Non-respect des procédures internes : 11 mai 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00367
Non-respect des procédures internes : 11 mai 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00367
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11 mai 2023
Cour d’appel de Limoges
RG n°
22/00367

ARRET N° .

N° RG 22/00367 – N° Portalis DBV6-V-B7G-BIKSW

AFFAIRE :

S.A.R.L. ZEEMAN TEXTIELSUPERS prise en la personne de son gérant

C/

Mme [Y] [I]

JP/MS

Demande d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Grosse délivrée à Me Lawrence RACOT, Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, Avocats,

COUR D’APPEL DE LIMOGES

Chambre sociale

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ARRET DU 11 MAI 2023

—===oOo===—

Le ONZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:

ENTRE :

S.A.R.L. ZEEMAN TEXTIELSUPERS prise en la personne de son gérant

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTE d’une décision rendue le 04 AVRIL 2022 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE GUERET

ET :

Madame [Y] [I]

née le 24 Août 1995 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Lawrence RACOT, avocat au barreau de MONTLUCON

INTIMEE

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 21 Mars 2023. L’ordonnance de clôture a été rendue le 01 mars 2023.

La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, et de Madame Johanne PERRIER, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Madame Johanne PERRIER, magistrat rapporteur, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 Mai 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

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LA COUR

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EXPOSE DU LITIGE :

Le 29 avril 2019, Mme [I] a été engagée par la société Zeeman Textielsupers ( ci-après la société Zeeman) ayant une activité de vente de textiles, de vêtements et de linge de maison à bon marché, pour occuper la fonction de responsable du magasin de [Localité 1].

Mme [I] a été en arrêt de travail du 7 décembre 2019 au 20 janvier 2020.

Le 16 décembre 2019, l’employeur a déposé contre Mme [I] une plainte pour vol qui a ensuite été classée sans suite..

Avant l’issue de cette procédure pénale, Mme [I] a été convoquée à un entretien préalable prévu le 20 décembre 2019, entretien auquel elle ne s’est pas présentée, et, par courrier recommandé du 8 janvier 2020, elle s’est vu notifier son licenciement pour faute grave.

Le 02 janvier 2021, Mme [I] a déposé une plainte pour harcèlement moral et dénonciation camonieuse contre Mme [F], sa responsable régionale, ainsi que contre deux vendeuses, Mme [X] et Mme [R], et le 07 janvier 2021 elle a saisi le conseil de prud’hommes de Guéret d’une contestation de la cause réelle et sérieuse de son licenciement et d’une demande en paiement d’heures supplémentaires.

Par un jugement du 4 avril 2022, le conseil de prud’hommes de Guéret, statuant en sa composition restreinte :

– a dit le licenciement de Mme [I] sans cause réelle et sérieuse ;

– a condamné la société Zeeman à régler à Mme [I] les sommes suivantes :

‘ 1 801,32 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

‘ 310 euros à titre d’indemnité de licenciement,

‘ 2 369,26 euros brut au titre des heures supplémentaires,

‘ 5 403,96 euros net à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

‘ 3.000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour harcèlement moral ;

‘ 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– a condamné la société Zeeman à remettre à Mme [I] l’attestation Pôle emploi, le certificat de travail, sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard, à partir du quinzième jour suivant la notification du présent jugement ;

– s’est réservé la liquidation de l’astreinte ;

– a débouté la société Zeeman de l’ensemble de ses demandes ;

– a condamné la société Zeeman aux entiers dépens.

Le 12 mai 2022, la société Zeeman a relevé appel de ce jugement.

*

* *

Aux termes de ses écritures du 27 février 2023 auxquelles il est renvoyé, la société Zeeman Textielsupers demande à la cour :

‘ à titre principal de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [I] de ses autres demandes et, le réformant pour le surplus  :

– de juger que le licenciement pour faute grave de Mme [I] est parfaitement fondé ;

– de juger que Mme [I] n’a jamais subi d’agissements de harcèlement moral durant la relation contractuelle ;

– de juger que Mme [I] a été entièrement remplie de ses droits en matière de paiement ou de récupération d’heures supplémentaires ;

– de débouter intégralement Mme [I] de l’ensemble de ses demandes ;

– de condamner Mme [I] à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés tant en première instance qu’en appel, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Aux termes de ses écritures du 14 février 2023 auxquelles il est renvoyé, Mme [I] demande à la cour de confirmer le jugement dont appel, sauf en ce qu’il l’a déboutée de ses autres demandes et fixé à la somme de 3 000 euros net le montant des dommages et intérêts alloués en réparation de son préjudice moral  et le réformant de ces chefs ;

‘ de condamner la société Zeemant Textielsupers à lui payer  :

– la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral consécutif aux faits de harcèlement moral auxquels elle a été exposée ;

– la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice consécutif à la remise tardive des documents de fin de contrat ;

‘ de condamner la même au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

SUR CE,

Si, selon l’article L. 1235-1 du Code du travail, la charge de la preuve de l’existence ou non d’une cause réelle et sérieuse du licenciement n’incombe spécialement à aucune des parties, l’employeur doit fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables et, en cas de doute, il bénéficie au salarié dont le licenciement sera dit sans cause réelle et sérieuse.

Le lettre de licenciement, qui fixe les limites du litiges, a, en substance, énoncé comme griefs à l’encontre de Mme [I] :

– un non respect des procédures prévoyant des dépôts en banque tous les lundis et tous les jeudis ;

– l’absence de dépôt d’une somme de 1.305 euros, qui aurait dû être réalisé le 28 novembre 2019, et un dépôt donc limité à 400 euros au lieu de 1.705 euros réalisé le 05 décembre 2019 sans être accompagnée de la vendeuse Mme [X] à laquelle elle a demandé de rester dans la voiture, et ce en non respect des procédures internes;

– d’avoir ce même 5 décembre 2019 pris l’initiative de désactiver la caméra de la caisse, d’avoir pris 2 billets de 50 euros dans la caisse de Mme [X] au motif fallacieux de devoir les faire contrôler par la banque et d’avoir demandé à cette vendeuse de clôturer sa caisse en ne tenant pas compte de ce retrait;

– le constat fait le 19 décembre 2019 de la sortie pour son propre compte d’articles pour un montant de 365 euros qui n’avait pas été préalablement réglé, étant été rappelé que la durée maximale de mise de côté d’articles par le personnel est de 24 heures ;

– un non respect des procédures dans l’enregistrement de ses heures de travail ayant généré de manière injustifiée treize heures supplémentaires pour la semaine 39 et 133 heures de repos compensateurs à partir du 15 juillet 2019.

La société Zeeman, dont les organes de direction sont implantés aux Pays-Bas, compte près de 300 magasins répartis sur le territoire français ; si le contrat de travail par lequel cette société a embauché Mme [I] pour occuper le poste de responsable du magasin de [Localité 1] est en date du 29 avril 2019, ce magasin n’a été ouvert à la clientèle qu’à partir du 22 mai 2019 et, préalablement à son ouverture, Mme [I] a suivi une formation au sein d’un magasin de [Localité 4]. Ainsi, Mme [I], ce qu’elle ne discute, a reçu toutes instructions utiles par la remise d’un document écrit – produit en pièce n°22 par la société Zeeman – sur l’étendue de ses responsabilités et les procédures à respecter, notamment pour la tenue de la caisse et les remises en banque .

Mme [I], en tant que responsable de ce magasin, a été placée sous l’autorité de Mme [F], sa responsable régionale, et elle-même a eu sous sa responsabilité trois vendeuses et, pour expliquer certains manquements visés à la lettre de licenciement comme la remise tardive des dépôts en banque des sommes en numéraire dont elle ne conteste pas la matérialité, elle invoque, d’une part, une surcharge de travail et, d’autre part, des faits de harcèlement moral et de dénonciations mensongères qu’elle impute à deux de ses vendeuses, Mme [C] [X] et Mme [S] [R], n’ayant entraîné aucune réaction de la part de l’employeur.

Il convient donc d’examiner en premier lieu ces deux griefs articulés contre l’employeur.

Sur les horaires de travail :

Mme [I] formule une demande en rappel d’heures supplémentaires à hauteur de 133 heures ; il sera rappelé à ce titre qu’ en cas de litige relatif à l’existence et au nombre d’heures de travail accomplies, en application de l’article L 3171-4 du code du travail, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments et, après analyse des pièces produits par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu au détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

La société Zeeman produit l’accord collectif d’entreprise sur la durée du travail conclu le 13 janvier 2016 et prévoyant que l’accomplissement d’heures supplémentaires par le responsable de magasin doit recueillir l’accord préalable de son manager régional et que ces heures supplémentaires donnent lieu à un repos compensateur à prendre par le salarié dans un délai maximum de deux mois suivant l’ouverture du droit.

En l’espèce, le contrat de travail de Mme [I] avait prévu un horaire hebdomadaire de 35 heures ; la société Zeeman expose qu’il revenait à Mme [I] d’établir un projet de planning pour l’ensemble du personnel du magasin, donc y compris pour elle-même, et de le soumettre à sa responsable régionale pour approbation au moins trois semaines à l’avance et que, chaque jour et conformément au planning pré-établi, les salariés devaient enregistrer sur une’ badgeuse’ leurs horaires d’arrivée et de départ, en ce compris ceux de la pause méridienne, et que le relevé d’heures enregistré sur un logiciel ZES devait être vérifié et validé chaque fin de semaine par le responsable de magasin ; la société Zeeman précise que Mme [F], en sa qualité de responsable régionale, n’avait pas elle-même accès à distance au logiciel ZES.

Ce procédé n’est pas discuté par Mme [I] qui fait valoir qu’ayant été amenée à suppléer l’absence d’une des trois vendeuses et à être déléguée en renfort pour des missions sur un magasin à [Localité 3], elle a accompli, entre le 15 juillet 2019 et le 30 novembre 2019, 133 heures supplémentaires qu’elle n’a pas été en mesure de récupérer.

A cet égard, il sera observé que, selon les pièces produites, son renfort au magasin de [Localité 3] l’aura été sur une durée limitée de trois jours du lundi 30 septembre au mercredi 02octobre 2019 et que la vendeuse [P] [B] été absente trois jours en septembre et à compter de la mi-.octobre 2019. Le nombre d’heures supplémentaires enregistré sur le logiciel ZES, qui était déjà de plus de 114 au 14 septembre 2019, ne peut donc s’expliquer par ces seuls événements.

La société Zeeman conteste le droit de Mme [I] à paiement d’heures supplémentaires en se fondant :

– sur un courrier de Mme [F] en date du 17 décembre 2019 qui a considéré, après rapprochement avec les plannings, que les horaires de travail de Mme [I], tels qu’elle les a enregistrés sur le logiciel ZES, sont faux ;

– sur un décompte de ses horaires réels de travail réalisé par Mme [D] en janvier 2020 et ne faisant apparaître aucun droit à paiement d’heures supplémentaires ;

– sur les relevés de pointage de ses horaires enregistrés sur le logiciel ZES pour la période allant du 14 juillet 2019 au 30 novembre 2019 et faisant apparaître des anomalies (pièce n°14 de la société Zeeman).

Au titre de ces anomalies, il doit effectivement être relevé qu’il existe des absences répétées de pointage par Mme [I] lors de la prise de la pause méridienne, pour certaines journées complètes ou lors de la fin de son service, induisant une fin de poste à 23h59, ainsi que des journées prises en repos compensateurs mais comptées comme ayant été travaillées : ainsi, et à titre d’exemple, pour la semaine 39 où les seuls pointages existants sont deux du lundi 23 septembre à 8h52 et 23h59, Mme [I] a validé sur le logiciel un horaire de 48 heures, dont 27 heures en présence – dont et en l’absence de tout pointage 16h30 pour la seule journée du 24 septembre 2019! – et 21 heures pour les repos compensateurs pris sur les trois journées des mercredi et jeudi et vendredi, alors que le jour férié chômé comme celui du jeudi 15 août est compté pour 8h20 de travail .

Par ailleurs, il résulte des pièces communiquées ( pièce n°13 de la société Zeeman) que si Mme [F] n’avait pas directement accès au logiciel ZES, Mme [I] lui adressait chaque semaine une synthèse des horaires travaillés pour l’ensemble du personnel du magasin et il en résulte que, pour ce qui la concerne, des différences apparaissent entre les heures de travail enregistrées sur le logiciel ZES et celles communiquées à Mme [F]; ainsi, une différence de 44 heures est constatée :

– sur la semaine 35 du 26 au 31 août 2019, entre les 53h20 enregistrées sur le logiciel ZES (avec des absences de pointage lors de la pause méridienne ou à la fin du service 4 jours sur 7) et l’horaire communiqué à Mme [F] lors de la remise de la synthèse hebdomadaire, limité à 33h20, soit une différence de 20 heures pour laquelle il n’est donné aucune explication ;

– entre l’horaire de travail enregistré sur le logiciel et celui déclaré lors de la synthèse hebdomadaire sur les semaines 37 (36h40cotre 31h40 ), 40 (39h contre 35h), 41 40h contre 35h) et 42 (38h20 contre 28h20).

Enfin, dans un message du 5 novembre 2019 ( pièce n°8 de la société Zeeman) , Mme [I] a informé Mme [F] qu’elle procédait, en l’attente du retour de Mme [B], à un allégement des plannings avec pour elle-même avec un horaire maintenu à 35 heures pour les semaine 46 et 47 ( soit du 11 au 23 novembre 20019), mais pour lesquelles elle a cependant enregistré plus de 20 heures supplémentaires sur le logiciel ZES sans avoir préalablement informé sa supérieure hiérarchique d’un possible tel dépassement de son horaire de travail.

Certes, dans ce même message du 5 novembre 2019, Mme [I] a fait état d’un nombre de 110 heures supplémentaires lui ouvrant droit à récupération et si ce décompte n’a été remis en cause par Mme [F] qu’ultérieurement, il n’a pas non plus été expressément approuvé par celle-ci.

En conséquence, compte tenu des anomalies relevées dans le décompte horaire du logiciel ZES qui seul sert de fondement à la demande de Mme [I], il sera retenu, en l’absence de plus ample preuve rapportée par la société Zeeman qui ne produit pas l’ensemble des plannings ou des synthèses hebdomadaires qui ont été adressés à Mme [F], que Mme [I] a droit à paiement d’heures supplémentaires, mais dans une bien moindre proportion à sa prétention et qui sera ramenée à environ 70 heures, soit, au taux majoré de 25%, pour un montant brut de 1.050 euros, auquel sera ajouté celui de 105 euros au titre des congés payés afférents .

Le jugement dont appel sera infirmé en ce sens.

Sur le harcèlement moral :

Selon l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En application de l’article L. 1154-1 du même code, il appartient au salarié qui prétend avoir été victime de harcèlement moral de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral et, au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme [I], qui sollicite une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice moral en lien avec des faits de harcèlement moral, fonde sa demande :

‘ sur un message qu’elle a adressé le 05 novembre 2019 à Mme [F] faisant état, pour solliciter qu’il soit mis fin à sa période d’essai, d’un comportement déplacé de Mme [S] [R] à l’égard de la clientèle mais également à son égard en ce qu’elle l’aurait insultée en critiquant sa coupe de cheveux ou son comportement trop rigide, ainsi que d’un sentiment d’être non respectée tant par Mme [R] que par Mme [X] ; toutefois, aucun document ne vient attester de la réalité de faits répétés de cette nature et d’une dégradation de ses conditions de travail qui soit imputable aux deux salariées qui ont été placées sous sa responsabilité et auxquelles elle n’a elle-même adressé aucune remarque ;

‘ sur des commentaires publiés par ces deux salariées sur les réseaux sociaux postérieurement à son licenciement la traitant de mythomane et la mettant directement en cause pour le détournement de numéraire ou d’articles dans le magasin, faits pour lesquels elle a déposé une plainte le 02 janvier 2021 ; ces commentaires ont eu lieu en dehors de la relation de travail et la société Zeeman n’a pas à répondre de ces agissements commis par des préposés en dehors du temps et du lieu de travail.

Mme [I] n’est donc pas fondée en cette prétention et le jugement dont appel doit être infirmé en ce qu’il y a fait droit en condamnant la société Zeeman à lui payer une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur le licenciement :

‘ Sur le grief d’un non-respect des procédures prévoyant des dépôts en banque tous les lundis et tous les jeudis et l’absence de dépôt d’une somme de 1.305 euros :

S’agissant de ces dépôts, les instructions reçues par Mme [I] avaient prévu que l’argent à déposer en banque devait être compté chaque jour par deux personnes en présence l’une de l’autre, que cet argent était ensuite mis dans une enveloppe ( ou ‘seebag’) fermée à l’aide d’un rabat autocollant, avec le montant indiqué sur l’enveloppe, puis, après conservation dans le coffre-fort, portée à la banque au moins une fois par semaine, les enveloppes des différents jours étant alors regroupées dans une seule enveloppe dont le montant total est indiqué sur le bordereau de dépôt.

Il est établi, alors que la société Zeeman avait donné pour instruction que les dépôts en banque pour le magasin de [Localité 1] se feraient deux fois par semaine les lundis et jeudis ( cf sa pièce n°21), Mme [F] a été rendue destinataire le 02 décembre 2019 au matin d’un message lui indiquant que la banque (en fait le CIC de [Localité 1]) n’avait pas enregistré de dépôts depuis début novembre 2019 et que Mme [I], sur rappel à l’ordre de sa supérieure, a ensuite procédé :

– le 02 décembre 2019, aux environs de 13 heures, aux dépôts de cinq enveloppes datées des 7, 11, 14, 18 et 21 novembre 2019 regroupant les encaissement en numéraires des 05 au 20 novembre 2019 inclus pour des montants respectifs de 830 euros, 990 euros, 790 euros , 820 euros et 610 euros, qui auraient dû être déposées en banque les 7, 12, 14, 18 et 21 novembre 2019 ;

– le 04 décembre 2019 au dépôt d’une enveloppe d’un montant de 870 euros regroupant les encaissements en numéraire des 21,22 et 23 novembre 2019 et qui aurait dû être déposée en banque le lundi 25 novembre 2019 ;

– le 05 décembre 2019, au dépôt d’une enveloppe portant le n° 0290324361 d’un montant de 400 euros alors qu’un enveloppe n° 0281784786 datée du 02 décembre 2019 regroupait une somme de 1.705 euros correspondant aux encaissements des 25 et 26 novembre pour un montant de 400 euros et ceux des 27 au 30 novembre pour montant de 1.305 euros ;

– le 05 décembre 2019 , au dépôt d’une enveloppe d’un montant de 880 euros correspondant, selon la société Zeeman, aux encaissement des 2au 5 décembre.

Le grief énoncé à la lettre de licenciement d’un non respect de la procédure des dépôts en banque est avéré et Mme [I] ne peut sérieusement soutenir qu’elle avait obtenu l’accord de Mme [F] pour reporter ces dépôts bancaires puisqu’ une telle dérogation ne lui avait été consentie que pour le lundi 30 septembre 2019 à l’occasion de sa délégation en renfort au magasin de [Localité 3], elle-même ayant alors précisé ‘ je ferai les dépôts directement jeudi à mon retour.’

En revanche, si l’établissement d’une part d’une enveloppe unique regroupant pour un montant de 1.705 euros les encaissements en numéraire des 25 au 30 novembre et, d’autre part, d’une enveloppe de 400 euros correspondant aux seuls encaissements des journées des 25 et 26 novembre pose question, la société Zeeman n’établit pas, par exemple par un relevé de son compte au CIC de [Localité 1], de l’absence de dépôt de la somme de 1.305 euros ; par ailleurs, dans le procès-verbal d’audition de Mme [I] par la gendarmerie le 22 mai 2020, il est mentionné, sans que cela ne soit utilement contredit ; ‘S’agissant de la remise bancaire, il n’a jamais manqué 1.305 euros car vous me montrez la capture d’écran de la remontée de la banque sur notre ordinateur qui mentionne bien un montant total de 1.705 euros ‘.

Une responsabilité de Mme [I] dans la disparition d’une enveloppe de 1.305 euros et l’absence de remise de ces fonds n’est donc pas établie.

‘ Sur le grief fait d’un dépôt en banque le 05 décembre 2019 sans être accompagnée de la vendeuse Mme [X] à laquelle elle a demandé de rester dans la voiture :

Les instructions reçues par Mme [I] ont effectivement prévu, pour les dépôts en banque, que ceux-ci soient toujours effectués en présence de deux personnes dont le responsable du magasin.

La société Zeeman ne justifie pas d’un manquement de Mme [I] à cette directive lors des dépôts effectuées le 05 décembre 2019.

Ce grief ne peut être retenu contre elle.

‘ Sur le grief d’une désactivation de la caméra de la caisse le 05 décembre 2019 et de la prise de deux 2 billets de 50 euros dans la caisse de Mme [X] au motif fallacieux de devoir les faire contrôler par la banque :

En l’état de la procédure, ce grief repose uniquement sur un commentaire qui a été publié par Mme [X] sur les réseaux sociaux , dépourvu de toute force probante.

Ce grief n’est donc pas à retenir contre elle.

‘ Sur le grief de la sortie pour son propre compte d’articles pour un montant de 365 euros qui n’avait pas été préalablement réglé :

Il est acquis au débats que les salariés de la société Zeeman ont la faculté de procéder pour leur propre compte à la rétention d’articles les intéressant, mais sous la condition que les articles soient mis de côté pendant une duré maximale de 24 heures et soient réglés au plus tard le lendemain, à défaut de quoi ils doivent être remis en place dans le magasin.

Mme [F] a constaté le 16 décembre 2019 que Mme [I] avait mis de côté des articles pour un montant de 365 euros; toutefois, la date à laquelle Mme [I] a mis ces articles de côté n’est pas démontrée et cette dernière, en arrêt de travail à compter du 07 décembre 2019, n’en a effectivement ni réglé le montant, ni donné d’instructions au personnel en place pour leur remise en magasin.

Le grief qui lui en est fait est couvert par son arrêt de travail.

EN CONSÉQUENCE, la société Zeeman a été fondée à énoncer comme motifs du licenciement :

– des anomalies dans l’enregistrement de ses horaires de travail dans le logiciel ZES ayant conduit à valider des heures de travail non effectuées ;

– un non respect des procédures pour les dépôts bancaires caractérisé par des retards de plusieurs semaines ne pouvant se justifier par un quelconque motif impérieux.

Ces griefs, en ce qu’ils sont retenus contre Mme [I] en sa qualité de responsable du magasin, ont revêtu une cause réelle et sérieuse de licenciement . Toutefois, leur gravité n’a pas fait obstacle à la poursuite de la relation de travail pendant le temps limité du préavis.

Le jugement dont appel sera donc :

– infirmé en ce qu’il a condamné la société Zeeman à payer à Mme [I] la somme de 5.403,96 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– confirmé en ce qu’il a condamné la même à lui payer les sommes de 1.801,32 euros au titre de l’indemnité de préavis et celle de 310 euros au titre de l’indemnité de licenciement .

Sur la remise des documents de fin de contrat :

Les documents de fin de contrat sont dits ‘quérables’ et non ‘portables’. La seule obligation de l’employeur est de les tenir à la disposition du salarié, lequel doit alors aller les chercher.

Mme [I] ne discute pas que ces documents, soit son certificat de travail et l’attestation pôle emploi, ont été établis par la société Zeeman . Au surplus, la société Zeeman justifie d’un envoi à Mme [I] par pli recommandé du 1er février 2020 du certificat de travail daté du 31 janvier 2020.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Mme [I] de sa demande en dommages et intérêts pour remise tardive de ces documents

En cas de besoin, le jugement dont appel mérite confirmation en ce qu’il a condamné la société Zeeman à lui remettre un certificat de travail et une attestation pôle emploi conforme à la présente décision sous une astreinte de 50 euros par jour de retard dans une délai de 15 jours après sa notification.

Sur les frais et dépens:

La société Zeeman, qui succombe en partie en son appel, devra supporter les dépens de première instance et d’appel et il est de l’équité de la condamner à payer à Mme [I] une somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles .

Le jugement dont appel sera donc confirmé de ce chef, sans qu’il n’y ait lieu à majoration de l’indemnité qui a été allouée à Mme [I] sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

—==oO§Oo==—

PAR CES MOTIFS

—==oO§Oo==—

LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Limoges en date du 04 avril 2022 sauf en ce qu’il a condamné la société Zeeman TextielSupers à payer à Mme [Y] [I] les sommes de 2 369,26 euros brut au titre des heures supplémentaires, 5 403,96 euros net à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et 3.000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour harcèlement moral ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société Zeeman TextielSupers à payer à Mme [Y] [I] la somme brute de 1.050 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires et celle brute de 105 euros au titre des congés payés afférents ;

Dit que le licenciement de Mme [Y] [I] a reposé sur une cause réelle et sérieuse ;

Déboute Mme [Y] [I] de ses demandes en paiement d’une indemnité sur le fondement de l’article L.1235-3 du code du travail et de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

Y ajoutant,

Condamne la société Zeeman Textielsupers aux dépens de l’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.

 


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