Violation de clause d’exclusivité : 8 décembre 2015 Cour d’appel de Lyon RG n° 13/05171
Violation de clause d’exclusivité : 8 décembre 2015 Cour d’appel de Lyon RG n° 13/05171
Ce point juridique est utile ?

8 décembre 2015
Cour d’appel de Lyon
RG n°
13/05171

R.G : 13/05171

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 04 juin 2013

RG : 11/03952

ch n°9

Société Anonyme PROMOTION SPORT CONSULTING

C/

[K]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRÊT DU 08 Décembre 2015

APPELANTE :

Société Anonyme PROMOTION SPORT CONSULTING

[Adresse 3]

[Adresse 1]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Assistée de la SELARL VEBER ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

INTIME :

M. [I] [Y] [K]

né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 4]

[Localité 2] (GRANDE-BRETAGNE)

Représenté par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

******

Date de clôture de l’instruction : 18 Mars 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Novembre 2015

Date de mise à disposition : 08 Décembre 2015

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Jean-Jacques BAIZET, président

– Marie-Pierre GUIGUE, conseiller

– Michel FICAGNA, conseiller

assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier

A l’audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSE DE L’AFFAIRE

Selon contrat daté du 20 octobre 2008 à Hambourg, M. [I] [K], footballeur professionnel au club de football [Localité 1], a conclu avec la société de droit suisse Promotion Sport Consulting S.A. «représentée par M. [G] [D], directeur général, titulaire d’une licence F.F.F.n° 10052230» un contrat d’agent sportif d’une durée de deux ans.

Par un courrier du 15 avril 2009, la société Promotion Sport Consulting a signifié à M. [K], qu’ayant appris que celui-ci avait prolongé sans son assistance, son contrat de joueur avec le club [Localité 1] pour une durée de 3 ans, elle était en droit de percevoir la rémunération contractuellement prévue.

M. [K] a contesté le bien fondé de la réclamation de la société Promotion Sport Consulting et par courrier du 17 juillet 2009, ce dernier a résilié son contrat d’agent sportif.

Par acte du 21 janvier 2011, la société Promotion Sport Consulting l’a assigné devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins d’obtenir sa condamnation avec exécution provisoire à lui verser la somme de 322.000 € de dommages et intérêts en exécution de la clause pénale stipulée au contrat outre la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [K] a conclu à la nullité du contrat, à titre subsidiaire au rejet des demandes et à titre infiniment subsidiaire, à la réduction de la clause pénale.

Par jugement du 4 juin 2013, le tribunal de grande instance de Lyon a :

– Dit que le contrat signé le 20/ 10/ 2008 entre la société représentée par son dirigeant M. [D] et M. [K] n’est pas entaché de nullité,

– Condamné M. [K] à payer à la société la somme de 5.000 € de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement et la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Ordonné la capitalisation des intérêts,

– Débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

– Condamné M. [K] aux dépens avec distraction au profit de maître Veber avocat.

La société Promotion Sport Consulting a relevé appel de ce jugement sur le quantum des dommages et intérêts alloués.

M. [I] [K] a formé un appel incident tendant à l’infirmation du jugement.

La société SA demande à la cour :

– de déclarer irrecevable l’appel incident de M. [I] [K] en cas de refus de communiquer une adresse de domicile valable,

Statuant à nouveau dans les limites de l’appel principal,

– de dire et juger que la clause pénale n’est pas excessive et n’a pas à être réduite,

– de rejeter l’ensemble des moyens de M. [I] [K],

En conséquence,

– de déclarer la société recevable et bien fondée en ses demandes,

– de condamner M. [I] [K] à lui payer la somme de 322 000 € à titre de dommages et intérêts outre intérêts à compter de l’assignation du 21 janvier 2011,

– d’ordonner la capitalisation des intérêts,

En tout état de cause,

– de débouter M. [K] de son appel incident comme non fondé,

– de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 4 juin 2013 pour le surplus,

– de condamner M. [I] [K] à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner M. [I] [K] aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de la Scp Aguiraud Nouvellet sur son affirmation de droit sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile.

Elle soutient :

– que l’appel incident de M. [K] est irrecevable, dans la mesure ou l’intimé ne justifie pas d’une adresse valable,

– que le contrat d’agent sportif est valable puisqu’aucun texte en vigueur à la date où le contrat a été conclu n’interdisait à l’agent sportif titulaire d’une licence d’exercer son activité à travers une société comme cela a été ultérieurement prévu de façon explicite par l’article L 222-8 modifié par la loi du 9 /06/2010,

– que la rémunération est parfaitement déterminée,

– que l’absence éventuelle de communication du contrat à la fédération française de football n’affecte en aucune manière sa validité,

– qu’on ne peut reprocher à une agence sportive de ne pas avoir fait de diligences alors que le joueur a résilié abusivement le contrat et commis une faute contractuelle empêchant justement l’agence sportive de toute intervention,

– que M.[K] a perçu sous forme de prime exceptionnelle à la signature du renouvellement de son contrat de joueur la somme de 500 000 €, qui correspond à ce qu’aurait perçu son agent, s’il ne l’avait pas écarté,

– que M. [K] refuse de communiquer son contrat de joueur et donc le montant de sa rémunération revalorisée,

– que la clause pénale n’est pas excessive.

M. [I] [K] demande à la cour

-de réformer le jugement rendu ,

– de prononcer l’annulation pure et simple du contrat de médiation signé le 20 octobre 2008, avec toutes conséquences de droit ;

à titre subsidiaire,

– de débouter la société Promotion Sport Consulting, de toutes ses demandes,

– de condamner la société Promotion Sport Consulting à lui payer la somme de 22.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner la société Promotion Sport Consulting aux dépens de l’instance distraits au profit de Maître Ligier de Mauroy, avocat aux offres de droit.

Il soutient :

– que le contrat est nul en raison du fait :

. qu’il a été signé par une personne morale non titulaire d’une licence d’agent sportif,

. que le contrat ne comporte pas de mention de la rémunération de l’agent,

. que le contrat n’a pas été transmis aux autorités fédérales.

– que la société ne justifie d’aucune diligence effectuée dans son intérêt ni d’aucun préjudice corrélatif découlant de la résiliation anticipée du contrat ou de l’inexécution de ce contrat au prétexte de la violation de la clause d’exclusivité,

– que l’article 8, alinéa 2, du contrat constitue une clause pénale au caractère manifestement excessif en tant qu’elle permet à l’agent de revendiquer en cas de résiliation anticipée du contrat, l’honoraire stipulé à l’article 7 égal à 7 % HT du montant total de la rémunération nette du joueur dans le cadre de son contrat .

MOTIFS

Sur la recevabilité de l’appel incident

L’appelante ne peut soulever devant la cour l’irrecevabilité de l’appel incident de l’intimé dont elle n’a pas saisi le conseiller chargé de la mise en état en temps utile.

D’autre part, M. [K] a fait connaître son adresse précise.

Sur les dispositions contractuelles

Le contrat signé par M. [K] avec la société Promotion Sport Consulting avait pour objet :

«de le conseiller, de l’assister ou de le représenter dans la conduite de la sa carrière professionnelle et dans toute négociation, médiation, intermédiation ou intervention ayant un lien direct ou indirect avec son contrat de joueur de football professionnel ou l’une de ses dispositions que ce soit au stade de la recherche de clubs, des pourparlers, de la négociation, de la finalisation, de la conclusion, de la renégociation, de la rupture et du suivi des relations contractuelles en fonction de l’évolution et du déroulement de la carrière sportive du joueur.»

Il est mentionné au contrat :

à l’article 3 alinéa 2 :

« Compte tenu de l’exclusivité accordée à l’AGENT, le JOUEUR s’engage à renvoyer à ce dernier toutes les propositions entrant dans le cadre de la mission confiée à l’AGENT, qui pourraient lui parvenir directement, de façon à ce que celles-ci soient intégralement traitées par l’AGENT, dans les conditions définies au présent contrat. En tout état de cause, le JOUEUR s’engage à informer l’AGENT de tous contacts, approches, sollicitations dont il pourrait faire l’objet de la part de toute personne, quelle qu’elle soit».

à l’article 6 :

«le joueur ne pourra signer seul et donc sans l’assistance de l’agent, un quelconque contrat ou avenant se rattachant directement ou indirectement à l’exercice de sa profession de footballeur.»

Sur la nullité

L’article L.222-6 du code du sport dans sa version en vigueur en 2008 au jour de la signature du contrat par les parties avant son abrogation par la loi du 9 juin 2010, disposait que :

« toute personne exerçant à titre occasionnel ou habituel, contre rémunération, l’activité consistant à mettre en rapport les parties intéressées à la conclusion d’un contrat relatif à l’exercice rémunéré d’une activité sportive doit être titulaire d’une licence d’agent sportif »,

sans distinguer entre les personnes physiques et morales alors admises dans les mêmes conditions à exercer cette activité.

Ce texte ci-dessus n’interdisait pas à une personne physique titulaire d’une licence d’agent sportif d’exercer cette activité dans le cadre d’une société.

En l’espèce, le contrat a été conclu par M. [K] avec la société Promotion Sport Consulting «représentée par M.[G] [D], directeur général, titulaire d’une licence F.F.F.n° 10052230».

En conséquence, aucune irrégularité n’affecte la validité du contrat de ce chef.

Par ailleurs, la rémunération de l’agent est indiquée à l’article 7 du contrat en ces termes :

« le montant des honoraires sera égal pour chaque contrat ou revalorisation à 7% HT du montant total de la rémunération nette et après déduction des charges sociales que percevra le JOUEUR dans le cadre de son contrat. Le règlement des honoraires ainsi dus sera effectué par le JOUEUR par paiement unique dans le mois qui suit la présentation de la facture par le JOUEUR.

Pour l’application de la présente clause, les parties conviennent expressément que par rémunération du JOUEUR, il faut entendre son salaire et ses diverses primes et autres rémunérations (dont le droit à l’image collective ou individuelle), à l’exclusion des primes de résultat, primes de présence et avantages en nature. »

Cette mention est suffisamment explicite.

De surcroît, s’agissant d’un contrat de mandat, la détermination de la rémunération du mandataire n’est pas une condition de validité.

Enfin, aucune dispositions légale ne sanctionne de la nullité le défaut de transmission du contrat à la Fédération Française de Football.

En conséquence, la demande d’annulation du contrat n’est pas fondée.

Sur la résiliation du contrat

Aux termes de l’article 2004 du code civil, le mandant peut révoquer sa procuration quand bon lui semble.

Lorsque le mandat comporte un terme précis, les parties ne peuvent sans faute l’abréger unilatéralement et arbitrairement .

Aux termes de l’article 8 du contrat, il est mentionné que le contrat a une durée de deux ans et ne peut être résilié par anticipation.

En l’espèce, M. [K] a résilié unilatéralement le contrat par un courrier du 17 juillet 2009 et qui ne comporte aucun motif.

M. [K] ne justifie d’aucun grief qu’il aurait fait auparavant à la société Promotion Sport Consulting.

M. [K] ayant ainsi évincé la société Promotion Sport Consulting lors du renouvellement de son contrat de joueur avec le club [Localité 1], en violation des dispositions de l’article 6 du contrat, il ne peut est fait grief à cet agent sportif de ne pas avoir accompli de diligences.

En conséquence, il convient de constater que le contrat a été résilié unilatéralement, sans motif légitime et donc fautivement par M. [K].

Sur la clause pénale

Aux termes de l’article 8 alinéa 2 du contrat, il est mentionné :

«Le JOUEUR ne pourra unilatéralement résilier par anticipation le présent contrat. A défaut, le JOUEUR versera une indemnité égale au montant des honoraires que l’AGENT aurait perçu si le contrat avait été respecté jusqu’à son terme. »

Aux termes de l’article 7 :

« le montant des honoraires sera égal pour chaque contrat ou revalorisation à 7% HT du montant total de la rémunération nette et après déduction des charges sociales que percevra le JOUEUR dans le cadre de son contrat. Le règlement des honoraires ainsi dus sera effectué par le JOUEUR par paiement unique dans le mois qui suit la présentation de la facture par le JOUEUR.

Pour l’application de la présente clause, les parties conviennent expressément que par rémunération du JOUEUR, il faut entendre son salaire et ses diverses primes et autres rémunérations (dont le droit à l’image collective ou individuelle), à l’exclusion des primes de résultat, primes de présence et avantages en nature. »

Il résulte de ces dispositions que le manque à gagner de la société Promotion Sport Consulting est égale à 7 % de la rémunération nette de M. [K].

Ce dernier a produit quelques éléments de son contrat de joueur renouvelé mentionnant une rémunération brute de 133 000 € par mois.

Il n’a pas communiqué les autres éléments qui auraient permis de calculer l’assiette de la rémunération de la société Promotion Sport Consulting ( montant des charges, montant des primes…).

Sur la base du seul salaire net de 100 000 € tel qu’estimé par la société Promotion Sport Consulting, la rémunération de la société Promotion Sport Consulting aurait atteint au minimum la somme de 252 000 €.

Cette clause apparaît très excessive au regard de la courte durée du mandat.

La clause pénale sera ainsi ramenée à la somme de 100 000 € .

Sur l’article 700 du code de procédure civile

L’équité commande de na pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

la cour:

– Déclare irrecevable le moyen d’irrecevabilité de l’appel incident, soulevé par la société Promotion Sport Consulting,

Confirme le jugement en ce qu’il a :

– Dit que le contrat signé le 20 octobre 2008 entre la société Promotion Sport Consulting représentée par son dirigeant M. [D] et M. [K] n’est pas entaché de nullité,

– Ordonné la capitalisation des intérêts,

– Condamné M. [K] aux dépens avec distraction au profit de Me Veber, avocat,

le réformant pour l’application de la clause pénale et y ajoutant :

– Condamne M. [I] [K] à payer à la société la somme de 100 000 € de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l’arrêt,

– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne M. [I] [K] aux entiers dépens d’appel, avec distraction au profit de la Scp Aguiraud Nouvellet sur son affirmation de droit sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x