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8 juin 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
21/02982
C 9
N° RG 21/02982
N° Portalis DBVM-V-B7F-K6M3
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY
la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 08 JUIN 2023
Appel d’une décision (N° RG F 20/00343)
rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE
en date du 11 juin 2021
suivant déclaration d’appel du 05 juillet 2021
APPELANTE :
S.C.S. CHUBB FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,
et par Me Corinne BEAUCHENAT de l’AARPI BLM ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIME :
Monsieur [S] [M]
né le 03 Août 1990 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Adrien RENAUD de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
DÉBATS :
A l’audience publique du 03 mai 2023,
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président, chargé du rapport, assisté de Mme Carole COLAS, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.
Puis l’affaire a été mise en délibéré au 08 juin 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L’arrêt a été rendu le 08 juin 2023.
EXPOSE DU LITIGE’:
M. [S] [M], né le 3 août 1990, a été embauché le 11 janvier 2014 par la société UTC Fire & Security Services, établissement du groupe Chubb France, suivant contrat de travail à durée déterminée, en qualité de livreur poseur statut ETAM, niveau III, échelon 2, coefficient 225 de la convention collective de la Métallurgie de la région parisienne.
La relation de travail s’est poursuivie suivant contrat de travail à durée indéterminée au sein de la société en commandite simple (SCS) Chubb France à compter du 15 juillet 2014 dans les mêmes conditions et au même poste.
Selon avenant en date du 1er mars 2015, M. [S] [M] a été promu au poste de gestionnaire de stock, niveau III, échelon 3, coefficient 240 de la convention collective précitée. M. [S] [M] bénéficiait d’un véhicule professionnel dans le cadre de cette affectation.
Le 21 janvier 2019, M. [S] [M], conduisant le véhicule professionnel, a eu un accrochage avec le véhicule de sa mère. La SCS Chubb France conteste la réalité de cet accrochage et affirme que le salarié a réalisé une déclaration frauduleuse auprès de l’assurance de la société.
Par courrier remis en main propre le 12 juillet 2019, M. [S] [M] a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué par la SCS Chubb France à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 29 juillet 2019.
Par lettre en date du 2 août 2019, la SCS Chubb France a notifié à M. [S] [M] son licenciement pour faute grave au motif qu’il n’avait pas respecté la procédure interne lors de la déclaration de l’accident survenu le 21 janvier 2019 et que cette déclaration présentait un caractère frauduleux.
M. [S] [M] a contesté son licenciement par courrier du 8 août 2020.’
Par requête en date du 12 mai 2020, M. [S] [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble afin de contester son licenciement et a sollicité l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
La SCS Chubb France s’est opposée aux prétentions adverses et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de M. [S] [M] au paiement d’une amende civile sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 11 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Grenoble a’:
– dit que le licenciement de M. [S] [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– condamné en conséquence la SCS Chubb France à verser à M. [S] [M] les sommes de :
3 348,41 € net à titre d’indemnité de licenciement,
1 426,18 € brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
142,61 € brut à titre de congés payés afférents,
4 121,13 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
412,11 € brut à titre de congés payés afférents,
14 420,00 € net à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
1 500,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– ordonné la remise d’un bulletin de salaire conforme à la présente décision.
– rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution, en application de l’article R. 1454-28 du code du travail, étant précisé que ces sommes sont assorties des intérêts de droit à compter du jour de la demande et que la moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire à retenir est de 2 060,56 €,
– ordonné pour le surplus l’exécution provisoire de la présente décision dans la limite de neuf mois de salaire.
– ordonné à la SCS Chubb France, en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, de rembourser aux organismes concernés les indemnités chômage versées à M. [S] [M], dans la limite de trois mois.
– dit qu’une expédition certifiée conforme du présent jugement sera adressée par le greffe du Conseil à Pôle emploi.
– débouté la SCS Chubb France de ses demandes reconventionnelles.
– condamné la SCS CHUBB France aux dépens.
La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 23 juin 2021 par les deux parties.
Par déclaration en date du 5 juillet 2021, la SCS Chubb France a interjeté appel à l’encontre dudit jugement.
Par acte d’huissier de justice du 6 juillet 2021, et au visa des articles 517-4, 521 et 524 du code de procédure civile, la SCS Chubb France a fait assigner en référé M. [S] [M] pour que soit ordonné l’aménagement de l’exécution provisoire du jugement du conseil de prud’hommes de Grenoble du 11 juin 2021 par la consignation de la somme de 25.370,44 € entre les mains de la caisse des dépôts et consignations ou de tout autre tiers.
Par ordonnance de référé en date du 15 septembre 2021, le premier président de la cour d’appel de Grenoble a’:
– débouté la SCS Chubb France de sa demande de consignation,
– condamné la SCS Chubb France à payer à M. [S] [M] la somme de 1.200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SCS Chubb France aux dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er mars 2023, la SCS Chubb France sollicite de la cour de’:
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Grenoble le 11 juin 2021 en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau :
– Dire et juger que le licenciement de M. [S] [M] repose sur une faute grave.
– Déclarer irrecevable la nouvelle demande de M. [S] [M] au titre d’un prétendu licenciement brutal et vexatoire.
En conséquence :
– Débouter M. [S] [M] de ses demandes, fins et prétentions ;
– Condamner M. [S] [M] au remboursement des sommes ayant été versées par la SCS Chubb France dans le cadre de l’exécution provisoire de droit du jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Grenoble ;
– Condamner M. [S] [M] à verser la somme de 3.000 euros au titre de l’amende civile et 1 euro à titre de dommages et intérêts à la SCS Chubb France sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile ;
– Condamner M. [S] [M] à payer à la société Chubb France la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner M. [M] aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 24 février 2023, M. [S] [M] sollicite de la cour de’:
Vu l’article L. 1232- du code du travail,
Vu la jurisprudence,
Vu la convention collective régionale des industries métallurgiques OETAM de la région parisienne,
Vu l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT,
L’article 24 de la charte sociale européenne du 3 mai 1996 ratifiée par la France le 7 mai 1999,
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Grenoble en ce qu’il a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave de M. [S] [M].
En conséquence,
Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SCS Chubb France à verser à M. [S] [M] les sommes suivantes :
– 3.348,41 € nets au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 4.121,13 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 444,36’€ au titre des congés payés afférents,
– 14.420,00 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle, sauf à porter ce montant à la somme de 20.605,60 € en écartant l’application de l’article L.’1235-3 du code du travail.
– 1.426,18 € bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre la somme de 142,61 € au titre des congés payés afférents,
Y ajoutant, dire et juger que ces sommes porteront intérêts de droits à compter de la demande.
Confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné la remise d’un bulletin de salaire conforme à la décision.
Confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné à la SCS Chubb France, en application de l’article L. 11354 du code du travail, de rembourser aux organismes concernés les indemnités chômage versées à M. [S] [M], dans la limite de neuf mois de salaires.
Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SCS Chubb France à régler à M. [S] [M] la somme de 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Y ajoutant,
Condamner la SCS Chubb France à régler à M. [S] [M] la somme de 3000 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral pour licenciement brutal et vexatoire, avec intérêts de droits à compter de la demande.
Condamner la SCS Chubb France à régler à M. [S] [M] la somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel, en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamner la SCS Chubb France aux entiers dépens.
En tout état de cause,
Débouter la SCS Chubb France de ses demandes reconventionnelles formulées à hauteur de :
– 3.000,00 au titre de l’amende civile sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile,
– 1,00 € symbolique à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile.
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 2 mars 2023.
L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 3 mai 2023.
EXPOSE DES MOTIFS’:
Sur le licenciement pour faute grave’:
L’article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.
La faute grave est définie comme celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.
La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur, qui doit prouver à la fois la faute et l’imputabilité au salarié concerné.
La procédure pour licenciement pour faute grave doit être engagée dans un délai restreint après la découverte des faits.
En vertu de l’article L 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement fixe les termes du litige.
En l’espèce, M. [M] s’est vu reprocher dans la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige d’une part, le non-respect des procédures internes pour le traitement des constats amiables suite à des accidents de la circulation avec des véhicules fournis par l’employeur et d’autre part, d’avoir fait une déclaration frauduleuse à l’assureur du loueur Lease Plan auquel recourt la société Chubb s’agissant d’un accident de la circulation en date du 21 janvier 2019.
Premièrement, la pièce n°9 de la société Chubb France permet d’infirmer le fait que M. [M] aurait traité directement avec la société Lease Plan sans aviser l’assistante d’établissement, Mme [L], puisque celui-ci a certes adressé le constat amiable du jour précédent à la société Lease Plan par courriel du 22 janvier 2019 mais avec Mme [L] en copie ainsi que son supérieur hiérarchique M. [G], le dossier sinistre ayant ensuite été ouvert le 24 janvier 2019 avec un accusé de réception sur l’adresse de Mme [L], avec une orientation donnée à celle-ci vers une carrosserie le même jour.
Au demeurant, la charte véhicule utilitaire du 26 juillet 2013 prévoit, en cas d’accident, de prévenir sans délai et dans la limite de 24 heures l’assistance du loueur et de suivre scrupuleusement les procédures détaillées ensuite.
L’employeur verse aux débats un courriel du 18 juin 2018 de Mme [L] à divers responsables aux nombres desquels figure M. [G] prévoyant un changement des procédures en cas d’accident, le collaborateur devant avertir son responsable et envoyé le constat original à Mme [L], pour traitement avec l’assureur, en mettant en copie le directeur d’agence.
Toutefois, l’appelante ne justifie pas que M. [M] a effectivement été informé de cette consigne.
Surtout, rien n’indique que M. [M] aurait intentionnellement voulu mettre à l’écart son employeur dans le traitement du sinistre avec l’assureur du loueur puisque Mme [L] a été immédiatement mise en copie de son envoi.
Le premier grief tenant au non-respect volontaire des procédures internes de traitement des accidents de la circulation n’est dès lors pas retenu.
Deuxièmement, si M. [M] a effectivement indiqué lors de l’entretien préalable qu’il n’avait pas souhaité amener le véhicule au garage eu égard au caractère minime des rayures sur le véhicule Kangoo qui lui avait été remis, de sorte que son supérieur, M. [G], avait dû le faire lui-même, il est observé pour autant qu’il justifie qu’il a été en vacances à tout le moins du 04 au 19 février 2019 avec une facture de billets d’avion alors que le véhicule a été présenté au garage pour expertise le 05 février 2019.
Troisièmement, si M. [M] admet qu’il a raturé son adresse sur le constat suite à une erreur initiale de sa part et passé sous silence le fait que sa mère était la propriétaire de l’autre véhicule impliqué, il n’en demeure pas moins que l’employeur ne rapporte pas la preuve suffisante qui lui incombe que son salarié se serait livré à une déclaration frauduleuse à l’assurance que la société Chubb France qualifie pénalement d’escroquerie à l’assurance.
En effet, l’employeur n’apporte aucune explication aux raisons pour lesquelles M. [O], responsable Ethique et Compliance au sein de la société Chubb France, a soupçonné dès le 01 février 2019, soit avant même l’examen du véhiculé confié au salarié et sans avoir consulté le rapport d’expertise du véhicule tiers, que M. [M] aurait fait une déclaration frauduleuse à l’assurance en écrivant à M. [P], Responsable assurances de la société Lease Plan, «’vous pouvez donc mandater un expert BCA pour faire les constatations. L’objectif étant de démontrer que les soit disant dégâts sur ce véhicule ne peuvent être en correspondance avec ceux du véhicule tiers indiqué sur le constat.’».
Certes, aux termes d’un courriel en date du 17 juin 2019, M. [W], chief anti-fraud Officer de la société AXA Corporate Solutions, a écrit que «’je vous informe que notre expert conseil a pu déterminer le caractère frauduleux du sinistre portant la référence 19XFRLP00015 suite à l’analyse des rapports d’expertises et photos des deux véhicules concernés. En effet, les dommages subis par le véhicule Renault Kangoo ne correspondent pas à ceux subis par le véhicule VW Polo.’».
Cette analyse se fonde manifestement sur l’avis d’un expert conseil, M. [X], de la société Axa Corporate Solutions, du 23 mai 2019 qui au vu des rapports d’expertise et photographies des deux véhicules impliqués et après description détaillée de leurs dommages respectifs, en déduit que «’la nature des dommages, l’intensité et la hauteur du choc ne permettent pas d’établir de lien entre les deux sinistres. Il y a lieu d’informer la LAF.’».
Cependant, le rapport d’expertise du cabinet BCA Expertise concernant le véhicule Polo de Mme [N], mère de M. [M], adressé à la compagnie d’assurances Mira Assurances, fait état du fait que le véhicule est économiquement réparable et ne mentionne aucune fraude, faisant état d’une collision.
Par ailleurs, M. [M] produit aux débats les attestations de Mmes [D] [E] et [F] témoignant du fait qu’elles ont été témoins de l’accident du 21 janvier 2019, Mme [F] précisant qu’il s’agissait d’un accrochage entre un Kangoo et une Polo Blanche.
La société Chubb France discute du caractère probant de ces témoignages.
Pour autant, la charge de la preuve de la faute grave lui incombe exclusivement et elle n’établit aucunement que ces attestations seraient de complaisance’; ce qui ne saurait résulter du seul fait que le constat amiable ne fait état d’aucun témoin de l’accident.
Surtout, elle ne produit pas aux débats l’intégralité du rapport de l’expert d’assurances de la compagne AXA avec en particulier les photographies des deux véhicules, se limitant au message du service anti-fraude ainsi qu’à l’avis de son expert-conseil du 23 mai 2019 si bien que M. [M], qui avait réclamé les rapports des experts d’assurances, est dans l’impossibilité de développer utilement des moyens de défense.
La cour d’appel ne peut davantage apprécier la valeur probante de ces pièces qui apparaissent déterminantes, étant observé qu’il n’est pas même justifié d’une demande en ce sens à la compagnie AXA qui aurait refusé et il n’est pas élevé un incident de pièce détenue par un tiers au visa des articles 138 et suivants du code de procédure civile.
Il est d’ailleurs noté qu’à la lecture des conclusions d’appel de la société Chubb France, il s’évince que celle-ci est en possession dudit rapport (page n°12 ultime paragraphe) mais a fait le choix de ne pas le verser aux débats dans son intégralité.
La preuve de la fraude n’est en conséquence par rapportée, la rature sur le constat quant à l’adresse et le fait que le salarié ait pu omettre d’indiquer à son employeur que le véhicule tiers impliqué était la propriété de sa mère, ne permettant aucunement de conclure de manière certaine que l’accident n’a pas eu lieu.
Le seul fait pour M. [M] d’avoir refusé d’amener lui-même le véhicule au garage pour expertise ne saurait constituer une faute grave et pas davantage justifier un licenciement, nonobstant l’avertissement du 15 mars 2018 pour des faits totalement distincts de non-port de chaussures de sécurité, et ce, d’autant que le véhicule a été conduit au garage pendant les vacances du salarié.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié le 02 août 2019 par la société Chubb France à M. [M].
Sur les demandes afférentes à la rupture du contrat de travail’:
Premièrement, dès lors que le jugement est sans cause réelle et sérieuse, il convient de confirmer purement et simplement le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Chubb France à payer à M. [M] les sommes suivantes’:
– 3 348,41 € net à titre d’indemnité de licenciement,
– 1 426,18 € brut à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,
– 142,61 € brut à titre de congés payés afférents,
– 4 121,13 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 412,11 € brut à titre de congés payés afférents,
Deuxièmement, au visa de l’article L 1235-3 du code du travail, au jour de son licenciement injustifié, M. [M] avait une ancienneté de 6 ans (ancienneté reprise au 09 avril 2013 d’après les bulletins de paie) et un salaire de l’ordre de 2060,56 euros bruts.
Il justifie avoir perçu des indemnités Pôle emploi jusqu’en janvier 2023, précisant avoir retrouvé un emploi en intérim sans toutefois en justifier.
Il convient, dans ces conditions, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Chubb France à payer à M. [M] la somme de 14420 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à préciser qu’il s’agit d’une somme brute.
Le surplus de la demande indemnitaire est rejeté, les premiers juges ayant justement apprécié le préjudice subi au vu des éléments fournis de sorte que le moyen tiré de l’inconventionnalité alléguée des barèmes de l’article L 1235-3 du code du travail n’est pas opérant en l’espèce.
Le jugement entrepris est également confirmé en ce qu’il a condamné la société Chubb France à rembourser aux organismes concernés les indemnités chômage dans la limite de 3 mois d’indemnités au visa de l’article L 1235-4 du code du travail.
Sur la demande au titre des circonstances vexatoires au licenciement’:
Au visa des articles 564 et suivants du code de procédure civile, la demande indemnitaire de M. [M] au titre des circonstances vexatoires du licenciement est nouvelle en cause d’appel, de sorte qu’il y a lieu de la déclarer irrecevable.
Su les demandes d’indemnité pour procédure abusive et d’amende civile’:
Au visa des articles 1240 du code civile et 32-1 du code de procédure civile, dès lors que les prétentions de M. [M] sont en large partie fondées, la présente procédure ne saurait être qualifiée d’abusive, de sorte qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Chubb France de ses demandes d’amende civile et de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les demandes accessoires’:
L’équité commande de confirmer l’indemnité de procédure de 1500 euros allouée par les premiers juges à M. [M] et de lui accorder une indemnité complémentaire de 1500 euros en cause d’appel.
Le surplus des prétentions des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejeté.
Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner la société Chubb France, partie perdante, aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS’;
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi’;
DÉCLARE M. [M] irrecevable en sa demande indemnitaire au titre des circonstances vexatoires du licenciement
CONFIRME le jugement entrepris sauf à dire que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont en brut
Y ajoutant,
DIT qu’une expédition certifiée conforme de l’arrêt sera transmis par le greffe à l’établissement Pôle Emploi
CONDAMNE la société Chubb France à payer à M. [M] une indemnité complémentaire de procédure de 1500 euros
REJETTE le surplus des prétentions au titre de l’article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE la société Chubb France aux dépens d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière Le Président