS Carrefour Marchandises Internationales, par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 25 octobre 1988 en qualité d’employé libre-service au secteur bazar du magasin de [Localité 6].

A compter du 1er décembre 2010, le contrat de travail de M. [M] a été transféré au sein de la société Carrefour Marchandises Internationales au poste de directeur coordination non alimentaire, statut directeur niveau D1.

Suite à un avenant signé le 1er avril 2014, M. [M] a été promu au poste de directeur des opérations commerciales non alimentaires, statut directeur D2.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce de détail et de gros prédominance alimentaire.

Le 4 octobre 2017, par lettre remise en main propre, M. [M] a été convoqué à un entretien préalable fixé le 13 octobre 2017 en vue d’une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.

Suite à cet entretien, un courrier a été envoyé à M. [M], pour des informations complémentaires, auquel il répondra le 20 octobre 2017.

M. [M] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre datée du 30 octobre 2017.

A la date du licenciement, M. [M] avait une ancienneté de 29 ans et la société Carrefour Marchandises Internationales occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, outre des rappels de salaires, M. [M] a saisi le 16 avril 2018 le conseil de prud’hommes de Longjumeau qui, par jugement du 20 février 2020, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

– dit que le licenciement de M. [M] repose sur une faute grave,

– déboute M. [M] de l’ensemble de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail,

– déboute M. [M] de sa demande de rappel de rémunération variable et de congés payés afférents,

– déboute M. [M] de sa demande de remboursement de frais,

– condamne la Sas Carrefour Marchandises Internationales à verser à M. [M] la somme de 707 euros au titre de rappel de salaire sur prime de vacances,

– rappelle l’exécution provisoire de droit pour cette condamnation en application des dispositions des articles R 1454-28 et R 1454-14 du code du travail,

– déboute M. [M] du surplus de ses demandes,

– rejette les demandes des deux parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

Par déclaration du 29 juillet 2020, M. [S] [M] a interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 6 juillet 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 25 janvier 2022, M. [M] demande à la cour de :

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Longjumeau du 20 février 2020 en ce qu’il a condamné la société Carrefour Marchandises Internationales à verser à M. [M] la somme de 707 euros au titre de rappel de salaire sur prime de vacances,

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Longjumeau du 20 février 2020 en ce qu’il a :

dit que le licenciement de M. [M] repose une faute grave,

débouté M. [M] de l’ensemble de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail, à savoir :

* 26.044,14 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 2.604,41 euros bruts au titre des congés payés y afférents

* 8.484 euros bruts de rappel de salaire au titre de la période de mise à pied et 848 euros bruts au titre des congés payés y afférents

* 204.545 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement

* 227.171 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

– débouter M. [M] de sa demande de rappel de rémunération variable à hauteur de 16.034 euros bruts et ainsi que de sa demande de congés payés y afférents à hauteur de 1.603 euros bruts

débouté M. [M] de sa demande de remboursement de frais à hauteur de 532,45 euros

débouté M. [M] du surplus de ses demandes, à savoir :

* 68.151 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice de carrière,

* 68.151 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure vexatoire,

* 3.912,07 euros bruts à titre de rappel de salaire pour prime de fin d’année,

* Capitalisation des intérêts de retard,

rejeté la demande de M. [M] à hauteur de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

dit que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens,

En conséquence, statuant à nouveau :

– Dire et juger le licenciement de M. [M] dépourvu de cause réelle et sérieuse condamner la société Carrefour Marchandises Internationales au paiement des sommes suivantes :

* Indemnité compensatrice de préavis : 26.044,14 euros bruts

* Indemnité compensatrice de CP sur préavis : 2.604,41 euros bruts

* Rappel de salaire au titre de la période de mise à pied : 848 euros bruts

* CP sur mise à pied : 8.484 euros bruts

* Rappel de salaire prime de fin d’année : 3.912,07 euros bruts

* Rappel de salaire sur prime de vacances : 707 euros bruts

* Rappel rémunération variable : 16.034 euros bruts

* CP sur rémunération variable : 1.603 euros bruts

* Indemnité conventionnelle de licenciement : 204.044 euros

* Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 227.171 euros

* Dommages-intérêts pour préjudice de carrière : 68.151 euros

* Dommages-intérêts pour procédure vexatoire : 68.151 euros

* Article 700 du Code de procédure civile : 5.000 euros

– Débouter la société Carrefour de l’ensemble de ses demandes ;

– Assortir le paiement de ces sommes de l’intérêt légal commençant à courir à compter de la saisine s’agissant des rappels de salaires et à compter du prononcé du jugement s’agissant des dommages-intérêts ;

Y ajoutant :

– Condamner la société Carrefour à verser à M. [M] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner la société Carrefour aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 20 janvier 2022, la société Carrefour Marchandises Internationales demande à la cour de’:

A titre principal :

– constater que les faits ayant justifié le licenciement de M. [M] sont matériellement établis et d’une gravité telle qu’ils ne permettaient pas son maintien dans l’entreprise et ce même pendant la durée du préavis,

– constater que M. [M] ne peut prétendre au versement d’une rémunération variable ;

– constater que M. [M] ne peut prétendre au versement d’un rappel de prime de fin d’année;

– constater que M. [M] ne peut prétendre au versement de la prime de vacances ;

En conséquence,

– infirmer partiellement le Jugement rendu le 20 février 2020 par le conseil de prud’hommes de Longjumeau en ce qu’il a considéré que la demande de rappel de prime de vacances était justifiée,

Statuant à nouveau :

– débouter M. [M] de sa demande de rappel de prime de vacances,

– Pour le surplus, confirmer le jugement rendu le 20 février 2020 par le conseil de prud’hommes de Longjumeau en ce qu’il a :

dit et jugé que le licenciement pour faute grave notifié à M. [M] le 30 octobre 2017 est justifié,

débouté M. [M] de l’ensemble de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail (rappels de salaire pour la période afférente à la mise à pied conservatoire, indemnité compensatrice de préavis, indemnité compensatrice de congés payés, indemnité conventionnelle de licenciement, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et préjudice de carrière, dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et délivrance de documents de fin de contrat rectifiés),

débouté M. [M] de sa demande de rappel de prime de fin d’année ;

débouté M. [M] de sa demande de remboursement de frais,

débouté M. [M] de sa demande de rappel de rémunération variable et d’indemnité compensatrice de congés payés afférents,

À titre reconventionnel, condamner M. [M] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire :

Si par extraordinaire votre cour jugeait que le licenciement de M. [M] ne repose pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse :

– fixer le salaire de référence de M. [M] à la somme de 11 319,13 euros,

– réduire le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement qui lui sera allouée à la somme de 203 744,34 euros.

– réduire le montant du rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire à la somme de 2 610,46 euros bruts,

– réduire le montant de l’indemnité compensatrice de congés payés afférent à la période de mise à pied à titre conservatoire à la somme de 261,04 euros bruts,

– réduire le montant de l’indemnité compensatrice de préavis qui lui sera allouée à la somme de 25 962 euros bruts,

– réduire le montant de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents au préavis qui lui sera allouée à la somme de 2 596,2 euros bruts,

– réduire le montant du rappel de prime de fin d’année à la somme de 3 205,07 euros bruts.

A titre infiniment subsidiaire :

Si par extraordinaire votre cour jugeait que le licenciement de M. [M] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse :

– réduire le montant des dommages et intérêts alloués à M. [M] au minimum légal de 3 mois de salaire, soit à la somme de 33 957,39 euros.

– débouter M. [M] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice de carrière,

– débouter M. [M] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

– débouter M. [M] de sa demande d’exécution provisoire de la décision à intervenir.

En tout état de cause

– débouter M. [M] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 mars 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 22 mars 2022. A la suite de l’audience, les parties se sont entendues pour entamer une démarche de médiation. Le 12 avril 2022, la cour d’appel de Paris a ordonné le recours à une médiation qui n’a néanmoins pas permis de trouver une issue favorable à la résolution du litige. L’affaire a été rappelée à l’audience du 22 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de rappeler à titre liminaire que par application de l’article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statuera que sur les prétentions énoncées au dispositif des écritures des parties en cause d’appel, ce que ne sont pas au sens de ces dispositions des demandes visant seulement à ‘dire’ ou ‘constater’ un principe de droit ou une situation de fait.

Sur le licenciement pour faute grave

Pour infirmation de la décision entreprise, M. [M] conteste tous les griefs qui lui sont reprochés.

La société Carrefour réplique que les griefs reprochés à M. [M] sont en réalité parfaitement établis et d’une gravité telle qu’ils ne permettaient pas le maintien de ce dernier dans l’entreprise, et ce même pendant la durée du préavis.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis.

L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En application de l’article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

Il est constant que ce n’est pas la date des faits qui constitue le point de départ du délai mais celle de la connaissance par l’employeur des faits reprochés. Cette connaissance par l’employeur s’entend d’une ‘connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits’. Cette connaissance peut dépendre de la réalisation de vérifications auxquelles l’employeur doit procéder pour s’assurer de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés

La lettre de licenciement du 30 octobre 2017 qui circonscrit les limites du litige est ainsi rédigée:

‘Par lettre remise en main propre le 4 octobre 2017, nous vous avons convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui s’est déroulé le vendredi 13 octobre 2017 et au cours duquel vous n’étiez pas assisté. Au cours de cet entretien, nous vous avons exposé les motifs qui nous conduisaient à envisager votre licenciement. Les éléments recueillis lors de cet entretien ne nous ayant pas permis de modifier notre appréciation des faits, nous avons le regret, par la présente de vous notifier votre licenciement pour faute grave compte tenu des motifs suivants :

Vous avez été engagé au sein du Groupe Carrefour à compter du 28 octobre 1988. En dernier lieu, vous occupiez le poste de Directeur des Opérations commerciales non-alimentaires, statut cadre supérieur niveau D2.

Au cours du mois de septembre 2017, la Direction des ressources humaines a été alertée par une partie des membres de votre équipe sur votre comportement et vos agissements apparaissant comme contraires à nos principes éthiques, à savoir :

– la déclaration abusive de notes de frais ;

– l’octroi injustifié d’avantages personnels à votre collaboratrice, [S] [A] ;

– la relation privilégiée avec l’opérateur belge Promeco ;

– l’existence de conflits d’intérêts avec la société d’emballages SMURFIT KAPPA ;

– la commande de matelas par votre épouse et par votre collaboratrice et Mme [S] [A], sans aucune trace d’achat en magasins ;

– la disparition de produits et d’échantillons.

Après investigations menées par la Direction des ressources humaines, il s’avère en effet que plusieurs éléments vous sont reprochés :

* La déclaration abusive de note de frais

La procédure Frais Professionnels applicable au sein du Groupe Carrefour prévoit que seules les dépenses effectuées dans le cadre des activités professionnelles sont susceptibles d’être remboursées par note de frais.

Or, il s’avère que de nombreuses notes de frais ont été remises par vos soins de manière abusive. En effet, à plusieurs reprises, au cours des années 2016 et 2017, vous avez demandé, alors même que vous étiez en congé et que vous n’effectuiez donc aucun travail au titre eu pour le compte du Groupe Carrefour, le remboursement de diverses notes de frais :

– demande de remboursement de courses de taxi ou de Uber, notamment:

le 13 décembre 2016,

sur la période du 30 janvier au 3 février 2017,

le 3 mars 2017,

le 6 mars 2017,

le 20 avril 2017.

Chacune des dates précitées correspond à des périodes pendant lesquelles vous étiez en congés. Par conséquent, aucun de ces frais n’est susceptible de rentrer dans le cadre de votre activité professionnelle.

– demande de remboursement de parking:

les 30 et 31 janvier 2017,

3 notes de frais pour la période du 22 mars au 27 mars 2016.

Or la procédure Frais Professionnels rappelle que le remboursement de frais de parking est autorisé uniquement dans le cadre de déplacements professionnels. Etant donné que vous étiez en congé sur ces dates, ces frais ne peuvent légitimement entrer clans le cadre de votre activité professionnelle.

– demande de remboursement d’un billet SNCF de Paris à [Localité 6] à 10h27 le 26 juin 2017, date à laquelle vous étiez pourtant absent pour circonstance familiales. Une nouvelle fois, nous vous rappelons que seules les dépenses effectuées dans le cadre de vos activités professionnelles sont susceptibles d’être remboursées par note de frais. En l’occurrence, ce trajet était effectué à titre personnel et ne rentrait pas dans le cadre de votre activité professionnelle et ne pouvait à cet titre vous être remboursé.

– demande de remboursement des frais de carburant notamment sur la période allant du 22 mars au 17 mars 2016, ainsi que le 10 septembre 2016. Or, le remboursement de frais de carburant est autorisé uniquement dans le cadre de déplacements professionnels et uniquement pour les véhicules de fonction, de services ou de location. Une nouvelle fois, ces dépenses ne pouvaient vous être remboursées puisque n’entrant pas dans le cadre de votre activité professionnelle.

En outre, le montant de vos notes de frais a doublé entre l’année 2014 et l’année 2016 sans que vos obligations professionnelles ne le justifient. En effet, le montant total de vos notes de frais pour l’année 2016 s’élève à 14.335 euros contre 6.845 euros en 2014.

Au vu des éléments précités, de nombreuses notes de frais non-conformes ont été émises par vos soins alors même que vous aviez parfaitement connaissance de la procédure applicable en la matière. En effet, vous ne pouviez décemment pas penser que les frais engendrés par vos activités personnelles, au surplus pendant vos congés, étaient susceptibles d’être remboursés par l’entreprise.

* Octroi injustifié d’avantages personnels au profil de votre collaboratrice, [S] [A]

Il ressort des témoignages que nous avons recueilli de vos collaborateurs que aviez une relation privilégiée avec [S] [A].

Il apparaît en effet que vous avez validé de nombreuses demandes de remboursements de frais présentées par [S] [A] qui manifestement ne pouvaient pas se rattacher à son activité professionnelles (notamment remboursement d’une box surprise achetée par [S] [A]).

De même, lors d’un de vos déplacements professionnels en Asie, une commande d’échantillons textiles prêt à porter en taille 36 a été réalisée par [S] [A] sur le site G2000 pour un montant de 210,16 euros, remboursée par note de frais. Or aucune marchandise a été ramenée sur le site de [Localité 7] ou dans les espaces où sont stockés les échantillons. De plus, aucune opération commerciale concernant de prêt à porter n’était prévue lors des opérations vignettes.

A ce propos, plusieurs collaborateurs ont pu soupçonner que votre collaboratrice, [S] [A], portait ces échantillons.

Or d’après la procédure Frais Professionnels, seuls les achats d’échantillons à usage professionnel peuvent être remboursés par note de frais.

Vous avez également permis à [S] [A] à bénéficier indûment d’une opération commerciale d’un de nos fournisseurs sur des matelas (voir ci-après).

* La relation privilégiée avec le fournisseur belge, PROMECO

En tant que Directeur des opérations commerciales non – alimentaires, il vous revenait de piloter et de cadrer les différentes opérations commerciales non-alimentaires.

Afin de mener à bien ces opérations commerciales, votre Direction fait notamment appel à des fournisseurs spécialisés dans la création de campagne Marketing appelés opérateurs.

Or, il s’avère que la plupart des opérations commerciales prévues sur le deuxième semestre de l’année 2017 sont gérées par l’opérateur PROMECO alors même que certaines des dernières opérations avec cet opérateur se sont révélées décevantes.

En outre, la Politique de lutte contre la corruption et le trafic d’influence annexée au Règlement Intérieur prévoit qu’aucun avantage personnel, sous quelque forme que ce soit ne peut être retiré des relations avec les fournisseurs. En outre, le Groupe Carrefour tient à limiter le nombre et le coût des cadeaux et invitations offerts ou reçus par ses collaborateurs. Ainsi, tout cadeau ou invitation, reçu ou offert, doit revêtir un caractère occasionnel et raisonnable, avec un objectif strictement professionnel de promouvoir les activités du Groupe Carrefour.

A ce titre, vous êtes régulièrement sensibilisés sur le respect des principes éthiques applicables au sein du Groupe notamment compte tenu des relations que vous êtes amenés à entretenir avec les fournisseurs dans le cadre des relations commerciales.

Pour autant, dans votre agenda professionnel, le 3 mars 2017, l’opérateur PROMECO vous a envoyé une invitation via la messagerie professionnelle Notes pour la réservation d’un hôtel à New-York – The Nomad Hotel – vous informant des dates de check-in et de check-out. Or, il s’avère que les 3,4 et 5 mars 2017, vous étiez en congé et n’effectuiez donc aucun travail au titre ou pour le compte du Groupe Carrefour. A ce titre, il vous revenait de refuser cette invitation contraire aux principes éthiques et interdite par la Politique de lutte contre la corruption et le trafic d’influence et par le code de conduite professionnelle.

Par ailleurs, il s’avère que vous avez procédé à la signature d’un contrat avec l’opérateur PROMECO le 11 septembre 2017 afin que ce dernier gère l’opération commerciale ‘CACHAREL’. Or, d’après les éléments qui nous sont parvenus, l’affectation de cette opération commerciale à l’opérateur PROMECO n’a été présentée et validée en Comité Exécutif que le 2 octobre 2017. Il apparaît alors très clairement que vous ne respectez pas les procédures applicables au sein du Groupe Carrefour puisqu’il est de votre obligation de faire procéder à la validation des opérations commerciales par les Directeurs de Business Unit avant toute contractualisation. La présentation au Comité Exécutif ayant eu lieu en octobre 2017, il ressort que vous avez attribué une opération commerciale à un opérateur sans avoir obtenu la validation de vos supérieurs hiérarchiques.

Outre le non-respect des procédures internes, l’honnêteté, l’indépendance et l’objectivité du Groupe Carrefour en termes de relations commerciales sont susceptibles d’être remises en cause et par conséquent, de refléter une image négative du Groupe auprès de nos interlocuteurs internes comme externes.

Au delà de sanctions disciplinaires, nous vous rappelons que ce comportement est passible de sanctions civiles et pénales sévères.

* L’existence de conflit d’intérêts avec la société SMURFIT KAPPA

Conformément à la politique de lutte contre la corruption et le trafic d’influence, vous vous devez d’éviter toute situation où vos intérêts personnels pourraient se trouver en conflit avec ceux de la société ou de Groupe ou risqueraient de nuire à votre indépendance de jugement ou à votre intégrité professionnelle tout comme à l’image ou à la réputation du Groupe. Or, il s’avère que dans le cadre des opérations commerciales Naomie Campbell et Ocean Budies, l’opérateur spécialisé dans la création de la campagne Marketing a traité avec l’entreprise SMURFIT KAPPA, spécialisée dans l’emballage, dans laquelle travaille votre épouse [W] [R]. Cette situation pouvant s’apparenter à un conflit d’intérêts est susceptible de troubler la perception de votre intégrité professionnelle et de porter atteinte à l’image ou à la réputation du Groupe Carrefour.

* La commande de matelas par votre épouse et par votre collaboratrice

Au cours de l’année 2017, une opération commerciale Prenium Hotel a été gérée par l’opérateur PROMECO. Dans ce cadre, les clients en magasins bénéficiaient d’un code leur permettant de réaliser la commande de matelas de luxe auprès de l’opérateur PROMECO ainsi que la livraison à domicile. Sur cette opération commerciale, sur les 4004 clients ayant bénéficié de ce code, votre épouse, [W] [R] et votre collaboratrice , [S] [A] se sont vues faire livrer un matelas à leur domicile et ce, alors même qu’elles ne disposaient d’aucun identifiant magasin. Un de vos collaborateurs ayant remarqué cette anomalie a contacté l’opérateur PROMECO qui lui a alors indiqué que pour des raisons techniques, PROMECO avait dû traiter manuellement les commandes. Dès lors, il n’existe aucune trace d’achat en magasin des matelas par votre épouse et par votre collaboratrice.

De surcroît, il s’avère que le service Marketing de l’opérateur PROMECO a interrogé par courrier électronique, le 11 mars 2017, [S] [A] ainsi que [S] [B] en demandant ‘Je sais pas si [Y] a passé le message à vous concernant le lit pour [S] [B]’ Nous n’avons pas de sommier 160, je peux prendre 2 sommiers de 80”. [S] [B] a alors répondu à ce courrier électronique en précisant qu’il devait s’agir d’une erreur car celle-ci n’avait pas commandé de produit dans le cadre de l’opération commerciale Premium Hotel. Il apparaît par conséquente que [S] [A] a commandé un produit de la gamme Prenium Hotel sans qu’aucune trace d’achat en magasin ne puisse être retrouvée.

* La disparition de produits et d’échantillons

En tant que Directeur des opérations Commerciales Non-Alimentaires, il vous appartenait notamment d’organiser les différentes opérations commerciales non-alimentaires se déroulant au Hall Fournisseur, sur le site de [Localité 7].

A ce titre, des produits sont susceptibles d’être commandés afin d’être exposés lors de ces animations. Or, certains produits n’ont pu être exposés car ils étaient introuvables. Pourtant, ils avaient bien été commandés par vos collaborateurs. Il en va notamment ainsi pour une tireuse à bière devant servir à l’animation Krups. A ce propos une de vos collaboratrices, s’apercevant de la disparition de la tireuse à bière, vous a interrogé sur l’endroit auquel la machine se trouvait, ce à quoi vous lui avez répondu ‘je l’ai ramené chez moi’.

Or vous n’êtes pas sans savoir que les échantillons sont destinés à un usage exclusivement professionnel et ne peuvent, par conséquent, être ramenés à votre domicile pour un usage personnel, sans autorisation préalable de votre supérieur hiérarchique.

A titre d’exemple, en D13, espace où sont stockés les échantillons, un fournisseur avait mis à disposition un réfrigérateur- au cours du mois de Février 2017, le réfrigérateur n’y était plus.

Lorsque vos collaborateurs vous ont interrogé à ce sujet, vous leur avez indiqué que le fournisseur avait émis la demande qu’il soit renvoyé. Or, une de vos collaboratrices avait placé dans ce réfrigérateur deux bouteilles de vin pour une occasion spéciale, bouteilles qui avaient alors disparu. Pour autant, deux mois après, [S] [A] les lui a ramenées.

En 2016, lors d’une opération commerciale AZZARO, vous avez expressément demandé à l’un de vos collaborateurs de préparer des produits dans le cadre de cette opération. Deux palettes sont restées introuvables.

L’ensemble des éléments précités démontre très clairement le non-respect de votre part des procédures applicables au sein du Groupe et des principes éthiques, créant ainsi un préjudice financier pour notre entreprise et véhiculant une image négative du Groupe à nos collaborateurs ainsi qu’à nos interlocuteurs externes.

Or, du par votre statut et votre fonction, nous sommes en droit d’attendre de vous un comportement exemplaire. Pour autant, cette attitude fautive, réitérée à maintes reprises, est en totale contradiction avec les principes éthiques, essentiels au bon fonctionnement des relations professionnelles et commerciales de notre entreprise.

Cette situation dont vous êtes le seul responsable ne peut plus perdurer. Votre manque d’exemplarité et de professionnalisme dans l’exercice de votre activité professionnelle caractérisent une faute professionnelle qui ne peut être tolérée au vu de la gravité des éléments précités.

Ces manquements à vos obligations professionnelles les plus élémentaires nous contraignent à cesser notre collaboration et par conséquent, à vous notifier votre licenciement pour faute grave, votre comportement rendant impossible la poursuite de votre activité professionnelle au sein de notre société, même pendant votre préavis …’

Les principaux griefs soulevés par la lettre de licenciement sont :

– des déclarations abusives de notes de frais,

– l’octroi injustifié d’avantages personnels à Mme [A],

– des relations privilégiées avec l’opérateur belge Promeco,

– un conflit d’intérêts avec la société d’emballages Smurfit Kappa ;

– une commande de matelas par Mme [M] et Mme [S] [A], sans aucune trace d’achat en magasin dans le cadre de l’opération Premium Hôtel à laquelle elle se rattachait,

– la disparition de produits et d’échantillons.

Sur les notes de frais :

Il est de droit que l’employeur s’entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire, mais également du supérieur hiérarchique du salarié même non titulaire de ce pouvoir.

Au constat que M. [M] a été convoqué le 4 octobre 2017 à l’entretien préalable au licenciement ; que la dernière note de frais litigieuse est du 26 juin 2017 ; que les frais litigieux étant enregistrés via un logiciel et validés par le supérieur hiérarchique de M. [M], M. [N], la société Carrefour était en capacité de contrôler la réalité des frais dont le remboursement était demandé ; que la société ne justifie pas d’un quelconque flux de demandes de prises en charge de frais qui rendait impossible la connaissance exacte de la réalité et de l’ampleur des frais litigieux, il s’ensuit que les griefs portant sur les notes de frais antérieurs au délai de 2 mois précédant la convocation à l’entretien préalable au licenciement, sont prescrits.

Sur les octrois d’avantages personnels au profit de Mme [A] :

La société Carrefour établit par les justificatifs versés aux débats que M. [M], supérieur hiérarchique de Mme [A], a validé la prise en charge de frais qui n’étaient pas professionnels tels que le remboursement d’une box surprise d’un montant de 16,90 euros, d’un gym-ball de 11,99 euros, d’une coque Iphone de 34,90 euros, de textile prêt à porter de 210,16 euros, d’une commande Uber Eats pour deux personnes livrée le dimanche 30 avril 2017 à domicile pour un montant de 35,50 euros, d’une facture de téléphone relative à des communications passées depuis l’étranger pendant la période de congés d’un montant de 1.388,36 euros, sans que M. [M] qui a validé les notes de frais présentées par sa subordonnée, sans lien avec son activité professionnelle, ne puisse opposer la prescription, Mme [D] ayant alerté des différentes anomalies le service des ressources humaines les 18 et 25 septembre 2017 et la société n’ayant eu connaissance de leur réalité et de leur ampleur qu’à la suite des entretiens réalisés entre le 29 août et le 22 septembre 2017, soit moins deux mois avant la convocation à l’entretien préalable. En outre, la procédure de remboursement des frais prévoit la validation par le supérieur hiérarchique et le paiement par le service comptabilité sans que ce dernier n’ait une quelconque compétence pour rejeter la validation accordée.

En conséquence, la cour retient que ce grief, non prescrit, est établi.

Sur les relations privilégiées avec le fournisseur belge Promeco :

Comme le souligne à juste titre l’appelant, d’une part, la lettre de licenciement qui circonscrit les limites du litige ne vise pas la concession à la société Promeco de clauses contractuelles manifestement contraires aux intérêts économiques du groupe Carrefour ainsi le soutient la société Carrefour dans ses conclusions, d’autre part, ni l’existence de relations privilégiées avec un client, ni le caractère “décevant” des opérations commerciales menées avec celui-ci ne constituent une faute grave, en l’absence de tout élément démontrant un manquement caractérisé.

En outre, la cour retient que la seule mention ‘CP’ (congés payés) sur l’agenda Outlook de M. [M] tel que produit aux débats ne suffit à établir que celui-ci était en congés durant la période du voyage à New-York du 3 au 5 mars 2017. De surcroît, le salarié produit différents documents sur les opérations de promotion avec Promeco et sur les marques apportées, notamment LACROIX Maquillage en 2018, ainsi qu’un message d’un collaborateur de Promeco qui établissent que M. [M] a pu bénéficier du paiement de ce voyage par Promeco mais pour des raisons professionnelles.

En revanche, la société Carrefour verse au dossier une ‘lettre de confirmation opération Cacharel’ en date du 11 septembre 2017 signée par M. [T] pour Promeco SA et par M. [M] pour Carrefour France selon laquelle la société Carrefour ‘s’engage à procéder avec la société Promeco SA …. à une opération de type fidélisation avec une gramme de produits de la maque Cacharel’. Cette lettre a été signée sans avoir été validée par le comité exécutif de la société Carrefour, formalité pourtant nécessaire, ce que M. [M] ne conteste pas, et sans que ce dernier ne puisse opposer qu’il s’agissait là d’une simple lettre d’intention sans engagement de la société Carrefour, eu égard aux termes mêmes de cette lettre.

Ce grief sera donc retenu.

Sur le conflit d’intérêt avec la société d’emballage Smurfit Kappa France :

S’il n’est pas discuté que l’épouse de M. [M] est salariée du groupe Smurfit Kappa, il est établi que celle-ci travaille au sein de l’un des établissements secondaires de la société Smurfit Kappa France situé à [Localité 5], et non pas au sein de la société Smurfit Kappa Display et que selon l’attestation de M. [L], directeur général de Smurfit Kappa France, le site d'[Localité 5] et celui de [Localité 4] sont deux centres de profit à part entière, indépendant, ne commercialisant pas les mêmes produits, que l’opération ‘[P]’ est inconnue de son usine. Le doute devant profiter au salarié, ce grief ne sera donc pas retenu.

Sur la commande d’un matelas dans le cadre par l’épouse de M. [M] et sa collaboratrice Mme [A] :

M. [M] indique qu’il a été décidé avec la société Promeco de simuler deux commandes afin de se rendre compte de la réalité d’incidents de livraison (absence ou retard) et de tenter d’y remédier et ainsi éviter une contre publicité pour le Groupe Carrefour qui aurait pu s’avérer néfaste ; que c’est dans ces conditions qu’il a été décidé de procéder à la commande de deux matelas, livrés l’un à son domicile et l’autre au domicile de Mme [A], tous les deux étant directement en charge de cette opération au sein du service et ayant la responsabilité de garantir le fonctionnement de ce nouveau mode de vente et livraison.

Au vu des éléments produits aux débats établissant la réalité de difficultés de livraison, mais également de la livraison de deux matelas à Mme [M] et à Mme [A], ce que M. [M] ne conteste pas, et de la reprise de matelas en septembre 2017, le doute devant profiter au salarié, ce grief ne sera pas retenu par la cour.

Sur la disparition de produits et d’échantillons :

A l’appui de ce grief, la société Carrefour ne produit qu’un ‘point récapitulatif’ des alertes de la direction des opérations commerciales non alimentaire rédigé par la responsable des ressources humaines sans élément objectif corroborant les disparitions alléguées de telle sorte que ce grief ne sera pas retenu.

Eu égard à l’ancienneté de M. [M] et de son niveau hiérarchique dans la société, la cour retient que les deux griefs établis, à savoir l’octroi de remboursement de frais non professionnels au profit de sa collaboratrice Mme [A] et la signature de lettre d’engagement de la société Carrefour sans validation préalable du comité exécutif, constituent une faute grave de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

C’est donc à juste titre que les premiers juges ont débouté M. [M] de ses demandes relatives à son licenciement et la décision sera confirmée de ce chef.

Sur les circonstances vexatoires du licenciement

Pour infirmation de la décision déférée, M. [M] fait valoir qu’il est particulièrement bien fondé à solliciter des dommages-intérêts distincts compte tenu du préjudice subi du fait des circonstances particulièrement vexatoires de son licenciement ; que le licenciement est intervenu de façon brutale et qu’il a été humilié publiquement devant plusieurs salariés de l’entreprise.

La société Carrefour réplique que le salarié ne démontre par l’existence d’un quelconque préjudice distinct.

En l’espèce, M. [M] a été convoqué à un entretien préalable le 4 octobre 2017 et mis à pied à titre conservatoire. Pour autant, le seul fait d’avoir été mis à pied avec l’obligation de quitter l’entreprise immédiatement ne suffit pas à établir que le licenciement est intervenu dans des circonstances vexatoires ou humiliantes.

Par confirmation de la décision déférée, M. [M] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.

Sur le salaire d’octobre 2017

Le licenciement pour faute grave de M. [M] étant justifié, il doit être débouté de sa demande de rappel de salaire durant la période de mise à pied à titre conservatoire. La décision sera confirmée de ce chef.

Sur le rappel de prime de vacances

La convention collective d’entreprise prévoit que les salariés titulaires d’un contrat de travail ayant une ancienneté d’au moins 12 mois au 1er juin de l’année considérée bénéficient d’une prime de vacances calculée sur une demi-mensualité de leur dernier salaire mensuel de base ; que les salariés ayant une ancienneté d’au moins 16 années au 1er juin de l’année de versement du complément de primes de vacances bénéficieront au mois de juin de l’année considérée d’un complément de prime de vacances représentant une demi-mensualité de leur dernier salaire mensuel de base.

Le contrat de travail ayant été suspendu le 4 octobre 2017 puis rompu le 30 octobre 2017, il n’est dû aucune prime de vacances au titre de l’année 2018.

Le bulletin de paie du mois de juin 2017 mentionne le versement d’une prime de vacances de 4.242 euros bruts dont le versement n’est pas discuté. Il reste dû la prime de vacances pour la période du 1er juin 2017 au 4 octobre 2017, date de la mise à pied à titre conservatoire. C’est donc à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Carrefour à verser à M. [M] la somme de 707 euros au titre de la prime de vacances dans la limite de la demande. La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur la prime de fin d’année pour 2017

M. [M] soutient qu’il n’a pas perçu de prime de fin d’année pour 2017 ; que les absences du salarié n’ont pas d’incidence sur le montant de la prime ; que le licenciement n’était pas justifié, le délai de préavis de 3 mois doit être pris en compte dans le calcul de la prime.

La société Carrefour réplique que M. [M] aurait dû bénéficier d’une prime de fin d’année au prorata temporis de ses périodes d’absence du second semestre 2017, soit la somme de 5.184,66 euros ; qu’elle a déjà versé une prime d’un montant de 5.278,93 euros au salarié ; qu’il ne peut alors valablement solliciter un rappel de prime de fin d’année.

La convention collective d’entreprise Carrefour prévoit que les salariés ayant une ancienneté d’au moins 12 mois au 1er décembre de l’année considérée bénéficient d’une prime de fin d’année calculée sur une mensualité de leur dernier salaire mensuel de base ; qu’en cas de cessation du contrat de travail ou d’absences en cours de semestre, autres que celles autorisées conventionnellement ou ayant donné lieu à un complément de salaire par l’entreprise, le montant de la prime est réduit à raison de 1/180ème par jour calendaire d’absence au cours du second semestre (‘) ».

Le licenciement étant justifié par une faute grave, le délai de préavis ne doit pas être pris en compte dans le calcul du montant de la prime de fin d’année.

Il n’est pas établi que M. [M] a été en absence non autorisée conventionnellement ou en arrêt de travail durant l’année 2017 de telle sorte qu’il aurait dû percevoir une prime de fin d’année d’un montant de 7.070 euros. Or il n’a reçu que 5.278,93 euros. Il s’ensuit que, par infirmation de la décision déférée, la société Carrefour sera condamnée à lui verser la somme de 1.791,07 euros à ce titre.

Sur la rémunération variable de 2017

M. [M] indique qu’il est en droit de recevoir l’intégralité de son bonus de 2017 et fait valoir que tous ses entretiens étaient excellents et ses compétences reconnues.

La société Carrefour répond que dès lors que le contrat de travail de M. [M] a été rompu en cours d’année, il ne pouvait valablement prétendre au versement d’un bonus équivalent à celui obtenu l’année précédente au titre d’une année de travail complète. En outre la société relève que le salarié a bénéficié du versement d’une rémunération variable à hauteur de 4.581 euros au moins de septembre 2017.

Le contrat de travail de M. [M] prévoyait une rémunération pour partie fixe et pour partie variable dite ‘prime de performance dont l’attribution est conditionnée à la réalisation de performances globales et individuelles appréciées par le supérieur hiérarchique ; les modalités de calcul et le versement sont fixées chaque année’.

La société Carrefour ne verse pas aux débats les modalités de calcul de cette prime pour l’année 2017. En 2016, M. [M] a perçu 16.034 euros. Il s’ensuit que pour l’année 2017, la société Carrefour devait lui verser cette prime prorata temporis, soit 13.361,33 euros pour la période du 1er janvier 2017 au 4 octobre 2017. Il a perçu 4.581 euros à ce titre en septembre 2017 de telle sorte que la société Carrefour reste lui devoir la somme de 8.780,66 euros outre 878,06 euros de congés payés afférents. La décision sera infirmée de ces chefs.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

La société Carrefour sera condamnée aux entiers dépens et devra verser à M. [M] la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande au titre de la prime de fin d’année 2017 et au titre de la rémunération variable,

Statuant à nouveau dans cette limite,

CONDAMNE la SAS Carrefour Marchandises Internationales à verser à M. [S] [M] les sommes suivantes :

– 1.791,07 euros au titre de la prime de fin d’année 2017,

– 8.780,66 euros au titre de la rémunération variable pour l’année 2017,

– 878,06 euros de congés payés afférents,

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil des prud’hommes ;

CONFIRME le jugement déféré quant au surplus ;

CONDAMNE la SAS Carrefour Marchandises Internationales aux entiers dépens ;

CONDAMNE la SAS Carrefour Marchandises Internationales à verser à M. [S] [M] la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.

 


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