Non-respect des procédures internes : 27 janvier 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/00248
Non-respect des procédures internes : 27 janvier 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/00248
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27 janvier 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
21/00248

ARRÊT DU

27 Janvier 2023

N° 94/23

N° RG 21/00248 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TOTZ

OB/VM

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LANNOY

en date du

28 Janvier 2021

(RG 20/00094 -section 2 )

GROSSE :

aux avocats

le 27 Janvier 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANTE :

S.A.S.U. DECATHLON FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Nicolas GEORGE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ :

M. [N] [C]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Véronica FREIXEDA, avocat au barreau de TOULOUSE

DÉBATS : à l’audience publique du 06 Décembre 2022

Tenue par Olivier BECUWE

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Olivier BECUWE

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Frédéric BURNIER

: CONSEILLER

Isabelle FACON

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Olivier BECUWE, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 15 Novembre 2022

EXPOSE DU LITIGE :

M. [C] a été engagé en décembre 2006 en qualité d’hôte vendeur, statut employé, par la société Décathlon France (la société) à durée indéterminée et à temps partiel.

Il a fait l’objet d’un avertissement en septembre 2010 pour avoir adopté à l’égard de son supérieur hiérarchique des propos inadaptés.

Il bénéficie de la reconnaissance de travailleur handicapé et, dans le dernier état de la relation contractuelle, il exerçait les fonctions de vendeur sportif pour une rémunération mensuelle brute de 1 215,97 euros.

Le 27 mai 2015, il a fait état auprès de son responsable d’une situation de mal-être au travail, à la suite de laquelle une mission d’écoute a été réalisée par la direction.

Le salarié et l’ensemble des collaborateurs du magasin ont été entendus.

Suite à cela, la société a convoqué M. [C], par lettre du 22 juillet 2015, à un entretien préalable à un éventuel licenciement avec mise à pied conservatoire.

Par lettre du 5 août 2015, l’intéressé a été licencié pour faute grave.

Contestant son licenciement, celui-ci a saisi le conseil de prud’hommes de Lille de demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse lequel a renvoyé l’affaire devant le conseil de prud’hommes de Lannoy qui, par un jugement du 28 janvier 2021, y a fait droit.

La société a fait appel selon déclaration du 24 février 2021.

Par des conclusions récapitulatives notifiées le 29 octobre 2021, auxquelles il est référé pour l’exposé des moyens, l’appelante sollicite l’infirmation du jugement et le rejet des prétentions adverses, ce à quoi s’oppose M. [C] qui, par des conclusions notifiées le 30 juillet 2021, fait un appel incident sur le montant des dommages-intérêts.

MOTIVATION :

La lettre de licenciement repose sur quatre griefs :

1°/ non-respect des procédures internes et de la réglementation : violation de l’article 3-8 du règlement intérieur qui soumet la vente de munitions au bénéfice de clients justifiant préalablement d’une licence de tir ou d’un permis de chasse ;

2°/ insubordination ;

3°/ comportement empreint d’agressivité vis-à-vis des collègues et des clients ;

4°/ non-respect des procédures relatives aux produits défectueux : violation de l’article 6 du règlement intérieur qui prévoit qu’il est interdit d’utiliser à des fins personnelles des

produits défectueux (retirés du linéaire ou échangés aux clients) lesquels peuvent présentés un risque.

S’agissant du premier grief, le salarié excipe de sa prescription au sens de l’article L.1332-4 du code du travail.

Les deux attestations dont se prévaut la société se fonde sur des faits constatés par des collègues en avril et juin 2015 faisant état de ventes de munitions à des clients n’ayant pas justifié d’un permis de chasse valide.

Ils ne sauraient, compte de la date d’engagement de la procédure disciplinaire le 22 juillet 2015, être considérés comme prescrits en totalité, étant rappelé que l’article L.1332-4 du code du travail permet à l’employeur de prendre en compte un fait antérieur à 2 mois si le comportement du salarié a persisté dans ce délai.

M. [C] produit quatre attestations de clients qui exposent que ce dernier leur a systématiquement réclamé leur permis.

Quant aux attestations de la société, elles relatent des propos rapportés : les collègues n’ont pas été témoins directs des faits reprochés.

Les faits 1°/ allégués ne peuvent donc être retenus.

Les faits 2°/ apparaissent beaucoup trop vagues et font état d’un refus, un jour, de la part de M. [C] de répondre au téléphone.

En revanche, les faits 3°/ sont beaucoup plus sérieux.

La société emploie environ vingt salariés et quatre au moins attestent, de façon circonstanciée, que M. [C] était agressif envers ses collègues, tant verbalement que physiquement, ainsi qu’avec des clients et qu’il créait, par son comportement, de la tension et de la peur.

Ce dernier produit quatre attestations de clients qui louent ses qualités de vendeur mais elles ne sont pas de nature à réfuter ce qu’ont pu, par ailleurs, constaté et éprouvé par eux-même les collègues de l’intéressé.

Il est à noter que l’intimé ne produit aucune attestation favorable de collègues, étant ajouté que c’est à la suite de la mission d’écoute conduite en mai et juin 2015 que ces derniers ont dénoncé les agissements, ce qui réfute l’idée de toute prescription.

L’attestation de l’employeur relative aux faits 4°/ ne comporte que des propos rapportés, le collègue n’ayant pas témoin direct du manquement reproché.

En définitive, seuls les faits 3°/ sont constitués.

Ces faits justifient par leur nature le licenciement, l’employeur étant tenu à une obligation de sécurité.

Mais la faute grave sera écartée, le salarié ayant su, en certaines circonstances, faire bonne figure avec des clients et disposant, par ailleurs, d’une certaine ancienneté sans antécédent disciplinaire autre qu’un vieil avertissement de 2010 qui ne peut plus être rappelé à l’appui du licenciement en vertu de l’article L.1332-5 du code du travail.

M. [C] a donc droit au préavis, au rappel de salaire pour la mise à pied et à l’indemnité de licenciement.

Le jugement sera confirmé en ce sens et infirmé pour le surplus.

Le licenciement pour faute grave n’étant pas retenu, il est équitable d’accorder à l’intimé, qui a dû exposer des frais en justice pour se défendre, la somme de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour d’appel, statuant publiquement, contradictoirement, et après en avoir délibéré conformément à la loi :

– confirme le jugement rendu le 28 janvier 2021, entre les parties, par le conseil de prud’hommes de Lannoy, sauf en ce qu’il dit et juge le licenciement de M. [C] dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamne la société Décathlon France à lui payer la somme de 11 205 euros à titre de dommages-intérêts de ce chef et ordonne, conformément à l’article L.1235-4 du code du travail, à l’employeur de rembourser à Pôle emploi les allocations de chômage versées au salarié depuis le licenciement dans la limite de six mois d’indemnités ;

– l’infirme sur ces points et statuant à nouveau, dit que le licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse, exclusive de faute grave ;

– rejette la demande en dommages-intérêts au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– dit n’y avoir lieu à application de l’article L.1235-4 du code du travail ;

– y ajoutant, condamne la société Décathlon France à payer à M. [C] la somme de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles ;

– déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;

– condamne aux dépens d’appel la société Décathlon France.

LE GREFFIER

Annie LESIEUR

LE PRÉSIDENT

Olivier BECUWE

 


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